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Les aides d’Etat et le financement des SIEG

Dans le document Droit administratif (Page 179-197)

Section 2. Les fonctions de l’administration

B. Les aides d’Etat et le financement des SIEG

161. Présentation

Le Traité CE organise un contrôle par la Commission européenne des aides octroyées par les pouvoirs publics863. Les aides octroyées par les pouvoirs publics

interfèrent avec une certaine conception de la concurrence, notamment parce qu’elles avantagent leurs bénéficiaires par rapport à leurs concurrents. Le Traité CE reconnaît cependant la compatibilité de plein droit de certaines aides et la compétence de la Commission pour déclarer certaines aides compatibles avec le marché intérieur. Alors que le Traité CE prohibe les ententes et abus de position dominante, les dispositions relatives aux aides d’État sont plus nuancées, voire plus souples864.

Les aides d’État constituent une matière particulièrement sensible. D’une part, pour les États membres, dans la mesure où elles constituent un des principaux instruments des politiques économiques nationales865 et, d’autre part, parce que

les aides publiques posent une série de problèmes économiques pour lesquels les outils d’analyse économique semblent faire l’objet de nombreuses controverses au sein de cette discipline866. Il s’agit dès lors de trouver un équilibre entre, d’une part,

les exigences d’une économie de marché ouverte dans laquelle la concurrence

858

C.J.C.E., 21 mars 1974, BRT II, aff. 127/73, op. cit., pt 20 ; C.J.C.E., 11 avril 1989, 11 avril 1989, Ahmed Saeed Flugreisen, aff. C-66/86, op. cit., pt 55).

859

C.J.C.E., 14 juillet 1981, Züchner, aff. 172/80, Rec., 1981, p. 2021.

860 C.J.C.E., 23 octobre 1997, Commission c/ République française, aff. C-159/94, Rec., 1997, p. I-5815, pt 66.

861 C.J.C.E., 27 avril 1994, Almelo, aff. C-393/92, op. cit. ; C.J.C.E., 23 octobre 1997,

Commission c/ République française, aff. C-159/94, op. cit.

862

C.J.C.E., 21 septembre 1999, Albany, aff. C-67/96, op. cit.

863 L’expression doit être, en cette matière comme dans tout le droit communautaire, interprétée très largement.

864 Ph.-E. P

ARTSCH et M. WATHELET, « Délimitation des contours de la notion d’aide d’État en droit communautaire », in Les aides d’État en droit national et en droit communautaire, colloque C.D.V.A., Bruxelles, Bruylant, 1999, pp. 3-59, spéc. p. 11.

865

M. DONY, Droit de la Communauté et de l’Union européenne, op. cit., spéc. p. 182. 866 D. G

ÉRADIN, op. cit., spéc. pp. 200-206 ; certains problèmes renvoient aux notions

d’échecs de marchés et d’externalités (supra, chap. 1 ; Ph.-E. PARTSCH et M. WATHELET, op. cit., spéc. p. 10).

n’est pas faussée et, d’autre part, les interventions des États en vue de corriger certaines défaillances du marché867.

En droit communautaire, les aides d’État affectent clairement de nombreuses politiques publiques et se greffent sur un autre sujet particulièrement sensible : le financement, par les États membres, des services d’intérêt général868, publics et

autres services à la collectivité, et de leurs entreprises publiques (au sens organique).

162. La notion

Sur le plan économique, « les aides sont des transferts, c’est-à-dire des revenus attribués à des personnes ou groupements, qui ne constituent pas le paiement d’un service ou d’un produit »869. Elles modifient la répartition du produit national sans l’affecter en tant que tel. Si le Traité CE n’a pas défini la notion d’aide d’État, le droit communautaire a construit une définition particulièrement large de celle- ci870. Il s’agit d’un avantage accordé, directement ou indirectement871, à certaines

entreprises ou certaines productions, à l’aide de ressources d’origine étatique, qui affecte ou est susceptible d’affecter la concurrence et les échanges entre États. La notion d’avantage fait l’objet d’une approche économique et pragmatique par la Cour de justice et la Commission européenne. Elles s’attachent, dans chaque cas d’espèce, à apprécier si le bénéficiaire se trouve dans une position plus avantageuse. L’interprétation est résolument finaliste et passe par une analyse des effets des mesures, afin de s’assurer que la concurrence n’est pas faussée. Une approche globale de la mesure est réalisée. La mesure n’est pas nécessairement unilatérale. Lorsque des obligations sont réciproques, les instances communautaires vérifient l’existence d’un déséquilibre qui traduit un avantage872. La forme de l’aide importe peu : subventions, garanties, renonciation à percevoir des recettes, transactions à prix anormal, etc. Le support juridique est tout aussi indifférent873.

