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COMMENT SE FAIT LA TRANSMISSION L’apprentissage par l’échange

CONSTRUCTION PAILLE

B- COMMENT SE FAIT LA TRANSMISSION L’apprentissage par l’échange

Les choix et les envies des autoconstructeurs sont posés. Viennent alors les questions d’ordre pratique ; Comment construire et avec quelle technique? Comment obtenir des conseils et les matériaux ?

Internet fonctionnant comme une base de données commune sur l’autoconstruction, la personne entame un processus d’apprentissage et d’échange car ses questions sont plus précises. Pour autant, la conception sera facilitée par l’apport des connaissances d’un maître d’œuvre, bien que certains autoconstructeurs ne s’aident pas d’un professionnel à cette phase sans qu’il y ait de problème majeur. Dans le cas contraire, les plans qu’il destinera aux autoconstructeurs seront souvent plus détaillés, conçus comme une maquette ou un puzzle pour aider à la fabrication.

Bien souvent, la mission du maître d’œuvre ou de l’architecte s’arrête à cette phase, pour deux raisons principales ; premièrement, un architecte ne peut être assuré pour un chantier en autoconstruction. Deuxièmement, il ne sera pas rémunérer car la plupart de ces chantiers fonctionnent grâce à du bénévolat. Il est donc régulier que le maître d’œuvre délègue la phase de réalisation à des associations (les différentes personnes que j’ai rencontrées ont toutes été dans des associations ou entreprises différentes comme Botmobil, HEN, Thierrhabitat, approche paille…).

La plupart de ces associations, comme c’est le cas de Botmobil, demandent au futur propriétaire de s’investir lui même dans un autre chantier participatif.

Dans ce type de chantier, la personne s’investit gracieusement pour un autre autoconstructeur. Les constructeurs accueillant les bénévoles s’occupent en échange de loger et nourrir les « futurs apprentis ouvriers ».

En donnant de son temps pour la réalisation d’une autre maison, non seulement elle apprend, participe au fonctionnement du réseau, met en pratique et confronte ses savoirs théoriques accumulés aux cours de ses recherches.

C’est à ce moment que les futurs constructeurs peuvent réaliser l’ampleur du chantier, et comprendre la globalité de l’action dans laquelle ils s’engagent, que ce soit technique, humain ou plus de l’ordre de la gestion. Ce chantier peut aussi permettre d’affirmer ses choix et de profiter de l’expérience d’autrui. C’est un temps de pédagogie et de rencontres.

C’est une phase à ne pas négliger car le bénévole s’engagera à son tour dans son propre chantier participatif, faisant appel alors à d’autres futurs autoconstructeurs, qui eux aussi pourront profiter de ses connaissances accumulées : la roue tourne ainsi.

« En fait déjà, moi j’avais fait un chantier participatif, deux ans avant, un truc comme çà, et c’était une autre technique. On mettait la botte sur fibre verticale, on mettait sur le champ, avec la fibre horizontale. Moi j’trouvais pas çà très logique, en plus çà peut s’écraser potentiellement plus. Et donc voilà, je voulais déjà en faire un pour voir la méthode, toute l’organisation autour, parce que mine de rien y’a toute une logistique autour hyper importante pour que çà marche.»

« -Et après on a fait un stage. Je sais pas si tu connais la technique du GREB avec approche paille ? […] En fait, ils font des stages sur 2 jours. Ça a du tombé à peu près en même temps où on était dans les fondations, on a fait un stage en Touraine. […] Voilà, c’était intéressant. Ça a confirmer notre choix. Heureusement ! »

Le rôle des professionnels, travaillant eux aussi pour la plupart en tant que bénévoles, est d’aider à la préparation du chantier et de s’assurer de son bon déroulement. Ils supervisent le chantier et forment les personnes.

La phase de conception et l’expérience d’un autre chantier participatif se fait souvent en parallèle.

Le chantier participatif, l’autoconstructeur transmetteur et acteur du réseau

Le projet est mûr, l’été approche ainsi que la récolte de la paille. Les autoconstructeurs sont prêts pour le chantier.

« La confrontation avec la réalité par la mise en œuvre de savoirs et connaissances théoriques va être une étape importante dans le processus d’apprentissage. Elle va souvent nécessiter un temps d’adaptation, de tâtonnements avant de se familiariser avec la technique. […]

La débrouille et l’improvisation seront souvent de mise. Ces difficultés vont générer de nouvelles techniques, améliorer des techniques existantes, ou inventer des variantes. L’autoconstructeur va vraiment s’approprier la technique en l’adaptant à son projet. Il

pourra parfois inventer ses propres techniques et astuces. » (1)

1-DOY Mélody et NENERT Anaïs. L’autoconstruction, un processus d’apprentissage, entre virtualité et réalité. Rapport. Nature Culture Architecture. ENSASE. 2012. (p.8)

Au cour de ces chantiers, les autoconstructeurs, pour la plupart, nourrissent un blog. Ainsi, ils alimentent à leur tour les connaissances et expériences partagées sur internet, en plus de participer à un échange concret sur le chantier. On peut ainsi dire que l’autoconstructeur, pendant la construction, devient acteur du développement de la construction en paille, dans le sens où il transmet son expérience, qui pourra par la suite rassurer d’autres futurs propriétaires.

Des objectifs atteints ?

Tous les autoconstructeurs que j’ai rencontrés s’avèrent satisfait de leur maison. Cependant, ils expriment certains déboires ou difficultés rencontrés, qui pour autant ne leur font pas regretter l’expérience vécue, et les évoquent avec nostalgie.

De plus, une fois sortie de l’engouement autour du chantier participatif, le quotidien revenu et même si la maison n’est pas finie, les propriétaires manifestent le besoin d’une « pause » et se détachent de leurs intérêts pour la paille.

« Mais la mise en œuvre est beaucoup trop longue, heu. C’est un super chantier participatif, c’est génial, mais normalement on aurait dû en faire d’autre, on a pas le temps ! Dans les vies qu’on mène actuellement, c’est pas possible ! On a fait un troisième enfant, on veut se poser, on veut faire autre chose que de la construction, on est pas du métier non plus. »

« Et dès que tu sors du chantier participatif, tu te retrouves tout seul, devant ta masse de boulot, et là, çà devient difficilement gérable. »

Ce besoin de répit va jusqu’à une certaine lassitude pour certain. En effet, rappelons que ces autoconstructeurs avaient fait le choix de la paille en fonction de plusieurs paramètres, à savoir ; les préoccupations écologiques autour des matériaux, l’envie d’une maison saine, performante énergétiquement et d’un coût peu élevé à la fabrication. La fierté d’avoir une maison saine est peut être un des objectifs les mieux atteint, les autres étant relégués au second plan. Parfois même, les autoconstructeurs, par fatigue ou déception, reviennent pour les travaux restants à des matériaux de constructions conventionnels.

« Et puis là c’est les seuls rangs de parpaing qu’il y a dans la maison mais ma femme a dit, bon là y’en a marre on arrête, on va à l’efficace et au moins cher. »

Il serait intéressant de comprendre ce qui a été perçue comme un labeur trop conséquent, et dégager ce qui pourrait être amélioré afin que ce type de projet soit plus supportable ou accessible pour les autoconstructeurs.

2–LES DIFFICULTES RENCONTREES ET