• Aucun résultat trouvé

A la lum ière de l’ensem ble des considérations théoriques précédentes, il est possible d ’affirm er que la PG RO se veut un effort de décloisonnem ent du cham p introjecté visant à perm ettre à l’individu de retrouver sa vitalité, sa créativité et sa flexibilité dans ses interactions avec l’environnem ent (D elisle, 1998). C ’est surtout le traitem ent du cycle de reproduction des im passes de contact, à travers les différents cham ps de l’expérience spatio-tem porelle du client (voir le tableau 2) et par un dialogue herm éneutique im pliquant la co-construction du sens de l’expérience de ce dernier, qui rend possible l’atteinte de ce changem ent (D elisle, 1998). L ’identification d ’un dilem m e de contact par le thérapeute pourrait en quelque sorte être considérée comm e le début de sa participation à cette dém arche de co-construction de sens. Bien que les objectifs thérapeutiques ne puissent être définis q u ’en étroite collaboration avec chaque client, à partir du vécu, des problém atiques et des besoins spécifiques de chacun, nous pouvons affirm er que la visée fondam entale de la PG RO concerne la reconstruction d ’un S e lf unifié (D elisle, 1998). C ela im plique d ’aider le client à passer du m ode chronicisé d ’ajustem ent conservateur tel q u ’il se m anifeste dans les troubles de la personnalité vers un m ode de fonctionnem ent où la conscience du sens de l’expérience perm et davantage d ’ajustem ents créateurs dans le cham p (D elisle, 1998). Bien entendu, les objectifs spécifiques de la thérapie seront plus ou m oins am bitieux selon le type de personnalité du client, la nature des m icrocham ps introjectés qui subsistent dans le Self, la sévérité de sa pathologie, la qualité de ses ressources, etc. N ous allons ici survoler quelques procédures, propres à la PG RO , qui sont m ises au service de l’atteinte de ces objectifs.

Les champs expérientiels et les transitions interchamps. Si la G estalt-thérapie a été avant tout fondée et centrée presq u ’exclusivem ent sur « l’ici et m aintenant », la PG RO s ’en dém arque en reconnaissant les autres espaces-tem ps de l’expérience hum aine et de l’interaction thérapeutique (D elisle, 2004). Bien entendu, « l’ ici et m aintenant » est doté d ’un avantage particulier, en ce sens q u ’il perm et au thérapeute une observation et une participation directes du déploiem ent des cycles de contact et des im passes q u ’ils contiennent. A ux notions d ’espace et de tem ps, D elisle (1998, 2004) ajoute toutefois les dim ensions interne et externe, pour créer une grille de huit cham ps spatio-tem porels et expérientiels en psychothérapie, telle que présentée dans le tableau suivant :

Tableau 2

Les huit champs de la psychothérapie (Delisle, 2004) Niveau externe

La phénom énologie du

contact observable dans le cham p. (E)

Niveau interne

Les représentations de Soi

e t de l’A utre. (I)

Ici

/

maintenant (1) Le contact thérapeutique

im m édiat, observable par une personne raisonnable et de bonne foi.

Les représentations internes de la relation thérapeutique im m édiate.

Ici/ pas maintenant (2) Un événem ent ou une

séquence passée de la

relation thérapeutique qui aurait pu être observée par un tiers raisonnable et de bonne foi.

Les représentations internes de la relation thérapeutique à un m om ent du passé.

Ailleurs/ maintenant (3) Les contacts et les relations

significatives de la vie

courante du client, tels

q u ’ils pourraient être

observés par un tiers

raisonnable et de bonne foi.

Les représentations internes de relations significatives contem poraines.

Ailleurs

/

pas maintenant Les contacts et les relations Les relations internes de

(4) significatives du passé du

client, en particulier celles de l’enfance, tels q u ’ils pourraient être observés par un tiers raisonnable et de bonne foi.

relations significatives du passé.

Dans les pathologies de la personnalité, la personne est souvent incapable de traiter son expérience à travers ces différents cham ps. Elle peut par exem ple nier la réalité de sa vie psychique, être envahie par celle-ci au point de perdre de vue ce qui se passe dans le cham p externe ou encore ne pas voir le rapport entre les différents cham ps de son expérience, ce qui fait largem ent obstacle à la possibilité de com prendre le sens de ce q u ’elle m et en place et déplore (Delisle, 2004). D ans ce contexte, le travail du thérapeute im plique d ’aider le client à élargir sa capacité de conscience face aux im passes q u ’il tend à reproduire dans les différents dom aines de sa vie. Pour ce faire, il doit pouvoir inviter le client dans l’exploration de son expérience à travers les différents cham ps spatio-tem porels et expérientiels décrits précédem m ent. Ce travail d ’identification des affinités thém atiques intercham ps constitue un m oyen privilégié pour m ettre en lum ière les reproductions d ’im passes liées aux trois grands enjeux développem entaux et nourrir la réflexion du thérapeute quant aux dilem m es de contact qui sous-tendent ces reproductions. Il im porte ici de rappeler une nuance fondam entale, tant pour la bonne com préhension du concept de dilem m e de contact qui est au cœ ur de notre réflexion que du processus thérapeutique en PG RO : si, dans une théorie du cham p, le passé n ’est pas nié, il faut toutefois préciser que ce n ’est pas tant le passé historique qui est en cause que le passé tel q u ’il agit dans la configuration actuelle du cham p (D elisle, 2004). A insi, le thérapeute ne cherche ni à expliquer la pathologie du client à partir d ’événem ents du passé, ni à résoudre quelque chose qui s ’est produit dans le passé. 11 cherche avant tout à dissoudre quelque chose, qui trouve son écho dans le dilem m e de contact et tend à se reproduire chroniquem ent dans la vie du client à travers les relations significatives q u ’il

