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2–LES DIFFICULTES RENCONTREES ET AVANTAGES DE L’AUTOCONSTRUCTION

A-LES CONDITIONS CLIMATIQUES

Reprenons depuis le tout début du chantier. La première difficulté rencontrée est de se fournir en paille. Cela semble moins évident qu’on ne pourrait le penser, même si théoriquement, il y en a en quantité suffisante. Essayons de savoir pourquoi.

« […] mais quand on est citadins, beh voilà, on est obligé d’aller chercher tout le matériel, la connaissance, le réseau. […] Déjà rien que çà, faut le trouver l’agriculteur. »

« La paille, bon beh la paille, faut trouver une botteleuse qui fait des bottes carrés, enfin rectangulaires. Parce que sinon, c’est que des Round baller. Donc faut trouver l’agriculteur qui a la botteleuse qui va bien etc. Alors pour démarrer un chantier, ça demande, enfin ça demandait beaucoup d’anticipation. »

« La botteleuse qui tombe en panne ! Donc là, je courais derrière la botteleuse, (rires) et je mesurais chaque botte ! Parce qu’en fait, la machine elle se déréglait, (rires) et pour éviter de reprendre, parce qu’on voulait faire des trucs un peu standard, on c’est dit, attend c’est le gros bazar à reprendre une botte, parce que l’aiguille à tricoter machin, c’est vachement de temps, beh je courais derrière et puis je mesurais. […] Çà c’est notre maison ! En botte ! (rires) par contre c’est super sympa, super journée »

« Y’a eu des soucis parce que, 2007, c’est une année où il pleuvait beaucoup et arrivé début juillet, y’avait pas de paille. Et donc c’est Christian qui a fait jouer son réseau pour trouver de la paille de l’année d’avant qui était sur Coufé, çà fait une quarantaine de kilomètres. Donc il a fallu aller jusque là bas, elle était en plus en Round-baller, donc là on a fait une journée de travail. Donc tout dérouler, après ils ont remis en petites bottes moyenne densité. […] Et je pense que c’est un souci de trouver des bottes de paille. En plus faut trouver les botteleuses. »

Comme on peut le constater, pour ces autoconstructeurs, la première complication est de trouver un agriculteur. Les personnes rencontrées soulignent le fait qu’ils ne sont pas « de la campagne », citadins d’origines et donc ont peu de moyen de trouver un agriculteur susceptible de leur vendre de la paille. En plus, il faut que celui-ci ai la bonne presse. On peut supposer que mettre à disposition une cartographie interactive via internet qui liste les agriculteurs voulant bien fournir de la paille pour la construction faciliterait la recherche pour les autoconstructeurs.

Cette cartographie spécifierait les conditions de vente (outils- temps-main d’œuvre-prix-stockage…). Bien que les agriculteurs demandent souvent de l’aide au moment du pressage étant donné qu’il manque de main d’œuvre, cela ne semble pas être un problème pour le constructeur. Par contre, la période de récolte est un moment intense pour les agriculteurs puisqu’ils ont une charge de travail non négligeable et « tout vient en même temps ». Parfois, la météo n’aide pas non plus à la disponibilité.

« Est ce qu’il y a eu des points qui vous ont vraiment fait hésiter à construire en paille ? »

« La météo ! Clairement. […] on peut pas commander la météo, dès qu’il flotte il faut bâcher, c’est extrêmement compliqué […] Et puis ce gars là il galéré parce qu’il arrivait pas à récolter sa paille, la paille était pas sèche, donc ça repousse parce que c’est une fois par an. Donc si la récolte elle est pas bonne et beh on a pas de paille ! »

« C’était l’été où il a vachement plut. Et en fait du coup tout les agriculteurs manquaient de fourrage, de paille et donc ne vendaient plus. Parce qu’ils le gardaient pour leurs troupeaux, pour leurs bêtes, pour leur fermes… et là c’est les boules, parce qu’on se dit que si on a pas de paille on peut pas faire de maison.

Et puis l’année d’après on a eu du bol parce que y’avait la bonne météo, le bon timing, très juste.

Très juste parce qu’en fait on attendait les récoltes de la paille, le chantier commençait fin juillet, enfin mi-juillet, fin juillet, là cette année là, y’avait quand même un peu de pluie, et vu que la moissonneuse batteuse elle fait plusieurs champs, plusieurs propriétaires, beh nous il avait pas encore la moissonneuse batteuse ! Donc on a récolté la paille le premier jour du chantier. (Rires)

On a fait deux aller-retour avec des camions, on a fait la récolte dans la journée, on a tout ramené là en deux fois et on a pu commencer le lendemain matin. Et Christelle est arrivé sur le chantier le lundi, on avait rien ! »

S’il pleut, tout est retardé et parfois la récolte est mauvaise. Le chantier peut même devenir impossible. Comme les autoconstructeurs ont difficilement la possibilité de stocker la paille d’une année sur l’autre et d’anticiper ainsi le désagrément de ne pas être approvisionné, le chantier peut parfois être retardé d’une année, comme c’est le cas pour un des couples.

