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Classification des rassemblements dédiés à la musique électronique au Québec

CHAPITRE 3 MÉTHODOLOGIE

3.6 Description du terrain de recherche

3.6.1 Classification des rassemblements dédiés à la musique électronique au Québec

pas une différenciation des événements sur la base de leur contenu culturel. Comme nous l’avons abordé dans le premier chapitre, la musique électronique est un genre qui se subdivise en plusieurs styles différents dont chacun est le véhicule d’une sous-culture distincte avec ses propres valeurs, ses symboles et ses formes de pratiques. Il nous est toutefois apparu plus pertinent dans le cadre de cette recherche de différencier les types d’événements selon les paramètres réglementaires et légaux plutôt qu’en fonction des styles de musique respectifs. En effet, malgré le fait que la dimension culturelle permet une lecture ethnographique très riche à laquelle nous ferons référence par ailleurs, la dimension du cadre normatif permet une meilleure compréhension des mécanismes de régulation sociale qui s’appliquent de façon générale à ces événements.

3.6.1.1 Les raves légaux

Parmi les rassemblements festifs caractérisés par la musique électronique, plusieurs sont qualifiés de raves, c'est-à-dire comme nous l’avons vu des événements où des centaines, voire des milliers de participants, majoritairement des jeunes, se rassemblent pour danser au rythme d’une musique techno. Les raves ont comme caractéristique commune de se dérouler tout au long de la nuit. Certains de ces événements sont légaux et d’autres sont tenus de façon clandestine. Un rave légal est un rassemblement tenu généralement dans un local aménagé à l’occasion de la fête pour lequel les organisateurs ont obtenu des autorités municipales les autorisations nécessaires. Pour qu’un local soit autorisé, il doit avoir été jugé conforme aux exigences des codes de prévention des incendies et du bâtiment ainsi qu’aux règlements de zonage de l’arrondissement suite à une inspection.

3.6.1.2 Les raves clandestins

Les raves clandestins sont des événements peu publicisés en raison du fait que les organisateurs n’ont pas obtenu les autorisations nécessaires pour l’occupation du local où ils projettent tenir l’événement. On ne peut souvent obtenir l’information sur le lieu que quelques

heures avant le début de l’événement à l’aide d’une ligne téléphonique dédiée à cette fin ou par le biais du bouche à oreille.

Beaucoup de ces événements nocturnes de musique techno sont communément appelés raves privés par les gens qui y participent. Cette terminologie porte toutefois à confusion. Certains événements qualifiés de raves peuvent ainsi se tenir de façon légale mais n’être ouverts qu’aux personnes qui ont fait l’objet d’une invitation, ce qui peut amener les participants à les considérer comme des raves privés. À l’inverse, un événement peut être ouvert à tous sans qu’il ait fait l’objet d’une autorisation légale, mais il pourra être présenté comme une fête privée s’il fait l’objet de vérifications par les autorités le soir même sur les lieux de l’événement.

3.6.1.3 Les raves commerciaux

Certains événements techno peuvent rassembler plusieurs milliers de participants et se dérouler à l’intérieur de grands amphithéâtres comme le Centre Bell, le Stade olympique et le Palais des congrès. Ces événements annuels majeurs que plusieurs qualifient d’événements commerciaux, dont les plus connus sont le Bal en Blanc et le Black and Blue, sont publicisés à grande échelle et les organisateurs s’assurent d’une visibilité importante dans les rues, les journaux, les magazines, à la radio et même à la télévision sur les ondes de Musique Plus par exemple. Ce sont des événements annuels d’envergure qui sont autorisés et encadrés par le Service de police de la ville de Montréal par un protocole depuis 2001. Nous reviendrons plus spécifiquement sur la question du protocole dans le chapitre quatre. Soulignons pour l’instant que ces événements majeurs se déroulent légalement toute la nuit, et qu’il y a vente d’alcool jusqu’à 3h00 du matin en raison du fait qu’il y a suspension volontaire du permis d’alcool pour le reste de la nuit délivré par la Régie des alcools des courses et des jeux du Québec (RACJ).

Parmi ces événements majeurs, certains font partie de ce qu’il est convenu d’appeler un circuit party, en ce sens qu’ils s’inscrivent dans la programmation d’un festival qui s’étend sur plusieurs jours. Dans le cadre de ces festivals qui peuvent durer jusqu’à une semaine, il y a plusieurs événements à caractère techno qui se déroulent à différents endroits et à différents moments.

3.6.1.4 Les soirées techno

Il y a ensuite une autre catégorie d’événements que l’on peut qualifier de soirées techno. Certains promoteurs organisent des soirées de musique techno à l’intérieur de bars, de discothèques ou d’autres types de salles. Ces événements sont souvent qualifiés de soirées techno et non de raves, parce qu’ils prennent fin à 3h00 du matin, en même temps que l’expiration du permis d’alcool.

