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PARTIE I CONTEXTUALISATION HISTORIQUE : LA PSYCHANALYSE DE

Chapitre 4 – La psychanalyse au 21 ème siècle 119 

2) Les lieux 121 

Ce qui justifie l’idée d’un renouveau de la psychanalyse à Delhi, c’est tout d’abord le constat que la thérapie freudienne a réussi à pénétrer de nouveaux lieux alors qu’elle était ultra- marginale, et presque inexistante, dans la capitale jusque dans les années 1990. La psychanalyse se déploie aujourd’hui dans plusieurs espaces, et il est utile de commencer par cartographier sa présence, avant de nous pencher sur la composition de son personnel.

A – Le Delhi Chapter of Psychoanalysis

Le Delhi Chapter of Psychoanalysis est l’organe le plus officiel de la psychanalyse à Delhi, qui dépend officiellement de la Société psychanalytique indienne de Calcutta, qui fait elle-même partie de l’Association psychanalytique internationale. Contrairement au Centre de thérapie et de recherche psychanalytiques, l’organe officiel de la psychanalyse à Mumbai, le Delhi Chapter of Psychoanalysis n‘a pas la capacité de donner officiellement le titre de psychanalyste, reconnu par l’Association psychanalytique internationale, et doit pour cela s’en remettre à la maison-mère de Calcutta. Il y a une vingtaine d’années encore, les psychothérapeutes d’orientation psychanalytique de Delhi qui voulaient être officiellement reconnus comme psychanalystes par les instances de légitimation nationale et internationale devaient se rendre à Calcutta ou à Mumbai pour y faire une analyse avec un membre affilié à la Société psychanalytique indienne, car aucun psychanalyste – à l’exception de Sudhir Kakar pendant quelques temps, avant qu’il ne déménage à Goa – n’était officiellement reconnu par ces instances de légitimation. Comme on l’a vu, Sudhir Kakar est venu s’installer à Delhi au milieu des années 1970. Il n’y avait alors qu’un seul psychanalyste en exercice dans la capitale, Shib Mitra, qui devint son contrôleur. De longues années durant, la psychanalyse est ainsi restée ultra-marginale à Delhi. Kakar s’imposa peu à peu dans les milieux intellectuels de la capitale, écrivit des livres, tint des séminaires, mais cela ne signifiait nullement que la psychanalyse « prenait » réellement. Peu à peu toutefois, un petit groupe se forma. A partir de la fin des années 1980, Kakar, désormais reconnu par les institutions de Calcutta, prit en analyse didactique plusieurs personnes (Ashok Nagpal, Vinita Kshetrapal, Madhu Sarin, etc.), qui ont toutes

aujourd’hui un rôle important dans le monde psychanalytique de Delhi (professeur à l’université d’Ambedkar, analyste contrôleur, formateur au sein du Delhi Chapter of Psychoanalysis, etc.). Aujourd’hui, cinq psychanalystes membres de la Société psychanalytique indienne exercent à Delhi, et les psychothérapeutes qui veulent entreprendre le long processus qui permet de se voir attribuer le titre officiel de psychanalyste peuvent donc faire une analyse didactique avec l’une de ces cinq psychanalystes. Ce sont toutes des femmes, qui ont entre quarante-cinq ans et soixante- cinq ans et qui ont été formées à Calcutta, à Mumbai, à Delhi – auprès de Sudhir Kakar ou des analystes qu’il a formés – ou à New York pour l’une d’entre elles. Quatorze psychothérapeutes sont actuellement en formation auprès de ces cinq psychanalystes pour devenir membres à part entière de la Société psychanalytique indienne.

