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a. La liberté de faire

La Charte exige que les collectivités disposent d’une liberté d’action Ŕla liberté de

faire- qui nécessite, par ailleurs, la mise en œuvre d’un certain nombre de garanties institutionnelles visant la pérennité de l’action locale.

Ainsi, l’article 6-1 de la Charte pose un principe « d’auto-organisation administrative » : « les collectivités locales doivent pouvoir définir elles-mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter, en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et afin de permettre une gestion efficace ». Les collectivités locales doivent donc être en mesure de s’agencer, de se structurer elles-mêmes. Elles s’organisent en fonction de leur

propre besoin, gouvernées par un souci d’efficacité permanent64.

L’article 10 de la Charte consacre le droit d’association des collectivités locales : « 1- Les collectivités locales ont le droit, dans l'exercice de leurs compétences, de coopérer et, dans le cadre de la loi, de s'associer avec d'autres collectivités locales pour la réalisation de tâches d'intérêt commun.

64Le rapport explicatif souligne qu’il est possible au niveau central (ou même régional quand il existe un

pouvoir législatif à cet échelon) de fixer des critères généraux venant orienter cette organisation - lorsqu’il s’agit de prescriptions spécifiques touchant la composition de certaines commissions ou la création de certains postes administratifs -. Toutefois, ces dispositions devront être limitées de manière à ne pas imposer un cadre d’organisation trop rigide, effaçant de fait cette liberté d’auto-organisation.

2- Le droit des collectivités locales d'adhérer à une association pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs et celui d'adhérer à une association internationale de collectivités locales doivent être reconnus dans chaque Etat.

3- Les collectivités locales peuvent, dans des conditions éventuellement prévues par la loi, coopérer avec les collectivités d'autres Etats ».

Les collectivités locales, pour la réalisation de projets communs, peuvent décider de coopérer, dès lors que ces projets relèvent de leurs compétences. Le projet en question qui ne peut être réalisé par une collectivité locale seule, trouve sa résolution dans l’association de différentes collectivités. Toutefois, le passage d’une simple coopération à une association peut exiger la création d’un syndicat, d’une fédération de collectivités locales, etc. Et la loi peut alors fixer un cadre juridique à la création de tels organismes65. Plus complexe est la question de l’association internationale des collectivités. Ici, les objectifs partagés par les autorités locales sont plus larges que le seul partage d’intérêts communs et empiètent sur le domaine des relations internationales, domaine éminemment politique qui

relève des affaires d’Etat ! Le rapport explicatif de la Charte rappelle alors qu’« à partir du

moment que l’Etat reconnait à ses collectivités locales le droit de s’associer entre-elles au niveau national, ce droit est étendu à l’association internationale de collectivités locales ». Ce qui n’est pas toujours partagé par les Etats. Enfin, les questions relatives à la coopération entre collectivités de plusieurs Etats, la Charte est en cohérence avec une autre convention, la Convention cadre européenne sur la coopération transfrontalière, dite Convention de Madrid qui pose un cadre juridique spécifique à la coopération entre les

collectivités locales des Etats partis à la Convention66.

65 En France, la loi du 22 mars 1890 qui a créé les syndicats de communes, a généré dans son sillon d’autres

formes de coopération intercommunale. Au 1er janvier 2007, la France ne comptait pas moins de 14 communautés urbaines, 169 communautés d’agglomération, 2400 communautés de communes, 5 syndicats d’agglomération nouvelle, regroupant 33 414 communes pour un total de 41 769 617 personnes. Source : Ministère de l’Intérieur, direction générale des collectivités locales.

