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Section 2: Le niveau de capitalisation : le nœud de la solidité bancaire

I. 2.3- Les données utilisées

II.2- Les recommandations pour une politique bancaire efficace

L’objectif de cette thèse est d’évaluer l’apport des autres variables individuelles et macroéconomiques à la relation qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire. Certains des indicateurs individuels et macroéconomiques exercent des effets différents sur la solidité des banques de la CEMAC. Les différentes estimations nous amènent à faire des recommandations pour les trois principales remarques.

Premièrement, nous remarquons que la solidité des banques est dynamique et dans toutes les estimations il existe une relation positive et significative entre l’ensemble des ratios du capital (FPTA et FPTCR) et le Z-score. Les banques qui ont un ratio du capital plus important présentent une solidité plus élevée. Ce résultat est en conformité avec les résultats des études réalisées par Solhi et Mehdi (2012) sur un panel constitué des banques des pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord. Il corrobore également les résultats obtenus par

Camara (2010) qui montrent que les ratios du capital réglementaire pondéré du risque contribuent à réduire le risque de défaillance des banques européennes. Pour ce faire, il s’avère nécessaire pour les institutions de régulation sous-régionales des banques des pays d’Afrique comme la COBAC d’élever le niveau du ratio du capital minimum, afin d’améliorer la solidité des banques de la sous-région. Pour ce qui est des banques, elles ne doivent pas chercher à avoir un niveau très élevé du total de dépôts sur le total actif, car cela indique que le niveau du capital ou de fonds propres est faible, c’est-à-dire une faible solvabilité. C’est vrai que le niveau de capitalisation élevée d’une banque (surcapitalisée), nous amène à la considérer comme robuste, mais cette banque peut montrer une préférence pour le risque. En effet, si l’excès de capitalisation de cette banque provoque un sentiment de sécurité chez les dirigeants, ces derniers choisiront des stratégies plus risquées (Saadaoui, 2010).

Deuxièmement, lorsqu’on prend individuellement les différents indicateurs, on ne constate pas d’effet significatif dans les différentes relations établies entre la solidité bancaire et les indicateurs individuels et macroéconomiques. De plus, la relation préétablie entre les ratios des fonds propres et le Z-score est restée presque stable (relation significative au seuil de 1% avec des coefficients maintenus autour de 4,2 pour le ratio fonds propres sur total des actifs et 0,28 pour le ratio fonds propres sur total des crédits bruts). Ceci nous amène à dire que, l’application d’une politique prudentielle qui prend en considération individuellement ces éléments ne pourra pas améliorer la solidité des banques. S’agissant des effets des variables macroéconomiques, il ressort de nos estimations que le taux de croissance du PIB et le taux d’inflation n’ont aucun effet sur la solidité des banques dans la CEMAC. Ce résultat ne confirme pas celui de Dannon et Lobez (2014) qui constatent que dans l’UEMOA les taux de croissance élevés sont associés à un risque de défaillance bancaire plus faible. Ceci peut être expliqué par la frilosité des banques de cette sous-région. Le manque de diversification au niveau des sources de rendement des banques de la sous-région, engendre une domination des commissions sur une large partie des profits réalisés. Pour Saadaoui (2010), cette situation de dépendance des banques à l’égard des activités d’intermédiation traditionnelles peut être due à la faiblesse des activités des marchés financiers qui constituent une source, alternative et plus fructueuse de revenus. Il est donc important de résoudre le problème d’asymétrie d’information afin de stimuler les activités de crédit et des marchés financiers. En effet, en période de croissance, l’amélioration des revenus des agents économiques

augmente leur capacité à honorer leurs engagements et les banques choisissent les actifs les moins risqués.

Troisièmement, nous remarquons qu’il y a une amélioration de la solidité bancaire lorsque tous les indicateurs du type CAMEL sont pris en compte simultanément. On a le même résultat lorsqu’on ajoute à ces indicateurs les indicateurs macroéconomiques. Cette amélioration de la solidité des banques proviendrait d’une gouvernance prudente, qui se manifeste à travers le provisionnement des créances. Dans nos estimations 9 et 10, on constate que la variable PROETCR est significative au seuil de 5% avec des coefficients positifs. Il ressort donc de ces estimations que la gouvernance bancaire contribue à la solidité de la banque à condition que les autres indicateurs internes soient pris en considération.

Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons évalué empiriquement si la prise en compte des autres indicateurs internes et externes amplifie ou modère la contribution du niveau de capitalisation à la solidité bancaire dans la CEMAC. Nous avons utilisé les données de panel pour 41 banques reparties dans quatre pays de la CEMAC (Cameroun, Congo, Gabon et Tchad) sur la période allant de 2000 à 2013. Les données utilisées sont extraites du système CERBER de la COBAC. Pour apprécier les influences individuelles et groupées, nous avons procédé à l’estimation de notre modèle en deux étapes.

Dans la première étape, plusieurs estimations du modèle dynamique de panels ont été considérées afin d’apprécier l’impact individuel de chaque groupe des variables sur la relation qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire. Nous avons d’abord défini le modèle de base avec les variables liées au niveau de capitalisation. Ensuite, nous avons estimé plusieurs équations en injectant les variables par groupe dans le modèle de base. Nos résultats pour cette première étape montrent que la prise en considération individuelle des différents indicateurs CAMEL et macroéconomiques, n’amplifie pas la contribution des exigences en fonds propres à la solidité bancaire. Cependant, pris individuellement ces indicateurs permettent de stabiliser la relation qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire.

Dans la seconde étape, nous élargissons notre analyse à l’ensemble des indicateurs. Nous avons procédé à l’estimation des équations imbriquées afin d’analyser les effets des groupes des variables pris simultanément. Nous effectuons cette étude pour les banques de la

CEMAC avec le même échantillon que celui de l’étape précédente. Nous constatons que lorsqu’on tient compte de toutes les variables CAMEL dans une politique d’exigence des fonds propres, il y a une amélioration de la solidité. En effet, non seulement la relation de base reste significative au seuil de 1%, la bonne gouvernance représentée par la capacité à provisionner les créances douteuses contribue à améliorer la solidité bancaire au seuil de 5%. Cette relation reste stable lorsqu’on ajoute les indicateurs macroéconomiques.

Les résultats de notre étude mettent en évidence l’importance de la prise en considération de la plupart du contour de la banque pour l’amélioration de la solidité bancaire tout en stabilisant la contribution du niveau de capitalisation. Les résultats des estimations des équations imbriquées qui font apparaître l’importance des provisions existantes sur le total de crédits bruts, vont dans le sens de la mise en œuvre d’une régulation contra-cyclique de la capitalisation bancaire dans la CEMAC. Les résultats de nos analyses confirment la nécessité d’une mise œuvre contextualisée de la réglementation prudentielle définie par les accords de Bâle III.

Conclusion deuxième partie

Dans cette deuxième partie de notre travail, nous poursuivons avec l’examen des différentes relations existantes entre les exigences réglementaires et la solidité des banques. Dans cette partie l’attention est portée sur la contribution du niveau de capitalisation à la solidité bancaire. Théoriquement, il est établi avec les accords de Bâle que le niveau de capitalisation à partir d’un seuil bien défini améliore la solidité bancaire. Si on considère que la relation qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire est positive, il se pose donc la question de son amplification. C’est la raison pour laquelle, nous avons essayé d’apporter une réponse à la question de savoir : quels sont les effets des indicateurs individuels et macroéconomiques sur la relation qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire notamment dans la CEMAC ?

Nous avons entamé le troisième chapitre par une réflexion sur la définition des fonds propres. Il nous a semblé important de revenir sur le concept des fonds propres avant de ressortir les différentes relations qui existent entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire. Il ressort de la revue de littérature que le concept de capitalisation est dynamique. En plus, on constate que la définition des fonds propres dépend du contexte. C’est pour cette raison que la définition des fonds propres dans la CEMAC n’est pas la même chose qu’en Europe. En effet, chaque régulateur tient compte des spécificités de son économie. Ainsi, tout en reprenant à son compte les fondamentaux définis par le Comité de Bâle, chaque organe de supervision définit sa réglementation.

Après avoir levé l’équivoque sur la définition du concept des fonds propres, nous avons exploré la littérature pour ressortir les différentes relations qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire. Au vu de la littérature l’influence de la capitalisation sur la solidité à travers la prise de risque reste controversée. En effet, certains auteurs (Artus, 1991 ; Kim et Santomero, 1988 ; Shrieves et Dahl, 1992) montrent que l’exigence en matière de capitalisation a un effet négatif sur la solidité des banques. Pour eux les exigences en matière de fonds propres peuvent avoir pour conséquence l’augmentation de la prise des risques. Par contre certains auteurs (Miskhin et al., 2010) qui défendent l’idéologie du Comité de Bâle, pensent que le débat devrait plutôt porter sur le niveau de capitalisation et non sur le sens de la relation. Pour les auteurs de ce courant de pensée, la capitalisation améliore la solidité bancaire. C’est cette idéologie qui est appliquée dans la CEMAC. C’est pour cette raison que nous considérons qu’il existe une relation positive entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire dans la CEMAC.