Du point de vue des promoteurs d’événements comme des adeptes de rassemblements festifs techno, la durée d’un événement constitue un élément clé lorsqu’il est question de déterminer s’il s’agit d’un événement que l’on peut qualifier de rave. En effet, cet élément de la durée semble avoir un impact important sur la nature de l’événement. Les gens ne consomment pas de la même façon s’ils n’y passent pas la nuit. La majorité des participants vont ainsi éviter de consommer certaines drogues de synthèse dont les effets peuvent être plus longs. Le climat ne sera donc pas le même sur la piste de danse. Les DJs ne feront pas jouer la même musique, la soirée techno ne « tournera pas en rave ». Selon les promoteurs et les adeptes rencontrés, on retrouve rarement lors de ces soirées cette euphorie collective, l’extase que beaucoup de participants cherchent à se communiquer lors d’un rave, souvent amplifiée par l’usage de certaines drogues, un usage dont les adeptes ont moins recours lorsque la soirée est plus courte.

Certaines de ces soirées se déroulent à l’intérieur de lieux soient aménagés pour l’occasion comme une salle de réception, soit dans des lieux qui se consacrent à la diffusion des arts multimédia par exemple. Ces événements peuvent également s’inscrire dans le cadre d’un festival de musique électronique dont le plus connu est organisé par un collectif nommé Mutek.

3.6.1.5 Les clubs afterhours

Les clubs afterhours constituent une autre forme que peut prendre le milieu festif techno au Québec. Apparus dans l’arrondissement Ville-Marie au début des années 90, ces établissements se caractérisent par le fait qu’ils peuvent rester ouverts après 3h00 du matin en raison du fait qu’ils ne vendent pas d’alcool, d’où l’appellation de clubs afterhours.

Nous verrons dans le chapitre quatre comment l’émergence et la popularité de ces clubs afterhours a préoccupé les autorités policières qui ont fait pression sur les élus de

l’arrondissement afin que ces derniers mettent en place un règlement pouvant limiter la multiplication de ce type d’établissement qui échappait aux contrôles de la RACJ.

Les afterhours se caractérisent par le fait qu’ils constituent une manifestation du phénomène festif techno qui a pignon sur rue, qui accueille la clientèle les nuits de fin de semaine avec des DJs réguliers et produisent également des événements spéciaux avec des DJs invités.

3.6.1.6 Les événements en plein air

Depuis quelques années, une autre forme d’événements techno se déroule à l’extérieur tous les dimanches à l’Île Sainte-Hélène, événements appelés Pik Nik Électronik. Ces rassemblements sont qualifiés par certains comme étant des « after-after » parce qu’ils se déroulent en après-midi, donc suite aux heures d’ouverture des clubs afterhours. Présentés par les organisateurs comme étant des événements destinés autant à une clientèle techno avertie qu’à des jeunes familles, les Pik Nik Électronik offrent une programmation de DJs prisés par les adeptes dans un environnement favorisant la détente en plein air. Il y a également un événement qui se déroule les soirs de trois fins de semaines d’hiver au Quai Jacques Cartier du Vieux Port de Montréal. Cet événement appelé Igloo Fest est organisé par la même compagnie de production. Ces différents rassemblements sont autorisés par la municipalité.

D’autres événements de type rave se déroulent également en plein air à l’extérieur de Montréal, malgré le fait qu’ils rassemblent majoritairement des personnes provenant de la métropole. Certains de ces événements rassemblent jusqu’à plusieurs milliers de personnes et peuvent se dérouler sur une période de quelques jours. Ces événements de type rave sont moins sujets à des règlementations tel que c’est le cas à Montréal. Les autorisations des municipalités concernées suffisent souvent pour tenir ces rassemblements sans problème.

3.6.1.7 Les clubs techno de jour

Un autre établissement situé en banlieue de Montréal fait partie de ce « réseau » que constitue le milieu festif techno. Le Beach Club est un complexe récréatif destiné à la clientèle adepte de musique techno. Aménagé sur un site qui offre une plage de sable donnant sur un lac artificiel, ce complexe peut également être considéré par la clientèle comme étant un « after-after », en raison du fait que l’on peut s’y adonner toute la journée à la danse et la socialisation dans une atmosphère festive techno, avec toutes les commodités comparables à

ce que l’on retrouve dans les discothèques. D’autres clubs techno ont également des heures d’ouverture de jour à Montréal pour ceux qui désirent continuer à « sortir » après leur nuit passée dans un afterhour ou dans un rave.

Il y a donc une importance accordée à la dimension temporelle dans la définition même des événements festifs techno. À titre d’exemple, suivant la majorité des rassemblements rave s’organisent entre adeptes des arfter-partys, qui sont des événements tenus généralement dans des lieux privés et pouvant se dérouler jusqu’à quelques jours.