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Manifestations personnelles du support socioaffectif à l’écrit

2. SOCIALISATION MÉDIATISÉE EN FOAD

2.3 Manifestations personnelles du support socioaffectif à l’écrit

D’emblée, il convient de rappeler que notre problème de recherche est inspiré de notre expérience professionnelle, ce qui représente un aspect fondamental d’une recherche de type self-study. Cette expérience sera d’ailleurs présentée dans le troisième chapitre lorsque nous aborderons le sujet de recherche et les terrains de recueil de nos données, soit la tension entre nos pratiques enseignantes et notre expérience personnelle, ainsi que les contextes d’enseignement au sein desquels nous avons évolué, d’un point de vue méthodologique. Soulignons tout de même que, en amont du déroulement de la présente recherche, dans le cadre de notre exercice professionnel de formatrice en contexte à distance, nous avons expérimenté plusieurs stratégies pour tenter de développer et d’entretenir des liens relationnels et pédagogiques avec les personnes étudiantes à distance en mode asynchrone. L’intention derrière celles-ci était de favoriser leur engagement dans leur formation en ligne, notamment grâce à des modalités de renforcement positif. L’envoi d’encouragements à l’échelle collective ou individuelle par le biais de forums ou de courriels, la création d’un forum de découvertes à partager informellement, la variation des registres de langue au sein de nos communications asynchrones ainsi que le recours à l’humour en sont des exemples. Ce dernier est d’ailleurs présenté dans plusieurs recherches comme un indicateur de présence sociale à distance (Kehrwald, 2008; Gauducheau, 2008 ; Quintin, 2008, Dussarps, 2014, Jézégou, 2010, Domakin, 2012). L’objectif que nous poursuivions alors intuitivement était d’humaniser la communication asynchrone de manière à favoriser la création d’une dynamique pouvant réduire la distance entre les personnes étudiantes et nous, mais aussi à favoriser un accompagnement pédagogique de qualité sur le plan socio-affectif avant de rejoindre l’individu sur le plan cognitif.

Il convient de noter que, selon notre expérience, dans le cas du forum, la participation hétérogène des personnes étudiantes rend parfois plus difficile l’établissement d’un dialogue pédagogique de qualité avec eux (Gouvernement du Québec, 2015). La fréquence variable des échanges asynchrones ayant lieu sur les forums et la participation parfois limitée des personnes étudiantes à ceux-ci permettent plus ou moins de nous engager dans de longs échanges à la suite d’interventions réalisées par celles-ci. Au-delà de la longueur des échanges, une fréquence moins élevée de ceux-ci risque de contrevenir à la dynamique d’ouverture qui les caractérise, étant donné qu’aucune relation de confiance n’est établie entre eux au préalable. Comme le soulignent Petit, Deaudelin et Brouillette (2015) : «il faut que les [personnes étudiantes] […] développent une confiance et un respect mutuel pour travailler ensemble sur une seule et même tâche.» (p.3); cela vaut aussi pour la personne formatrice et les personnes étudiantes qui s’engagent dans une formation ouverte à distance.

Ainsi, la qualité des échanges entre les personnes prenant part à la FOAD influence positivement le processus d’apprentissage collaboratif (un groupe d’individus qui poursuivent un même objectif) et coopératif (un groupe d’individus dont les membres poursuivent chacun leur propre objectif), tels que définis par Henri et Lundgren-Cayrol (2001). Plus spécifiquement, «la formation d’un sentiment de communauté, déclenchée par une importante perception sociale au sein de la formation à distance, influence positivement l’apprentissage collaboratif et la motivation à travailler en équipe et à apprendre.» (Denami et Paquet, 2015, p. 51). À l’inverse, de courts messages ne laissant voir aucune trace d’empathie semblent décourager la poursuite du dialogue (Ibid.). En effet, les interactions stimulantes comporteraient certaines caractéristiques telles que la récurrence de la participation, l’immédiateté des réponses, le partage de conseils et de ressources, ainsi que le témoignage d’empathie ou de soutien affectif (Ibid.). En d’autres mots, le fait de répondre aux personnes étudiantes rapidement et d’engager de manière récurrente le dialogue entourant les activités d’apprentissage et les consignes claires qu’elles sous-tendent est essentiel en formation à distance (Prat, 2015). Bref, pour Bourdet, la relation entre les personnes enseignantes et étudiantes est significative :

En gros, la relation entre enseignants tuteurs et étudiants devrait […] être un espace de libre échange basé autant que faire se peut sur la confiance et le respect ». Comme on le voit, il ne s’agit pas de paramètres professionnels liés aux rôles traditionnellement dévolus aux tuteurs (technique, pédagogique, gestion, social) ; mais, au-delà de cette déclinaison de la fonction tutorale, d’un rapport humain nourri de valeurs philosophiques et morales. (Bourdet, 2010, p. 336)

Ce rapport humain doit pouvoir s’épanouir à travers les échanges asynchrones considérant la fréquence du recours à ceux-ci en contexte de FOAD. En ce sens, l’absence de manifestations d’un support affectif à l’écrit en FOAD pourrait avoir des conséquences négatives sur la qualité des interactions entre les membres d’un groupe formel ou d’une communauté d’apprentissage (Ferone, 2011).

En somme, il est possible d’émettre l’hypothèse que les manifestations écrites asynchrones d’un rapport positif à l’autre représenteraient effectivement des bases sur lesquelles la personne enseignante pourrait construire une relation de confiance avec les personnes étudiantes en FOAD. Bien que nous reconnaissions l’importance de communiquer fréquemment et d’offrir des réponses de qualité aux personnes étudiantes lors des échanges, des questions persistent quant à l’opérationnalisation du soutien socio- affectif sur le plan du langage et de la rhétorique. La prochaine section présente l’objectif général de recherche qui émerge en rapport à ces questionnements.