• Aucun résultat trouvé

Les stratégies mobilisées lors de la pratique scripturale

LE PLURILINGUISME ET LA PRATIQUE SCRIPTURALE

4. Les stratégies mobilisées lors de la pratique scripturale

Comme nous l’avons déjà souligné, dès que l’écrit est valorisé, les études menées à ce propos ont montré que les processus mis en œuvre lors de la rédaction dans la langue étrangère sont identiques à ceux dans la langue maternelle, d’où la nécessité de s’intéresser beaucoup plus aux processus de bas-niveau qui relèvent de la grammaire, du lexique et d’orthographe. Ainsi, Dr. Saliha Ameure-Amokrane, dans son article intitulé " Apprentissage de

l’écriture en contexte plurilingue : problèmes liés à l’acquisition de l’orthographe", affirme que :

" Les processus d’écriture sont similaires en langue maternelle et en langue seconde […]. C’est ce qui fait dire […] que dans l’enseignement de l’écrit en langue étrangère l’accent devrait être mis « essentiellement sur la langue et cette fonction première de l’écrit qu’est

la transcription "(2009 :72).

De même que pour Chérifa GHATAS, cité par Louise Dabène, qui souligne, à travers une expérience menée auprès d’apprenants algériens âgés de 5-7 ans, voulant apprendre l’arabe standard8, l’existence de trois stratégies susceptibles de rendre compte de la façon par laquelle l’apprenant apprend une langue étrangère (1998 :245).

Ainsi, selon la même auteure, ces stratégies sont les suivantes : -Stratégie de continuité:

Elle concerne les apprenants qui se trouvent au début du parcours d'apprentissage. En effet, ces derniers n'arrivent pas à établir une coupure

Chapitre n° 2 : Le plurilinguisme et la pratique scripturale

entre la (les) langue (s) qu'ils ont déjà acquise (s) et la langue cible à acquérir car le répertoire langagier avec lequel ils arrivent ne leur permet pas de communiquer en langue cible dans toutes les situations de communication. Confrontés alors à des difficultés pour s'exprimer, ils font recours à leur bagage linguistique déjà assimilé pour répondre aux insuffisances ressenties par eux.

Le recours à ce potentiel acquisitionnel se manifeste du point de vue

syntaxique lorsqu'ils exploitent des structures syntaxiques déjà assimilées

même celles qui ne correspondent pas au système linguistique dans lequel ils produisent, du point de vue lexical en faisant recours au vocabulaire précédemment acquis, et du point de vue orthographique lorsque ces derniers ne respectent pas les règles du système graphique propre à cette nouvelle langue. Le recours à cette stratégie par les apprenants se fait inconsciemment (Ibid : 245).

-Stratégie de substitution :

Arrivant à certain âge, et si les conditions le permettent, l'apprenant commence à prendre conscience de l'existence des différences entre les langues en présence dans son répertoire plurilingue. Il procède alors par substitution de toute forme linguistique appartenant à la (aux) langue (s) déjà acquise (s) par des formes appartenant à la langue cible. Dans le cas où l'apprenant fait inconsciemment recours à la (aux) langue (s) déjà acquise (s), ce dernier s'auto-corrige instantanément ou ce sont ses camarades qui s'impliquent et l'aident à remédier aux formes linguistiques jugées déviantes par rapport à la langue cible. Durant la substitution, et comme il ne maîtrise pas encore tous les faits de la langue cible, il procède par tâtonnement, ce qui donne lieu à des formes erronées d'une part, et réussir d'autres formes, de l'autre (Ibid : 246).

Chapitre n° 2 : Le plurilinguisme et la pratique scripturale

-Stratégie d'enfermement:

Ici, l'apprenant tente d'éviter tout ce qui relève de son potentiel linguistique déjà acquis et s'enfermer dans les structures que lui offre la nouvelle langue. Plus il avance dans l'âge, plus il assimile de nouvelles connaissances sur la langue cible, plus les formes jugées erronées disparaissent de ses productions (Ibidem).

D’après tout ce qui a été dit, nous pouvons résumer les différentes stratégies9 auxquelles recourt un apprenant de langue étrangère comme suivant :

4.1. Influence des langues acquises/apprises antérieurement

Dans la mesure où l’apprenant ne part pas d’un terrain vierge, l’ensemble des connaissances déclaratives mais aussi procédurales acquises préalablement intervient dans le processus d’apprentissage d’une langue étrangère. Autrement dit, l’apprenant transfère ce qu’il a appris ou acquis vers la langue cible. Si le transfert est positif, cela donne lieu à des formes linguistiques correctes. Si le transfert est négatif, cela donne lieu à des erreurs (résultats des interférences établies).

