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3. CONFRONTATION DES HYPOTHÈSES DE RECHERCHE ET DES

3.5 La diaphonie

Constat

Est-ce que la diaphonie se manifeste autrement que par la reformulation ?

Question Comment témoignai-je que j’ai compris le propos d’autrui et que j’en tiens compte dans ma réponse ?

Les marques de diaphonie représentent de manière générique les propos d’autrui auxquels nous faisons écho à travers nos échanges de manière à favoriser les discussions égalitaires entre les partis. À partir des exemples ci-dessous, nous dégageons différentes expressions diaphoniques que nous avons classées dans le tableau 15.

Tableau 15

Exemples d’agencements syntaxiques à tonalité diaphonique Groupes nominaux Groupes prépositionnels Groupes adverbiaux Phrases subordonnées Phrases incidentes • Justification erronée • Généralisation abusive • Pertinence (–) • Fidélité (–) • Clarté (–) • À mon tour • À la demande générale • À la demande de [Prénom], • Effective -ment • Bel et bien • Plutôt • Pour répondre à votre seconde question • […] auquel vous faites référence • qui ont représenté un plus grand défi hier soir • comme vous le pensiez • J’en comprends que […] • J’ai eu quelques questions en ce qui a trait à… alors, je me permets de vous faire un petit tutoriel en images afin de… • Vous avez vu juste ! ;)

Nous avons également observé à travers notre corpus la présence de marques de diaphonie correspondant à des réponses à portée collective fournies à un questionnement récurrent de la part de membres du groupe : « à la demande générale, voici une phrase pour vous exercer à la réalisation d’une analyse arborescente. » D’autres réponses à des questions faisant référence à la personne ayant soumis ledit questionnement initial ont aussi été relevées comme en témoigne l’exemple suivant : « à la demande de [Prénom], voici des clarifications sur l’emploi du deux-points et du point-virgule. ». Notons qu’aucune reprise littérale du propos d’autrui n’a été identifiée à travers le corpus. De plus, aucune de ces marques n’a été recueillie dans les consignes disponibles dans l’ENA étant donné qu’il s’agit d’information donnée et que celles-ci ne rendent pas possible la discussion. Le cas échéant, les discussions sur les consignes données se font sur les forums ou par courriels. Ce sont d’ailleurs les catégories auxquelles sont associées le plus grand

nombre de marques de diaphonie. Il est toutefois intéressant de noter que la portée des marques de diaphonie présente sur les forums est plus collective qu’individuelle.

Pour en revenir à notre hypothèse, la diaphonie se manifeste effectivement par d’autres moyens que la reformulation. L’usage de marqueurs de modalités, le choix des constituants de nos groupes syntaxiques ainsi que l’ajout de phrases incidentes peuvent laisser entrevoir la voix du destinataire à travers la nôtre et ainsi favoriser la création de liens entre nous. La prochaine section se concentre sur les marques de liance, plus spécifiquement d’empathie, présentes à travers ces marques de diaphonie.

3.5.1 La diaphonie et les marques d’empathie

Constat ou Hypothèse :

Les marques de diaphonie doivent être souvent suivies de marques de liance, plus spécifiquement de marques d’empathie.

Question : Comment se manifeste ce croisement ?

À travers les données, nous avons remarqué que certaines marques de diaphonie sont combinées à des marques de liance, plus spécifiquement liées à la manifestation d’empathie et de réconfort à l’égard du ou des destinataires. Il s’agit par exemple de formulations explicatives dans le cadre duquel on fournit une justification dans le but d’éviter les questionnements inutiles ou les inquiétudes quant à une information manquante ou temporairement indisponible comme en témoignent les exemples suivants :

• « je vous rassure : les séances WebEx sont enregistrées. » [2.1.3 Empathie et 2.2.1 mise en disponibilité d’une ressource au profit du destinataire] • « Le cours ne dure pas seulement trente minutes, ne vous inquiétez pas. » ;

[2.1.3 Empathie et 2.3.7 Requête]

• « Ne vous en faites pas, vous aurez les délais nécessaires pour la réalisation des évaluations. ;)». [2.1.3 Empathie et 2.2.2 Délai accordé pour la remise d’un travail pratique]

Dans les trois exemples, on fait référence au fait de rassurer, ce qui fait écho à l’émotion qui nous a été communiquée par le destinataire, à savoir l’inquiétude. Pour ce faire, nous avons généralement recours aux actes commissifs (promissifs), soit la mise en disponibilité d’une ressource au profit du destinataire ou l’attribution d’un délai pour la remise d’un travail pratique. Il est toutefois à noter que nous demandons parfois explicitement au destinataire d’arrêter de s’inquiéter tout en lui fournissant une information complémentaire, comme dans le deuxième exemple. De plus, dans certains cas, ces marques de réconfort peuvent être explicitement associées à :

1) des actes commissifs :

• « Ne vous inquiétez pas, la séance de ce soir sera enregistrée et disponible pour un visionnement dès qu’elle sera terminée. » [2.1.3 Empathie et 2.2.1 mise en disponibilité d’une ressource au profit du destinataire]

• « Je comprends tout à fait que cette période de la session est chargée pour tout le monde. Je vais donc dès maintenant vous octroyer une dérogation dans le système informatique jusqu’à mercredi soir. » [2.1.3 Empathie et 2.2.2 Délai accordé pour la remise d’un travail pratique]

2) des actes directifs :

• En espérant le tout un peu moins confus, je vous encourage à m’écrire de nouveau si vous avez une question. [2.1.7 Vœux et 2.3.4 Invitation]

• Sachez que je suis très heureuse que vous fassiez partie du groupe de nouveau et que vous preniez le temps de me partager vos interrogations. Je vous encourage fortement à récidiver. [2.1.8 Émotions positives (joie/enthousiasme) ; 2.1.1 Appréciation de l’Autre et 2.3.4 Invitation] • Merci de me tenir au courant et bon courage [2.1.5 Remerciements ; 2.3.7

Requête ; 2.1.7 Vœu]

Dans le premier groupe d’exemples, on remarque encore une fois que l’empathie est le moteur qui guide la réalisation de l’acte commissif (ou promissif), que ce soit de mettre à disposition une ressource au profit du groupe ou d’accorder un délai au destinataire pour la remise d’un travail. Les deux premiers exemples illustrent la présence

de l’agencement des invitations à des marques de liance comme les vœux, les émotions positives, les remerciements et autres à travers le corpus. Le dernier illustre également les croisements entre vœux et remerciements qui ont été identifiés à plusieurs reprises à travers les artefacts écrits analysés. Il est également à préciser que les actes directifs accompagnés d’émoticônes sont récurrents à travers notre corpus.

En somme, nous constatons que les marques diaphoniques proposent une certaine structure récurrente, soit la reprise du discours de manière directe ou indirecte afin de manifester à l’autre que nous avons bien entendu sa question ou son besoin ainsi que l’ajout de marques d’empathie pour rassurer le destinataire en complémentarité cette reprise. La logique derrière le dialogue pédagogique place ici les marques d’empathie au premier rang pour s’assurer d’une relation humaine et conviviale entre les partis.

La prochaine section aura pour but de proposer des pistes de régulation professionnelle en ce qui a trait à l’usage de marques de reliance sociale à travers le discours écrit asynchrone selon la portée du message et la situation de communication dans laquelle nous nous retrouvons.