La condition de spécificité ou de sélectivité est importante, quoique délicate à concrétiser parfois874 : l’avantage doit être octroyé à une entreprise ou production

867

Ph.-E. PARTSCH et M. WATHELET, op. cit., spéc. p. 11.

868 L’art. 86 du Traité CE sera examiné plus en détail dans le § 4 de la présente section. 869 Ph.-E. P

ARTSCH et M. WATHELET, op. cit., spéc. p. 5. 870 A. B

ENOIT-MOURY et N. THIRION, op. cit., spéc. p. 78. 871

Cela signifie que les qualités de bénéficiaire et de destinataire de l’aide ne coïncident pas nécessairement (dans le même sens : Ph.-E. PARTSCH et M. WATHELET, op. cit., spéc. p. 15). 872 J.-P. K

EPPENNE, Guide des aides d’État en droit communautaire, op. cit., spéc. p. 19. 873 M. W

AELBROECK et A. FRIGNANI, Concurrence, coll. Commentaire MEGRET : le droit de Communauté économique européenne, vol. 4, Bruxelles, éd. U.L.B., 1987, mis en avant par Ph.-E. PARTSCH et M. WATHELET, op. cit., spéc. p. 15 ; voy. cependant infra, § 3, la discussion sur les relations entre les marchés publics et les aides d’État.

874

Les opérations « Maribel » constituent un exemple de la difficulté ; voy. not. sur le sujet, Avis n° 175/1 de la Commission des normes comptables relatif au traitement dans les comptes arrêtés pour l'exercice 1996 des aides Maribel bis et ter octroyées pour les exercices 1994, 1995 et 1996, C & FP, 1997/4, pp. 5-9 ; D. WIJNS, « Gegeven is gegeven.

déterminée. Les mesures générales relèvent d’autres dispositions du Traité CE875. Sous l’impulsion de la Cour de justice, la Commission a retenu le critère de dérogation afin de distinguer les mesures qui visent le développement général, et qui par conséquent ne peuvent être considérées comme des aides, de celles qui sont spécifiques et qui bénéficient à des bénéficiaires identifiables876.

L’origine étatique de l’aide est comprise tout aussi largement que la notion d’avantage877. Elle suppose que l’aide soit accordée par l’État878 au moyen de ses propres ressources879. En pratique, les deux conditions sont appréciées

globalement et de manière systémique. Elles font l’objet d’une approche économique : la mesure doit être supportée, directement ou indirectement, par le budget public, quelle qu’en soit la forme880 (manque à gagner, renonciation à

percevoir des recettes fiscales, allocations directes de fonds publics, ...)881. Une évolution récente suscite un vif débat en doctrine. En effet, les instances communautaires ont admis que cette condition est remplie lorsqu’une entité publique met à disposition des fonds d’origine privée (un établissement de crédit gère les dépôts d’épargnants)882. Cette interprétation large a été vivement critiquée

par la doctrine883.

La condition d’affectation de la concurrence884 est interprétée très largement par les instances communautaires et semble presque inhérente à la notion d’avantage885. Toutefois, la concurrence peut être affectée de deux manières : soit dans les coûts de production (et donc, in fine, le prix de vente final), soit dans les relations entre concurrents, ce qui suppose que la concurrence existe et qu’un De Maribelvermindering of hoe de Europese concurrentieregels toepassen op RSZ- bijdragenverminderingen », Kijk Uit, 2000/2, pp. 2-4 ; A. SADZOT, « Les mesures de soutien

à l'emploi : le cas Maribel » in Les aides d'État en droit communautaire et en droit national, Bruxelles, Bruylant, 1999, pp. 141-163.

875 M. D

ONY, Droit de la Communauté et de l’Union européenne, op. cit., spéc. p. 181 ; notons cependant que certaines mesures à portée générale peuvent constituer des aides si elles favorisent des produits ou services nationaux (pour un ex. : C.J.C.E., 10 décembre 1969, Commission c/ France, aff. 6/69 et 11/69, Rec., 1969, p. 523).

