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L’analyse qualitative à l’aide des catégories conceptualisantes

N otre question de recherche nous m ène à nous dem ander si, chez des thérapeutes pratiquant à partir du m odèle de la PG RO et qui acceptent d ’élaborer sur l’histoire de l’un de leurs clients, il serait possible de trouver des élém ents se rapportant à chacune de des catégories que nous avons form é en s ’inspirant des travaux de Karasu (1992, 1995). N ous cherchons ainsi à en arriver à proposer une nouvelle form ulation au dilem m e de contact, davantage opérationnelle pour les thérapeutes dans leur dém arche diagnostique

et d ’assim ilation du m odèle en PGRO. Cette question de recherche coïncide avec l’am orce du cœ ur de notre dém arche : puisqu’elle nous oriente vers l’utilisation de catégories déjà identifiées, les configurations dyadiques, triadiques, conflictuelles et déficitaires proposées par Karasu (1992, 1995), notre parcours rom pt avec la dém arche d ’une analyse par théorisation ancrée telle que proposée par Paillé (1994). En effet, plutôt que de poursuivre nos efforts de théorisation en analysant un corpus, extraits de nos observations cliniques, par le biais des étapes se rapportant habituellem ent à la dém arche propre à la théorisation ancrée (p. ex., la codification, la catégorisation, la m ise en relation, l’intégration, la m odélisation et la théorisation), nous nous orientons vers une dém arche davantage inspirée par l’analyse qualitative à l’aide des catégories conceptualisantes, telle que définie par Paillé et M ucchielli (2005). 11 s ’agit d ’une m éthode perm ettant de poser les fondem ents d ’une théorisation, dès la prem ière analyse du m atériel à l’étude, par le biais de la catégorie : un outil d ’analyse défini com m e «une production textuelle se présentant sous la form e d ’une brève expression et perm ettant de dénom m er un phénom ène perceptible à travers une lecture conceptuelle d ’un m atériau de recherche» (Paillé & M uchielli, 2005, p. 147). A u-delà de la sim ple analyse du contenu des données, la catégorie réfère à un phénom ène et im plique l’attribution de sens du m atériau analysé (Paillé & M uchielli, 2005). Elle dépasse donc le caractère statique d ’autres outils de désignation et perm et de rendre com pte, de m anière dynam ique, précise et em piriquem ent fondée, d ’une partie de la com plexité d ’un phénom ène ou d ’une suite d ’événem ents (Paillé & M uchielli, 2005). L ’analyse qualitative à l’aide des catégories conceptualisantes offre l’avantage de la flexibilité et

peut s’appliquer à tout type de m atériau d ’enquête. Bien que les auteurs précisent en quoi cette m éthode d ’analyse ne se résum e pas à la sim ple reconduction de notions pré­ identifiées, Paillé et M uchielli (2005) décrivent com m ent elle perm et la «déduction interprétative» : il s ’agit d ’une dém arche visant la création du sens du m atériel à l’étude à partir de catégories fondées sur la base d ’élém ents théoriques déjà constitués.

Pour com prendre le choix de cette m éthode, nous devons revenir à nos objectifs et au type de m atériel avec lequel nous travaillons. En ce sens, nous nous intéressons au concept de dilem m e de contact en PG RO et souhaitons lui proposer une nouvelle form ulation. C ’est donc dire que nous voulons contribuer à la théorisation du phénom ène étudié : nous retrouvons ici le prem ier o b jectif fondam ental de l’analyse qualitative à l’aide des catégories conceptualisantes, telle que définie p ar Paillé et M ucchielli (2005). Ensuite, le m atériel que nous étudions se rapporte à des élém ents théoriques déjà constitués et ce, à partir de catégories : c ’est là l’essence m êm e de l’analyse qualitative à l’aide des catégories conceptualisantes. Puisque le choix d ’une m éthode découle de l’objet de recherche en cause, le fait que notre dém arche concerne un concept (la notion de dilem m e de contact en PGRO) auquel nous souhaitons fournir des apports théoriques (une nouvelle form ulation) à partir de catégories (les notions de conflit, déficit, dyadique et triadique) ju stifie le recours à l’analyse qualitative à l’aide des catégories conceptualisantes.

N otre but ultim e est d ’aider de je u n e s cliniciens ou des thérapeutes soucieux de s ’initier au m odèle de la PG RO à repérer et com m encer à donner du sens, dans le cadre de la dém arche diagnostique propre à ce m odèle (le diagnostic structural, incluant la notion de dilem m e de contact), à ce qui sem ble le plus saillant dans les reproductions m ises en place par des clients aux prises avec un trouble de la personnalité. Pour ce faire, nous croyons q u ’il importe de fournir au concept de dilem m e de contact une nouvelle form ulation, capable de m ieux rendre com pte de certaines dim ensions de la pathogenèse. Le recours à nos catégories (les contextes conflictuels et déficitaires, dyadiques et triadiques), inspirées de travaux de Karasu (1992, 1995) nous sem ble un m oyen approprié d ’y parvenir. Or, dans une telle dém arche et tel que nous le rappellent Paillé et M ucchielli (2005), une catégorie n ’est pas nécessairem ent une entité autonom e qui doit être repérée avec précision : nom m er une catégorie est souvent un exercice artificiel, rendu nécessaire pour des raisons d ’organisation de l’inform ation et qui représente un acte de ferm eture, c'est-à-dire l’apposition d ’un concept sur une observation. En ce sens, la catégorie se trouve souvent à être plus étroite que les réalités dont elle cherche à rendre com pte et ce fait trouve sa résonnance dans l’exercice visant le repérage d ’une catégorie ou la codification d ’élém ents à l’intérieur de catégories. A insi, l’esprit de notre dém arche ne concerne pas avant tout un exercice d ’élaboration de catégories étanches : notre l’o b jectif ultim e n ’est donc pas la définition de catégories m utuellem ent exclusives, dotées de critères d ’inclusion ou d ’exclusion ferm es ou capables d ’assurer la précision des observations de différents juges qui chercheraient à en repérer les occurrences. Paillé et M ucchielli (2005) affirm ent que si un analyste