Le Delhi Chapter of Psychoanalysis, créé bien des années plus tard en 2016, est donc l’organe qui prend aujourd’hui officiellement en charge la formation des candidats au titre de psychanalyste. C’est un lieu assez discret et confidentiel, auquel seuls les (futurs) membres affiliés ont accès. Alors que j’ai pu fréquenter sans problème la grande majorité des lieux où se rencontrent les psychanalystes dans la capitale (cours à l’université, conférences, journées d’étude, hôpitaux), les réunions et les séminaires de travail internes au Delhi Chapter of Psychoanalysis me sont restées inaccessibles. Cela avait également été le cas au Centre de thérapie et de recherche psychanalytiques, l’organe officiel de la psychanalyse à Mumbai, qui avait fait montre de la même réticence à laisser quelqu’un venu de l’extérieur pénétrer leur institution. Comme je l’ai déjà dit en introduction, ce sont donc les institutions tenant lieu de relais à la Société psychanalytique indienne qui ont été les plus difficilement accessibles. A Delhi comme à Mumbai, malgré mes requêtes, ces sociétés ne se sont guère laisser pénétrer, ce qui a pu poser quelques difficultés dans l’enquête ethnographique. Ces petites institutions officielles entourent d’un mur de protection le savoir qu’elles délivrent, sont très attentives aux places respectives de chacun et aux prérogatives corrélées à ces positions et ne tolère guère qu’on se situe hors des terrains balisés. La position de doctorante en sciences sociales ne correspondait à rien dans leur organisation et était pour cette raison difficilement intégrable. Le caractère assez clos de ces institutions officielles s’accompagne de la grande importance accordée, dans le monde psychanalytique indien, à la reconnaissance des institutions internationales, et en premier lieu de l’Association psychanalytique internationale. Le titre officiel de psychanalyste, durement obtenu, est souvent considéré comme un must, et les règles de l’Association psychanalytique internationale semblent scrupuleusement respectées dans la formation des futurs analystes. La motivation à devenir analyste dans les formes, en remplissant toutes les exigences de l’Association psychanalytique internationale, apparaît comme un trait

structurant de l’identité professionnelle des psychanalystes chevronnés de Delhi. Inversement, les psychanalystes qui ne sont pas reconnus par l’Association psychanalytique internationale ne sont pas autorisés, et ne s’autorisent généralement pas non plus, à se décrire comme psychanalystes. Quand je les décrivais comme psychanalystes, ils me reprenaient souvent en m’expliquant qu’ils étaient des « psychothérapeutes psychanalytiques » (psychoanalytical psychotherapists) ou des « psychologues d’orientation psychanalytique » (psychoanalytically-oriented psychologists). Dans ce travail toutefois, j’utilise le terme « psychanalyste » pour désigner tous les thérapeutes qui se revendiquent de la psychanalyse dans leur approche théorique et clinique.

B – La psychanalyse à l’université

Les tendances décrites précédemment sont bien plus fortes à Mumbai qu’à Delhi. Cela s’explique aisément : alors qu’à Mumbai, la psychanalyse n’existe qu’au sein de l’institution représentant officiellement la Société psychanalytique indienne, à Delhi, la psychanalyse est présente en bien d’autres lieux que le Delhi Chapter of Psychoanalysis, et ces autres lieux sont généralement bien plus accessibles et bien moins concernés par les questions de statut et de confidentialité. Dans la capitale, ce sont d’autres espaces que l’organe officiel du Delhi Chapter qui accueillent en priorité la vie intellectuelle des cercles psychanalytiques, et en premier lieu les espaces universitaires.

C’est au début des années 2000 que la psychanalyse commence à s’institutionnaliser dans le monde universitaire de la capitale. Jusque-là, la psychanalyse n’existait qu’à l’état embryonnaire à Delhi. Seul Sudhir Kakar pratiquait vraiment : il avait quelques patients en analyse didactique et donnait quelques séminaires. Il n’y avait toutefois aucune institution psychanalytique propre à la ville de Delhi et la psychanalyse n’était nullement incluse dans le monde de la santé mentale, pas plus que dans le monde universitaire. En 2002, Sudhir Kakar lance un projet : il a appris par des amis psychanalystes de Francfort que l’Union Européenne finance des centres de psychanalyse en Chine, à condition que ceux-ci soient intégrés à une université. Il veut faire la même chose à Delhi. Madhu Sarin, une psychanalyste formée à New-York, revient également à Delhi avec le projet de contribuer au décollage de la psychanalyse dans la capitale. A cette époque, ils sont une poignée à être très intéressés par la psychanalyse, dont trois sont reconnus comme praticiens par l’Association psychanalytique internationale. D’autres ont leurs entrées à l’université de Delhi, notamment Ashok Nagpal, qui y enseigne la psychologie. C’est ainsi qu’est créé le Centre d’études psychanalytiques