876

16me Rapport de la concurrence de la Commission européenne, cité par Ph.-E. PARTSCH

et M. WATHELET, op. cit., spéc. p. 18.

877 M. D

ONY, « La notion d’aide d’État », C.D.E., 1994, pp. 399-416, spéc. p. 401.

878 En droit communautaire général, la notion d’État reçoit une interprétation largement fonctionnelle.

879

Art. 87 (ex-art. 92) du Traité CE. 880 Ph.-E. P

ARTSCH et M. WATHELET, op. cit., spéc. p. 25.

881

Pour plus d’exemples, voy. J.-P. KEPPENNE, Guide des aides d’État en droit

communautaire, op. cit., spéc. pp. 111-119 ; G. KARYDIS, « Le principe de l’opérateur

économique privé », R.T.D.E., 2003, pp. 389-413, spéc. p. 389 ; pour une illustration où cette condition n’a pas été considérée comme remplie par la Cour de justice, voy. C.J.C.E., 13 mars 1991, Preussenelektra, aff. C-379/89, Rec., 1991, p. I-2099 ; sur cet arrêt, voy. O. SEGNANA, « Environnement et marché intérieur de l’électricité. L’arrêt Preussenelektra », C.D.E., 2002, pp. 131-159.

882 Déc. n° 94/662/CE de la Commission, du 27 juillet 1994, concernant la souscription de CDC-Participations à des émissions obligataires d’Air-France, J.O.C.E., L 258 du 6 octobre 1994, p. 26 et s. ; T.P.I.C.E., 12 décembre 1996, Air France c/ Commission européenne, aff. T-358/94, Rec., 1996, p. II-2109.

883

Souligné par A. BENOIT-MOURY et N. THIRION, op. cit., spéc. p. 78. 884 Art. 87 (ex-art. 92) du Traité CE.

885 J.-P. K

EPPENNE, Guide des aides d’État en droit communautaire, op. cit., spéc. p. 120 ; Ph.-E. PARTSCH et M. WATHELET, op. cit., spéc. p. 26.

marché pertinent soit par conséquent déterminé. Une nouvelle fois, des outils d’analyse économiques sont très largement utilisés par les instances communautaires.

L’affectation de la concurrence n’est, au terme de cette analyse, pas toujours établie. Ainsi, des mesures qui visent à développer des infrastructures dans la poursuite d’un intérêt général, pour autant que ces dernières soient accessibles sans discrimination à tous les usagers, ne sont pas considérées comme des aides d’État886.

L’aide doit, en outre, affecter les échanges entre États membres887. Si la condition semble transversale et avoir été insérée dans le Traité CE pour limiter le champ d’action des instances communautaires à ce qui est nécessaire pour la réalisation du marché intérieur, elle est interprétée, ici comme ailleurs, largement par ces dernières. Au demeurant, certains marchés étant restés cloisonnés, les aides peuvent renforcer ces cloisonnements, raison qui a guidé la Commission européenne à élargir son intervention888.

163. Nuances

La présence d’une aide au sens de l’article 87, § 1, du Traité CE suppose des vérifications complémentaires. Elle peut encore rentrer dans les exceptions prévues par les §§ 2 et 3 de l’article 87 du Traité CE.

L’article 87, § 2, du Traité CE précise les aides compatibles avec le marché commun. La Commission n’est pas compétente pour apprécier l’opportunité des dérogations prévues par cette disposition889, mais seulement pour apprécier si les

conditions d’application sont remplies890. Sont de plein droit compatibles avec le marché intérieur : les aides à caractère social accordées aux consommateurs individuels, à condition que celles-ci le soient sans discrimination liée à l’origine des produits ; les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou d’autres évènements extraordinaires ; les aides aux régions allemandes affectées par la division de l’Allemagne.

L’article 87, § 3, du Traité CE précise les aides qui peuvent être déclarées compatibles avec le marché commun et pour lesquelles la Commission dispose d’un large pouvoir discrétionnaire. Cette disposition vise : les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi ; les aides destinées à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt européen commun ou à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre ; les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun ; les aides destinées à

886 J.-P. K

EPPENNE, Guide des aides d’État en droit communautaire, op. cit., spéc. p. 122. 887 Art. 87 (ex-art. 92) du Traité CE.

888

Le marché de l’audiovisuel cloisonné en raison d’obstacles naturels, de la langue et de la culture (sur la notion, voy. supra, titre II, chap. 1), décision relative à la Société française de production du 2 octobre 1996, J.O.C.E., L 95 du 10 avril 1997, spéc. p. 19, pt VIII.