Cette relation établie, nous avons procédé dans le quatrième chapitre à l’évaluation empirique des effets de la prise en compte de certaines variables internes à la banque et les variables macroéconomiques dans les différentes estimations de cette relation. Nous avons utilisé des données de panel pour 41 banques dans un modèle dynamique pour la période 2000-2013. Nous avons procédé à l’estimation de notre modèle en deux étapes.

Premièrement, nous avons cherché à apprécier l’impact individuel de chaque groupe des variables de contrôle sur la relation qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire. Nous avons estimé plusieurs équations en injectant les variables de contrôle groupe par groupe dans le modèle de base. Nous n’avons pas constaté un effet amplificateur ou modérateur pour cette première étape. En effet, la prise en compte individuelle des indicateurs CAMEL et des indicateurs macroéconomiques, n’améliore pas la contribution du niveau de capitalisation à la solidité bancaire. Cependant, ces indicateurs jouent un rôle stabilisateur de la relation qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire.

Deuxièmement nous avons apprécié l’effet collectif des variables de contrôle. Pour cela, nous avons procédé à l’estimation des équations imbriquées qui nous permettent d’analyser les effets des groupes des variables pris simultanément. Le premier constat qu’on dégage de ces estimations est l’importance de la prise en compte simultanée de l’aspect interne de la banque pour une politique d’exigence en fonds propres efficace. Ensuite, la prise en considération de l’aspect macroéconomique permet de stabiliser cette relation. C’est pour cette raison qu’il est recommandé aux autorités monétaires de la CEMAC de prendre en considération l’aspect interne de la banque et le cadre macroéconomique pour toute politique d’exigence des fonds propres.

Conclusion générale

Compte tenu des exigences de capitalisation et de qualité d’actif, l’objectif de notre thèse est d’analyser la solidité bancaire dans la CEMAC. Pour y arriver, nous avons retenu deux principaux axes de recherches. Nous avons d’une part étudié les effets des variables individuelles et macroéconomiques sur la relation préétablie entre la qualité du portefeuille de crédits et la solidité bancaires, et d’autre part les effets de ces variables sur la relation qui existe entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire. Pour ce faire, nous avons scindé le travail en deux parties. Dans la première partie, nous avons porté notre attention sur l’analyse de la relation qui existe entre la qualité du portefeuille de crédits et la solidité bancaire. La deuxième partie s’est portée sur l’importance de la prise en compte des variables individuelles et macroéconomiques sur le lien qu’il y a entre le niveau de capitalisation et la solidité bancaire.

Comme il est établi par plusieurs auteurs dans la littérature, le risque de crédit est le principal risque de défaillance des banques. Les prêts non performants sont la conséquence d’une prise de risque de crédit par la banque. Dans la CEMAC, en dépit des efforts déployés depuis les années 90 pour assainir le secteur bancaire, le taux des crédits non performants demeure élevé. Avec un taux des créances douteuses d’environ 7,22 % en 2011, la qualité du portefeuille de crédits des banques de la communauté s’est de plus dégradée en 2013 avec une hausse de 48 % des créances en souffrance par rapport à 2012 (COBAC, 2013). Ce taux envoie un signal sur la qualité du portefeuille de crédits des banques de la sous-région. L’estimation de notre modèle de base montre que l’augmentation des créances douteuses détériore la solidité des banques. Pour cela, il semble important de chercher les facteurs modérateurs de cette influence. C’est ainsi que, nous avons dans la première partie de notre thèse tenté d’apporter des éléments de réponse à la question suivante : quels sont les effets des variables individuelles et macroéconomiques sur la relation qui existe entre la qualité du portefeuille de crédits et la solidité bancaire dans la CEMAC ?

Pour une meilleure connaissance de la qualité du portefeuille de crédits, nous nous sommes intéressés à la littérature théorique et empirique traitant de ce sujet. L’importance de la qualité des actifs pour la banque n’est plus à démontrer. En effet, la qualité du portefeuille de crédits d’une banque est dépendante de la qualité de ses actifs, c’est-à-dire de ses débiteurs. Ainsi, nous avons étudié dans le premier chapitre la nécessité pour les banques d’avoir des débiteurs sains. Nous avons mobilisé certaines théories (la théorie du signal, les