entretient, incluant la relation thérapeutique. C ette dernière est celle qui est privilégiée, car elle est la seule à laquelle a directem ent accès le thérapeute.

L ’identification projective selon la PGRO. La PG RO fait une utilisation singulière du concept d ’identification projective. En s ’inspirant des travaux de Tansey et B urke

(1989), D elisle (1993, 2004) propose une intégration particulière et

épistém ologiquem ent cohérente avec une position existentielle hum aniste, de l’utilisation du concept d ’indentification projective. Pour Tansey et Burke (1989), et par extension pour la PG RO , le processus d ’identification projective n ’est pas strictem ent pathologique ni purem ent d ’essence intrapsychique. Il nous accom pagne toute notre vie et constitue l’un des fondem ents du développem ent d ’un moi intégré. Il agit donc constam m ent au sein de la relation thérapeutique, où il est vu com m e le m ode de transm ission inconsciente de représentations de soi et d ’objet. La PG R O conçoit l’identification projective de m anière concordante avec les travaux de Schore (2003a, 2003b) : selon lui, l’identification projective est une stratégie précoce, inconsciente et organisatrice, visant à réguler les com m unications de cerveau droit à cerveau droit, en particulier celles qui com portent des états affectifs intenses : l’identification projective est en som m e une form e de com m unication. Par ce phénom ène, le client com m unique au thérapeute un état interne et des représentations de soi et de l’autre. N ous pourrions aussi dire q u ’il com m unique au thérapeute l’essence de son dilem m e de contact. En général, ces représentations et ces états internes sont inconscients et contribuent aux difficultés vécues par le client : c ’est pourquoi ils ne peuvent être com m uniqués que de façon

im plicite du client au thérapeute, dans un effort pour résoudre un conflit interne. Le client projette donc des affects et des représentations de soi et de l’autre sur la personne du thérapeute. Or, pour que l’identification projective réussisse, il faut q u ’elle trouve son écho dans une identification introjective de la part du thérapeute (D elisle, 1993, 2001, 2004) Celui-ci, abordant la relation dans une disposition em pathique, reçoit com m e autant d ’identifications introjectives les identifications projectives du client. Elles sont reçues soit en m ode concordant (entendre ici un parallèle affectif de l’état du client tel que vécu par le thérapeute) soit en m ode com plém entaire (expérience où la représentation de soi du thérapeute se trouve à correspondre à l’une des représentations d ’objet du client). Le rôle du thérapeute est de transform er et de m étaboliser l ’identification introjective en une réponse adaptative qui sera ensuite com m uniquée et réintrojectée par le client, opérant à son tour en m ode identificatoire introjectif. C ’est ce q u ’on appelle le traitem ent em pathique de l’identification projective (D elisle, 1993, 2001, 2004). Cette dém arche de traitem ent de l’identification projective représente l’une des voies im portantes pouvant perm ettre de m ettre à jo u r le dilem m e de contact du client : elle aide le thérapeute à poser des inférences, qui devront bien sûr être co- construites avec le client, m ais qui représentent la prem ière source d ’inform ation pouvant m ener à la form ulation du dilem m e de contact.

En som m e, parm i tout le m atériel clinique q u ’il est pertinent de recueillir, le thérapeute en PG RO porte une attention particulière aux im passes de contact susceptibles de se reproduire dans les différents cham ps spatio-tem porels et il cherche à

m ettre à jo u r la nature des représentations de soi et de l’autre du client qui se trouvent liées à ces im passes. D ans la relation thérapeutique, il observe la m anière particulière dont son client utilise ses différents m odes de régulation et d ’adaptation au contact pour m aintenir ses ajustem ents conservateurs. 11 tente de repérer des indices qui tém oignent du cham p introjecté du client, notam m ent en repérant les dissonances entre l’expression et l’expérience, et il se m ontre sensible à la tendance du client à transposer, d ’un cham p spatio-tem porel à l’autre, des expériences inachevées (D elisle, 1998). À partir du m atériel ainsi recueilli dans le contact avec son client et travers le traitem ent q u ’il fait de l’identification projective, il organise sa dém arche réflexive à l’aide de la grille de diagnostic structural (C1G, 2002) et cherche à préciser le dilem m e de contact de son client. Il soum et les hypothèses étiologiques qui en découlent au processus herm éneutique de création de sens en collaboration avec son client.