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Le maillage de détail : un des éléments clé de la contrainte urbaine

Préambule aux chapitres 5 et

Chapitre 5. Quand l’organisation spatiale du territoire influence la distribution urbaine

5.3 Maillage de la ville à grande échelle et aménagements urbains : condition de l’ accessibilité du dernier kilomètre

5.3.1 Le maillage de détail : un des éléments clé de la contrainte urbaine

Le maillage de détail d’une ville regroupe les rues, voies, ruelles et boulevards, quelle que soit leur hiérarchie, à l’exception des voies rapides et autoroutières ou des rocades qui appartiennent au maillage général et qui ont déjà été traitées à plus petite échelle. Leur profil (largeur, tracé, partage des voies) et le réseau qu’elles forment (plus ou moins dense) constituent deux axes d’étude privilégiés.

A grande échelle, le maillage de détail de la ville a une influence directe sur les derniers kilomètres et hectomètres de la livraison urbaine. A cet égard, le centre-ville est souvent le nœud des difficultés potentielles de distribution.

Les professionnels signalent que les pénétrantes sont essentielles à une distribution efficiente et efficace du territoire urbain (boulevard urbains, avenues, grandes rues, etc.). Une structure radiale associée à une structure en étoile permet la meilleure accessibilité. A divers degrés, les cas toulousain, angevin et tourangeau sont exemplaires. A contrario, la ville de Bayonne propose peu de pénétrantes vers un centre qui concentre commerces, restaurants/bars et services, c’est pourquoi les quelques voies permettant d’entrer dans la ville sont congestionnées structurellement en heures de pointe.

La densité du maillage est essentielle à la desserte. Celle-ci ne doit être ni trop faible (faible connectivité), ni trop importante : une forte densité de voies est souvent associée à un grand nombre de croisements et de feux tricolores qui ralentissent la vitesse du VUL.

Parmi les caractéristiques techniques du profil d’une voie, la largeur a des conséquences sur l’accessibilité et la congestion d’un axe. Plus la rue est étroite, plus elle contraint la vitesse de la course et l’efficacité de l’arrêt. Montbéliard est une ville très accessible et qui ne présente aucune contrainte de circulation pour les transporteurs. Il s’agit en effet de la ville de la voiture par excellence, non seulement du fait de la présence de Peugeot mais également par le surdimensionnement de sa voirie, très large, en partie lié à la logistique industrielle de PSA et de ses sous-traitants106. Montbéliard ne présente pas d’intérêt pour les questions de fret urbain. Pour un

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175 acteur local, ce désintérêt s’explique très naturellement par l’importance que tient la voiture dans cette région107. Angers, Limoges, Lens ou encore Douai ne présentent pas non plus de contraintes viaires spécifiques et un réseau de voies dense. La plupart de ces villes n’ont d’ailleurs pas inscrit la logistique urbaine à leur agenda politique.

Certaines zones dans les villes sont plus fortement contraintes que d’autres par leur réseau viaire, notamment les sites historiques. 64% des villes du panel présentant des contraintes liées au maillage de détail et au bâti sont, en effet, des villes avec un centre historique (figure 26). Ces espaces héritent du maillage d’origine peu ou pas remanié : voirie étroite, irrégulière, sinueuse, réseau dense avec de nombreux croisements du fait du parcellaire historique. Plusieurs villes de notre panel proposent des exemples parlants : traverses et rues étroites des quartiers du Vieux Marseille, étroitesse des rues d’Avignon, de Toulouse, du Vieux Lyon, du Grand Bayonne, parcellaire médiéval et rues étroites du quartier de l’Ecusson à Montpellier, petits ponts étroits de la Petite France à Strasbourg. Ces formes ont un effet sur la vitesse de circulation du livreur, qui est ralentie par les girations ou la difficulté de croiser un autre véhicule et de faire un dépassement. Les effets portent également sur la capacité à se garer pour livrer sans obstruer la rue. L’étroitesse de la voie empêche le stationnement en double file, même comme solution imparfaite (figure 27). Or, ces zones sont restées les centres commerçants et touristiques des villes françaises, concentrant commerces, bars, restaurants, services et siège des administrations municipales, lieux de nombreuses livraisons. En outre, les centres-villes historiques ont parfois été patrimonialisés et « sanctuarisés » par diverses réglementations portant sur les caractéristiques des véhicules utilitaires ou les horaires de livraison visant à protéger les témoignages de l’histoire. A Aix en Provence, la fragilité du sous-sol a conduit à une limitation du tonnage à 3,5 tonnes, le stationnement a été interdit dans des rues étroites de Toulouse. Les villes au centre historique contraint sont majoritaires dans la mise en œuvre de réglementation en matière de fret urbain (67% des villes) mais corrélativement présentent moins de contraintes en matière de stationnement car elles œuvrent en ce sens (29% des villes) (figure 26).

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Chapitre 5. Quand l’organisation spatiale du territoire influence la distribution urbaine

176 Figure 26 - Les contraintes morphologiques, spatiales et réglementaires associées aux types de ville

Source : entretiens. 2013

Nota Bene : Figure du dessus, se lit : 71% des villes au centre-ville peu contraint présentent des contraintes en

matière de stationnement

Les faubourgs et zones de grands ensembles, les zones industrielles et commerciales et lotissements périurbains de construction plus récente présentent un réseau viaire dont le profil plus large facilite la circulation (ce qui peut compenser d’ailleurs l’augmentation du haut-le-pied dans un contexte d’étalement urbain). Le maillage est moins dense mais permet cependant une très bonne accessibilité car le réseau est constitué de toutes les hiérarchies de voies : voies rapides, boulevards,

177 rues (figure 27). De même, les villes dont le centre a été détruit puis reconstruit proposent des voies plus larges, un maillage de forme simple (souvent carré) et des mailles régulières et plus grandes (Tours, Le Havre, etc.). Les lotissements pavillonnaires sont également majoritairement dotés de larges rues. Toutefois, la forme du réseau viaire et le nombre de croisements et de voies en sens unique peuvent y compliquer la distribution des colis (figure 27).

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178 Les difficultés pour les transporteurs peuvent venir de l’incomplétude du réseau, qui complique l’accès à la zone de distribution, de la faible densité du réseau et de la saturation des voies, qu’elle soit structurelle et technique – profil voie, profil du réseau – ou conjoncturelle – volumes de trafic routier, aménagements urbains liés à des évènements ou travaux –.

Les professionnels mettent en œuvre plusieurs stratégies d’adaptation. La sous-traitance de l’hyper centre permet d’externaliser les contraintes d’accessibilité. Cette stratégie a été observée chez les professionnels dans les villes d’Aix en Provence, Toulouse et Montpellier par exemple. La multiplication des moyens de transport ou la subdivision des livraisons dans les quartiers contraints permettent de pallier l’augmentation de la durée de tournées. Ainsi, Coliposte augmente le nombre de moyens de transport pour la livraison du centre de Strasbourg lors du marché de Noël, pour remédier à la congestion des rues rendues aux piétons et impraticables aux VUL108.Les difficultés liées aux profils des voies dans les centres-villes passent par une adaptation du véhicule au design urbain plus étroit. Le goupil est par exemple utilisé par Chronopost pour desservir le quartier du Panier à Marseille109, les triporteurs par Exapaq à Montpellier dans l’Ecusson110. L’adaptation peut passer également par de nouvelles organisations, telle la livraison à pied et avec un diable. Le quartier de La Petite France au réseau viaire étroit et piétonnier peut être desservi par Coliposte à pied lors du marché de Noël (contraintes structurelle et conjoncturelle associées)111.

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