(Centre for Psychoanalytic Studies) sur le campus nord de l’université de Delhi. Le Centre accueille, de façon très informelle, des cours, des ateliers de réflexion, des conférences, qui ont lieu le soir et le week-end de préférence, de façon à ce que les professionnels de la santé mentale puissent plus facilement venir. Des cours de psychanalyse sont aussi ajoutés dans les études de master du département de psychologie. Des intellectuels indiens ayant un lien plus ou moins étroit avec la psychanalyse sont invités à donner des conférences, des psychanalystes étrangers sont conviés à partager leur expérience quand il leur arrive de voyager en Inde. Une clinique est aussi créée à l’intérieur de l’université, où les étudiants peuvent consulter un psychothérapeute pour un prix dérisoire. Se noue ainsi, dans une atmosphère que beaucoup m’ont décrite comme enthousiaste, un petit réseau de professionnels de la santé mentale, d’étudiants de psychologie et de laïcs venus d’autres univers professionnels réunis autour de leur intérêt commun pour la psychanalyse. En 2007, l’équipe de psychologues qui dirige le Centre d’études psychanalytiques à l’université de Delhi parvient à prendre la tête du département de psychologie de l’université Ambedkar, qui vient juste d’être créée. L’une des quatre universités qui proposent un enseignement de psychologie à Delhi est désormais d’orientation clairement psychanalytique. Les trois autres universités abritant un département de psychologie – l’université de Delhi, l’université Jamia Millia Islamia, l’université nationale libre Indira Gandhi – sont d’orientation cognitive et comportementale, comme la vaste majorité des départements de psychologie en Inde, avec parfois une touche de psychologie humaniste ou psychanalytique.

L’université Ambedkar est une petite université située près de Kashmere Gate, dans le nord de Delhi. C’est une université très marquée à gauche, d’une façon moins classiquement marxiste que l’université Jawarhalal Nehru – la grande université de gauche de Delhi qui, comme on l’a vu, n’a jamais regardé d’un bon œil la psychologie – et davantage influencée par les développements récents de la gauche américaine, qui pose la question des identités sexuelles, queer, raciales (et de caste en contexte indien), pense les dominations dans une logique intersectionnelle (capitalisme, patriarcat, système des castes, impérialisme) et accorde une grande importance à certains penseurs de la French Theory32. Il règne sur le campus de l’université une ambiance marquée par la volonté de créer une contre-culture et de résister aux vents réactionnaires qui soufflent sur le sous-continent depuis la montée en puissance du nationalisme hindou. Et de fait, à bien des égards, on se sent à l’université Ambedkar comme dans une bulle à l’intérieur de la société indienne, même si

32 Cette appellation regroupe un ensemble de philosophes français (Jacques Derrida, Gilles Deleuze, Michel Foucault,

Louis Althusser, Jacques Lacan, Jean Baudrillard, etc.) qui n’ont jamais fait la démarche de se constituer en courant intellectuel unifié et ont au contraire manifesté de fortes divergences théoriques. C’est leur réception dans les milieux intellectuels américains qui a fait de ces auteurs très différents un ensemble cohérent, qui s’est ensuite diffusé dans de nombreux pays, dont l’Inde (Cusset 2005).

l’actualité politique y est constamment débattue, dans les conversations informelles des étudiants étendus sur la pelouse ou assis dans des salles de classe inoccupées, dans les séminaires des différents départements, dans des conférences organisées en dehors de tout cursus ou dans les débats qui suivent des projections de films. Le campus s’étend sur un petit espace, inséré au sein d’un quartier populaire de la capitale, entre l’église catholique Saint James du 19ème siècle, des ruines d’anciennes fortifications mogholes du 17ème siècle, des artères densément peuplées et les rives de la Yamuna, où s’enchaînent des bidonvilles dont les jours sont comptés, les pouvoirs publics ayant entrepris de rénover les berges, sans grand égard pour toute la vie qui s’est développée autour. Par contraste avec le monde très dense qui l’entoure, le campus est un endroit relativement calme, laissant une large place à la verdure (image 2 et 3), abritant sur ses murs d’innombrables tags et graffitis qui invitent à rêver, à construire un monde plus juste, à résister à l’air du temps (image 4). L’ambiance présente sur le campus pousse ainsi fortement les étudiants à questionner le monde dans lequel ils vivent, et nombreux sont ceux qui témoignent du choc ressenti à leur arrivée, de l’enthousiasme qui a pu en résulter, de l’angoisse aussi qui a pu parfois naître de voir ses certitudes ébranlées de toute part.

