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Section I.2 Définition des termes de la question : les pays émergents

II. Périmètre

2. Listes de pays et idéaltypes wébériens

2.1. L’approche du FMI

En termes quantitatifs, les statistiques produites par le FMI font autorité. Sur un total de 184 pays recensés dans le monde par l’Institution, 34 sont des pays avancés et 150 sont des pays émergents. Nous présentons ici ces statistiques, avant de discuter plus avant les enseignements qui peuvent en être retirés, notamment en recourant à l’idéaltype au sens de Max Weber.

Comment circonscrire le périmètre des pays émergents ? Il n’existe en effet pas de liste officielle, mais une abondance de listes et de terminologies concurrentes. Au sein même des BRIC, certains géographes et économistes contestent la présence de la Russie pour sa qualification de pays « en transition » qu’ils jugent douteuse. Nous sommes donc conscients de l’aspect conventionnel qui entoure le classement des 184 économies mondiales entre pays émergents et développés. En témoigne l'abondance de listes et de terminologies concurrentes, dont voici une sélection : Goldman Sachs invente l’appellation BRIC, groupe de pays auxquels il ajoute onze « grandes économies en développement », les Next-11. IFC-World Bank crée les « économies émergentes » en 2007 pour intégrer notamment la Chine et l'Inde. L’année suivante, trois nouvelles listes apparaissent : celle d’Ernst & Young, pour qui les pays émergents désignent les BRIC auxquels s’ajoutent l'Argentine, le Mexique, l'Arabie Saoudite et la Corée du Sud ; celle du Boston Consulting Group, qui regroupe sous la dénomination d’« économies à croissance rapide » 14 pays dont les BRIC ; et celle de PricewaterhouseCoopers enfin, qui identifie 20 marchés émergents.

Dans son rapport « Perspectives de l’économie mondiale » datant d’avril 2011, le FMI explique sa méthodologie : « Les pays sont répartis en deux groupes principaux : pays

avancés, et pays émergents et en développement. Loin d’être fixée en fonction de critères immuables, économiques ou autres, cette classification évolue au fil des

années. Elle a pour but de faciliter l’analyse en permettant d’organiser les données de manière aussi significative que possible58 ». Les caractéristiques de ces groupes de pays sont résumées dans les deux tableaux qui suivent, issus de l’édition d’avril 2012 du rapport du FMI « World economic outlook59 ».

Les pays avancés sont au nombre de 34 dans le monde selon le FMI, et rassemblent notamment les pays du G7 (États-Unis, Japon, Allemagne, France, Italie, Royaume- Uni et Canada). En 2011, ils concentrent 14,9% de la population mondiale et contribuent à hauteur de 51,1% dans le PIB mondial - les 48,9% complémentaires étant issus du PIB des économies émergentes. Les contributions au PIB mondial de ces deux groupes de pays s’approchent d’un équilibre. Dans une perspective dynamique, ces deux courbes devraient se couper à court terme (voir infra60), matérialisant ainsi le basculement du monde régulièrement annoncé par les économistes.

Tableau 3. Groupe des 34 pays avancés selon le FMI

58

FMI. Perspectives de l’économie mondiale. Etudes économiques et financières. Washington. Avril 2011, 251 p.

59

FMI. World economic outlook. World Economic and Financial Surveys. Washington. April 2012, 250 p.

60

Les pays émergents et en développement sont au nombre de 150 dans le monde selon le FMI, et regroupent 85,1% de l’humanité. Ils contribuent pour 48,9% dans le PIB mondial, majoritairement grâce à l’Asie (la Chine représente 29,3% du PIB des pays émergents et l’Inde 11,6%).

Tableau 4. Groupe des 150 pays émergents et en développement selon le FMI

2.2. Recours à l’idéaltype wébérien

Le planisphère des pays qualifiés d’émergents par IFC (voir figure supra) en illustre le nombre et la variété. Pour tenter de dégager les traits qui leur seraient communs, nous avons recours à la démarche de Max Weber sur les idéaltypes. Nous considérons ainsi que les BRIC représentent un idéaltype des pays émergents, en tant que pays aux caractéristiques les plus abouties. En regard, nous considérons que les pays du G7 sont un idéaltype des pays développés. Comme l’explique le sociologue Max Weber dans

son ouvrage « Économie et Société61 » publié en 1921 : « Dans tous ces cas,

‘comprendre’ signifie saisir par interprétation le sens ou l’ensemble significatif visé (a) réellement dans un cas particulier (dans une étude historique par exemple) (b) en moyenne ou approximativement (dans l’étude sociologique des masses par exemple), (c) à construire scientifiquement (sens « idéaltypique ») pour dégager le type pur (idéaltype) d’un phénomène se manifestant avec une certaine fréquence. Les concepts ou les « lois » qu’établit la pure théorie de l’économie politique constituent par exemple des constructions idéaltypiques de ce genre. (…) Ce n’est qu’en de très rares cas (celui de la Bourse), et encore de façon approximative, que l’activité réelle se déroule telle qu’elle est construite dans l’idéaltype ».

En 2011, Christophe Jaffrelot, Directeur de recherche au CERI-Sciences Po et président du groupe de veille « Pays émergents » de l'Institut Montaigne (présenté

supra) a rédigé un document de travail intitulé : « La France, le G20 et les ‘Pays émergents’ - un nouvel équilibre des pouvoirs ?62 ». Parmi les critères qu’il étudie dans ce rapport, nous retenons comme discriminants : la croissance, la démographie, la dette souveraine et le progrès technique. Sur ces quatre critères, la mise en parallèle du G7 (considéré comme un marqueur des pays développés) et des BRIC (considérés comme un marqueur des pays émergents) offre un fort contraste qui permet de discriminer les deux populations, et de structurer l’analyse présentée dans les pages qui suivent :

Tableau 5. Comparaison économique entre G7 et BRIC

Comparaison économique G7 BRIC

Taux de croissance moyen du PIB entre 2000 et 2010 +1,3% +6,5% Dette publique en pourcentage du PIB +107,3% +35,9% Recherche et développement en % du PIB +2,7% +0,9% PIB par habitant (en USD courant) 39 613 5 420

Source : Institut Montaigne, 2011

61

WEBER, M. Économie et Société. Édition Pocket (1ère édition 1921), France, janvier 2003, 410 p.

62

JAFFRELOT, C. La France, le G20 et les ‘Pays émergents’ - un nouvel équilibre des pouvoirs. Paris : L’Institut Montaigne, 2011.