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Chapitre 3 Effets des compromis sociaux sur les attendus spatio-temporels de la mise en œuvre de la

II.1 Mobilisation des alliés non-humains

Sur les trois projets de LGV, des secteurs privilégiés de recherche de sites de compensation ont été

établis.

II.1.1 SEA

En fonction des espèces à compenser un certain nombre de milieux abritant ces espèces ont été

définis (tableau 8).

Tableau 8 Définition des milieux auxquels sont inféodées les espèces impactées par la ligne

Source : (COSEA , 2014)

Les petites régions agricoles (PRA) ont été définies comme étant prioritaires pour l’implantation et la

recherche des sites de mesure de compensation. Ces PRA correspondent à des unités territoriales qui

peuvent être relativement homogènes d’un point de vue pédologiques et du relief. Cela déterminera

entre autres un certain potentiel agronomique, le type d’agriculture qui peut être fait et, également,

le type de paysage et de biodiversité associés. Ensuite, les APN, la fédération de pêche et le CRPF ont

été mandatés pour cibler des zonages dans lesquels se trouvent les milieux définis précédemment.

Selon les milieux, les ZPS, les ZNIEEF et des inventaires complémentaires ont pu aider à la

détermination de zonage de recherche. La réglementation sur les ZH humides impose que les

impacts soient compensés au sein du même bassin versant. Les zones de prospection des sites

correspondent donc à une superposition entre les bassins versants, les PRA et les zonages ciblés par

les APN. Pour chaque découpage PRA et bassin versant un nombre d’espèces et de zones humides à

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compenser a été défini. Les recherches se sont en priorité orientées vers les zones de couleur que

l’on peut identifier sur la carte 1.

(Sources d’après COSEA 2014)

Carte 1 : Zone de recherche prioritaire des mesures de compensation

Une fois les zones de recherche identifiées, une animation foncière s’est mise en place. Les

propriétaires de ces zonages ont été contactés en priorité. Si les propriétaires étaient intéressés par

la mise en place d’un cahier des charges pour des mesures de compensation, alors un diagnostic

écologique était lancé. Ces diagnostics sont faits par les APN, ils détaillent44 les éléments présentés

dans l’encadré 10 :

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Encadré 10 Détail des éléments à fournir pour le diagnostic écologique des sites potentiels

d’accueil des mesures de compensation

Partie 1 du diagnostic

- Localisation de la zone d’étude (dans quelle zone de prospection elle se trouve, quelle PRA,

localisation des parcelles, localisation des autres parcelles de mc proches si il y a, point km

de la ligne) -> carte.

- Analyse du contexte environnemental du site (site intégré ou proche d’autre zonage de

protections : ZNIEEF, Natura 2000, APB,…) ; obstacles proches du site (LGV, lignes hautes

tensions, bâtis…) ;

- Description des milieux à partir de la nomenclature Corinne Biotope (description complète

de l’habitat : configuration, relief, état de conservation, stade d’évolution, espèces

floristiques caractéristiques, éléments de contexte permettant de comprendre pourquoi on

va proposer un cahier des charges ou non sur ce milieu. Pour cela il est donc important de

bien cibler les enjeux de chaque entité).

- Descriptions de enjeux Faunistique et Floristique dans un rayon de 1 à 10 km selon les

taxons. (1km = amphibiens, 5km = reptiles et entomofaune, 10 km = avifaune, mammifères,

chiroptères) sur l’ensemble des espèces à protéger ou compenser suite à la construction de

la LGV et pour toutes espèces indicatrices pouvant être déterminantes. -> carte par taxons

- Espèces à compenser et potentiel du site pour celles-ci : synthèse de la présence avérée ou

potentielle des espèces devant faire l’objet d’une compensation dans le cadre de la LGV.

- Parcelles ou ilots pour les mesures de compensation possibles : ici sont détaillés la surface

totale de l’entité et la surface potentielle de mesures de compensation engagée, les

éléments fixes du paysage, la plus-value du cahier des charges pour les espèces.

Partie 2 du diagnostic

- Engagements finalement retenus : cartographie des mesures contractualisées, avec la

précision des cahiers des charges associées aux mesures et les éventuelles adaptations

- Espèces cibles et plus-values pour ces espèces : justifier l’additionalité, la plus-value

apportée par le cahier des charges aux espèces.

