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Une série récente de crises a affecté l industrie locale. D abord, la crise de à la

suite de laquelle et jusqu aux années , l industrie du décolletage a connu une hausse

très importante des volumes des chiffres d affaires suivie d une relative stagnation avec

des pics d activités en 2007 et début 2008 (SNDEC, 2012). Toute de suite après, encore

en 2008, la forte crise mondiale frappant notamment le secteur automobile a eu des

conséquences sur le niveau de l activité productive locale en raison d une baisse abrupte

des commandes.

En , il est constaté une baisse d activité moyenne de %, avec un « creux » à

50% en février de cette année (Arve Industries, 2011). Compte tenu de la chute brutale

des chiffres d affaires, les taux de chômage ayant atteint des niveaux très élevés,

notamment pour les apprentis et les intérimaires, certaines entreprises ont dû fermer

leur porte.

Malgré cette période très difficile, les patrons de PME, en grande partie, ont pu

retrouver leur niveau d activité d avant grâce à l appui des organisations locales qui les

ont aidé à réorganiser leur activité changement de marché, autre que l automobile, de

59Le terme mécatronique est défini par la norme française comme « la démarche visant l intégration en synergie de la mécanique, l électronique, l automatique et l informatique dans la conception et la fabrication

stratégie de négociation avec le client, etc.

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. D o‘ le chiffre d affaires de l industrie

locale de milliards d euros en . Aujourd hui, elle occupe environ 14000 personnes

dans près de entreprises, soit % de l activité du décolletage national. SNDEC,

2012).

D après les responsables des organisations locales, ce sont les mesures mises en

œuvre, avec l appui de l Etat, qui ont permis de réduire les effets de la crise. De toute

façon, comme ils le font aussi remarquer « ce n est pas la crise qui a provoqué nos

faiblesses structurelles. Elles les a plutôt révélées et a permis une prise de conscience

collective de ces faiblesses face aux grands enjeux économiques de la mondialisation »

(Document Expansion 2020, 2011, p. 4).

Quant aux patrons de PME, notre enquête a révélé que la réduction du chiffre

d affaires provoqué par la crise les a amenés à effectuer des changements dans leur

entreprise de façon à réduire leurs coûts de production. C est ce qu affirment % des

entrepreneurs de l échantillon qui y ont vu l occasion d améliorer leur procédé de

fabrication et 9% qui ont pu innover leurs produits (la majorité d'entre eux étant

adhérents au pôle).

De la part des patrons de PME, notre enquête a révélé que la crise a été une période

de changements qui a conduit, certes, à une réduction du chiffre d affaires, mais pas

seulement.

60 Même si la plupart des entreprises sont dans le secteur automobile, il s est opéré une ouverture vers d autres secteurs porteurs pour les décolleteurs de la Vallée de l Arve.

Figure 15. Les effets de la crise de 2008-2009 sur les PME de la Vallée de l’Arve61

Source : Les questionnaires

Ainsi, le rapprochement entre les entreprises et les organisations locales a été l un

des principaux effets de la crise : Sur l ensemble des PME enquêtées, % se sont

tournées vers ces dernières à la recherche de solutions à leurs difficultés.

Soulignons aussi l action efficace concernant l emploi local. A la demande des PME,

les institutions locales et l Etat ont mis à disposition des aides afin d éviter le

licenciement en masse. « Malgré l obligation du chômage partiel pour quelques-uns, on a

pu envoyer la totalité des salariés en formation une fois par semaine. C est une décision qui

est partie d en bas. Cette action a incité la formation des salariés pour le développement

des compétences, plutôt que de les laisser au chômage … Une partie a été financée par

l entreprise, une partie par l Etat et une partie par les organismes de formation ». (Dir.

PME 1 – Décolletage – Adh. PC).

Cette mobilisation des acteurs de la Vallée a permis donc de trouver des réponses

rapides à la crise et d éviter des dégâts encore plus importants.

