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Partie 3 : Recensement des termes

6. Méthodologie

Pour recenser les termes imaginaires dans Harry Potter, j’ai relu l’ensemble des sept tomes parallèlement en anglais et en français et pris note au fur et à mesure des termes imaginaires et de leur équivalent dans la traduction. Après quoi, j’ai cherché les termes originaux recensés un à un dans l’Oxford Dictionary of English, ainsi que sur Google (au cas où il se serait agi d’un terme qui ne serait pas encore entré dans le dictionnaire), afin de m’assurer qu’il s’agissait effectivement de mots imaginaires.

La plupart des concepts imaginaires, et donc des termes qui les désignent, sont introduits dans les premiers tomes. Plus le lecteur avance dans la série, moins de nouveaux termes apparaissent. Ce sont toujours les mêmes qui reviennent. Lors du recensement, il a fallu être attentif aux termes issus de la mythologie. En effet, de nombreux noms désignant des plantes ou des animaux imaginaires dans Harry Potter semblent être issus de la créativité de l’auteure : par exemple, grindylow traduit en français par « strangulot ». Or, grindylow est une créature folklorique originaire d’Angleterre présente dans les légendes et les contes pour enfants63, habituellement désignée par un emprunt, « grindylow », ou un équivalent,

« strangulot », en français. De plus, on retrouve le strangulot dans d’autres romans fantastiques :

J’ignorais à quelle vitesse se déplaçait un strangulot, ni s’il pouvait tenir sur de longues distances et encore moins naviguer à contre-courant.64

De même, les hippogriffes (hippogriffs en anglais) sont de célèbres créatures mythologiques, mi-chevaux mi-aigles, souvent citées en littérature, par Charles Baudelaire, par exemple, dans son poème Les Petites Vieilles :

63 WIKIPEDIA, 2016. « Grindylow », Wikipédia : l’encyclopédie libre. Dernière modification de la page le 20 juillet 2016.

64 HUNTER Faith, 2014. Jane Yellowrock : La malédiction du corbeau, Traduit de l’anglais par Audray Sorio, Modène : Panini Books.

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Hippogriffe puissant, mène-moi jusqu’au ciel !65

De même, le Bezoar, terme pouvant sembler tout à fait imaginaire, figure dans l’Oxford Dictionary of English et désigne « a small stony concretion which may form in the stomachs of certain animals, especially ruminants, and which was once used as an antidote for various ailments ». C’est exactement dans ce sens qu’est utilisé ce terme dans Harry Potter : un antidote. En français, « bézoard » est aussi présent dans Le Petit Robert et désigne une

« concrétion formée de poils ou de divers débris végétaux se formant dans le corps de certains animaux (ruminants) et parfois des humains ». Pour chaque végétal et animal cités, j’ai donc commencé par une recherche détaillée sur le terme en anglais et en français pour vérifier s’il existe dans d’autres textes ou s’il est effectivement propre à l’univers de Harry Potter.

Parmi les mots vraiment inventés par J. K. Rowling, je n’ai pas retenu les noms propres qui désignent des personnages, des lieux ou des établissements uniques, et me suis concentrée sur les termes imaginaires désignant des concepts, des objets – imaginaires mais courants dans le monde fictif des sorciers –, des classes sociales, des aliments, des sports, des langues, des fonctions, etc. J’aimerais pouvoir dire que je me suis intéressée uniquement aux noms communs, mais la situation est loin d’être simple. La nature même de ces mots imaginaires est difficile à définir et la frontière entre nom propre et nom commun est parfois ténue.

Le Petit Robert définit le nom propre comme un « mot ou groupe de mots servant à désigner un individu et à le distinguer des êtres de la même espèce » ou comme la

« désignation individuelle d’un animal, d’un lieu, d’un objet ». A l’inverse, un nom commun est un « mot servant à désigner les êtres, les choses qui appartiennent à une même catégorie logique et à une même espèce ». Presque la totalité des termes imaginaires dans Harry Potter prennent une majuscule, autant dans le texte original que dans la traduction, comme s’ils désignaient des entités uniques. Or, ce n’est pas le cas. Ils désignent des objets, plats, fonctions, censés être courants dans le monde des sorciers.

Le terme qui m’a posé le plus de problème est « Quidditch ». Il désigne un sport d’équipe pratiqué par les sorciers, qui pourrait être comparé au football pour ce qui est de sa popularité. Il s’agit bien d’un concept unique mais non pas d’une entité unique. Tout le monde peut y jouer à tout moment et le mot ne désigne pas un objet ou un lieu unique. Le football est

65 BAUDELAIRE Charles, 2006. Les Fleurs du Mal, Paris : Flammarion.

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bien un nom commun et il ne prend pas de majuscule. Alors pourquoi « Quidditch » prend-il une majuscule ? On pourrait supposer que tous les mots imaginaires prennent une majuscule dans Harry Potter. En réalité, c’est bien le cas, à l’exception de tous les verbes, de lunascope et de la deuxième unité graphique de Floo powder. Cependant, rien ne différencie lunascope ou Floo powder de tous les autres termes imaginaires. J’en conclus donc que l’orthographe de lunascope et de Floo powder résultent d’un oubli et que tous les mots imaginaires de la série prennent une majuscule (sauf les verbes), non pas parce qu’ils désignent des entités uniques mais simplement parce que ce sont des mots inventés.

Ce qui précède m’a permis d’éliminer un certain nombre de termes recensés. Aussi, si ma première liste contenait environ 80 mots, la liste finale n’en compte-t-elle plus que 50. J’ai éliminé Marauder’s Map, Sorting Hat et Whomping willow car ils désignent, respectivement, deux objets uniques et un arbre unique dans le monde des sorciers. J’ai également laissé de côté les noms des sorts et des potions, car ils ne sont pas traités comme des termes entrés dans l’usage : les personnages utilisent systématiquement une périphrase, telle que charm ou potion précédés de noms imaginaires en anglais ou « le sortilège de » ou « la potion de » suivis de noms imaginaires en français : par exemple, Polyjuice potion ou « sortilège du Patronus ».

Quant à Mirror of Erised, je l’ai également écarté, non seulement parce qu’il s’agit d’un objet unique, mais également parce que le terme est un anacyclique, c’est-à-dire un mot ou une phrase que l’on peut lire à la fois dans le sens normal de lecture et dans le sens inverse : Erised est en fait desire écrit dans le sens inverse de lecture. En français, Jean-François Ménard a utilisé la même technique : « Miroir du Riséd » pour « Miroir du désir ». Dans la saga, ce miroir porte une inscription qui semble être composée de mots imaginaires, mais qui est en fait une phrase anacyclique : Erised stra ehru oyt ube cafru oyt on wohsi lue en sens inverse donne I show not your face but your heart’s desire. Idem en français : « Riséd elrue ocnot edsi amega siv notsap ert nomen ej » lue en sens inverse donne « Je ne montre pas ton visage mais de ton cœur le désir ».

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