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Chapitre I . Synthèse bibliographique : Le recyclage des fibres cellulosiques

IV. Le procédé de désencrage par flottation

IV.2. Les facteurs influençant l’efficacité de la flottation

Le procédé de désencrage est une opération unitaire complexe, dont l’efficacité dépend de plusieurs paramètres qui peuvent être reliés aux paramètres de fonctionnement et physico-chimiques. L’objectif est toujours de trouver la meilleure combinaison pour améliorer le détachement de l’encre des fibres.

L’efficacité du désencrage dépend de différents paramètres : (i) le type d’encre et la nature du support papier (Carré et al. 2000) ainsi que le cycle de vie du papier, (ii) la technologie de remise en suspension (Fabry and Carré 2002) et (iii) la composition des agents chimiques utilisés tout au long de la procédure de recyclage. D’ailleurs, la performance de la cellule de flottation dépend aussi des phénomènes physico-chimiques mis en jeu et des caractéristiques hydrodynamiques de l’équipement. Les paramètres associés sont le débit de gaz et le volume du liquide, ainsi que la taille des bulles de gaz.

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La qualité de la suspension fibreuse dépend de la nature de ses différents constituants : qualité des fibres présentes dans la composition du papier à recycler, nature des encres et des autres contaminants libérés et séparés pendant les différentes opérations unitaires du recyclage.

IV.2.1. Nature du substrat papier

La composition fibreuse des papiers à recycler influence l’efficacité du désencrage. Les mélanges contenant de la pâte mécanique sont plus difficiles à traiter par rapport aux sortes de papier dites sans bois, contenant moins de 10% de pâte mécanique, car les particules d’encre ont plus d’affinité avec la lignine qu’avec la cellulose (Belgacem and Pizzi 2016). Lors d'une série d'essais (figure I-19) des papiers couchés et non couchés, avec et sans bois (respectivement wood-containing et wood-free), ont été imprimés avec le procédé offset. Dans le cas des papiers sans lignine (wood-free), après flottation, la blancheur augmente de plus de 17% ISO. La présence de lignine (papier avec bois, i.e. wood-containing) limite le gain de blancheur à 8%. Le désencrage est moins efficace pour les papiers contenant la pâte mécanique car le décrochage de l’encre est plus difficile.

Figure I-19. Blancheur de papiers magazine avec et sans bois imprimés en offset avant et après la flottation

La figure I-19 montre d’autre part, d’autres études ont démontré que l’élimination d’encre des papiers couchés est plus facile que celle des papiers non-couchés. Supposant que la couche de revêtement entraîne la majorité de l’encre, les encres ne sont pas tout à fait en contact avec les fibres de cellulose. L'âge du papier est un autre facteur qui conditionne l’efficacité du détachement de l'encre. La plupart des encres d’impression pour le journal sont des huiles végétales chimiquement réactives. Au cours du vieillissement de l’imprimé, les composants de l'huile laissés à la surface de la fibre réagissent lentement avec l’oxygène pour former un réseau polymère tridimensionnel avec le pigment d'encre. Cela conduit à la formation d'un film solide, augmentant la cohésion de l'encre et l'inhibition du détachement de l'encre de la fibre.

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IV.2.2. Formulation de l’encre

En fonction de la formulation de l'encre, du niveau d'absorption des particules encrées au sein du réseau fibreux et du procédé de séchage, l'encre est plus ou moins liée aux fibres. Le procédé d’impression influence la liaison des fibres aux encres et donc impacte le procédé de désencrage. La désencrabilité des papiers est ainsi fonction du type d’encre et du procédé d’impression (paragraphe II.5.6).

La figure I-20 présente une comparaison du comportement au désencrage des différents types d’impression par flottation. Les substrats cellulosiques imprimés en offset, rotogravure et avec la plupart des toners solides présentent une bonne désencrabilité, tandis que ceux imprimés avec des encres à l’eau (encres flexographiques ou jet d’encre) ont une désencrabilité plus faible. En revanche, les toners (UV) et les toners liquides sont détachés sous forme de particules de grandes tailles, qui peuvent être trop grosses pour pouvoir être flottées (paragraphe II.5.6).

Figure I-20. Désencrabilité de différents types d'encre par flottation (Faul and Putz 2008)

La taille et la forme des particules d’encre jouent en effet un rôle déterminant pour assurer l’efficacité du désencrage. La flottation permet d’éliminer des particules ayant des tailles comprises entre 50 et 100 µm (Beneventi et al. 2006; Lothar and Heikki 2000; Saint Amand 1999) . En revanche, les tailles optimales pour le désencrage par flottation peuvent dépendre de nombreux paramètres différents tels que le type d'encre et les produits chimiques ajoutés. Dorris et Page ont mené des études de flottation avec des encres toners et ils ont constaté que la taille optimale pour une bonne efficacité de flottation pour ce type d’encre était comprise entre 60 et 100 µm (Dorris

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and Page 1997). Le tableau I-12 présente la taille des particules d’encre issues de différents procédés d’impression après remise en suspension des papiers imprimés.

Tableau I-12. Taille des particules d'encre après désintégration (Lothar and Heikki 2000)

Taille des particules d’encre (𝜇𝑚)

Papier non couché Papier couché

Offset 2 – 30 50 – 100

Rotogravure 2 – 30 5 – 30

Laser (Toner) 40 – 400 40 – 400

Il a été démontré aussi que l’efficacité de désencrage des papiers imprimés avec des toners est inconstante. Ceci est dû à la grande variabilité des formulations des toners, à de nombreuses configurations d'imprimantes ou de photocopieurs, mais aussi à des différences de comportement des encres au cours du vieillissement de l'impression. Par exemple, l'utilisation d’encres toners ne contenant pas d’oxyde de fer dans sa formulation produit des particules plus aptes à leur

élimination par flottation (Tremblay 1996).

IV.2.3. Nature du tensioactif

L’action mécanique et chimique conduisant au détachement de l’encre de la fibre et à sa fragmentation au niveau du pulpeur, n’est pas suffisante pour l’obtention de particules d’encre hydrophobes de taille convenable à la flottation, i.e. de l’ordre de 10 à 100 µm (Larsson et al. 1984). Ce manque de fragmentation peut affecter le procédé de flottation (réduction de l’efficacité d’élimination de l’encre et du rendement de flottation). Des additifs chimiques sont donc couramment utilisés en complément, dans le désencrage par flottation, afin de modifier l'état de dispersion des composants de la suspension fibreuse et d'améliorer les performances du procédé (Lassus 2000). Le principe d’action de ces produits est présenté schématiquement dans la figure I-21 et détaillé plus précisément dans les paragraphes qui suivent.

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Les acides gras (savons) ou des tensioactifs sont généralement ajoutés pour la flottation dans l’opération amont de remise en suspension ou directement dans la cellule de flottation. Un tensioactif est une substance ayant la propriété de se concentrer, et de s'agréger aux interfaces entre l'eau et d'autres substances peu solubles dans l'eau, les corps gras notamment. Ces molécules présentent au moins deux parties d'affinité différentes, l'une est hydrophile (affinité pour l'eau) et l'autre lipophile (affinité pour les graisses). Ce caractère amphiphile permet au tensioactif de modifier la tension superficielle entre deux phases (gaz/liquide, liquide/solide, liquide/liquide) non miscibles ou présentant une faible affinité. Cette modification d’énergie de surface conduit à l'élimination des contaminants comme l'encre de la surface des fibres. Par exemple, les tensioactifs non-ioniques sont généralement adsorbés sur la surface des encres ce qui leur donne un caractère hydrophile et améliore leur détachement des fibres.