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PARTIE II : DIVERSITE GENETIQUE DE L’ABEILLE D’ELEVAGE EN FRANCE

CHAPITRE 3 : PRINCIPALES SOUS-ESPECES D’APIS MELLIFERA ET LEURS

C. La lignée A

La lignée A contient les sous-espèces de l’Afrique (Franck et al., 2001). Au Nord, dans le Maghreb, on trouve A. m. major, A. m. sahariensis et A. m. intermissa. Au sud du continent Africain, on trouve d’autres sous-espèces telles A. m. adansonii, A. m. monticola, A. m. litorea, A. m. capensis ou encore A. m. scutellata. A l’Est enfin, il s’agit d’A. m. lamarckii, l’abeille égyptienne, et d’A. m. jemenitica. Initialement, A. m. intermissa et A. m. sahariensis étaient rattachées à la lignée M mais grâce à l’analyse de l’ADNmt (Garnery et al., 1992) elles ont été rattachées à la lignée A. La zone d’expansion des abeilles de la lignée A s’étend au nord jusque dans la péninsule ibérique et en Sicile (Franck et al., 2001). Cependant, le niveau « d’africanisation » des abeilles du sud de l’Europe reste très bas (Franck et al., 2001). Par ailleurs, l’abeille du Cap A. m. capensis présente une particularité étonnante. En effet, elle est la seule race d’Apis mellifera pour laquelle les ouvrières sont capables de produire des filles diploïdes par une reproduction asexuée (Goudie et al., 2012).

a. L’abeille africaine : Apis mellifera scutellata

Des reines d’espèces africaines, Apis mellifera scutellata notamment, abeille tropicale originaire de l’Afrique de l’Est, ont été introduites au Brésil en 1956 (Kent et al., 1989) par le biais de 26 colonies (Francoy et al., 2009) dans le but d’améliorer la production de miel (Gonçalves, 2004). Dès lors, elles ont très vite colonisé l’espace tropical, notamment amazonien, où elles se sont hybridées avec les abeilles européennes des lignées M et C, mal adaptées à ces climats, donnant ce que l’on appelle « l’abeille africanisée » (Kerr, 1967). Cette abeille a progressivement remplacé les abeilles européennes (Schneider et al., 2004) de sorte que les colonies actuelles ne présentent plus désormais un ADNmt d’origine européenne, comme c’était le cas en 1968, mais un ADNmt d’origine africaine (Francoy et al., 2009). Partant du centre du Brésil, elles se sont étendues vers l’Argentine au Sud (Kerr et al., 1982) et jusqu’aux Etats-Unis au nord (vanEngelsdorp et Meixner, 2010) où elles sont arrivées en 1991 (Rinderer et al., 1993).

Photographie 17 : L’abeille africaine Apis mellifera scutellata (source : Center for Invasive Species and Ecosystem Health [en ligne]. Disponible sur : http://www.invasive.org/browse/subthumb.cfm?sub=5000

(consulté le 18/08/2016))

Outre le fait qu’elle est particulièrement adaptée à la vie en conditions tropicales, Apis mellifera scutellata présente d’autres caractéristiques potentiellement intéressantes pour l’apiculture (Francoy et al., 2009). Elle produit beaucoup de miel, a un comportement hygiénique très développé et une bonne résistance aux maladies du couvain (Francoy et al., 2009) . En revanche, elle présente d’autres traits beaucoup moins désirables. D’une part, elle est très essaimeuse (Francoy et al., 2009) mais surtout elle offre un comportement de défense très développé (Goncalves, 1974) avec une agressivité importante, bien supérieure à celle de l’abeille noire. Et cette agressivité est exacerbée pour l’abeille africanisée (Goncalves, 1974), issue de croisement avec des souches européennes, si bien qu’elle fut responsable de mortalités humaines, ce qui lui vaut l’une de ses appellations glaçante qui est « l’abeille tueuse » (Gonçalves et al., 1991). Etant assez proche morphologiquement des abeilles européennes, c’est d’ailleurs à cause de problèmes de piqûres (França et al., 1994) que le processus d’africanisation a été diagnostiqué (Francoy et al., 2008). Et cette agressivité a conduit de nombreux apiculteurs brésiliens à abandonner leurs activités (Gonçalves, 2004). Depuis, ils se sont adaptés à cette abeille et l’apiculture au Brésil s’est grandement développée.

D. La lignée C

La lignée C contient les sous-espèces de l’aire géographique d’Europe centrale et du sud, zone limitée au sud par la Méditerranée, à l’ouest par les Alpes, à l’est par les Carpates et au nord par l’Autriche et la Hongrie. C’est au sein de ce rameau qu’on trouve les très répandues A. m. ligustica et A. m. carnica. D’autres races moins connues telles A. m. cecropia, A. m. sicula ou A. m. macedonica appartiennent également à cette lignée. Dernièrement, Apis mellifera caucasica a finalement été déplacée de la lignée O à C (Özdïl et al., 2009).

a. L’abeille jaune italienne : Apis mellifera ligustica

Apis mellifera ligustica Spinola est l’abeille jaune italienne. Elle a un index cubital de 2,30, des poils plus courts qu’Apis mellifera mellifera (0,3 mm ; Tomassone et Fresnaye, 1971), une langue moyenne (6,5 mm) et la bande jaune sur le 2ème tergite mesure 1,75 mm de largeur contre seulement 0,35 pour A. m. carnica et 0,25 pour A. m. mellifera. C’est de cette coloration jaunâtre de l’abdomen que provient son nom et la confusion possible avec les guêpes.

