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UNE MISSION DE STAGE AUX PRISES AVEC LES ENJEUX D’UNE FÉDÉRATION

La construction de ma mission de stage est le fruit d’un long cheminement ; elle s’origine dans l’intérêt personnel et professionnel que je porte depuis une vingtaine d’années à l’égard des questions de migrations internationales, de déplacements de populations, de protection de l’enfance et de manière plus large, vis-à-vis des sujets relatifs à l’élaboration des politiques publiques et de la défense associative. En conséquence, l’URIOPSS, fédération des associations du secteur sanitaire, social et médico-social m’est apparue comme étant un lieu de stage particulièrement privilégié pour aborder ces thématiques. J’ai donc sollicité cette structure pour y réaliser mon stage de Master 2ème année, avec le projet de travailler sur la problématique des Mineurs Non Accompagnés.

2.1 L’URIOPSS Grand Sud, une fédération en tension

L’URIOPSS Grand Sud (Union régionale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux) implantée sur le Languedoc-Roussillon et plus récemment redéployée sur les Midi-Pyrénées, avec la fusion de ces deux régions (soit 13 départements au total depuis le 1er janvier 2016), appartient au réseau des 23 unions régionales, 110 fédérations, unions et associations nationales de l’UNIOPSS (Union

nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux).

L’UNIOPSS, association loi 1901, basée à Paris, s’est créée en 1947, en réaction à la construction de la Sécurité sociale. Craignant leur marginalisation, voire leur disparition face à la prépondérance de ce nouvel acteur institutionnel dans le champ de la protection sociale, les œuvres privées se sont fédérées en une union pour faire valoir leur importance auprès des pouvoirs publics. L’UNIOPSS est parvenue dans ses premiers mois d’existence à trouver en l’Union nationale des caisses d’allocations familiales, l’UNCAF, des interlocuteurs prêts à négocier avec elle pour défendre les intérêts des œuvres privées. L’UNIOPSS a donc joué un rôle déterminant dans leur reconnaissance, en proposant une troisième voie entre le « tout public » et « la charité », à savoir celle de la solidarité. Il s’est agi pour les associations d’opérer des mutations dans la gestion des organisations et dans leurs pratiques, vers une plus grande professionnalisation et technicité. Ainsi, se sont-elles vues confier des missions publiques pour lesquelles elles ont reçu des subventions. C’est l’UNIOPSS qui s’est chargée de leur faire connaître leurs droits et obligations vis-à-vis des autorités de tutelle. C’est par une approche de la négociation et du compromis que l’UNIOPSS est devenue un interlocuteur privilégié de l’État, pour faire reconnaître l’intérêt de l’action de ses adhérents et le rôle incontournable de ces œuvres privées. « Cette proximité avec le public lui a d’ailleurs valu d’être qualifiée de ‘ministère privé des affaires sociales’ par A. Argoud en 1992 43. » Il apparaît donc que l’UNIOPSS joue un rôle d’intermédiaire entre l’État, les collectivités territoriales et les associations adhérentes, en charge des populations handicapées, âgées, exclues, des familles et des enfants, dans l’intérêt de ces publics fragilisés.

43 MARIVAL Céline, Interactions entre associations et pouvoirs publics : logiques, tensions, diversité : le cas des associations d'action sociale et médico-sociale, Université de la Méditerranée Aix-Marseille II, Sciences de l'Homme et Société, Laboratoire d'Économie et de Sociologie du travail (LEST-UMR 6123), 2011

Ainsi, « l’UNIOPSS agit constamment pour que les associations puissent jouer leur rôle de vecteurs des solidarités vivantes de proximité, sans les réduire au seul rôle d’opérateurs sous-traitants des politiques publiques 44. »

Comme elle le rappelle encore aujourd’hui dans son rapport d’activité, « l’UNIOPSS a pour vocation d’unir, de défendre et de valoriser les acteurs privés non lucratifs de solidarité. Elle porte auprès des pouvoirs la voix collective des associations des secteurs sanitaire, social et médico-social, engagés au service des personnes vulnérables et fragiles 45. » Elle représente 75 % des intervenants privés non lucratifs de solidarité. Ce qui n’est pas sans poser difficulté compte tenu de l’hétérogénéité de ses adhérents aux intérêts parfois divergents. Il s’agit donc de composer avec cette pluralité d’associations multi sectorielles, d’élaborer une position commune et de la représenter au niveau le plus haut de la sphère politique avec comme objectif ultime de peser dans la construction des politiques publiques de l’action sociale.

En septembre 2015, au moment de la rentrée sociale, le directeur général de l’UNIOPSS ne manquait pas de rappeler un phénomène récurrent : à savoir, une activité législative et règlementaire abondante mais insuffisamment ambitieuse, laissant « un goût d’inachevé, [suscitant] l’incompréhension » faisant notamment référence à la dernière réforme de l’asile, tout en reconnaissant des marges de manœuvre limitées compte tenu du contexte économique tendu 46. Il attirait l’attention sur la nécessité pour le secteur associatif de « sortir des schémas et rigidités sectoriels, (de renoncer) à une logique égalitariste au profit d’une prise en compte équitable des réalités locales et des inégalités territoriales 47. » Et d’ajouter que pour permettre cette capacité à l’innovation

44 DOLGOROUSKY H., « Transformations sociales, travail social et solidarités : Des orientations de Nicole Questiaux sur le travail social à nos jours, Vie Sociale, ERES, n°3, 2012, pp. 77-94

45 UNIOPSS, Rapport d’activité 2014, p. 49

46 Union Sociale, « Rentrée sociale des associations sanitaires, sociales et médico-sociales : enjeux politiques et budgets prévisionnels 2016 », hors-série n° 290, septembre 2015, p. 5

47 Ibid., p. 6

sociale, une « stabilité du cadre [et de l’environnement] et de moratoire des changements législatifs » apparaissait essentielle.