Image 3 : Campus nord de l’université Ambedkar (crédit Anne Gagnant de Weck).

C’est donc au sein de cet environnement très stimulant intellectuellement que les psychanalystes indiens ont réussi à développer leur propre département de psychologie, qui comprend une licence,

un master, un Mphil, un doctorat et une clinique. La licence a pour but de fournir un panorama complet de la discipline. Tous les courants de la psychologie (cognitivo-comportementale, psychanalytique, humaniste, existentielle) sont abordés. Les étudiants sont initiés aux théories de la psychologie, à la psychologie clinique et à la psychologie expérimentale. La maquette de cours témoigne d’un panel très large : psychologie de l’enfant, statistiques, histoire de la psychologie, psychologie pour l’Inde, neuropsychologie, psychopathologie, études de cas, etc. De nombreux cours se proposent d’être les plus interactifs possibles et l’introduction à la psychologie clinique se fait souvent en utilisant des matériaux issus de la culture populaire, notamment des discussions autour de films. Dans cette licence, l’orientation psychanalytique n’est donc pas prédominante. La formation cherche à fournir aux étudiants une vue d’ensemble du domaine.

Image 3 : Salles de classe33.

En master, la formation devient beaucoup plus psychanalytique. Le master est accessible à tous les étudiants en possession d’une licence, quelle que soit la discipline. Le concours de recrutement pour le master de psychologie a la réputation d’être particulièrement sélectif à l’université Ambedkar. Officiellement intitulé « études cliniques psychosociales », ce master a l’ambition d’articuler l’étude des phénomènes intra-psychologiques à l’étude des ancrages sociaux des individus (familles, communautés, travail, etc.) et des phénomènes de société de façon plus vaste (politisation des identités religieuses, place des femmes, existence des pans marginalisés de la société, etc.). Un esprit interdisciplinaire est fortement mis en avant : des cours sont organisés au

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croisement de plusieurs départements (psychologie et études de genre, psychologie et sociologie, etc.) et les étudiants de psychologie sont encouragés à assister aux cours d’autres départements en fonction de leurs intérêts. La maquette fait ainsi alterner des cours de théorie ou de clinique psychanalytique avec des cours d’inspiration plus sociologique (même si le prisme psychanalytique n’est jamais abandonné). En voici quelques exemples : lire Freud ; préparation au travail clinique ; psychothérapie psychanalytique ; vivre à la marge ; famille et identité en Inde ; politique, résistance et transformation ; enfance, identité et société.

Image 4 : Graffitis sur les murs de l’université (crédit : Anne Gagnant de Weck).

On remarque ici une spécificité de l’université Ambedkar : la volonté de resituer la psychologie individuelle dans une trame sociale plus vaste et de ne pas séparer l’étude des phénomènes psychiques de la prise en compte des conditions d’existence réelles des individus – toutes choses qui sont en assez nette rupture avec ce qui se fait dans la grande majorité des départements de psychologie en Inde. De façon plus concrète, le master dure deux ans, avec un stage d’un mois dans une institution (hôpitaux et ONG essentiellement) pendant l’été qui sépare les deux années. Les étudiants doivent rédiger un mémoire la deuxième année sur un sujet de leur choix, et ils sont