889 D. G

ÉRADIN, op. cit., spéc. p. 206. 890 Ph.-E. P

promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges et la concurrence dans la Communauté dans une mesure contraire à l'intérêt commun891 ; les aides reprises dans des catégories

d’aides déterminées par le Conseil892.

En outre, l’article 89 du Traité CE autorise le Conseil à adopter tous règlements utiles en vue de l’application des articles 87 et 88 du Traité CE. Sur cette base, le Conseil a adopté un règlement habilitant la Commission à exempter certaines catégories d’aides d’État. Sur base de cette habilitation, la Commission a adopté divers règlements d’exemption, notamment pour les aides dites de minimis, les aides en faveur de petites et moyennes entreprises, les aides en matière de recherche et développement, les aides en matière d’emploi, les aides de formation et les aides respectant la charte approuvée par la Commission pour chaque État membre pour l’octroi d’aides à finalité régionale893.

164. Politiques publiques et aides d’Etat

La définition très extensive d’aide d’État permet aux instances communautaires de contrôler de nombreuses interventions étatiques dans le champ économique. L’ensemble des politiques publiques est susceptible d’être examiné par la Commission européenne au travers de ses compétences en matière d’aides d’État. Les interactions entre la notion d’aides d’État et l’État dans ses fonctions de

propriétaire, d’investisseur ou de sauveur sont bien connues. Récemment, la

délicate question des compensations des obligations de service public a fait l’objet de plusieurs arrêts importants. Fondamentalement, pour échapper au contrôle de la Commission dans le cadre des aides d’État894, les pouvoirs publics doivent se

comporter comme des opérateurs économiques privés895. Ce standard peut heurter les publicistes, habitués à justifier l’action des pouvoirs publics par l’intérêt général. Le droit communautaire ne prohibe pas à proprement parler la poursuite de l’intérêt général ou des considérations autres qu’économiques, mais il institue une série de mesures afin de contrôler, d’une manière ou d’une autre, leur impact sur la concurrence896. La Cour de justice s’est prononcée clairement en ce sens.

891

Voy. not. T.P.I.C.E., 18 septembre 1995, Société internationale de diffusion et d'édition c/ Commission, aff. T-49/93, Rec., 1995, p. II-2501 et s., spéc. pts 61-65.

892

M. DONY, Droit de la Communauté et de l’Union européenne, op. cit., spéc. p. 183. 893 Ibid.

894 Pour autant que l’obligation de notification s’applique. 895 G. K

ARYDIS, op. cit., spéc. p. 38 ; pour une critique radicale du standard, M. PARISCH, « On the Private investor principle », E.L.R., 2003, pp. 70-89. Le standard est pour le moins sujet à interprétation et peut donner lieu à des applications imprévisibles, inacceptables en tant que telles dans un État de droit. Il constitue une version idéalisée du comportement humain, démentie par de nombreuses données empiriques et scientifiques : les bulles spéculatives pour l’observateur non initié ne peuvent s’expliquer que par une rationalité très limitée des acteurs économiques (sur les limites de la rationalité humaine dans le cadre des transactions économiques, voy. supra, chap. 1 ; voy. égal. C. KINDLEBERGER, Histoire mondiale de la spéculation financière (Manias, Panics and Crashes), 4e éd., traduit de l'américain par P.-A. ULLMO et G. RUSSELL, Hendaye, Valor, 2004).

896 La mesure ayant été qualifiée d’aide, elle ne serait pas pour autant nécessairement considérée comme incompatible.

Elle a précisé que la qualification d’une mesure étatique au regard de l’article 92 (actuel art. 87) du Traité CE doit être fondée sur ses effets sur la concurrence, dans la mesure où cette disposition ne distingue pas selon les causes et objectifs des interventions visées, mais les définit en fonction de leurs effets897. Le principe de l’opérateur économique privé n’est pas dépourvu d’une certaine connotation idéologique. Il implique, d’une part, que l’État doit se comporter selon le même mode opératoire qu’une société privée898 et, d’autre part, que les actions de l’État soient considérées par rapport au fonctionnement du marché. En outre, le standard de l’opérateur privé peut parfois générer des discriminations vis-à-vis des entreprises publiques par rapport aux entreprises privées899, les unes et les autres

restant dans des situations parfois difficilement comparables900.

