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Les deux extrêmes d’une politique de prélèvement

Dans le document gestion de portefeuilles (Page 74-81)

L’examen des décisions de prélèvement de Yale entre les deux extrêmes d’une politique de prélèvement, à savoir favoriser la stabilité budgétaire ou la préservation du fonds de réserve, souligne le penchant important de l’Université pour un soutien fiable à ses activités. Si les universités traitaient les activités d’enseignement comme étant secondaires par rapport à la croissance du fonds de réserve, les prélèvements correspondraient à des niveaux compatibles avec la préservation du pouvoir d’achat du capital. Dans le cas le plus extrême, les institutions ne prélèveraient que les rende-ments excédant l’inflation, plaçant ainsi la préservation des capitaux investis au-dessus même d’un minimum de stabilité dans le soutien aux programmes pédagogi-ques. À l’autre extrême, si les universités ne recherchaient que des prélèvements réguliers sur le fonds de réserve, ceux-ci augmenteraient avec l’inflation, suivant un schéma indépendant des fluctuations de la valeur de marché du fonds de réserve.

Le schéma 3.4A illustre les modes de prélèvement résultant des deux extrêmes d’une politique de prélèvement dans le contexte des rendements du marché préva-lant lors des années 60 et 70. Le premier graphique montre les flux continus qui résulteraient d’une politique de prélèvement destinée à maintenir un soutien régulier indexé sur l’inflation, alors que le deuxième montre la volatilité des flux résultant de la préservation des valeurs du fonds de réserve indexées sur l’inflation. Notez

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1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 19791978

Année

La simulation d’une politique de prélèvement stable érode la valeur du fonds de réserve indexée sur l’inflation

Niveaux du fonds de réserve de 1960 à 1979

Prélèvement de 5 % de la valeur de marché indexée sur l’inflation

Valeur de marché

1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 19791978

Année

La simulation d’une politique de fonds de réserve stable protège ses valeurs indexées sur l’inflation Valeur du fonds de réserve de 1960 à 1979 Prélèvement du seul rendement excédant l’inflation

Valeur de marché

1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 19791978

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La politique de prélèvement de Yale favorise le soutien budgétaire au détriment de la préservation du fonds de réserve

Valeur du fonds de réserve de 1960 à 1979 Politique réelle de Yale

Schéma 3.4B La comparaison des valeurs du fonds de réserve illustre l’impact de politiques extrêmes

Note : Les données sont indexées sur l’inflation. Le portefeuille de simulation a une valeur de départ de 1 000 dollars et il est réajusté chaque année pour détenir 60 % d’actions et 40 % d’obligations. La situation réelle de Yale comprend des dons nouveaux alors que ce n’est pas le cas pour la simulation.

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La simulation d’une politique de prélèvement stable génère un soutien budgétaire régulier indexé sur l’inflation

Prélèvements de 1960 à 1979

Prélèvement de 5 % de la valeur de marché indexée sur l’inflation

Prélèvement

1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 19791978

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La simulation d’une politique de fonds de réserve stable génère un soutien budgétaire irrégulier

Prélèvements de 1960 à 1979

Prélèvement du seul rendement excédant l’inflation

Prélèvement

1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 19791978

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La politique de prélèvement de Yale génère un soutien budgétaire stable Prélèvements de 1960 à 1979

Schéma 3.4A La comparaison des prélèvements illustre l’impact de politiques extrêmes

Note : Les données sont indexées sur l’inflation. Le portefeuille de simulation a une valeur de départ de 1 000 dollars et il est réajusté chaque année pour détenir 60 % d’actions et 40 % d’obligations. La situation réelle de Yale comprend des dons nouveaux alors que ce n’est pas le cas pour la simulation.

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qu’une attention exclusive portée à la préservation du pouvoir d’achat du fonds de réserve n’aurait permis aucun prélèvement pour le soutien au budget opérationnel pendant plus de la moitié de la période étudiée.

Le schéma 3.4B montre l’impact de ces politiques de prélèvement extrêmes sur le fonds de réserve. La recherche d’un prélèvement stable, comme illustré sur le premier graphique, produit une volatilité énorme pour le fonds de réserve. À l’inverse, la préservation du pouvoir d’achat du fonds de réserve favorise la relative stabilité des capitaux, comme le montre le deuxième graphique.

Les politiques de prélèvement conçues pour apporter un soutien constant aux activités, indexé sur l’inflation, et illustrées par les graphiques du haut des schémas 3.4A et 3.4B, dépendent de marchés financiers positivement orientés pour fonc-tionner correctement. Observez les résultats spectaculairement différents des simulations menées en utilisant les données des années 60 et celles des années 70.

Les années 60 ont généré des rendements substantiels pour les investisseurs.

Les actions ont rapporté 7,8 % par an et les obligations 3,5 %, dans un environ-nement où l’inflation n’a été que de 2,5 %. Les conseillers adoptant des politiques de prélèvement stable n’ont fait que peu de dégâts sur le fonds de réserve, ne provoquant qu’un déclin du pouvoir d’achat d’environ 10 %.

