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Chapitre 2 - Etat de l’art sur les facteurs qui influencent les trajectoires de l’intention

2.2 Les facteurs scolaires et extrascolaires : des facteurs dont l’étude est bien amorcée et qui

2.2.1 Les controverses sur l’éducation à l’entrepreneuriat

2.2.1.3 Les mesures d’impact des formations à l’entrepreneuriat : un effet controversé

a. Différents impacts positifs de l’éducation

L’éducation à l'entrepreneuriat a souvent été établie afin d’encourager les comportements entrepreneuriaux des étudiants (Donckels, 1991; Gasse, 1985). Les revues de la littérature en entrepreneuriat et en éducation à l'entrepreneuriat (Dainow, 1986; Gorman, 1997 ; McMullan et al., 2002) fournissent des preuves que ces programmes sont efficaces pour encourager les entrepreneurs à démarrer leurs entreprises, ou améliorer la performance des entreprises.

Différentes recherches ont montré que les formations à l’entrepreneuriat peuvent renforcer les connaissances sur la façon de lancer et gérer un nouveau projet d'entreprise (Schaper, 2007), permettre aux étudiants d'acquérir des expériences dans un contexte d'affaires réel et encourager les attitudes favorables envers l'entrepreneuriat (Gorman et al., 1997; Kourilsky et Walstad, 1998; Johannisson 1991; Autio et al. 1997). Plusieurs études mentionnent un impact positif sur les principaux attributs entrepreneuriaux, tels que le besoin d’accomplissement et le locus de contrôle (Hansemark, 1998), ou encore sur la perception de l’auto-efficacité entrepreneuriale (Ehrlich et al., 2000 ; Noël, 2001). Par voie de conséquence, les différentes formations élèvent le niveau de l’intention entrepreneuriale des étudiants (Noël, 2001; Kolvereid et Moen, 1997; Peterman et Kennedy, 2003 ; Souitaris et al., 2007; Andrén et Uudelepp, 1996; Lüthje et Franke, 2003; Brand et al., 2007), influent positivement sur l’aspiration entrepreneuriale des élèves (Souitairis et al., 2007), influencent et stimulent les étudiants à choisir une carrière entrepreneuriale cohérente avec leurs expériences d’apprentissage (Shapero et Sokol, 1982).

Des études ayant porté plus spécifiquement sur les intentions entrepreneuriales des étudiants universitaires viennent confirmer une forte présence d’entrepreneurs potentiels. Filion et al. (2002) ont montré que 57,7% des étudiants universitaires québécois avaient l’intention de démarrer une entreprise. Dans le même sens, Audet (2001) a trouvé que 45% des étudiants des universités anglophones québécoises estimaient les chances à 75% qu’ils possèdent un jour leur propre entreprise. Ces résultats sont d’ailleurs cohérents avec celui obtenu auprès d’étudiants de Russie (Tkachev et Kolvereid, 1999). L’étude de Tounès (2003) réalisée auprès de 178 étudiants français en gestion suivant des cursus à dominante

entrepreneuriale, s’inspirant du modèle d’Ajzen et de celui de Shapero et Sokol, souligne l’effet positif de la formation sur l’intention entrepreneuriale des étudiants.

Si nous prenons un échantillon plus large de plusieurs instituts d’enseignementdans plusieurs pays, une enquête internationale (GUESS, 2008) qui a pour objectif d’examiner l’intention et les comportements entrepreneuriaux des étudiants universitaires a montré que parmi 63527 étudiants provenant de 83 universités dans 20 pays, concernant leur préférence de travail à la sortie de l’école, 16% préfèrent un emploi indépendant et 76% préfèrent travailler dans une grande entreprise ; quant à leur préférence de travail après quelques années d’expériences, 43% préfèrent choisir un emploi indépendant et 47% vont rester dans les grandes entreprises. Un rapport (European Commission, 2005) d’évaluation de l’effet des programmes entrepreneuriaux ayant pour but de développer une activité économique réelle ou simulée pour tous niveaux d’enseignement a confirmé l’efficacité de ces programmes. Au niveau universitaire, 80 % des étudiants interrogés font état d’une capacité de confiance en soi, 98 % d’unecapacité d’évolution et 79 % d’une capacité de créativité. Il semblerait donc que lesparticipants aient pleinement acquis les qualités attendues de futurs entrepreneurs.