Lors de son congrès annuel en mars 2016, l’UNIOPSS avait choisi comme thème principal une réflexion sur notre modèle de société et sur les valeurs à défendre dans un contexte de difficultés économiques et budgétaires toujours plus marquées et de fracture sociale et communautaire renforcée par l’actualité récente.

Il s’agit pour cette fédération et ses adhérents de mettre en débat les défis actuels auxquels la société en pleine mutation est confrontée et de tenter d’y apporter des réponses, ou du moins des orientations. L’idée de penser autrement l’accompagnement des publics fragilisés en développant des pratiques alternatives qui associent économie, lien social et citoyenneté représente l’un des axes clés en termes de perspective.

L’expérimentation, à partir d’initiatives locales innovantes, est prônée permettant ainsi de dépasser les inquiétudes que suscitent de manière légitime un contexte économique toujours plus exigeant et source d’inégalité. Mettre en œuvre des projets partagés co-construits entre différents acteurs à différents niveaux, avec la participation des usagers et déplacer le regard pour s’extraire des tensions lourdes des interventions au quotidien, constituent pour cette fédération les pistes incontournables pour répondre aux enjeux sociétaux actuels.

Habituée à s’entretenir avec les pouvoirs publics dans une recherche de compromis qui freine la logique de confrontation pourtant parfois utile et nécessaire, l’UNIOPSS a néanmoins réaffirmé lors de son dernier congrès sa volonté de ne pas transiger sur certaines lignes. Regagner des marges de manœuvre sera tout l’enjeu pour cette fédération et l’objet du thème de la rentrée sociale de l’URIOPSS Grand Sud à partir de septembre 2016.

On voit bien à travers ces sujets et instances collectives d’élaboration, combien cette institution se préoccupe de l’impact du contexte global toujours plus difficile sur ses adhérents et se soucie, malgré ces contraintes toujours plus fortes, de soutenir le secteur associatif dans une dynamique innovante et créatrice au service des publics les plus fragiles, dans le respect du cadre imposé par l’État. À ce titre, il paraît juste d’envisager

l’UNIOPSS à une place d’intermédiaire entre les usagers, les associations, et les pouvoirs publics.

Pour mener à bien ces missions et tenter de relever tous ces défis, l’UNIOPSS s’appuie sur son réseau régional, composé des URIOPSS.

À leur échelon local, les URIOPSS assurent une représentation transversale des acteurs privés non lucratifs de solidarité, offrent un lieu de réflexion et de coordination, par l’animation de groupes de travail sectoriels et thématiques, apportent grâce à leur expertise et connaissance du terrain un appui technique et un accompagnement à leurs adhérents par le biais d’information, de conseils et de formation. Elles participent ainsi à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques publiques au niveau territorial. De par son rôle de représentation dans de nombreuses instances décisionnaires, les URIOPSS font remonter aux pouvoirs publics les positionnements et revendications de leurs adhérents. Au service des plus démunis, les URIOPSS défendent des valeurs de primauté de la personne, de non-lucrativité et de solidarité, du fait associatif, de la participation de tous à la vie de la société et de l’innovation dans les réponses sociales, alimentées par l’observation des besoins.

À elle seule, l’URIOPSS Grand Sud rassemble près de 500 associations, gérantes des établissements et services sans but lucratif, sur les cinq départements du Languedoc-Roussillon, dans les domaines de la santé, des personnes handicapées, des personnes âgées, de la petite enfance, de la protection de la jeunesse et des familles et de la lutte contre l’exclusion. Cela représente 51 % des acteurs du secteur sanitaire, social et médico-social en Languedoc-Roussillon, 22 000 salariés et 9 000 bénévoles 48.

Pour accomplir ces missions, l’URIOPSS Grand Sud s’appuie sur une équipe de salariés composée d’une directrice, d’un directeur adjoint, d’une attachée de direction, de 4 conseillers techniques (tous issus de formations supérieures en droit, ressources

48 Rapport d’activité 2015 de l’URIOPSS Grand Sud

humaines, sciences politiques, et sociologie), d’une documentaliste / webmaster et d’une secrétaire d’accueil.

Son projet politique est animé par des bénévoles, 24 élus représentant les adhérents au sein de son conseil d’administration auxquels sont associés des personnes qualifiées et membres d’honneur.

En 2015, la répartition des adhérents de l’URIOPSS en Languedoc-Roussillon se déclinait de la manière suivante :

• Sur le plan sectoriel

Si le secteur Enfance-Famille-Jeunesse ne représente que 10 % des adhérents, on peut penser que c’est en partie dû à l’existence d’une fédération sectorielle, la CNAPE, qui attire très certainement une majorité des établissements et service de la protection de l’enfance. L’URIOPSS est donc majoritairement concerné par le secteur médico-social.

51%

14%

10%

7% 4%

Répartition des adhérents par