Il serait intéressant de mettre en place des lieux de stockage des surplus issus de la récolte qui pourraient servir aux autoconstructeurs.

B-LES DIFFICULTES MATERIELLES

On lit souvent que la paille est un matériau avantageux pour l’autoconstructeur puisque sa manutention est relativement aisée et qu’elle demande un outillage basique. La réalité est un peu plus complexe ; non seulement sa mise en œuvre demande un savoir- faire spécifique, et elle n’est pas l’unique composant d’un mur. Trouver tous les matériaux nécessaires à la constitution du mur demande une énergie conséquente. En plus de trouver la botte de paille qui correspond à la construction, il faudra se fournir en argile, en sable, en copeaux de bois… La préparation de ces matières suppose également un équipement adéquat : des palettes, des bâches, des baignoires, un malaxeur… Dénicher ces objets et ces matériaux demande de l’investigation, du temps pour le transport et une organisation rigoureuse pour que le chantier se déroule sans déboire.

En parallèle de ce travail de logistique autour de l’organisation matérielles du chantier, il faudra se préparer à l’accueil des bénévoles, c’est à dire gérer les repas, les équipements sanitaires et l’hébergement.

Le chantier participatif s’avère d’une complexité considérable. Une assistance peut être largement bénéfique pour conseiller sur la préparation logistique du chantier et encadrer son déroulement.

« […] faut trouver l’argile, faut trouver une carrière qui fait de l’argile, heureusement y’en a une à Pau qui est pas très loin, qui fait une carrière de sable, faut transporter, heu faut se faire livrer, après faut trouver l’outillage qui va avec[…] »

« […] faut trouver des palettes parce qu’il faut installer le chantier. Alors les palettes çà va servir à tout mais heu, on loge les gens, faut préparer à manger, faut préparer pour les personnes, quand on est pas dans cette maison là, qu’on est loin, faut trouver des copeaux de bois qui viennent d’une scierie avec du bois non-traité, faut le trouver ! (rires) non mais quand on a qu’une remorque !

C’est pour çà que, mine de rien quand on est dans le milieu agricole, c’est vachement bien ! De trouver un malaxeur, un malaxeur ! Beh oui, c’est super mais qu’en on a pas de tracteur, le malaxeur de fou, çà se met qu’avec des tracteurs.

Donc faut aller le chercher en Bretagne, le seul avec un bras malaxeur machin, tout çà sur une commune qui est touristique, avec des horaires, donc une loi antibruit, qui fait 9h midi, avec des bruits qu’on a pas le droit de faire, avec des horaires très très restreint. Des gens qui ne sont pas forcément compétents, qui sont des participants qui viennent découvrir… c’est sport !

-Il faut tel type de vis, tel type de machin, c’est un chantier énorme ! Franchement, c’est un chantier énorme ! »

« Faut trouver des baignoires ! Un agriculteur il a des baignoires, mais nous on a pas de baignoires, enfin, et tout était comme çà. Et donc là faut s’imaginer qu’on est dans un lotissement qui est très propret, mine de rien, Saint-Brévins, et en fait les gens nous appelaient les jaillous du quartier. »

Au vue des difficultés liées aux recherches de matériaux et outillages et du travail important de logistique, un site internet qui réunirait les données aurait tout son sens. Il pourrait répertorier les agriculteurs fournissant de la paille adéquate pour la construction comme évoqué précédemment, mais aussi tous les autres acteurs liés à la construction d’une maison paille. Cela englobe donc les architectes ou maître d’œuvre, les associations, les artisans du bois, mais aussi de la terre et du chanvre.

Le site pourrait localiser les lieux ou se fournir en outillage et matériaux (lieux de stockage mis en place, prêt de matériels ou échange possible avec les propriétaires…)

Le site pourrait fonctionner de différentes manières : par recherche de lien de proximité ou par mots clés.

« C’est clair qu’il y a un outil à mettre en place parce que pleins de gens qui veulent construire comme ça ne savent pas, ils sont obligés quand ils voient une maison en paille de demander qui a construit ça, et c’est là qu’ils commencent à tirer sur la ficelle et trouver le réseau, alors qu’ils ne se rendaient pas compte qu’il y avait tout ça ici, pourtant ça concerne plein de gens, qui sont artisans ou autre comme charpentier ou ébéniste, qui sont dans le réseau et qui ont apporté plein de choses comme l’utilité du bois local, on n’a pas parlé du bois mais le bois c’est pareil […]

Maintenant comment mettre en relation tous les gens, parce qu’il y a des gens qui m’appellent et me disent ça ne fait je ne sais pas combien de temps que je cherche quelqu’un pour me construire ma maison avec du chaux-chanvre à l’intérieur et je ne trouve pas, et je me dis mince, comment ça ce fait qu’on n’est pas plus visible au niveau de l’éco-construction, sans parler que du centre, tout les gens qui œuvrent dedans que ce soit les artisans, les auto-entrepreneurs, et ça c’est bien dommage.[…]

Voilà, avec à chaque fois où est-ce que l’on se procure le matériel, le matériau, l’artisan… »

C-L’EXPERIENCE HUMAINE POUR