(Source résumé à partir de COSEA, 2014)

Suite à ces diagnostics, soit le site de mesures de compensation ne présente aucun intérêt pour la

biodiversité ciblée, le site est alors déclaré immédiatement non éligible, soit il présente suffisamment

d’intérêts écologiques pour la compensation, alors les APN envoient le diagnostic écologique au MOA

et les services de l’Etat pour validation. Le site est déclaré éligible si aucun de ces trois acteurs ne

remet en cause le potentiel écologique identifié pour accueillir des mesures de compensation45.

Des négociations sur la validation de ces diagnostics ont pu avoir lieu:

45 Pour davantage de détails sur la procédure d’éligibilité des sites de mesures de compensation cf les figures

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- Un manque d’additionnalité

Suite au diagnostic écologique effectué par les APN, sur les sites potentiels d’accueil des mesures de

compensation, celles-ci ont pu constater que les sites ne présentaient pas un potentiel suffisant,

permettant d’obtenir un gain écologique supplémentaire par rapport à l’état écologique initial des

sites et par rapport aux besoins compensatoires. Les sites ne peuvent donc pas être retenus.

Parfois les aires prédéfinies ne sont pas les plus intéressantes du point de vue écologique ce qui a

amené notamment le CEN à envisager l’acquisition de site au-delà des zones de prospection définies

initialement.

« Une distance de 10km de part et d’autre de la ligne est imposée, notamment par les

APN, mais parfois ce n’est pas possible, donc on est obligé de s’éloigner, car l’aire de

répartition des espèces est plus vaste. Parfois on fait primer la connectivité du lieu de

restauration. La localisation est fonction de la faisabilité foncière et écologique, on ne

peut pas avoir l’un sans l’autre. » CREN PC.

Des sites ayant un besoin de restauration ont parfois pu être préférés par rapport à des sites proches

de la LGV.

- Entre mutualisation et considérations économiques

Les APN peuvent juger qu’un site présente un potentiel de plus-value écologique. Ce potentiel de

plus-value écologique est déterminé par espèce cible (de la « dette » compensatoire). Pour chaque

espèce est associée une ou plusieurs mesures de gestion et ou de restauration/création d’habitat et

une surface46, mais ce potentiel écologique n’est pas toujours compatible avec les considérations

économiques du MOA.

« Parfois le pré diagnostic révèle qu’il y aura peu d’espèces, du coup c’est insuffisant pour

nous. On refuse. […] D’autre fois les travaux à faire sont beaucoup trop coûteux au

regard des gains écologiques produits, les coûts-bénéfices sont insuffisants du coup on

refuse. […]L’intérêt des associations est de faire le plus de surface possible ! Notre intérêt

c’est de faire de la mutualisation afin qu’une surface donnée puissent bénéficier à une

majorité d’espèces. » MOA SEA.

Le MOA souhaite qu’il y ait un minimum d’espèces47 à l’hectare pour que les mesures de

compensation ne coûtent pas trop cher. De même si il y a de gros travaux de génie écologique ou des

travaux onéreux à faire (création d’une mare, réhabilitation d’un ripisylve) et que cela ne bénéficie

qu’à un petit nombre d’espèces alors le MOA refuse de valider le site, pour lui le site n’est pas

46 Sur SEA, pour chaque espèce une surface d’impact a été identifié suite à l’étude d’impact, un ratio de

compensation a été appliqué ce qui a aboutie à une « dette » compensatoire surfacique par espèce. Pour plus

de détails cf notamment la figure 15 du § II.6.2.2 du chapitre 1.

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éligible. Parfois, les espèces cibles éligibles sur les sites diagnostiqués, les surfaces et les types de

mesures associées font l’objet d’une négociation entre APN, MOA et service de l’Etat. Les acteurs ne

sont pas d’accord sur les espèces ciblées par le site, ou sur les surfaces éligibles (qui viennent

dégrever la dette compensatoire pour chaque espèce) ou sur le type de mesures à mettre en place.

«Les APN ne s’y retrouvent pas toujours entre ce qu’elles préconisent et ce qui est

finalement fait, c’est-à-dire proposé à la DREAL. » DREAL SEA.