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III. Mesures thermiques en conditions physiopathologiques

III.2. Mesure de la température in vitro

Les élévations de température que nous avons mises en lumière dans les systèmes précédents pourraient se répercuter sur le tapis de cellules endothéliales. Pour tenter de le démontrer formellement, nous avons utilisé une sonde fluorescente thermosensible (Uchiyama et al., 2015) (obtenue en collaboration avec les Dr. Uchiyama et Inada de l’Université de Tokyo au Japon) que nous avons incorporée à l’intérieur des cellules endothéliales. Cette sonde est constituée de quatre sous-unités dont deux sont fluorescentes. Une de ces sous-sous-unités émet une fluorescence dont l’intensité est indépendante des variations de température. Elle est donc stable et sert de contrôle qualité à l’incorporation de la sonde au sein des cellules. En revanche, la deuxième sous-unité émet une fluorescence dont l’intensité est dépendante des variations thermiques. Son intensité de fluorescence augmente avec l’élévation de la température. Ainsi, en effectuant un ratio des deux intensités de

Page | 126 fluorescence pour chaque cellule, nous sommes capables de définir la température présente à l’intérieur de chacune d’elle, de manière relativement précise.

Notre objectif final était donc de perfuser les cellules avec du milieu de culture et de visualiser, par immunofluorescence et de manière simultanée, une possible variation locale de la température au sein des cellules localisées au niveau de la bifurcation.

III.2.1. Validation de la sonde en condition statique

Tout d’abord, nous avons cherché à définir les conditions optimales (concentration et solution de dilution) pour l’utilisation de la sonde thermosensible en condition statique. Pour chaque condition testée, la température environnante des cellules a été augmentée progressivement et les ratios de fluorescence ont été calculés pour chaque cellule. Cela nous a permis de vérifier que ces ratios augmentaient avec l’augmentation de température et d’évaluer la sensibilité de la sonde. Les courbes obtenues sont représentées Figure 64.

FIGURE 64 : LES RATIOS DE FLUORESCENCE DE LA SONDE THERMIQUE AUGMENTENT AVEC LA TEMPÉRATURE EN CONDITION STATIQUE.

Les HCAEC ont été cultivées en condition statique à 37°C pendant 24h. Elles ont ensuite été traitées pendant 10 minutes avec la sonde thermique à différentes concentrations (10 µg/mL, 5 µg/mL, 2.5 µg/mL et 1.25 µg/mL) et dans deux solutions de dilution différentes (5% de glucose ou 150 mM de KCl). Des mesures de fluorescence (longueur d’onde d’excitation : 458 nm, longueurs d’onde d’émission : 510 nm et 580 nm) ont ensuite été réalisées sur cellules vivantes à l’INCell 2200 pour une gamme de température allant de 31°C à 45°C, avec un pas de 2°C. Après chaque augmentation, la température a été stabilisée pendant 30 minutes avant la prise de photos. Les intensités de fluorescence pour chaque sous unité ont été générées à partir du logiciel d’imagerie cellulaire INCell Developer® et les ratios de fluorescence ont été calculés pour chaque température et chaque condition. Les résultats ont été obtenus sur une moyenne de 3 expériences +/- SEM.

Page | 127 Dans toutes les conditions testées, plus la température augmente et plus les ratios de fluorescence de la sonde augmentent également. Néanmoins, nous remarquons que le delta de fluorescence le plus élevé est obtenu lorsque la sonde est diluée dans une solution de KCl à une concentration de 10 µg/mL en lien avec ce qui était déjà publié sur cette sonde (Uchiyama et al., 2015). De plus, les variations des ratios de fluorescence étaient également cohérentes avec les résultats obtenus par Uchiyama et al. Nous avons donc choisi ces conditions pour la suite des expériences.

III.2.2. Validation de la sonde en condition de flux

Nous avons ensuite voulu valider le fonctionnement de la sonde en condition de flux. Pour cela, les cellules endothéliales ont été cultivées en condition de flux laminaire (10 dyn.cm²) dans du milieu de culture complet à plusieurs températures contrôlées, de 35°C à 45°C (Figure 65).