contrats incitatifs et la théorie du compte chèque) permettant à la banque de distinguer les débiteurs sains des autres débiteurs. En effet, le phénomène d’asymétrie d’information expliqué par Akerlof (1970) est à l’origine de la distinction entre les mauvais emprunteurs et les bons emprunteurs dans le secteur bancaire. Dans un contexte d’asymétrie d’information Spence (1973) développe la théorie du signal pour déterminer les éléments permettant d’envoyer un signal sur la qualité du demandeur d’emploi. Nous avons mobilisé cette théorie dans le cadre du marché bancaire, pour sa double utilisation. D’une part elle permet aux banquiers de distinguer les bons emprunteurs des mauvais emprunteurs et d’autre part elle peut être utilisée par les emprunteurs pour signaler la qualité de leurs signatures. Pour résoudre le problème d’information, Cherif (1999) pense qu’il faut développer non seulement des techniques de décodage du signal par les banquiers, mais les techniques de signalisation permettant aux emprunteurs d’envoyer les bonnes informations aux banques. Pour ce faire, nous avons développé des éléments qui permettent de connaître la nature de l’emprunteur : la capacité financière de l’emprunteur, le statut juridique du débiteur, la situation fiscale du débiteur et le secteur d’activité du débiteur. Eber (2001) considère la banque comme une structure multi – produits, il suppose qu’elle a l'avantage de gérer les comptes de ses clients. La théorie du compte du chèque développée par des auteurs comme Fama (1985), suppose que l’emprunteur est en même temps un déposant. La banque peut donc se servir du suivi des mouvements du compte de son client pour tirer en continue d’informations sur les capacités à rembourser de ce client. Ainsi, elle peut apprécier le degré d’aversion pour le risque d’un client en observant les mouvements de son compte. Vilanova (1997) soutient que la relation de compte courant établie entre la banque et son client, permet à la banque d'obtenir de l'information gratuite. En plus, les banquiers peuvent utiliser d’autres techniques pour extraire l’information sur la qualité de leurs emprunteurs.

Parmi les variables qui déterminent l’offre de crédit par la banque il y a le taux d’intérêt. Les banques en voulant se couvrir contre les risques, fixent leurs taux d’intérêt en tenant compte de la probabilité du défaut des emprunteurs. Pour Stiglitz et Weiss (1981), l’évolution du rendement de la banque en fonction du taux d’intérêt suit une courbe en cloche. En effet, si la banque se focalise seulement sur le taux d’intérêt pour distinguer les différents emprunteurs, elle va atteindre un niveau maximum du taux d’intérêt au-dessus du quel son rendement ne s’accroît plus. A ce niveau la banque pour éviter la dégradation de la qualité de son portefeuille, finit par rationner les crédits. La banque peut aussi utiliser le contrat incitatif pour réduire l’asymétrie d’information (Diamond, 1984). Le contrat incitatif

permet à la banque de distinguer les mauvais emprunteurs des bons dans une relation de long terme. La banque peut aussi utiliser l’apport personnel comme moyen de distinction des débiteurs. En effet, la volonté d’investir dans son projet envoie un signal important par rapport à la qualité du projet (Leland et Pyle, 1977). Pour Ross (1977), la structure financière de l’entreprise envoie un signal qui permet à la banque de déterminer la qualité de cette entreprise. Le banquier peut s’appuyer sur tous ces éléments pour avoir un portefeuille de crédits de bonne qualité. Abdou (2002) pense que la qualité des crédits est importante à plus d’un titre pour les autorités monétaires.

L’évaluation de la solidité d’une banque ne doit pas se limiter à la capacité de cette institution à faire face aux chocs défavorables, il faut identifier les facteurs qui peuvent influencer l’équilibre de cette banque. C’est ainsi que dans la littérature plusieurs auteurs considèrent que les facteurs qui dégradent la qualité du portefeuille de crédits d’une banque agissent négativement sur la solidité de cette dernière. Cette relation étant établie, nous nous sommes intéressés dans le deuxième chapitre de ce travail à l’évaluation empirique des effets de certains facteurs internes et externes à la banque sur l’influence de la qualité du portefeuille de crédits.

Pour l’évaluation empirique des effets des différents indicateurs individuels et macroéconomiques, nous avons utilisé l’indicateur Z-score pour appréhender la solidité bancaire. En fait, le Z-score contient toute l’information concernant la santé financière de la banque. Il est constitué d’une composante qui tient compte de la performance de la banque ajustée du risque et d’une autre composante portant sur la couverture du risque du portefeuille de crédits par les fonds propres. Nous avons présenté dans la suite les différents indicateurs internes de la banque et les indicateurs macroéconomiques, avant d’exposer les différents liens qui existent entre la qualité du portefeuille de crédits et la solidité bancaire. Ceci, nous a permis de spécifier un modèle économétrique que nous avons estimé sur un panel de 41

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