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Les disparités interrégionales de productivité

La structuration socio-économique de l’espace national

C. Les disparités interrégionales de productivité

L’indicateur d’emploi néglige dans les capacités de production ce qui relève du capital et plus encore du progrès technique. La productivité est une variable importante dans certaines branches économiques, notamment dans l'agriculture où les innovations technologiques se sont fortement développées et où les effectifs ont été fortement réduits au cours des dernières décennies. Ainsi, la prise en compte de la productivité comme variable explicative potentielle complémentaire à l’emploi permettrait de limiter les distorsions entre l'évolution de l'emploi et l'évolution des capacités de production. Les productivités participent aux inégalités régionales en tant que différentiels d'efficacité économique et jouent également un rôle dans le renforcement de spécialisations sectorielles régionales.

La construction d'indices de productivité se heurte à des difficultés méthodologiques relatives à la mesure de la production et à celle des quantités de facteurs de production et notamment du volume de travail. En guise d'approximation quantitative, le ratio de productivité régionale généralement calculé par l'I.N.S.E.E. est un rapport entre la valeur ajoutée brute régionale et le nombre d'actifs. Ce ratio a donc été retenu et calculé à partir des statistiques de valeur ajoutée et d'emploi précédemment exposées.

Tableau V-12. Répartition territoriale de la productivité (V.A.B./ actif : branches agricoles et industrielles et ensemble des branches en 1992)

France : indice base 100 Agri. + industrie total branches Agri. + industrie total branches

Nord Pas de Calais 88 93 Champagne-Ardenne 96 94

Picardie 85 93 Lorraine 84 90

Ile de France 131 119 Alsace 91 95

Centre 90 93 Franche-Comté 86 91

Haute-Normandie 117 103 Bourgogne 89 92

Basse-Normandie 96 92 Auvergne 87 91

Bretagne 87 92 Rhône-Alpes 97 97

Pays de la Loire 80 90 Languedoc-Roussillon 106 95

Poitou-Charentes 89 91 PACA 116 101

Limousin 80 85 Corse 87 84

Aquitaine 98 94 France 100 100

L’Ile de France se démarque à nouveau assez nettement des autres régions. La dispersion spatiale de la productivité du travail est plus particulièrement prononcée dans la branche agricole et industrielle qui présente une productivité élevée pour Ile de France, et dans une moindre mesure pour Haute-Normandie et Provence-Alpes-Côte-d'Azur. Dans ces deux dernières régions, les zones portuaires participent fortement au niveau élevé de productivité en raison d'une forte mécanisation de leurs activités.

Le calcul des indices de dissemblance spatiale sur le ratio de productivité (VAB/emploi salarié) est intéressant par la tendance d’évolution qu’il révèle. On s’aperçoit en effet qu’à la fin des années 80 et au début des années 90 que les disparités de productivité tendent à s’accroître alors qu’elles avaient connu une baisse du milieu des années 70 au milieu des années 80.

Tableau V-13. Evolution de l'inégalité territoriale de la productivité

1975 1980 1985 1990 1992

coefficient de variation C 9,38 9,51 9,35 9,43 9,49

indice de Theil 10,66 10,38 10,20 10,40 10,64

La présentation des structures socio-économiques régionales à travers les indicateurs économiques de valeur ajoutée et d'emploi a mis en évidence des capacités de production inégales entre les différentes régions supérieures aux dissemblances démographiques et une tendance à l’accentuation des disparités régionales en fin de période, depuis la fin des années 80. Cette tendance générale d’évolution met en évidence une nouvelle impulsion dans la concentration spatiale au sein des grandes régions économiques et en particulier en Ile de France.

L’analyse descriptive des disparités régionales a mis en évidence les différences de capacité entre les régions à créer des richesses. Pour terminer cette analyse, nous abordons maintenant les disparités de revenus, qui constitueront une estimation des différentiels de consommation régionale.

V-2-4. La dimension sociale à travers le revenu des ménages

Les disparités régionales de la richesse économique peuvent avoir un impact sur les mouvements de marchandises par l'intermédiaire des dépenses de consommation. A défaut de disposer d'indicateurs de consommation dans les différentes régions et sur plusieurs années, une approximation est fournie par l'indicateur du revenu disponible brut des ménages.

