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LA MISSION DE DROITS DE L’HOMME : ACTIVITÉS APRÈS LE RETOUR

Dans le document Troisième partie : La fonction de monitoring (Page 161-165)

183. À la suite du retour des rapatriés et PDI dans leurs communautés, les HRO peuvent encore jouer un rôle important par le monitoring de leur réinsertion. Dans de nombreuses situations, les réfugiés et PDI sont à considérer comme un groupe vulnérable qui doit être surveillé de plus près que d’autres catégories de la population. En outre, les rapatriés et PDI échappent fréquemment au spectre des mécanismes de protection qui contribuent à préserver les droits de la personne dans la communauté.

184. L’objectif du HRO dans le monitoring des rapatriés et PDI après leur retour dans leur région de résidence consiste à assurer que leurs droits humains ne soient pas violés au cours de cette période transitoire où leur statut passe de celui qui est le leur à celui de membres de la communauté. Tout problème que le monitoring aura permis de repérer pourra être

communiqué aux autorités locales, à d’autres organisations, ou traité d’une autre manière par le bureau local des droits de l’homme. Lorsque le rapatrié ou PDI aura “réintégré” sa

communauté, il ne sera plus considéré comme faisant partie d’un groupe à risques et n’aura plus besoin d’un monitoring particulier.

185. Cependant, le monitoring de la réinsertion est difficile à définir. Que signifie

exactement la réinsertion, dans ce contexte ? Comment peut-on établir qu’un rapatrié ou PDI s’est “réintégré” dans sa communauté ? Comment le HRO va-t-il conduire le monitoring de la réinsertion ? Quand pourra-t-on dire que le rapatrié ou PDI aura cessé d’être “un rapatrié ou PDI” ?

1. Le monitoring des mécanismes contribuant à la protection des rapatriés et PDI

186. Toute communauté comporte un certain nombre de “mécanismes de sauvegarde”. Ce sont là les éléments dans l’environnement de la personne qui lui procurent un sentiment de sécurité et contribuent à sa protection réelle. Les rapatriés et PDI, bien souvent, n’ont pas accès aux mécanismes de sauvegarde de la communauté. Il est donc important pour le monitoring des rapatriés et PDI d’évaluer les mécanismes de sauvegarde existants, et de vérifier dans quelle mesure les rapatriés et PDI en bénéficient. D’un certain point de vue, ces informations constituent un autre indicateur de la réinsertion des rapatriés et PDI. Quelques-uns de ces mécanismes de sauvegarde sont décrits ci-après :

La famille constitue souvent le plus immédiat des mécanismes de sauvegarde. Les gens peuvent le plus souvent avoir recours à des membres de leur famille pour trouver de l’aide. De nombreux rapatriés et PDI ne seront pas accompagnés de leur famille. De nombreuses femmes rapatriées ou PDI seront soit veuves, soit seules à retourner avec leurs enfants.

La communauté peut comprendre le voisinage immédiat aussi bien que toute une ville. La protection des personnes dépend habituellement du soutien de leur

communauté la plus proche. Parfois, les rapatriés et PDI feront l’objet de suspicions de la part de cette communauté, qui pourra faire office de menace plutôt que de protection.

Le HRO devra toujours tenter de ressentir la situation d’ensemble régnant au sein de la communauté (voir Chapitre 7 • “Se procurer l’information”).

Travailler et participer aux activités économiques apporte de l’argent et peut servir de mécanisme protecteur. Celles et ceux qui gagnent de l’argent au sein de la

communauté seront en mesure de s’assurer un certain statut, et un certain niveau de vie.

Ils et elles dépendront moins des autres. Mais les rapatriés et PDI risquent de devoir passer un certain temps sans aucun emploi ni revenu.

Les structures administratives, y compris les fonctionnaires locaux, sont susceptibles d’offrir une certaine protection aux rapatriés et PDI. Elles peuvent contribuer à retrouver des domiciles ou des terres; servir de médiateurs dans les

démêlés surgissant dans la communauté. Mais ces mêmes fonctionnaires peuvent à leur guise créer des problèmes pour les rapatriés et PDI, et leur rendre la vie difficile.

