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Chapitre 2 Le réseau territorialisé : les proximités

3.2 Les relations entre firmes

3.2.2 Les partenariats

Lors de la fixation de la stratégie de l entreprise, le dirigeant est amené à prendre la

décision entre faire-faire externaliser ou s allier. Pour cela, il lui faut identifier les

activités qui sont vitales pour la survie de l organisation. Ce sont ces activités, liées à leur

cœur de métier et/ou les activités qui rapportent plus de valeur, que les entreprises

auront tendance à internaliser, alors que les activités considérées comme étant

résiduelles pourront être éventuellement sous-traitées. De toute façon, pour s adapter à

l environnement, le dirigeant peut faire appel à plusieurs stratégies

d externalisation « faire-faire, acheter ou s allier » (Quélin, 2003, p. 14).

Selon leur décision d externaliser certaines tâches ou de centraliser les

investissement dans les activités clés, les entreprises « multiplient les connexions hors

marché, aussi bien verticales, avec leurs fournisseurs et leurs clients, qu horizontales à

travers les alliances avec leurs concurrents pour partager les coûts et les risques de

l innovation, des coalitions professionnelles pour imposer des standards techniques, ou des

partenariats avec des organisations non marchandes » (Edouard et alii, 2004, p. 9).

D après la littérature sur les relations dans un réseau industriel, le donneur d ordre

est représenté par la figure du client, celui qui passe les commandes à l entreprise

chargée de fabriquer, soit le produit, soit une partie de ce produit. La sous-traitance peut

aussi se faire sur les services fournis.

3.2.2.1 La sous-traitance

Le terme sous-traitance « qualifie les opérations concernant une ou plusieurs

opérations de conception, d élaboration, de fabrication, de mise en œuvre ou de

maintenance de produit, dont une entreprise dite donneur d ordres confie la réalisation à

une autre entreprise dite sous-traitant, tenue de se conformer exactement aux directives ou

spécifications techniques que ce donneur d ordre arrête en dernier ressort » (Genthon,

2000, p. 13).

Cette responsabilité varie pourtant selon le type de relation de sous-traitance. Dans

un premier cas, s agissant d un achat traditionnel (sur catalogue), le producteur est le

seul responsable des produits et/ou services fournis. Dans un deuxième cas, celui de la

sous-traitance par contrat, o‘ le donneur d ordre indique ses spécifications techniques,

c est ce dernier qui assume la responsabilité (Baudry, 2004). Le secteur automobile tient

compte de cette différence lorsqu il fait la distinction entre la catégorie de sous-traitants

(1er type) et celle des équipementiers (2ème type).

Baudry (2005, p. 100) a élaboré une classification des firmes sous-traitantes. Il

nomme « sous-traitant/concepteur » ou « sous-traitant/fournisseur », le premier

vendeur, celui qui se trouve en situation de quasi intégration avec la firme pivot. C est le

cas, par exemple, du secteur de l automobile, o‘ l équipementier (fournisseur direct) est

responsable de la qualité des produits livrés au donneur d ordre ainsi que de la tâche de

conception de nouveaux produits, même s il travaille en étroite collaboration avec les

équipes de constructeurs. L équipementier peut devenir à son tour un donneur d ordre

lorsqu il fait faire une partie de sa production par d autres entreprises, qui se situent

ainsi au deuxième rang de la sous-traitance.

Nous retrouvons, parmi ces dernières, les entreprises qui sont en situation de quasi

intégration verticale avec le fournisseur sous-traitant de premier rang. Ces entreprises

suivent un cahier des charges très rigoureux, détaillant toutes les procédures pour la

fabrication du produit. Bien que n étant pas responsables de la conception du produit, il

se peut qu elles aient un bureau d études pour la recherche et développement. Elles

peuvent faire également l objet d un contrôle strict par leurs donneurs d ordre directs.

Toujours selon Baudry (2005), il peut éventuellement y avoir une troisième

catégorie de sous-traitants, constitués de producteurs travaillant à la commande et

réalisant des tâches avec peu de valeur ajoutée, dans le cadre classique de la

sous-traitance de capacité.