Tableau V-14. Disparités spatiales du revenu disponible brut (1990)

millions de frs constants 80 RDB 1990 % RDB 1990 %

Nord Pas de Calais 267164 6% Midi-Pyrénées 183205 4%

Picardie 122308 3% Champagne-Ardenne 105987 2%

Ile de France 1034290 23% Lorraine 168646 4%

Centre 180164 4% Alsace 129512 3%

Haute-Normandie 128231 3% Franche-Comté 76461 2%

Basse-Normandie 99266 2% Bourgogne 121517 3%

Bretagne 203198 5% Auvergne 95765 2%

Pays de la Loire 215200 5% Rhône-Alpes 404430 9%

Poitou-Charentes 113422 3% Languedoc-Roussillon 154015 3%

Limousin 54172 1% PACA 344676 8%

Les disparités interrégionales de revenu sont très importantes à nouveau entre la région parisienne et la province. Au sein des régions de province, seules les régions Rhône-Alpes et PACA se détachent.

A travers les indices synthétiques de disparité spatiale, les revenus présentent une répartition régionale déséquilibrée mais moins prononcée que celle des valeurs ajoutées brutes. Cette relative correction des inégalités de production par les revenus tient au jeu des transferts financiers interrégionaux (Santi, 1995).

Tableau V-15. Evolution des disparités spatiales du revenu disponible brut

1975 1980 1982 1986 1988 1990

coefficient de variation C 24,9 23,9 23,5 22,5 23 23,4

indice de Theil 49,2 46,2 45,4 42,7 44,2 44,8

Entre 1975 et 1990, les inégalités relatives au revenu connaissent également une évolution en deux temps. Une première sous-période, jusqu’au milieu des années 80, est marquée par une réduction des inégalités régionales. Une seconde sous-période présente une tendance opposée avec une légère recrudescence des disparités.

Ce panorama général et synthétique de l’espace économique français à l’aide des indicateurs statistiques pouvant être utilisés dans le modèle QuinQuin Fret Multirégional fait ressortir une forte hétérogénéité démographique, économique et sociale de l'espace économique national ainsi qu’une hiérarchisation de l’espace dominée par la région francilienne.

Ces mesures quantitatives ne demeurent toutefois pas les seuls facteurs de différenciation des structures socio-économiques régionales. Des mesures plus qualitatives faisant référence à des particularités ou savoir-faire régionaux peuvent aussi révéler des disparités régionales et indirectement jouer sur des écarts de volume ou de structure spatiale des flux régionaux de marchandises générés et échangés. Les différences qualitatives régionales relèvent notamment de spécificités ou de spécialisations sectorielles.

V-3. La structuration socio-économique du territoire par le jeu de

spécificités, spécialisations et concentrations spatiales

L’hypothèse sous-jacente à l’étude des spécificités régionales en tant que déterminant de la distribution spatiale du fret interrégional est que les différenciations spatiales intimement liées aux phénomènes de spécialisation conduisent à la formation d'échanges de biens : "Les modèles statiques de base [d'inspiration ricardienne ou néo-classique] mettent en évidence une spécialisation spatiale de complémentarité entre régions à caractéristiques différenciées valorisant leurs avantages comparatifs. Une certaine division spatiale des activités productives, et une intégration par les courants d'échange, accompagnent ce processus de spécialisation ” (Catin, 1994). Les spécialisations spatiales proviennent de dotations particulières en ressources naturelles mais aussi de savoir-faire ou d'économies d'échelle dans certaines branches sectorielles.

Les effets positifs des spécificités ou spécialisations sectorielles sur le développement des échanges de marchandises ont été mis en évidence dans de nombreux travaux en économie

régionale ou en économie internationale. Notre objectif dans le cadre de ce travail est de formaliser ce type de relations au niveau macro-économique sur les échanges interrégionaux de marchandises. La question sous-jacente est de savoir si les spécialisations ou les spécificités sectorielles régionales peuvent non seulement orienter mais aussi favoriser les échanges de biens entre les régions au sens où elles auraient un impact favorable sur la dimension structurelle du fret, c’est-à-dire sur le niveau des coefficients structurels. En référence à la théorie de la base économique, l’hypothèse qui sous-tend notre investigation sur les spécificités sectorielles régionales est que les spécialisations ou les spécificités industrielles régionales fournissent un potentiel à l’exportation. Dans cette optique, les spécialisations pourraient participer à la formation de relations préférentielles ou privilégiées d’échange au sens défini dans la méthode des coefficients structurels.

V-3-1. Les spécificités régionales

Les mesures de spécificité et de spécialisation ont été calculées sur les indicateurs de valeur ajoutée brute régionale.