L’attitude de ces fonctionnaires locaux envers les rapatriés et PDI est donc de grande importance. Grâce à la familiarisation qu’ils auront acquise au sein de la communauté, les HRO devraient savoir comment l’administration locale va se comporter vis-à-vis des rapatriés et PDI.

Le système judiciaire, s’il fonctionne, peut constituer un mécanisme de protection officiel. Si chaque communauté disposait effectivement d’un système judiciaire, il n’y aurait sans doute aucun besoin de monitoring des rapatriés et PDI. Hélas, dans la réalité, le système judiciaire est bien souvent déficient dans la protection des personnes placées sous sa juridiction. De plus, à supposer même qu’il fonctionne, le système judiciaire peut s’avérer lent ou passif face à certains types de plaintes (par exemple les plaintes mineures). Le monitoring peut donc ici encore être utile.

187. Les HRO ne se contenteront pas de vérifier l’efficacité des divers mécanismes de sauvegarde : ils seront également attentifs aux possibilités d’améliorer le fonctionnement de ces mécanismes par la formation des fonctionnaires, l’assistance au système judiciaire, etc.

2. Le monitoring de la réinsertion

188. La “réinsertion” n’est pas une notion facile à quantifier. Les HRO pourront se simplifier la tâche en adoptant quelques “indicateurs” de réinsertion :

Le domicile : les rapatriés ou PDI ont-ils retrouvé leur domicile ? Récupérer son bien est souvent un problème majeur, parfois lié à des violations des droits de l’homme.

Les terres : les rapatriés ou PDI ont-ils récupéré leurs terres ? Les exploitent-ils ? Les terres exploitées apportent aliments et revenus, tous deux essentiels à la réinsertion des agriculteurs dans la communauté.

Le travail : en l’absence de terres, les rapatriés ou PDI effectuent-ils des travaux rémunérés, ou rétribués de toute autre façon ?

L’arrestation et la détention : le rapatrié ou PDI a-t-il été arrêté ?

L’école : les enfants des rapatriés peuvent-ils fréquenter l’école ?

Réunions, associations : les rapatriés ou PDI participent-ils aux réunions locales ? font-ils partie d’une quelconque association locale ?

La responsabilité : les rapatriés ou PDI occupent-ils des situations de responsabilité au sein de la communauté ?

La discrimination : le rapatrié ou PDI se sent-il sujet à discrimination de la part des membres de la communauté ? Comment la population locale a-t-elle réagi vis-à-vis des rapatriés et PDI ?

L’aide matérielle : les rapatriés ou PDI reçoivent-ils une quelconque aide matérielle en vertu de leur statut de rapatriés ? Ce dernier point peut s’avérer positif aussi bien que négatif. Les rapatriés et PDI qui reçoivent une aide matérielle peuvent y trouver de quoi se réinsérer plus facilement dans la communauté. Mais le fait même qu’ils bénéficient de cette aide contribue à les distinguer du reste de la communauté. En outre, les membres de cette dernière pourront éprouver des sentiments de colère ou de jalousie à l’égard de ces aides, et de ce fait rejeter les rapatriés.

Le sentiment de sécurité : le rapatrié ou PDI se sent-il en sécurité ? Sinon, pourquoi ?

3. Tout monitoring efficace requiert des contacts réguliers avec des sources au sein de la communauté

189. Puisque les HRO auront établi des contacts au début du processus de retour des rapatriés ou PDI, ils les entretiendront, que ce soit avec les autorités, les journalistes, ou les enseignants, etc. Ils pourront en obtenir des renseignements précieux pour la réinsertion des rapatriés et PDI dans la communauté.

4. Agir

190. En fonction du mandat de la mission,il sera peut-être possible aux HRO d’agir en vue de traiter les problèmes identifiés grâce au monitoring. Ils pourront se référer aux

informations fournies dans ce chapitre à propos des droits des rapatriés, et porter les problèmes soulevés à l’attention des autorités.