FIGURE 65 : LES RATIOS DE FLUORESCENCE DE LA SONDE THERMIQUE NE VARIENT PAS AVEC LA TEMPÉRATURE EN CONDITION DE FLUX LAMINAIRE.

Les HCAEC ont été cultivées en condition de flux laminaire (10 dyn.cm²) à 37°C pendant 24h. Elles ont ensuite été traitées en condition statique avec la sonde thermique (10µg/mL diluée dans du KCl 150 mM). Les cellules ont ensuite été replacées en condition de flux laminaire et des mesures de fluorescence (longueur d’onde d’excitation : 458 nm, longueurs d’onde d’émission : 510 nm et 580 nm) ont ensuite été réalisées au microscope à fluorescence pour une gamme de température allant de 35°C à 45°, avec un pas de 2°C. Après chaque augmentation, la température a été stabilisée pendant 30 minutes avant la prise de photos. Les intensités de fluorescence pour chaque sous unité ont été générées à partir du logiciel Zen® et les ratios de fluorescence ont été calculés pour chaque température. Ce graphique est représentatif de 3 expériences.

34 36 38 40 42 44 46 2.0 2.1 2.2 2.3 2.4 2.5 Température (°C) R at io d e fl u o re sc e n ce

Page | 128 Aucune variation du ratio de fluorescence n’a été observée lors de l’augmentation progressive de la température en condition de flux laminaire. Nous n’avons pas pu établir les raisons pour lesquelles cette sonde thermique ne fonctionne pas comme attendu en condition de flux malgré le fait que de nombreuses conditions aient été testées. Nous étions donc dans l’impossibilité de visualiser, avec cette sonde, une variation thermique locale des cellules endothéliales cultivées en flux.

III.2.3. Expression protéique au sein des bifurcations

Nous avons donc tenté de trouver une solution alternative à l’utilisation de la sonde thermosensible. Compte tenu des résultats obtenus précédemment en microarray, nous savons que les HSP et CIRBP sont des marqueurs fiables dont l’expression augmente et diminue respectivement en réponse à une élévation de température. Les niveaux d’expression de HSPA1A et de CIRBP ont donc été mesurés in

vitro au sein d’une bifurcation et ont été comparés avec ceux des parties laminaires situées en amont.

Pour cela, nous avons utilisé des modèles de canaux adaptés à la culture cellulaire en flux et nous avons réalisé différents immunomarquages (Figure 66).

Nous constatons que, comparativement à la zone laminaire (1), le niveau d’expression de HSPA1A semble être diminué (Figure 66A) alors que le niveau d’expression de CIRBP augmente (Figure 66B) au sein des zones non laminaires (2 et 3). Ces résultats sont inverses à nos prédictions et aux résultats observés ex vivo. En effet, nous nous attendions à observer une augmentation de la protéine HSPA1A au sein de la bifurcation et une diminution de la protéine CIRBP dans cette même zone, suggérant une augmentation de la température. Cependant, ces résultats pourraient être dus à la conformation des modèles de bifurcation utilisés dont nous parlerons dans la partie Discussion.

Page | 129 FIGURE 66 : EXPRESSION PROTÉIQUE DE HSPA1A ET CIRBP DANS LES DIFFÉRENTES ZONES DE FLUX.

Les HCAEC ont été cultivées en condition de flux perturbé dans un canal comprenant une bifurcation (10 dyn.cm²) pendant 24h à 37°C. Les cellules ont ensuite été fixées, perméabilisées et marquées avec des anticorps dirigés contre HSPA1A ou contre CIRBP. Les noyaux cellulaires ont également été marqué à l’aide du Hoechst 33342. Pour chaque canal, trois zones ont été délimitées : une zone laminaire (1), une zone de bifurcation (2) et une zone coudée (3) où le flux est également perturbé. Pour chaque zone, les HCAEC ont été dénombrées grâce aux marquages nucléaires et l’intensité de fluorescence obtenues pour chaque protéine a été quantifiée et normalisée au nombre de cellules. Chaque point représente le niveau de fluorescence par cellule et par zone (1, 2 ou 3). Les résultats ont été obtenus sur une moyenne de 4 expériences (pour HSPA1A) ou 2 expériences (pour CIRBP) +/- SEM. ***P<0.0005 et ****P<0.0001 entre les groupes indiqués.