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CHAPITRE 4 L’ENCADREMENT DES RAVES PAR LES AUTORITÉS

4.5 Le protocole de 2001 : une nouvelle réglementation stricte des événements rave d’envergure

4.5.2 Les mesures contenues dans le protocole

Les exigences du Service de prévention des incendies sont les premiers éléments dont tient compte le protocole. Les inspecteurs doivent avoir accès aux lieux avant et pendant l’événement pour s’assurer que toutes les normes de sécurité incendie soient respectées. Le Service de police doit également être en mesure de visiter les lieux avant l’événement, entre autres pour dépister, avec l’aide de chiens renifleurs, la présence de quantités de drogues cachées à l’intérieur. De plus, la police doit avoir accès à toute information ou lieux qui sont jugés pertinents pour la planification de la sécurité entourant l’événement.

D’autres éléments portent sur les billets d’admission. D’abord les billets ne peuvent être mis en vente tant que les autorisations nécessaires à la tenue de l’événement n’ont pas été obtenues (exigences des pompiers et obtention de suspendre le permis d’alcool par la RACJ).

Le nombre de billets ne doit pas excéder la capacité établie soit par les pompiers, soit par le permis d’alcool, se référant au nombre le plus bas. Il est également stipulé que des mesures doivent être prises pour minimiser les risques de falsification des billets. Ces mesures visaient à éviter que le nombre de personnes qui se présente à la porte avec un billet soit supérieur à la capacité de la salle, et que le mécontentement de la foule à l’extérieur ne cause des problèmes comme ce fut le cas lors de certains raves d’envergure dans le passé :

« Le fait d’écrire toutes les règles sur les billets aussi nous apparaissait normal, pour informer les parents aussi que c’est 18 ans, qu’on tolère pas de drogue, donc tu t’attends à être fouillé. Il y a eu des mesures aussi pour contrer la falsification de billets, parce que ça aussi c’était un gros problème. S’il y avait 1000 billets de trop en circulation, la capacité maximale était atteinte rapidement. Il fallait fermer la porte et il y avait des gens qui avaient acheté leur billet qui ne pouvaient pas entrer. Ça faisait du grabuge à la porte. » (Policier)

La question des billets d’admission VIP (Very Important Person, ou client privilégié) est également abordée dans le protocole. Les policiers avaient constaté des irrégularités au niveau des admissions. Selon le policier rencontré, il arrivait que des personnes liées au crime organisé entrent par l’entrée VIP, et qu’ils bénéficient par conséquent d’une forme de traitement privilégié, notamment en évitant le processus de fouille. Voici ce qu’il en disait :

« Il y a aussi l’admission VIP qui est regardée dans le protocole parce qu’il y avait une autre problématique. C’est que les motards passaient par la porte VIP sur le côté, et eux n’étaient pas fouillés, ils avaient un traitement privilégié. Alors on a mis des mesures pour qu’ils soient contrôlés comme tout le monde. » (Policier)

Le protocole prévoit que toute personne qui entre dans l’établissement soit soumise au même protocole de fouille que les participants, que ce soit le personnel affecté à l’événement ou les personnes détenteurs de billets VIP. Le policier rencontré soutenait qu’aucune mesure pour contrer l’introduction de drogues n’est parfaite, mais que la mise en place de ce protocole rendait néanmoins la tâche plus difficile aux réseaux de revendeurs. Voici ce qu’il nous disait à ce propos :

« On sait qu’il n’y a pas de solution totalement étanche. L’idée est de réduire les opportunités de trafic. Il y a une centaine de personnes qui entrent dans la bâtisse avant l’événement, certains avec beaucoup de matériel technique ou autre. C’est possible pour des réseaux bien organisés de passer à travers les mailles du filet. Mais c’est maintenant plus difficile qu’avant, où tout le monde pouvait aisément entrer avec des sacs de 300 pilules. » (Policier)

La fouille systématique de toute personne aux différents points d’entrée de l’événement (admission générale, VIP, invités, personnel, techniciens, premiers soins) doit être assurée par les agents d’un service de sécurité qui doit fournir suffisamment d’effectif féminin et masculin pour le faire, et pour patrouiller l’espace à l’intérieur mais aussi assister les policiers dans le cas d’expulsions. L’aménagement des lieux pour la fouille doit être fait de façon à ce que ceux qui ont déjà été fouillés ne puissent pas être en contact avec ceux qui n’ont pas encore été fouillés, et les personnes qui ont passé le poste de fouille ne puissent être réadmises si elles sortent à l’extérieur. Si les agents de sécurité trouvent une arme ou une substance illicite lors d’une fouille, ils doivent remettre la personne avec ce qui a été saisi aux policiers. Le protocole stipule à cet effet que les contrevenants sont pris en charge par les policiers, mais expulsés par le personnel de la sécurité.

Le protocole exige également la présence d’un pharmacien membre actif de l’Ordre des pharmaciens du Québec, qui sera affecté à l’entrée pour permettre l’identification des substances et éviter toute confusion entre des comprimés de drogues illicites et de vrais médicaments. Cette mesure est devenue d’autant plus pertinente dans le cadre d’événements de la communauté gaie comme le Black and Blue, avec un nombre grandissant de personnes qui doivent prendre une médication pour lutter contre le VIH. Une équipe médicale qualifiée est également requise pour assurer le traitement des blessures, les cas d’intoxication et de déshydratation. Cette équipe doit disposer d’un local identifié muni de l’équipement nécessaire aux interventions d’urgence, et aussi disposer d’un plan d’évacuation d’urgence pour les cas médicaux sérieux.

Certains éléments relatifs aux questions sanitaires ont également été inclus dans le protocole. Il doit y avoir un accès à de l’eau potable gratuite à des endroits stratégiques, un nombre de toilettes jugé suffisant pour accommoder toute la clientèle, et un système de ventilation et/ou d’aération permettant le maintien d’une température adéquate malgré le nombre important de participants. En ce qui concerne la vente d’alcool, elle est interdite après 2h30 du matin.

À la dernière section du protocole, il est stipulé que compte tenu de l’évolution constante du phénomène rave, les paramètres présentés dans le protocole ne doivent pas être considérés comme la « norme » stricte à rencontrer pour la tenue d’un tel événement. Chaque événement sera ainsi traité distinctivement et plusieurs facteurs pourront influencer ces

paramètres. Les détenteurs de permis d’alcool devront en conséquence s’engager à satisfaire toute autre exigence jugée nécessaire par le Service de police qui pourrait s’ajouter. Nous verrons qu’avec les années de mise en œuvre du protocole, il y a effectivement eu des modifications qui ont été apportées.