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Notions d’acoustique

2.1.1 Les ondes acoustiques

2.1.1.1 Le phénomène physique

Les ondes acoustiques sont produites par la vibration d’une source. Dans un milieu fluide tel que l’air, la vibration de la source est communiquée aux molécules voisines qui, à leur tour, la transmettent de proche en proche. Du point de vue physique, une onde acoustique ne correspond donc pas à un déplacement de matière sur une grande distance mais résulte de la propagation d’une petite perturbation à travers un milieu.

Le milieu support de propagation de l’onde peut être soit solide, soit fluide (liquide ou gazeux). Dans un fluide, la perturbation générée par la source est transmise par com-pression et détente des atomes ou molécules qui le composent (figure2.1). Dans un solide, où les liaisons entre les atomes sont fortes, la transmission de la perturbation se fait par l’intermédiaire des liaisons interatomiques (plus raides que dans le cas précédant). Ces liaisons agissent comme des ressorts connectant les atomes, modélisés par des masses, à leurs voisins [Zarembowitch,2003].

Ce modèle simplifié du solide comme une succession de masses et de ressorts permet de comprendre que la vitesse de propagation c d’une onde :

— est une propriété du solide (pour un état de contrainte mécanique, de température, d’humidité. . . donné) ;

— est d’autant plus grande que la raideur des liaisons entre les atomes qui le composent est élevée.

Figure 2.1 – Perturbation d’un milieu traversé par une onde acoustique [Alloprof,2018]. En effet, si on raisonne par l’extrême, des ressorts d’une raideur infiniment grande conduiraient à une propagation instantanée de la vibration de la source à l’ensemble des points du solide ; la vitesse de propagation de l’onde serait alors infinie [op. cit.]. Aucun so-lide n’étant indéformable, la vitesse de propagation des ondes acoustiques dans les soso-lides, bien que très élevée (de l’ordre de quelques kilomètres par seconde), est finie. La transmis-sion de l’onde à travers les fluides est moins efficace que par l’intermédiaire des liaisons interatomiques des solides. Cette transmission est également moins rapide à travers les gaz (facilement compressibles), qu’à travers les liquides (difficilement compressibles). Ainsi, la vitesse de propagation des ondes sonores dans l’eau est d’environ 1500 m/s alors qu’elle n’est que de 340 m/s dans l’air [op. cit.].

On appelle période et on note T le temps écoulé entre deux positions identiques d’un atome ou d’une molécule mis en mouvement par le passage d’une onde sonore périodique (figure 2.1). La fréquence f de l’onde correspond à l’inverse de sa période T . Ces deux grandeurs caractérisent la périodicité temporelle de l’onde.

On appelle longueur d’onde et on note λ la distance qui sépare deux points consécutifs du milieu qui sont animés du même mouvement oscillant (figure 2.1). La longueur d’onde caractérise la périodicité spatiale de l’onde. Ces différents indicateurs de la périodicité de l’onde sont liés par l’équation 2.1.

λ= c T = c

SECTION 2.1 - Généralités

2.1.1.2 Les différents types d’ondes

Dans les milieux fluides (liquides ou gaz), où les atomes/molécules sont respectivement faiblement et très faiblement liés, l’orientation du mouvement de compression/détente (fi-gure2.1) est nécessairement confondue avec la direction de propagation de l’onde. On parle dans ce cas d’onde longitudinale, ou de pression, ou primaire (ondes P, figure 2.2). Dans un solide, des liaisons interatomiques sont susceptibles d’agir dans toutes les directions de l’espace. De ce fait, le déplacement d’un atome dans une direction donnée peut également impacter des atomes situés dans les autres directions. Une onde pour laquelle la direction de propagation est perpendiculaire à celle du déplacement des atomes est appelée onde transversale, ou de cisaillement, ou secondaire (ondes S, figure2.2).

Figure 2.2 – Ondes de pression (P) et ondes de cisaillement (S) [Allègre,1987]. La propagation d’une onde P, mobilisant la raideur normale de la liaison interatomique, est plus aisée que celle d’une onde S, qui résulte de la mobilisation de sa raideur tangen-tielle. Pour cette raison, la vitesse de propagation des ondes P, notée cP, est généralement plus élevée que celle des ondes S, notée cS, et ce, d’un facteur proche de 2. Les équations

2.2et 2.3donnent respectivement les expressions théoriques de la vitesse de propagation des ondes P et S à travers un milieu élastique isotrope de dimensions infinies [Breysse,

2012]. Ces équations :

— confirment l’augmentation précédemment évoquée de c avec la raideur du matériau (Edyn et νdyn sont respectivement le module d’Young et le coefficient de Poisson dynamiques du matériau) ;

— indiquent une diminution de c avec la masse volumique ρ du matériau (par effet d’inertie). cP = s Edyn(1 − νdyn) ρ(1 + νdyn)(1 − 2νdyn) (2.2) cS = s Edyn 2ρ(1 + νdyn) (2.3)

2.1.1.3 Temps de vol et chemin acoustique

Du fait de la vitesse finie du son, la propagation d’une onde acoustique à travers un matériau prend un certain temps. On appelle temps de vol d’une onde et on note tvol le laps de temps écoulé entre la génération d’une onde en un point quelconque d’un milieu et sa première émergence en un autre point (figure 2.3-a). Considérons un bloc de matériau parallélépipédique d’épaisseur e équipé d’un émetteur E et d’un récepteur R ultrasonores, disposés en vis-à-vis sur deux faces opposées du volume (figures 2.3-b et2.3-c).

On s’intéresse tout d’abord au cas d’un matériau homogène, qui est donc caractérisé par une unique vitesse de propagation du son c, identique en tous points. Dans un tel matériau, le chemin acoustique correspondant au temps de vol n’est autre que le trajet le plus court entre l’émetteur et le récepteur, c’est à dire une droite (figure 2.3-b).