encouragés à choisir une thématique qui leur parle, qui fasse écho à leur vie et qui s’inscrive dans un parcours de réflexion personnelle. Et de fait, de nombreux étudiants ont un rapport très étroit avec leur sujet et sont émotionnellement très engagés dans leur recherche. Plus globalement, les étudiants sont poussés à réfléchir sur eux-mêmes et à appliquer à leur propre vie le regard psychanalytique qui leur est enseigné, même s’ils ne sont pas obligés d’entreprendre un travail personnel, comme c’est le cas en Mphil. A l’issue d’un master de psychologie, les étudiants diplômés peuvent exercer comme « counselor » ou comme « psychologist » dans de nombreuses institutions (des ONG, des centres de réhabilitation, des entreprises, des prisons) et enseigner la psychologie dans les écoles et parfois jusqu’au niveau licence. En revanche, un certain nombre d’institutions dans le monde de la santé mentale requièrent des « psychologues accrédités » (licensed psychologists), dont le titre est reconnu par le Rehabilitation Council of India, un organisme qui s’efforce de réguler les formations et les pratiques des institutions médicales et paramédicales et délivre des accréditations aux institutions et aux professionnels qui remplissent les critères de qualité requis. Pour obtenir cette accréditation, les étudiants doivent obtenir un Mphil en psychologie, différentes sous-spécialités pouvant être proposées (psychologie clinique, psychologie des enfants et des adolescents, psychologie de la réhabilitation, etc.). Les Mphil, qui sont organisés par des institutions agréés, universitaires ou hospitalières, sont ainsi des diplômes professionnalisant de deux ou trois ans, auxquels on peut avoir accès dès lors qu’on est en possession d’un master, dans quelque discipline que ce soit. Les Mphil de psychologie sont bien plus centrés sur la clinique que les masters et comportent une part bien plus importante de stages.

L’université d’Ambedkar propose le seul Mphil de psychothérapie psychanalytique du pays. C’est un programme de trois ans, qui requiert tout d’abord des étudiants qu’ils commencent, si ce n’est déjà fait, leur travail personnel, au moins deux fois par semaine (150 à 200 séances sont nécessaires pour valider cette unité au bout des trois ans). La première année est assez théorique. Des cours de psychanalyse sont dispensés : lecture de Freud : se confronter aux états psychiques conflictuels ; perspective relationnelle et intersubjective en psychanalyse et en psychothérapie ; introduction à la psychothérapie psychanalytique en contexte indien ; idées psychanalytiques dans la culture indienne : Girendrasekhar Bose et l’imaginaire non-européen du travail psychanalytique ; genre, corps et subjectivité. D’autres cours ont pour but de préparer plus directement les étudiants au travail clinique : lecture intensive d’études de cas cliniques ; se préparer à travailler en contexte communautaire (community work) ; travailler avec la désintégration psychique : focalisation sur la psychose, les états de désintégration et d’effondrement. Bien que la psychanalyse soit indéniablement l’approche prédominante du Mphil, certains cours ont aussi pour vocation

d’enseigner les grandes lignes des autres approches thérapeutiques (cognitives et comportementales, humanistes, spirituelles, neuroscientifiques) et d’apprendre les bases d’autres méthodes (tests psychologiques ou techniques projectives), de façon à mieux appréhender le champ de la santé mentale au sens large et à être à même d’engager un dialogue avec les autres courants. Les enseignants du Mphil savent pertinemment que la grande majorité des institutions dans lesquelles leurs étudiants seront amenés à travailler n’ont pas pour habitude d’accueillir des psychothérapeutes d’orientation psychanalytique. Il s’agit donc de permettre une meilleure intégration des étudiants dans l’univers de la santé mentale, fortement tourné vers les sciences neurologiques, comportementales et cognitives. Il s’agit aussi d’apprendre aux étudiants comment mettre à profit une sensibilité analytique dans des contextes qui ne permettent nullement de déployer un cadre psychanalytique et qui favorisent d’autres approches thérapeutiques. Outre cette ouverture à d’autres orientations thérapeutiques, le dialogue est aussi fortement encouragé avec d’autres disciplines des sciences humaines (sociologie, histoire, études féministes, philosophie) ainsi qu’avec le monde des arts. Il n’est pas rare qu’un cours de psychologie s’appuie sur la lecture d’un roman ou le visionnage d’un film, dont les étudiants discutent ensuite à la lumière des théories psychanalytiques étudiées et des cas cliniques rencontrés. Un volet clinique est en effet discrètement présent dès la première année. Tout d’abord, les étudiants doivent trouver dans leur entourage ou dans une institution une mère avec son bébé, et passer quelques heures chaque semaine à observer la façon dont la mère s’occupe de son enfant. Ces observations sont ensuite discutées dans un séminaire consacré à la petite enfance et aux relations mère-enfant. Ensuite, les étudiants commencent dès la première année à travailler dans la clinique de l’université Ambedkar, Ehsaas. Au début, ils se contentent de recevoir les nouveaux patients, de faire un entretien