Photographie 18 : L’abeille italienne Apis mellifera ligustica (source : COLOSS association [en ligne]. Disponible sur : http://www.coloss.org/taskforces/beebreeding/apis-mellifera-ligustica/view (consulté le

C’est une abeille appréciée des apiculteurs car elle a un caractère très doux (Franck et al., 2000). Elle est également forte productrice de miel et de couvain (Adam, 1980). Cette dernière caractéristique en fait une abeille idéale pour produire des essaims d’abeille ou de la gelée royale. Elle pond de manière importante jusque tard dans la saison y compris lorsque les réserves de provisions s’amenuisent. En fin de saison, si les conditions climatiques sont défavorables, il devient alors nécessaire de nourrir les colonies pour leur permettre de passer l’hiver. Cette production déraisonnable de couvain fait que ses détracteurs lui offrent parfois le qualificatif peu envieux « d’abeille à viande ». Son odorat est assez développé et sa production de propolis est élevée (Adam, 1980).

Grâce à tous ses traits positifs et sa capacité d’adaptation, elle serait l’abeille la plus répandue dans le monde (Franck et al., 2000). Des importations ont ainsi eu lieu en Israël (Bar-Cohen et al., 1978) et jusqu’en Australie (Oldroyd et al., 1995) et en Amérique du Nord (Woodward, 1993). Mais également en Chine, où elle a été importée entre les années 60 et 80 (Cao et al., 2016) pour optimiser la production de gelée royale. L'étude du polymorphisme de longueur (RFLP) de la région COI-COII de l'ADN mitochondrial des abeilles italiennes a montré qu’une grande partie de ces abeilles étaient en fait des hybrides entre la lignée M et la lignée C (Franck et al., 2000) tandis qu’au sud de l'Italie, les abeilles siciliennes (Apis mellifera sicula) présentent des mitotypes de la lignée A.

b. L’abeille carniolienne : Apis mellifera carnica

Apis mellifera carnica Pollmann (l’abeille carniolienne) est la sous-espèce majoritaire en Europe de l’Est, dans une zone limitée au sud par la Grèce, au Nord par l’Allemagne, à l’ouest par la Mer Adriatique et à l’est par la Mer Noire. La Carniole, dont elle tire son nom, est une région historique de la Slovénie.

Il s’agit d’une abeille avec des caractéristiques assez proches d’Apis mellifera ligustica. De couleur grise à noire (largeur de la bande jaune sur le 2ème tergite = 0,35 mm), elle est un peu plus grande que l’italienne. Elle a un index cubital de 2,6 et est assez velue (0,6 mm ;

Photographie 19 : L’abeille carniolienne Apis mellifera carnica (source : apis-mellifera-carnica.eu [en ligne]. Disponible sur : http://apis-mellifera-carnica.eu/gallery/index.php/Authentic-Apis-mellifera-

carnica/apis_mellifera_carnica_worker_bee (consulté le 19/08/2016))

Cette sous-espèce est très répandue en Allemagne. Initialement, l’abeille endémique outre-Rhin était pourtant l’abeille noire mais elle a été progressivement remplacée au profit de la carniolienne, ce qui aboutit d’abord en grande partie à des abeilles métissées issues des deux races (Moritz, 1991). Puis un programme de remplacement de cette abeille hybride par de l’abeille carniolienne pure a été mis en place. Cette dernière a donc été importée massivement il y a quelques dizaines d’années, et a presque remplacé les populations indigènes d’A. m. mellifera (Kauhausen-Keller et Keller, 1994). Le même type de processus a eu lieu au Danemark mais avec l’abeille italienne (Jensen et al., 2005). On trouve aussi l’abeille carniolienne dans le nord de la France et un peu partout dans le monde, y compris dans des lieux aussi insolites que l’île de Rodrigues dans l’Océan Indien (Techer et al., 2015) . Elle est, avec Apis mellifera ligustica, l’une des 2 abeilles les plus utilisée dans le monde (Pinto et al., 2014).

c. L’abeille caucasienne : Apis mellifera caucasica

Apis mellifera caucasica Gorbatchev (l’abeille caucasienne) est, comme son nom l’indique, originaire des montagnes du Caucase. Cette sous-espèce est assez proche de l’abeille carniolienne, des croisements entre les 2 sous-espèces sont d’ailleurs parfois utilisés en apiculture (Olszewski, 2009). C’est une abeille de couleur grise avec une pilosité moyenne (0,3 mm) et une très longue trompe (> 7 mm ; Tomassone et Fresnaye, 1971) ce qui lui confère la capacité de butiner aisément les fleurs à corolle profonde. Cette abeille est particulièrement réputée pour ses capacités de récolte de propolis (Silici et Kutluca, 2005).

E. Autres lignées

La lignée O contient les sous-espèces du Caucase, de la Turquie et du Proche-Orient, avec en particulier A. m. anatoliaca, A. m. pomonella, A. m. cypria, A. m. adami, A. m. syriaca, A. m. meda ou encore A. m. armeniaca tandis que la lignée Y est constituée par l’espèce A. m. simensis.

F. Les souches synthétiques