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Section 1 : La théorie du signal : la détection des emprunteurs de bonne qualité une condition de solidité bancaire

I- Le phénomène de l’asymétrie d’information : des conflits d’intérêt à la solidité bancaire

I.2- L’état de l’asymétrie d’information dans le milieu bancaire africain

Les analyses des asymétries d'information sur le marché du crédit représentent un enjeu considérable. Sur ce marché, les débiteurs empruntent aux banques la monnaie nécessaire pour leurs transactions. En effet, les banques jouent un rôle essentiel dans le financement de l’économie et doivent, de ce fait, sélectionner et contrôler les emprunteurs. Grâce à leurs aptitudes à apprécier les niveaux des risques, les banques sont au centre du mécanisme qui permet l'allocation efficace du capital au niveau macroéconomique.

Cependant elles peuvent se tromper et ne pas pouvoir réduire les asymétries d'information qu’elles subissent17

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Les difficultés à maîtriser le risque de défaut des emprunteurs peuvent conduire à un échec sur le marché de crédit. En effet, la banque, intermédiaire financier rapproche les bilans des déposants aux bilans des emprunteurs en allouant les avoirs des déposants aux besoins des emprunteurs. Ainsi, le cycle crédit-dépôt-crédit peut être interrompu, lorsque les emprunteurs ne remboursent pas, surtout si cela est doublé d’une volonté manifeste de retrait des déposants et/ou une insuffisance des fonds pour le financement des emprunteurs. D’après Diatkine (2002), les banques ne peuvent pas savoir à priori, si elles sont en situation de sélection adverse, et qu’elles financent les mauvais emprunteurs lorsqu'elles octroient un crédit. De plus, il est couteux pour une banque de contrôler l’usage que fera l'emprunteur de son financement. Les banques peuvent établir des contrats qui réduisent ces asymétries d'information par leur capacité à évaluer et sélectionner les emprunteurs, ainsi qu'à assurer le suivi des remboursements, et par la mise en place de mécanismes de contrôle.

Selon Cherif (1999), parmi tous les projets qui sont à la recherche d’un financement externe, seuls quelques-uns présentent un intérêt réel. La banque doit donc effectuer une analyse des projets pour distinguer les bons projets des mauvais. Pour atténuer les effets des problèmes d’asymétrie informationnelle, la banque peut accroître ses exigences de rentabilité en alignant celles-ci sur la qualité moyenne des projets à la recherche de financement. Ceci va entraîner une augmentation des coûts de financement pour les emprunteurs ayant des projets porteurs, ce qui peut les amener à abandonner la recherche des capitaux extérieurs pour ne laisser sur le marché du crédit que les projets de moindre qualité.

La délégation à la banque de la surveillance des emprunteurs par les prêteurs individuels (c’est-à-dire les déposants) n’est pas exempte du risque moral qui peut être encouru par ceux qui font de la finance directe. En effet, la banque peut être décrite dans la relation déposant – emprunteur, comme le siège de l'articulation de deux relations d'agence : l'une provenant du contrat de dépôt entre les déposants (les prêteurs individuels) et la banque et l'autre induite par le contrat de crédit entre la banque et l'emprunteur.

Concernant le contrat de crédit, les conflits d’intérêt peuvent surgir après que le financement ait été accordé. Ainsi, les emprunteurs peuvent engager des dépenses inutiles au

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En effet, pour Couppey et Madiès (1997), il existe deux types d’asymétrie d’information au niveau de la banque. Il y a l’asymétrie d’information au bénéfice de la banque et l’asymétrie d’information au détriment de cette dernière.

développement du projet financé, et diminuer de la sorte les montants disponibles pour rembourser la banque. Le potentiel de ce type de conflit est particulièrement élevé dans le cas des emprunteurs engagés dans des start-ups. Cette situation dite d’aléa moral provient de l’asymétrie d’information propre au contrat, lorsque la banque ne peut pas contrôler les agissements de l’emprunteur (Cherif, 1999). Cependant, on peut supposer que le rôle des banques envisagé par Diamond (1984) est limité aux relations avec les petites et moyennes entreprises relativement peu connues. Les grandes entreprises quant à elles, préfèrent la finance directe, car elles sont connues des prêteurs. De plus, ces entreprises peuvent fournir des garanties qui diminuent le risque moral ou se financer grâce à leurs profits qu’elles réinvestissent.

La mission principale de la banque est le financement de l’économie, mais le paysage bancaire en Afrique et particulièrement dans la CEMAC est caractérisé par une faible activité de crédits. Dans cette communauté, la structure des crédits consacre la prépondérance du court terme et du moyen terme. La proportion des crédits de long terme dans l’encours total des crédits sains en 2013 est d’environ 4 %. En effet, malgré toutes les reformes entreprises dans cette communauté depuis les années 90, les crédits à court et à moyen terme restent majoritaires, avec environ 64,7 % de l’encours des crédits sains octroyés à l’économie pour l’année 201318

. Cette faible activité de crédits peut être justifiée par un problème de diffusion de l’information (asymétrie d’information), un environnement institutionnel inadéquat et un système judicaire inefficace (Soupmo Badjio, 2009). En effet, le secteur bancaire de cette communauté est vulnérable au risque de crédit, car certaines banques de la CEMAC sont faiblement capitalisées19, et leur exposition au risque concerne peu de secteurs et d’emprunteurs. En effet, sur 50 banques en activité dans la CEMAC à la fin 2013, il y a onze banques sous-capitalisées (COBAC, 2013) contre sept banques sous-capitalisées sur 43 banques analysées par la COBAC en 2010. De plus, le cadre juridique dans cette sous-région n’est pas favorable au recouvrement des créances, d’où la réticence des institutions bancaires à l’octroi de crédit.

En faisant allusion à l’environnement institutionnel, nous parlons des organismes et des réglementations qui dans les pays en développement n’influencent pas trop l’asymétrie

18 Confère le rapport annuel 2013 de la COBAC, p.30

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Dans le cadre de cette étude, nous considérons qu’une banque est capitalisée lorsqu’elle dispose d’un montant de fonds propres qui couvre au moins 8 % de la valeur de ses actifs pondérés de leurs risques. Ainsi, une banque est faiblement capitalisée, lorsqu’elle a un ratio fonds propres sur total actifs inférieur à 8%.

d’information. En plus, cet environnement ne favorise pas une large diffusion de l’information. C’est pourquoi, Soupmo Badjio (2009) n’est pas surpris du fait que les variables mesurant la qualité des crédits octroyés par les banques ne soient pas statistiquement significatives pour un modèle de prédiction de difficultés bancaires en Afrique Centrale.

I.3- De l’asymétrie d’information à la solidité bancaire en passant par la qualité de

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