cherche à générer des catégories riches, bien définies, pouvant être cernées et reconnues sans am bigüité, en revanche, il n ’y a pas d ’obligation de perform ance en la m atière. Selon eux, l’analyse qualitative représente un travail de construction signifiante, fait à partir d ’approxim ations successives. Une dém arche de catégorisation peut ainsi être com parée à une session de photographie : il ne suffit pas de bien viser le sujet car, d ’une pose à l’autre, l ’angle, la distance et l’éclairage pourront être différents. A insi, bien que certaines prises puissent être plus ou m oins claires ou com plètes que d ’autres, il n ’y en a toutefois pas de vraies ou de fausses. C ’est donc dire que la variabilité à travers l’exercice n ’est pas un problèm e m ajeur et c ’est pourquoi il devient secondaire de chercher à la lim iter à tout prix. Dans cette perspective, la com ptabilisation de l’occurrence des catégories dans chaque étude de cas ne représente pas une fin en soi, m ais plutôt le processus par lequel nous cherchons à éclairer notre question de recherche. L ’utilisation de nos catégories et notre dém arche de codification vise certes à apporter une contribution significative à notre o b jectif de reform ulation du concept de dilem m e de contact. Toutefois, tel que nous le rappellent Paillé et M ucchielli (2005), cette contribution va naître de l’articulation de l’ensem ble de nos catégories et non de la som m e des catégories prises une à une. C onform ém ent à l’esprit des m éthodes qualitatives, nous avons voulu perm ettre aux sujets de nous présenter leurs données à partir de leur vision propre. D ans un tel contexte, il ne faut pas lim iter l’authenticité de l’analyse ou réduire la possibilité de com pléter l’effort de théorisation en visant une codification à tout prix reproductible : bien avant d ’être un exercice d ’étiquetage rigoureux, la codification représente surtout l’articulation d ’une conceptualisation en

action et où se rencontrent données em piriques, référents théoriques, etc. (Paillé & M ucchielli, 2005).

En som m e, à la lum ière des étapes prélim inaires à travers lesquelles notre réflexion a trouvé son am orce, l’analyse des données recueillies prendra la form e d ’une analyse qualitative à l’aide des catégories conceptualisantes, telle que définie par Paillé et M ucchielli (2005). Les catégories analysées seront créés à partir du m odèle de K arasu (1992, 1995), notam m ent à partir des distinctions que fait cet auteur entre les relations prim aires « dyadiques » et « triadiques » et en différenciant les situations se rapportant à des « conflits » de ceux propres à des « déficits ». La séquence développem entale débutant par les interactions dyadiques entre une m ère et son enfant et évoluant graduellem ent vers les interactions triadiques entre les deux parents et leur enfant est m ise en lien avec deux principaux types de configurations relationnelles pathogènes : d ’une part, ceux où le contact essentiel du jeu n e enfant avec ses figures d ’attachem ents est aussi porteur d ’une expérience inassim ilable et récurrente (les situations conflictuelles, im pliquant la rencontre sim ultanée de l’indispensable et de l’intolérable telles que définies par le dilem m e de contact en PG RO ). D ’autre part, ceux où le contact entre le jeu n e enfant et ses figures d ’attachem ent im plique que les élém ents qui se veulent nécessaires à la com plétion des différents enjeux développem entaux s ’avèrent absents (les situations déficitaires, im pliquant l’inaccessibilité de l’indispensable). Il devient alors possible de développer une taxonom ie en définissant quatre catégories pour

notre analyse : les contextes dyadiques déficitaires, les contextes dyadiques conflictuels, les contextes triadiques déficitaires et les contextes triadiques conflictuels.

Le récit de différents thérapeutes, portant sur leur com préhension du sens et de l’origine du trouble de la personnalité de l’un de leurs clients et des m anifestations de ce trouble au sein de différentes relations contem poraines incluant la relation thérapeutique, fera l’objet d ’une analyse basée sur les catégories suivantes : les contextes dyadiques déficitaires, les contextes dyadiques conflictuels, les contextes triadiques déficitaires et les contextes triadiques conflictuels. Pour préciser les critères d ’inclusion et d ’exclusion se rapportant à ces catégories, en plus des balises proposée par K arasu (1992, 1995) telles que nous les avons définies précédem m ent, un résum é des repères concernant les élém ents suivants est fourni à l’appendice 2 pour chacune des catégories : le type d ’environnem ent et d ’interactions se rapportant à un tel contexte développem ental ; les im pacts attendus de ceux-ci sur le développem ent de l’enfant ; le portrait clinique type d ’un adulte ayant grandi dans un tel contexte.