66 Le Conseil de l’Europe a adopté le 21 mai 1980 (STE n°106) à Madrid, une convention cadre européenne

sur la coopération transfrontalière des collectivités locales ou autorités territoriales. Selon l’article 2 de cette convention : « Est considérée comme coopération transfrontalière, au sens de la présente Convention, toute concertation visant à renforcer et à développer les rapports de voisinage entre collectivités ou autorités territoriales relevant de deux ou plusieurs Parties contractantes, ainsi que la conclusion des accords et des arrangements utiles à cette fin. La coopération transfrontalière s'exercera dans le cadre des compétences des collectivités ou autorités territoriales, telles qu'elles sont définies par le droit interne. L'étendue et la nature de ces compétences ne sont pas affectées par la présente Convention ».

Enfin, cette liberté d’action rend compte d’une chose : les collectivités locales agissent dans le cadre strictement défini de leurs compétences. Le principe de la légalité des

compétences de base des collectivités locales apparait à l’article 4 §.1 de la Charte : « Les

compétences de base67 des collectivités locales sont fixées par la Constitution ou par la loi. Toutefois, cette disposition n'empêche pas l'attribution aux collectivités locales de compétences à des fins spécifiques, conformément à la loi ». Cette clarification assure sécurité et lisibilité ; et l’exercice de ces compétences entraine l’application d’un autre principe : celui de l’exercice des responsabilités publiques qui incombent aux autorités les plus proches du citoyens. Ce principe a été notamment affirmé en 1977, dans les conclusions de la Conférence des ministres européens responsables des collectivités locales

à Lisbonne : « Ce principe implique que, sauf si l'ampleur ou la nature de la tâche est telle

qu'elle exige d'être remplie dans une entité territoriale plus vaste, et en l'absence de considérations impératives d'efficacité ou d'économie, les tâches doivent normalement être confiées à l'échelon le plus local des collectivités territoriales. Cette clause n'implique toutefois pas la nécessité de décentraliser systématiquement les fonctions à celles des collectivités locales qui, du fait de leur nature et de leur taille, ne peuvent se charger que de missions limitées »68.

Il énonce également une version du principe de subsidiarité69. Les compétences

attribuées données aux collectivités sont pleines et exclusives70 ; toutefois, il est permis

qu’une autorité supérieure (centrale ou régionale) puisse intervenir, en complément de l’action basée sur la compétence de la collectivité, dans la mesure où ces actions

67 L’article 4 de la Charte distingue les compétences de base des compétences spécifiques. Les compétences

de base sont fixées de préférence au niveau constitutionnel ; ou à défaut par la loi. Toutefois, il est toujours possible que les collectivités locales se voient confier d’autres compétences spécifiques, du moment qu’elles restent conformes à la loi.

68 Voir rapport explicatif de la Charte, op.cit.

69 L’attribution de compétences pleines et entières à une collectivité ne signifie pas pour autant que la

collectivité locale se voit attribuer la totalité d’une compétence et prive l’échelon supérieur de toute intervention.

70 Article 4-4 : Les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et

entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi. Par ailleurs le §.6 de l’article 4 pose plus généralement un principe de consultation des collectivités chaque fois que des décisions ou des planifications touchent directement à des questions qui les concernent. Selon le rapport explicatif de la Charte : cette consultation doit se faire directement avec la ou les collectivités concernées ou, dans le cas où plusieurs collectivités sont concernées, indirectement par l’intermédiaire de leurs associations.

complémentaires sont conformes aux dispositions législatives qui ne souffrent d’aucune ambigüité.

Enfin, dans le cas des délégations de pouvoirs aux collectivités locales, il faut veiller à ce que les pouvoirs délégués laissent, autant que possible, un certain libre arbitre aux collectivités afin d’adapter l’exercice de ces pouvoirs délégués à la situation locale. Toutefois, la nécessité de respecter une réglementation uniforme sur le territoire nationale exige, dans certaines circonstances, ou pour l’exercice de certaines fonctions, de ne laisser aucun pouvoir discrétionnaire à la collectivité : par exemple, dans les cas de délivrance de papiers d’identité.

A coté de cette « liberté de faire », la Charte mentionne l’exigence de moyens nécessaires à l’accomplissement de ces libertés.