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Section I.2 Définition des termes de la question : les pays émergents

I. Panorama des pays émergents

1. Macroéconomie

L'expression « marchés émergents » date de 1981. C’est Antoine Van Agtmael, économiste néerlandais au sein d’IFC-World Bank, qui a été le premier à utiliser l'expression au sujet de pays en voie de développement offrant des opportunités pour les investisseurs. Par la suite, le qualificatif s’est appliqué aux économies de ces pays. L'acronyme BRIC, qui signifie Brésil, Russie, Inde et Chine, est d’invention plus récente, utilisé pour la première fois en 2001.

Les quatre pays BRIC, différents par leur histoire et leur culture, ont été associés aux pays industrialisés du G7 en raison de leur importance économique, démographique et territoriale, avec pour objectif de traiter de façon plus efficace les grandes questions de gouvernance mondiale. Dans son ouvrage « Les nouvelles puissances mondiales -

pourquoi les BRIC changent le monde », Alexandre Kateb revient sur l’histoire de cet

acronyme inventé par l’économiste Jim O’Neill de la banque Goldman Sachs : « De

fait, les BRIC couvrent un quart de la surface terrestre, rassemblent 40% de la population mondiale, et produisent un quart du PIB mondial exprimé en parité de pouvoir d'achat (PPA). Du fait de leur croissance rapide, les BRIC consomment une proportion considérable des ressources agricoles, minérales et énergétiques mondiales et génèrent déjà plus de 30 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (à comparer avec 10% pour l’Union Européenne et 20% pour les Etats- Unis)49 ». Au-delà de leur influence économique, l’auteur rappelle aussi que les BRIC se sont imposés sur les questions politiques de sécurité internationale, de réforme du

49

KATEB, A. Les nouvelles puissances mondiales. Pourquoi les BRIC changent le monde, Paris : Ellipse, mai 2011, 267 p.

Conseil de Sécurité de l'ONU, et de la lutte contre la prolifération nucléaire et le terrorisme international.

IFC-World Bank localise généralement sur un planisphère les pays émergents, en introduction de ses présentations institutionnelles ; c’est le cas pour sa publication de référence The Case for Emerging Markets Private Equity50, ce qui permet de circonscrire le périmètre géographique de ses interventions :

Figure 4. Planisphère des pays émergents selon IFC-World Bank

Source : IFC-World Bank, 2011

Le processus de régionalisation, qui s'est diffusé à l’échelle mondiale depuis la chute du mur de Berlin, a profondément structuré les pays émergents. Ce phénomène a été explicité par l’Institut de Prospective Economique du monde MEDiterranéen

50

IFC, International Finance Corporation. The Case for Emerging Markets Private Equity. Washington DC, USA, Avril 2011

(l’IpeMed51), dans son rapport « Projet Convergence » de 2008 : « La chute du mur de

Berlin en novembre 1989 a marqué le départ d’une profonde mutation des relations internationales. La conception bipolaire Est-Ouest du monde, qui n’intégrait que des pays de l’hémisphère nord, s’est soudainement effacée pour laisser place à une dynamique de régionalisation Nord/Sud, liée à la formation de grands blocs économiques intégrés sur deux à trois fuseaux horaires. Au milieu des années 1990, les Etats-Unis, le Canada et le Mexique fondent l’ALENA, traité international d’ordre économique visant à intensifier l’intégration économique des trois pays-membres. A la fin des années 1990, le Japon, la Chine et la Corée du Sud se tournent vers les pays de l’ASEAN en constituant l’ASEAN Plus Trois et en ouvrant des négociations pour établir des zones de libre échange. L’Europe aussi a progressé sur la voie de la régionalisation en s’élargissant de 6 à 27 membres ».

La dynamique économique des pays émergents peut aussi être quantifiée grâce à l'indice MSCI Emerging Markets (« Morgan Stanley Capital International »), qui mesure la performance de leurs marchés boursiers. Positionné sur un axe temporel, cet indice révèle la tendance haussière de ces économies et les événements majeurs qui s'y sont produits au cours des vingt dernières années, ce dont les bourses locales ont été un marqueur sensible. C'est le travail de compilation auquel s'est livrée la banque Lazard, dans une note de recherche publiée en 2009 sous le titre « Evolution of the Emerging

Markets Equity, Asset class: No Longer ‘One Size Fits All’52 », et qu'illustre la figure

ci-après :

51

L’IpeMed (www.ipemed.coop) est un think tank créé en 2006, qui se fixe pour mission de rapprocher les pays des deux rives de la Méditerranée.

52

LAZARD ASSET MANAGEMENT, Investment Research. Evolution of the Emerging Markets Equity, Asset

Figure 5. Évolution de l’indice MSCI EM sur 20 ans

L’indice MSCI EM consolide aujourd’hui 21 indices boursiers : l'Afrique du Sud, le Brésil, le Chili, la Chine, la Colombie, la Corée, l'Égypte, la Hongrie, l'Inde, l'Indonésie, la Malaisie, le Maroc, le Mexique, le Pérou, les Philippines, la Pologne, la Russie, Taiwan, la République Tchèque, la Thaïlande et la Turquie. L'indice a connu une croissance exponentielle à partir de l’année 2003, par l'amélioration des fondamentaux des pays qui le constituent et par la croissance de leurs économies. De plus, son périmètre s'est élargi, puisqu’il n’incluait que 10 pays lors de sa création en 1987.

Derrière cette croissance tendancielle qu’illustre l’indice MSCI EM se trouvent agrégés des modèles distincts de développement régional, que l'on peut répartir selon cinq grandes zones : l’Asie, l'Europe de l'Est, le Moyen-Orient, l'Amérique du Sud et la Méditerranée. Pour construire cette croissance, chacune de ces régions a cherché à valoriser les avantages concurrentiels dont elle disposait.

Le modèle asiatique a bénéficié de la délocalisation des pays développés pour créer une industrie de biens (la Chine) et de services (l'Inde). En accédant au statut de « pays

ateliers », ces économies ont su drainer l'arrivée massive de capitaux étrangers :

certaines usines à valeur ajoutée technologique, et autres centres de recherche y sont désormais installés.

Le modèle de développement des pays de l'Est s’est, quant à lui, déployé après la chute du mur de Berlin de 1989, à travers une exposition grandissante à l'économie de marché ; la proximité géographique et culturelle des pays européens de l'Ouest a permis un modèle de développement régional propre, qui a été, pour de nombreux pays, validé par l’accession à l'Union Européenne.

Le modèle de croissance du Moyen-Orient s’est construit sur l'exploitation des ressources naturelles telles que le gaz et le pétrole, puis sur la recherche d’une diversification de l'économie nationale au-delà de la rente des matières premières. Le modèle Sud-Américain a profité de la libéralisation de l'économie mondiale et de la force de traction des accords de libre-échange avec l'Amérique du Nord : ce mouvement a permis le développement de productions primaires (agriculture et énergie) et de productions industrielles.

Le modèle des pays émergents méditerranéens (Tunisie, Maroc, Egypte et Turquie) est, quant à lui, comparable à celui de l'Amérique du Sud.

En complément des enseignements des indices boursiers, nous abordons à présent la dimension géopolitique des pays émergents.