Une classification des relations de sous-traitance dans un contexte industriel montre

la présence, d un côté, d une entreprise donneur d ordre le client et, de l autre côté,

d un prestataire de services le sous-traitant . Nous avons vu également, qu une même

entreprise peut exercer à la fois le rôle de sous-traitant et de donneur d ordre. C est le

cas, par exemple, de la fabrication d un produit complexe avec plusieurs composantes

interdépendantes) qui implique la participation de plusieurs entreprises.

La littérature sur les relations entre clients et fournisseurs soulève deux principaux

types de partenariat.

Tableau 12. Une typologie de partenariat

Quasi marché (relations transactionnelles durables) Quasi hiérarchies (partenariats stratégiques) Caractéristiques du produit Produits standardisés Faible niveau d interdépendance Produits personnalisés Niveau élevé d interdépendance

Pratiques du partenariat Assistance minimal (faible investissement dans le partage de connaissances inter-firmes)

Des précautions

contractuelles sont suffisantes

pour l entente de l accord

Assistance solide (fort investissement dans le partage de connaissances inter-firmes)

La performance des parties est composée par des éléments non contractuels (innovation, qualité, réactivité, etc.) Source : Adapté de Dyer et alii (1998, p. 72)

Ce tableau distingue les prestataires entre, d une part, ceux qui fournissent des

produits pas ou peu spécialisés, de base, ce qui caractérise une simple relation

transactionnelle et, d autre part, ceux qui fournissent des produits plus complexes et

adaptés à leurs clients dans une approche collaborative.

Le tableau montre également que la décision d externaliser dépend de l importance

de l activité pour le fonctionnement de l entreprise. C est-à-dire que celle-ci ne sera pas

disposée à externaliser les activités à la base d un avantage concurrentiel, ni celles dont

la performance interne est faible. Ces dernières peuvent toucher des domaines allant de

la gestion de la logistique à la R&D.

En général, l externalisation des activités stratégiques est basée sur des contrats à

long terme. Cela est vrai car un « contrat de sous-traitance classique comporte une série

de clauses sur le transfert du personnel et la cession des actifs, les moyens mis en œuvre, la

productivité et la performance » (Quélin, 2003, p. 18). Coase (1997) précise « qu il devient

beaucoup moins nécessaire de spécifier des prix pour chacune des transactions réalisées,

car il suffit d un contrat à long terme pour remplacer une série de contrats à court terme ».

Outre la dimension contractuelle de ce type de partenariat, les relations entre le

client et le prestataire, établies à long terme, impliquent une économie des coûts de

transaction pour chacune des parties. En plus, une transaction de ce type pourrait

réduire les coûts liés à l opportunisme des acteurs Williamson, dans un

environnement incertain. En outre, plus la relation entre les deux parties perdure, plus

la substitution du partenaire devient coûteuse (Baudry, 1993).

Il se peut que les relations de sous-traitance entre le donneur d ordre et le

prestataire ne soient pas toujours réglementées par un contrat. Cela arrive, en général,

dans le cas de la sous-traitance de tâches peu qualifiées. En l absence d un contrat, le

sous-traitant peut alors se trouver dans une position d infériorité face au donneur

d ordre et de ce fait subir des contraintes diverses et variées Azevedo, . Face à

leur situation de domination, ces sous-traitants tendent à privilégier des contacts

personnels et de longue durée avec les donneurs d ordre afin de se protéger des

comportements opportunistes de la part des industriels.

Enfin, le sous-traitant est au cœur d un noyau de relations qui caractérisent un

réseau. Toutefois, ces relations peuvent évoluer vers des partenariats, tels que les

alliances stratégiques établies entre les entreprises, afin de développer la coopération et

réduire ainsi les risques.