Dans le cas d’un matériau hétérogène comme le béton, c’est-à-dire constitué de plu-sieurs composants (gravillons, mortier. . . ) possédant chacun leur propre vitesse de propa-gation du son, le chemin acoustique correspondant au temps de vol n’est plus le trajet le plus court mais peut décrire une ligne brisée qui suit alors le trajet le plus rapide (figure

2.3-c).

Par convention, on détermine la vitesse de propagation du son dans un matériau par l’équation2.4en rapportant la distance e entre les capteurs, facilement accessible, au temps de vol tvol de l’onde. Le temps de vol peut être mesuré, par exemple, via l’enregistrement des signaux acoustiques d’émission et de réception, préalablement convertis en signaux électriques via des capteurs piézoélectriques, avec un oscilloscope. Cependant, pour ce qui est des matériaux hétérogènes, le chemin acoustique réel peut être plus long que le trajet direct de longueur e (figure 2.3-c). De ce fait, spécialement lorsque l’on s’intéresse au béton, il découle de cette analyse que l’utilisation de l’équation 2.4 à partir des données issues du dispositif de mesure illustré par la figure 2.3:

— ne donne accès qu’à une approximation de la vitesse de propagation du son ; — est très sensible au volume de matériau parcouru par l’onde.

En effet, la mesure réalisée est d’autant plus représentative des propriétés du matériau hétérogène que l’épaisseur e de matériau utilisée est grande (car elle contient une quantité suffisante d’hétérogénéités pour rendre compte de leur distribution aléatoire).

c(P ou S) = e

tvol,(P ou S) (2.4)

2.1.1.4 Atténuation de l’onde acoustique

La propagation d’une onde acoustique à travers un matériau solide induit, par divers mécanismes, une atténuation de l’énergie du signal. Au delà de la perte d’énergie liée à l’augmentation de la surface d’onde du fait de sa propagation dans toutes les directions possibles (divergence géométrique), on distingue généralement l’atténuation par absorption de celle par diffusion [Planès et Larose,2013] :

— l’atténuation par absorption, qui désigne la dissipation de l’énergie de l’onde (conver-sion en chaleur) par effets visqueux, constitue une perte d’information ;

SECTION 2.1 - Généralités

Figure 2.3 – Principe du dispositif expérimental de mesure de la vitesse de propagation du son en émission/réception.

— l’atténuation par diffusion, qui désigne la réflexion, réfraction, diffraction et conver-sion P/S de l’onde au contact des multiples interfaces entre les hétérogénéités du milieu, constitue un changement de l’information.

L’atténuation par absorption est, d’une manière générale, d’autant plus importante que la fréquence de l’onde est grande (ou que sa longueur d’onde est petite) [op. cit.]. L’utilisation d’une fréquence élevée permettant d’augmenter la résolution spatiale des ul-trasons par diminution de la longueur d’onde (équation 2.1), le choix d’une fréquence d’étude résulte donc généralement d’un arbitrage entre énergie du signal et résolution de la mesure.

L’atténuation par diffusion possède la particularité de changer de nature selon l’écart entre la longueur d’onde λ du signal et les dimensions d des hétérogénéités au sein du matériau. D’une manière générale, une onde interagit peu avec des hétérogénéités d’une dimension inférieure à sa longueur d’onde. De ce fait, trois régimes de diffusion peuvent être distingués [op. cit.] :

— la diffusion simple (figure 2.4-a), qui se produit lorsque λ  d, est un régime où l’onde interagit très peu avec la structure interne du matériau. Les réflexions et réfractions se produisent alors essentiellement aux frontières entre le matériau et le milieu environnant ;

— la diffusion multiple (figure2.4-b), qui se produit lorsque λ ' d, est un régime où l’onde entre en interaction avec la structure interne du matériau. L’onde peut alors être réfléchie de nombreuses fois sur les hétérogénéités avant d’atteindre le récepteur ; — le régime d’atténuation (figure2.4-c), qui se produit lorsque λ  d, est un régime où l’onde interagit tellement fortement avec la structure interne du matériau qu’elle n’en pénètre qu’une épaisseur très limitée.

L’interaction entre une onde et son milieu de propagation est liée à la notion d’impé-dance acoustique. En acoustique, l’impéd’impé-dance Z d’un milieu est calculée comme le produit de sa masse volumique ρ par la vitesse de propagation du son c dans ce milieu (équation

2.5). Ainsi, plus l’impédance acoustique est élevée, moins le milieu en question empêchera le passage de l’onde acoustique.

Figure 2.4 – Régimes de diffusion d’une onde acoustique : a) simple, b) multiple, c) d’atténuation [Zhang,2013].

Considérons maintenant deux milieux différents A et B. Lorsque une onde circulant initialement dans le milieu A entre en contact avec le milieu B, une partie de cette dernière est réfléchie à la frontière A-B vers le milieu A, une autre partie est effectivement transmise au milieu B. L’importance relative de la réflexion par rapport à la transmission dépend de l’écart d’impédance entre les deux milieux A et B.

Z = ρ c (2.5)

Ainsi, dans le béton :

— l’écart entre les masses volumiques et les rigidités des granulats, de la pâte de ci-ment, et a fortiori de l’auréole de transition pâte-granulat, constitue une rupture d’impédance qui, en régime de diffusion multiple, engendre réflexion et réfraction de l’onde aux interfaces ;

— la fissuration, qui représente la création d’une lame d’air à travers le matériau, pro-voque, du fait de son impédance acoustique relativement faible (ρair = 1,25 kg/m3

et cair = 340 m/s), la réflexion totale de toute onde se propageant dans le béton qui rencontre une fissure.