61 Ces réponses ont été récoltées après la sortie de la crise, lorsque les actions collectives avaient déjà été mises en place sur le territoire. Les réponses des questionnaires ne représentent pas la majorité des entreprises, celles-ci pouvant diverger sur certains points des discours des responsables des

0 2 4 6 8 10 12 14 16 Oui (42) Non (26) Total (68)

. . La situation actuelle de l’industrie locale : quelques données

L économie de la Haute-Savoie est basée sur une industrialisation importante,

notamment dans quatre domaines d activité : la mécatronique et le décolletage, la

fabrication des équipements et matériels de sport d hiver et loisirs, l image et le

multimédia le jeu vidéo, l audiovisuel et les biotechnologies

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. Malgré cette

diversification industrielle importante, la renommée de ce département se doit à la

grande qualité de sa production dans le décolletage et la mécatronique. En fait, la

Haute-Savoie concentre près des 2/3 des décolleteurs français (cf. Figure 16), dont la grande

partie est installée dans la Vallée de l Arve. La figure suivante montre comment

l industrie du décolletage est répartie en France.

Figure 16. Distribution du décolletage français

Source : SNDEC (2011)

Depuis 10 ans, les entreprises de la Vallée de l Arve sont confrontées à une forte

compétition qui a évidemment des effets sur l évolution de son chiffre d affaires cf.

Figure . Nous observons une augmentation du chiffre d affaires dans les années ,

suivi d une stabilisation jusqu à et, finalement, une grande chute en 2009. Et ce,

malgré la demande dans les secteurs traditionnels, comme l industrie automobile, et

dans les secteurs émergents, comme l industrie des prothèses médicales, qui ont

pourtant beaucoup augmenté ces dernières années.

Figure 17. L’évolution du chiffre d’affaires de l’industrie du décolletage français

Source : Expansion 2020 (2011)

Si les chiffres d affaires des PME locales ont maintenu une certaine régularité, voire

une légère croissance, entre 2000 et 2008, une étude élaborée par le pôle de

compétitivité Arve Industries et le SNDEC (Expansion 2020, 2011), démontre

l incapacité du décolletage français à profiter de la croissance des marchés, au contraire

Figure 18. Les parts de marché du décolletage automobile

Source : Expansion 2020 (2011)

La perte croissante d hégémonie du décolletage français liée au secteur automobile

est visible dans ce tableau, ce qui la place juste devant le Royaume Uni, mais derrière des

concurrents réputés comme l Allemagne

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et l )talie. )l s agit, en réalité, d une

concurrence technologique et dans cette course, les Allemands se sont démarqués en

développant des procédés de fabrication un peu différents de ceux employés par les

décolleteurs français. «En fait nos concurrents en Allemagne ce ne sont pas ce qu on

appelle des gens d usinage comme nous, c est de la concurrence technologique et la pièce

est fabriquée avec un autre procédé de fabrication qui s appelle la métallurgie de poudre,

très peu répandue en France. » (Resp. PME 12 – Décolletage – Adh. PC). Dans le cas du

secteur automobile, la croissance de la consommation a ouvert des opportunités à des

63C est la concurrence du décolletage allemand qui interpelle le plus les entrepreneurs de la Vallée de l Arve, car elle suit une stratégie différente du modèle français : elle est basée sur des entreprises de taille intermédiaire (ETI) et sur une technologie de fabrication de pièces différente de celle du décolletage français, la « métallurgie de poudres », procédé qui nous a été expliqué par un producteur local : « A partir

des poudres d acier que l on va mettre dans un moule, on va le compresser et ensuite on va cuire la pièce. Ça

permet de produire la pièce qui a quasiment la même forme que la nôtre. L avantage c est qu il n y a pas d enlèvement de matière. Nous avons des déchets de matière, pour une pièce qui fait 30 grammes, on a besoin de 40 grammes au départ. Par contre, dans la métallurgie de poudres, pour une pièce de 30 grammes ils ont

besoin de grammes de poudre. Mais la poudre est beaucoup plus onéreuse au kilo que si l on achète des

concurrents décolleteurs étrangers notamment, l Allemagne , mais n a pas entraîné la

croissance des opportunités dans ce secteur pour l industrie locale.