3.2.2.2 Les alliances stratégiques

Les alliances stratégiques sont devenues aujourd hui un moyen pour les entreprises

de se développer tout en réduisant les risques potentiels qu'implique un échange. Les

organisations alliées s engagent dans un accord de coopération afin de poursuivre des

objectifs communs ou pour résoudre des problèmes communs dans le cadre dune

relation durable. L alliance stratégique est constituée par un groupe de firmes insérées

volontairement dans des arrangements de partage ou de co-développement de produits,

technologies ou services (Gulati, 1998).

Todeva et Knoke (2005) indiquent différents types de coopération entre les

entreprises. Les alliances varient selon la forme, la structure ou la stratégie adoptée par

les parties, comme le montre le tableau ci-dessous. )l est à noter qu elles peuvent aussi

se baser sur des contrats formels ou simplement sur des liens informels fondés sur des

rapports de confiance entre les partenaires. Dans le tableau suivant, nous retrouvons les

principaux types d alliances stratégiques.

Tableau 13. Types d'alliances stratégiques

Type d’alliances stratégiques Caractéristiques

Relations hiérarchiques Par le biais d acquisitions ou de fusions, une entreprise prend le contrôle total de l actif et des actions de l autre en

coordination avec le mécanisme des droits et de propriété. Joint-ventures Deux ou plusieurs entreprises créent une organisation

juridique en copropriété qui sert un objectif limité pour

l entreprise mère, telle que la recherche et le

développement ou le marketing.

Investissements de capital Acquisitions de fonds d intérêts par une seule entreprise par le biais d un achat direct des parts dans une entreprise. Coopératives Une coalition de petites entreprises qui combinent la

coordination et la gestion de leurs ressources de façon collective.

Consortium de recherche et développement

Les accords interentreprises pour développer la recherche et le développement, généralement ils se forment dans les

industries de forte évolution technologique. Accords de coopération

stratégique

Contrats basés sur la jonction de plusieurs parties de contrôle stratégique avec la collaboration de partenaires clés pour la prise de décisions stratégiques et le partage de responsabilités en matière de performance.

Cartels La collusion de grandes entreprises pour limiter la concurrence par le biais de la coopération avec le contrôle de la production et/ou prix dans une structure spécifique. Franchising Un franchiseur accorde une franchise pour l utilisation

d une marque dans une zone géographique mais celui-ci conserve le contrôle des prix, le marketing et le service des normes standardisées.

Licence Une entreprise accorde à une autre le droit d utiliser ces

technologies brevetées ou des procédés de production en échange de redevances (royalties et d autres taxes.

Réseaux de sous-traitance Des entreprises liées par un sous-traitant qui négocie les prix, la production et les délais de livraison à long terme. Groupe de standards industriels Comités qui visent les entreprises qui réalisent des accords

organisationnels, en vue de l adoption de normes techniques pour la production et le commerce.

Jeux d’actions Coalitions d entreprises de courte durée dont les membres

coordonnent leurs efforts de pressions (lobbying) pour

influencer l élaboration de politiques publiques.

Relations de marché Principe de la pleine concurrence (la condition ou le fait que les parties à une transaction sont indépendants et sur

un pied d égalité entre les entreprises, coordonnées

seulement par les mécanismes de prix. Source : Adapté de Todeva et Knoke (2005, p.124)

L incertitude des marchés et leur degré de complexité incitant les entreprises à

innover constituent un facteur de motivation à la création d alliances stratégiques. La

coopération devient fondamentale pour la pérennité des entreprises. Le type d alliance

varie pourtant selon l objet d échange, du type de savoir-faire en jeu, de la durée

d engagement entre les acteurs, etc. D autres éléments sont aussi pris en compte dans

impliqués, la durée et les clauses du contrat, les types de ressources échangées, les

coûts, entre autres.

Remarquons que les relations entre les membres du réseau sont également

marquées par l influence de certains acteurs possédant plus de pouvoir que d autres,

cette disparité de pouvoir instituant une hiérarchie entre les parties et, par conséquent,

des conditions inégales d échange, comme on le verra par la suite.