Pourtant les études n’indiquent toutes pas des effets positifs de la formation sur les intentions et les comportements entrepreneuriaux.

b. La controverse sur le rôle de l’éducation

De nombreuses recherches dans la section précédente ont indiqué les impacts positifs de l’éducation à l’entrepreneuriat sur l’intention entrepreneuriale des élèves, mais d'autres observations ne sont pas en accord avec cette conclusion communément acceptée.

Certains chercheurs soulignent que l’éducation académique classique n'encourage pas l'entrepreneuriat. Au contraire, les étudiants vont davantage travailler dans les grandes entreprises (Timmons. 1994), l’éducation favorise une mentalité d’emploi salarié (Kourilsky. 1995) et supprime la créativité et l’esprit entrepreneurial des étudiants (Chamard. 1989; Plaschka et Welsch, 1990). L’enquête de l’APCE sur les jeunes français révèle que plus leur niveau d’étude est élevé, moins ils souhaitent entreprendre (APCE, 2001).

Une enquête auprès des étudiants en commerce a indiqué que seulement 5% d'entre eux ont considéré l'auto-emploi comme leur choix de carrière privilégié (Brenner et al., 1991) ; une enquête dans une école de commerce en Norvège a signalé un résultat similaire,

que 7% des étudiants considèrent l'entrepreneuriat comme une orientation possible (Kolvereid, 1996a). (Schaper, 2007) a effectué une étude sur l’impact de la sensibilisation entrepreneuriale dans une école de commerce en Australie. Il indique que l'éducation en entrepreneuriat ne semble pas modifier le pourcentage global des élèves qui souhaitent créer leur propre entreprise : les élèves sont susceptibles de passer d'une perspective à l'autre au cours d'un semestre, et ceux qui semblent les plus enthousiastes n’envisagent pas nécessairement de créer une entreprise à la fin. En outre, Whitlock et Masters (1996) qui ont mené une étude longitudinale des étudiants en commerce ont constaté qu'après avoir poursuivi quatre ans de cours d'affaires, l'intérêt pour devenir auto-emploi diminue. Une enquête de NGCE (Gibb et Hannon, 2006) a montré que l'impact des expériences pendant la scolarité sur les aspirations des étudiants vers l'auto-emploi dans le Royaume-Uni est actuellement négatif. Fayolle et Gailly (2009) obtiennent un résultat plus précis à partir d’une étude longitudinale en suivant des étudiants en entrepreneuriat avant, pendant et 6 mois après la formation. Les résultats montrent que le programme de l’éducation entrepreneurial n’a pas d’effet significatif sur l’intention des élèves en considérant que l’échantillon est homogène. Ils ont ensuite regroupé les élèves selon leur intention initiale avant ce programme et souligné que l’intention d’entreprendre d’élèves varie négativement en fonction de leur intention initiale : le programme tend à augmenter l’intention d’entreprendre de ceux dont l’intention était faible et diminuer l’intention d’entreprendre de ceux dont l’intention était forte avant le programme.

Qu’est-ce qui peut expliquer qu’une formation influe positivement sur les intentions dans certaines études et négativement dans d’autres ? De nombreuses études suggèrent que le niveau d’étude et la discipline universitaire des étudiants sont des variables qui impactent la désirabilité et la contrôlabilité perçues de la création d’entreprise par les étudiants. L’étude la plus précise à ce jour (Fayolle et Gailly, 2009) indique qu’une formation peut avoir un impact positif sur l’attrait et la perception de faisabilité d’une carrière entrepreneuriale si l’étudiant n’a jamais été exposé à l’entrepreneuriat, mais un impact négatif dans le cas contraire. Mais peu de recherches ont été conduites sur l’influence de variables liées au contenu ou aux modalités pédagogiques de la formation tant sur la contrôlabilité perçue que sur l’attrait de la carrière entrepreneuriale. Nous avons constaté de fait un manque d’études sur la relation entre les dispositifs pédagogiques et leurs effets. La majorité des études sur les impacts de l’éducation à l’entrepreneuriat ne montrent pas le lien entre l’effet et les caractéristiques de la formation.

Or de nombreux enseignants et chercheurs questionnent le modèle de formation actuel en entrepreneuriat, suggérant que la manière de former et la nature des comportements individuels et organisationnels dans les institutions d’enseignement supérieur sont radicalement incompatibles avec la nature des comportements entrepreneuriaux. Ces chercheurs argumentent que si l’institution éducative veut préparer des étudiants à