Un facteur expliquant cette mauvaise performance, d après la même étude, réside

dans l achat, depuis l année , de % du chiffre d affaires de l industrie locale par

des fonds de pension. Cela a eu des répercussions sur la stratégie locale de

développement, autrefois dotée d une vision de long terme en accord avec la mentalité

des PME familiales

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et, aujourd hui, fortement marquée par la recherche de résultats

financiers immédiats de la part des investisseurs étrangers.

Outre le fait d avoir des objectifs forts différents, l entrée des fonds d investissement

fait l objet de critiques de la part des entrepreneurs locaux du fait que les investisseurs

sont étrangers à la région et méconnaissent les enjeux de la profession du décolletage.

Preuve en est, l absence d investissements dans les moyens de production de la part des

entreprises rachetées depuis près de 9 ans, au contraire des 8 à 12% de

réinvestissement du chiffre d affaires nécessaires pour maintenir les conditions de

pérennisation et de développement du secteur. Cette absence d investissements, liée aux

effets de la crise, a provoqué une perte financière pour les investisseurs extérieurs et,

par conséquent, leur retrait progressif et le retour d investisseurs ayant une visée

industrielle.

D autres défis sont encore à relever dans l avenir.

 Premièrement, le problème de pénurie de main d œuvre dans le site. D une

part, car les employés spécialisés sont attirés par les salaires plus élevés

versés aux techniciens dans le pays voisin, la Suisse. D autre part, car le

travail à l usine souffre d une image peu attrayante auprès des jeunes.

 Deuxièmement, le besoin de moderniser l activité caractérisée

traditionnellement par une sous-traitance de capacité et affrontant

aujourd hui une forte concurrence. Pour cela, il faut investir dans la

recherche et le développement afin de fabriquer des produits plus complexes

et avec une plus forte valeur ajoutée.

64 La logique de développement des PME familiales n est pas basée exclusivement sur des profits à court terme : la pérennité de l activité prévaut sur des objectifs purement capitalistiques, car elle représente la

 Troisièmement, la dépendance à un seul secteur l automobile , et donc aux

aléas du marché, a été traumatisante pour les décolleteurs de la Vallée

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lors

de la chute des commandes en 2008.

D o‘ l installation du pôle de compétitivité dont la mission est de protéger et

valoriser le savoir-faire local par la mise en place de projets collectifs liés à l innovation

grâce à de forts investissements dans le domaine.

65Même si la crise a été frappante et a mis en péril l avenir de plusieurs entreprises locales, en la grande partie des interviewés a démontré avoir récupéré le volume de la production d avant. Ce constat est confirmé par l étude de l Agence Economique Départementale de la Haute-Savoie « même avec des

commandes réduites au moins de moitié pendant plus d un an, le tissu industriel n enregistre pas de dépôt de

bilan significatif ». (Etude du secteur du décolletage et mécatronique en Haute-Savoie). Document disponible sur le site www.haute-savoie.com, Accès le 20/03/2012.

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Cette section a montré comment l industrie du décolletage et le réseau d entreprises

de la Vallée de l Arve se sont formés il y a plus de deux siècles. L évolution de

l organisation des entreprises dans la continuité d une dynamique particulière à ce

territoire et malgré les diverses crises du marché économique, a permis une

spécialisation industrielle reconnue mondialement en termes de qualité et de précision.

Afin de légitimer la reconnaissance des intérêts des industriels locaux, et en

particulier des patrons de PME, la Vallée de l Arve a fait l objet d une première

intervention de l action publique, le Système Productif Local Technic Vallée. Depuis

, le SPL a été labélisé Pôle de Compétitivité Arve )ndustries , avec pour but de

rendre les entreprises locales plus compétitives par la participation à des projets

innovants.