À l’inverse, les conditions économiques et financières des années 70 ont grave-ment menacé les institutions possédant des fonds de réserve, car l’inflation élevée et les mauvais rendements des marchés financiers ont entraîné des coupes substantielles dans les capitaux. L’inflation, s’élevant à 7,4 % par an, a dépassé les rendements des actions américaines (5,9 % l’an), des obligations (7 %) et les rendements monétaires (6,3 %). Les investisseurs n’étaient nulle part à l’abri. Les simulations montrent qu’en 1970, si un portefeuille traditionnel avait suivi une politique de prélèvement stable, plus de 60 % de son pouvoir d’achat seraient partis en fumée dix ans plus tard.

Les politiques de prélèvement focalisées sur la préservation du fonds de réserve, illustrées sur les graphiques médians des schémas 3.4A et 3.4B, ont échoué à fournir un quelconque soutien au budget opérationnel pendant douze des vingt années qui se sont étalées de 1960 à 1979, soulignant l’impossibilité de fonctionner dans le cadre d’une politique étroitement centrée sur la préservation du capital. Même dans l’environnement favorable des années 60, les rendements de l’investissement n’ont apporté aucun soutien au budget opérationnel pendant trois années sur dix. Les années 70 ont été tellement défavorables que même avec un seul prélèvement décent au profit du budget, les politiques de fonds de réserve stable ont échoué à préserver les capitaux, leur pouvoir d’achat ayant décliné de presque 24 %.

La politique de Yale, dont les niveaux de prélèvement et de fonds de réserve sont illustrés par les graphiques du bas des schémas, respecte la règle du prélèvement

stable beaucoup plus fidèlement que celle du fonds de réserve stable. De la même manière que d’autres institutions dotées d’un fonds de réserve, Yale a subi dans les années 70 un déclin formidable du pouvoir d’achat de son fonds de réserve car l’institution a puisé des fonds pour soutenir la mission d’enseignement de l’Université.

En prélevant à des taux impossibles à tenir sur le long terme, le pouvoir d’achat des capitaux a décliné spectaculairement, baissant de plus de 40 % dans les années 70.

Le comportement de Yale dément la suggestion de Hansmann selon laquelle la préservation du fonds de réserve domine la stratégie de l’institution.

CONCLUSION

La politique d’investissement et de prélèvement soutient les objectifs pour les-quels les institutions d’enseignement accumulent un fonds de réserve, fournissant le cadre nécessaire à une stabilité accrue, à une indépendance consolidée et à l’excel-lence universitaire. En atteignant l’objectif à long terme de la préservation du pou-voir d’achat du capital et l’objectif à moyen terme d’un soutien régulier et consé-quent au budget opérationnel, les colleges et les universités répondent à l’exigence de l’économiste James Tobin selon qui un fonds de réserve « doit continuer de soutenir à l’avenir l’ensemble des activités qu’il soutient aujourd’hui »1.

Les administrateurs sont confrontés au défi d’équilibrer les objectifs contradic-toires de la préservation des capitaux et du soutien aux opérations courantes. Les règles de prélèvement résolvent cette tension en précisant l’importance relative de la réaction à la valorisation actuelle du fonds de réserve (contribuant ainsi à la préservation du capital) et celle de la réaction aux niveaux antérieurs de ment (contribuant de cette façon au soutien financier régulier). Le taux de prélève-ment ciblé joue un rôle important dans la détermination de la capacité d’un fonds à atteindre l’objectif de son intergénérationnalité, des taux de prélèvement trop élevés favorisant les universitaires actuels alors que des taux trop bas privilégient ceux de demain.

Les donateurs du fonds de réserve souhaitent apporter un soutien permanent à une activité désignée par eux, exigeant des gestionnaires qu’ils préservent la capacité de chaque aspect spécifique du fonds afin de servir à l’achat des mêmes biens et services dans la durée. Les taux d’inflation auxquels sont confrontées les institutions d’enseignement dépassent l’augmentation générale des prix car ces organisations, 1. Tobin, “Endowment Income”, 427.

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très dépendantes des ressources humaines, ne parviennent pas à réaliser des gains de productivité, ce qui accroît les difficultés à maintenir le pouvoir d’achat d’un fonds de réserve. Les dons nouveaux ne parviennent pas à soulager la pression exercée sur la préservation de la valeur du capital, car les contributions au fonds de réserve servent à étendre l’ensemble des activités financées par l’institution et ils accroissent la taille du portefeuille à préserver.

Le processus qui consiste à définir et à formuler les objectifs bénéficie à tous les gestionnaires, car il mène à des conclusions différentes en fonction des investisseurs.

Dans le cas d’institutions aussi proches que les fonds de réserve et les fondations, les différences de caractéristiques des organisations font différer les objectifs. Les dissemblances d’environnements opérationnels conduisent à fixer des objectifs d’investissement différents qui s’adaptent aux possibilités et aux contraintes spé-cifiques d’une institution donnée.

En fournissant le critère définitif à partir duquel mesurer l’intérêt de diverses règles d’investissement et de prélèvement, les objectifs d’investissement servent de fondement au processus de gestion des capitaux. Ces objectifs influencent la philo-sophie qui sous-tend la création des portefeuilles, fournissant une aide précieuse aux gestionnaires des fonds. Les investisseurs évaluent différentes combinaisons d’allocations d’actifs et de règles de prélèvement en fonction de leur capacité à atteindre les objectifs de l’institution, plaçant la formulation des objectifs d’inves-tissement au cœur du processus d’invesd’inves-tissement.

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