191. Par exemple, le monitoring aura pu révéler qu’un groupe de rapatriés ou PDI se sera vu refuser l’accès à leurs domiciles ou à leurs terres. Les HRO prendront alors contact avec les autorités compétentes afin d’expliquer à la fois l’intérêt, mais aussi le droit, de voir les rapatriés et PDI retrouver les propriétés qui sont les leurs. De façon analogue, dans les cas où

des rapatriés et PDI sont victimes d’arrestations arbitraires, les HRO pourront peut-être leur rendre visite sur leur lieu de détention, puis négocier leur libération (voir Chapitre 9 • “Les visites aux personnes détenues”).

192. Les HRO seront peut-être en mesure de servir de médiateurs sur des questions particulières entre les rapatriés et PDI d’une part, et les autorités de l’autre. Mais il est essentiel que les HRO restent neutres à propos de possibles revendications ou droits. Pour la mission, il sera important d’élaborer des directives claires concernant les principaux

problèmes susceptibles d’être mis au jour grâce au monitoring. Les exemples ci-dessus devraient permettre aux HRO de connaître précisément leur rôle éventuel, mais les fondements de ce rôle seront toujours établis en concertation avec les autorités locales et nationales (voir Chapitre 21 : “Conciliation et médiation sur le terrain”).

5. Quand le rapatrié ou PDI cesse-t-il de faire l’objet d’un monitoring particulier ?

193. Comme on l’a montré plus haut, les HRO veillent sur les nouveaux rapatriés et PDI en raison de leur catégorisation à “hauts risques”. Mais le monitoring des rapatriés et PDI ne peut se poursuivre indéfiniment. Dès lors, quand les rapatriés et PDI cessent-ils de constituer une “catégorie à hauts risques” ? Quand ne sont-ils plus des “rapatriés et PDI” pour devenir de simples membres de la population locale ? Si la question est importante, c’est qu’elle indique qu’il existe un point où les HRO doivent interrompre le monitoring de tous les groupes de rapatriés et PDI.

194. Il est vrai que la réponse claire et précise à la question : “quand le rapatrié cesse-t-il d’être un rapatrié ?” n’est guère aisée. On proposera à cette fin deux lignes de conduite : l’une a trait à la situation du rapatrié, et la seconde à la durée. Les deux s’emploieront ensemble.

a. La situation

195. Le rapatrié ou PDI cesse n’est plus un “returnee” dès lors qu’il ou elle fait partie de la communauté, et ne se distingue plus de cette communauté en raison quelconque de son ancienne situation de réfugié(e) ou de personne déplacée. On peut trouver un indicateur dans le fait que des organisations humanitaires distribuent encore, ou non, une aide alimentaire à la personne — même si ces distributions prennent parfois fin pour de simples raisons

budgétaires. Autre indicateur, le rapatrié ou PDI est-il victime d’une quelconque discrimination en raison de son ancienne situation de réfugié ? Les domaines de

discrimination sont décrits plus haut, les plus communs d’entre eux étant le logement, les terres, l’emploi, etc.

b. La durée

196. Parallèlement à la situation du rapatrié ou PDI, le HRO prendra également en compte la durée écoulé. Après un certain temps, six mois par exemple, les HRO devront accorder une attention prioritaire aux nouveaux rapatriés et PDI. Ce laps de temps suivant le retour sera établi en fonction de l’expérience acquise par la mission, de manière à couvrir la période au cours de laquelle les violations de droits de l’homme prévisibles seraient motivées par le fait que leurs victimes soient des rapatriés ou PDI. Mais établir précisément une telle borne peut s’avérer très difficile : dans certains pays, les rapatriés et PDI seront sujets à des risques de violations de leurs droits humains deux ans ou davantage après avoir regagné leurs foyers.

Toute limitation dans le temps sera donc envisagée avec prudence.

H. LA MISSION DE DROITS DE L’HOMME : STRUCTURES POUR TRAVAILLER

Dans le document Troisième partie : La fonction de monitoring (Page 161-165)

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