A côté du recours inconscient à la (aux) langue (s) acquise (s) ou apprise (s) au préalable d’où les interférences, l’apprenant, pour communiquer, produit d’abord l’énoncé en langue source, puis il le traduit mot à mot en langue cible (Analyse des erreurs : 18).

4.2. Le processus d’apprentissage

A côté des connaissances déjà acquises, l’apprenant repose aussi sur le processus d’apprentissage pour avancer. En d’autres termes, lorsque les techniques et les méthodes d’enseignement sont efficaces (par le biais d’une

9 Stratégie : est l’ensemble des méthodes et des démarches que dispose un apprenant pour gérer les échanges asymétriques et pour apprendre. Autrement dit, la stratégie désigne l’ensemble des étapes

Chapitre n° 2 : Le plurilinguisme et la pratique scripturale

correspondance entre le contenu à enseigner et le temps consacré, conformité entre ce contenu et les capacités d’assimilation, pédagogie efficace), cela permet de produire des formes linguistiques réussies.

Dans le sens inverse, et selon Richards, cité par Lounis Nehaoua dans son article intitulé "Les idiosyncrasies scolaires dans l’apprentissage d’une

langue étrangère", l’apprenant va procéder à :

- des surgénéralisation des faits linguistiques :

Ici, quand l’apprenant n’arrive pas à faire la différence entre certains faits linguistiques, il généralise la règle sur tous les éléments de la langue cible, ce qui le conduit à produire des énoncés déviants par rapport à la norme.

-l’ignorance des règles restrictives :

Ici, l’apprenant recourt à cette stratégie quand il ne maitrise pas suffisamment toutes les règles de la langue cible, y compris les cas exceptionnels.

-l’application incomplète des règles de la langue :

Ici, comme l’apprenant ne peut pas assimiler toutes les règles de la langue cible à un moment donné, il arrive qu’il commet des erreurs qui dépassent sa compétence acquise. Autrement dit, il utilise une règle apprise dans un contexte où elle ne s’applique pas.

-la réduction de redondance :

Ici, en essayant d’éviter la répétition, l’apprenant omet des éléments de la phrase dont leur existence est obligatoire, ce qui va donner naissance à des erreurs.

4.3. La surélaboration :

La situation d’insécurité linguistique dans laquelle peut se trouver l’apprenant conduit ce dernier, dans la plupart des cas, à commettre des erreurs. En effet, en essayant de trop bien dire, il se trompe. Par exemple, au

Chapitre n° 2 : Le plurilinguisme et la pratique scripturale

4.4. Stratégies de communication :

La nature des stratégies de communication qu’un enseignant peut appliquer en classe affecte positivement ou négativement la qualité des énoncés produits : écrits ou oraux, d’où les formes linguistiques conformes à la norme ou les erreurs inadéquates au système de la langue cible (Analyse des erreurs : 20).

4.5. Surcharge cognitive :

Lorsque l’apprenant se trouve dans une situation de surcharge cognitive, cela le mène à appliquer inconsciemment les règles de la langue cible, ce qui fait, dans la plupart des cas, qu’il commet des erreurs (c’est ce que nous avons tenté d’éclairer dans le premier chapitre).

4.6. Emission des hypothèses :

L’établissement des relations entre les différentes langues qui existent dans le répertoire plurilingue des apprenants fait que ce dernier, dans certains cas, ne sait pas comment il doit tirer profit de ses acquis antérieurs. Alors, il procède à l’émission des hypothèses pour répondre aux exigences de la situation d’apprentissage, ces hypothèses peuvent donner naissance soit à des formes linguistiques jugées justes (en faisant appel à des universaux linguistiques : les points communs entre les langues), soit à des erreurs (surtout dans le cas des langues génétiquement éloignées comme le français et l’arabe, par exemple).

Conclusion

Pour conclure, nous disons que l’ensemble des langues apprises/acquises par un plurilingue de même que pour les représentations et les attitudes qu’il peut avoir à propos de ces langues jouent un rôle très important dans le processus d’apprentissage de nouvelles langues. Tout dépend de la façon par laquelle tous les acteurs de l’enseignement/apprentissage des langues

Chapitre n° 2 : Le plurilinguisme et la pratique scripturale

appréhendent et gèrent ces facteurs, d’où la réussite ou l’échec dans la langue cible.

Chapitre n° 3 : L’erreur

CHAPITRE N° 3