L’État propriétaire doit tenir compte du droit des aides d’Etats. Des transactions à prix anormal sont parfois qualifiées d’aides d’État. Sont susceptibles d’être rangées dans cette catégorie, des ventes à prix trop réduit, la fourniture d’un service et la mise à disposition d’infrastructures ou d’informations à des conditions qui ne reflètent pas les coûts réels901. La démarche suppose parfois de comparer le prix

demandé ou payé à un prix normal. Il importe de se réserver les preuves des démarches réalisées pour vendre un bien ou du contexte particulier de la vente afin de justifier d’éventuels écarts de prix902.

L’organisation de procédure de mise en concurrence (ou d’une technique d’enchère) a parfois suffi pour sortir de la difficulté de cette démonstration, mais ne constitue pas une garantie en tant que telle. Certaines transactions font l’objet d’une attention particulière de la Commission européenne903.

Les opérations d’aliénation d’actifs de grande ampleur, telles les privatisations, ont très tôt fait l’objet des attentions de la Commission européenne. Elle a souligné que la mise en vente dans le cadre d’une procédure ouverte, transparente, organisée selon des critères non discriminatoires, était un outil précieux afin d’exclure une éventuelle application de l’article 87 du Traité CE904. La Cour de

897 Voy. not. C.J.C.E., 10 juillet 1986, Belgique c/ Commission, aff. 40/85, Rec., 1986, p. 2263.

898

Souligné égal. par M. PARISCH, op. cit., spéc. p. 88.

899 L’État est sanctionné là où un actionnaire privé ne l’est pas lorsqu’il investit dans des entreprises déficitaires pour des raisons stratégiques (image de marque, redéploiement d’activités) (voy., en ce sens, M. DEBENE, op. cit., spéc. p. 245).

900 Dans le même sens : A. B

ENOIT-MOURY et N. THIRION, op. cit., spéc. p 84 ; A. VERHOEVEN, « Privatisation and EC Law : is the European Commission ‘neutral’ with respect to public versus private ownership of companies ? », I.C.L.Q., 1996, p. 861 et s., spéc. pp. 868-870. 901

J.-P. KEPPENNE, Guide des aides d’État en droit communautaire, op. cit., spéc. p. 59. 902 Tentative infructueuse de vente ou vente dans le cadre d’une faillite.

903 Par ex. les transactions immobilières (communication de la Commission sur les éléments d’aides d’État contenues dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics, J.O.C.E., C 209 du 10 juillet 1997, p. 3 ; voy. égal. les réf. citées par J.-P. KEPPENNE, Guide des aides d’État en droit communautaire, op. cit., spéc. p. 62, notes 191 à 193).

904 Voy. le 21e Rapport sur la politique de la concurrence de 1991, § 248 ; le 22e Rapport sur la politique de la concurrence de 1992, § 464 ; le 23e Rapport sur la politique de la concurrence de 1993, § 403.

justice a approuvé cette solution, tout en précisant que la procédure n’excluait pas

ipso facto tout risque de qualification d’aide905.

L’État sauveur906 est contrarié par le droit des aides d’Etat. Les interventions des pouvoirs publics qui ont pour objectif de soutenir des entreprises en difficulté n’échappent pas au droit communautaire des aides d’État. Sans surprise d’ailleurs, puisque dans la logique de marché, ces dernières sont censées disparaître. Les perspectives communautaire et nationale trouvent, dans cette question, un nouveau terrain de tension, les préoccupations sociales et stratégiques des États membres les conduisant à soutenir certaines entreprises en difficulté. La qualification d’aide d’État n’est guère influencée par la situation particulière des entreprises. Néanmoins, la Commission a quelque peu précisé la manière dont elle apprécie les conditions de la dérogation ouverte par l’article 87, § 3 (ex-art. 92, § 3) du Traité CE907. Cet article considère comme compatibles avec le marché

commun, les aides d'État destinées « à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques ». Les lignes directrices s'appliquent à toute entreprise en difficulté, y compris les petites et moyennes entreprises, et à tout secteur, y compris l'agriculture. Après avoir défini les entreprises en difficulté908, la Commission a précisé que l’aide au sauvetage devait être suivie par une restructuration réaliste, qui tend à assurer la viabilité à long terme de l’entreprise. Nécessairement limitées dans le temps, les aides au sauvetage ne peuvent tendre au maintien d’un statu quo et doivent remplir une série de conditions909. Les aides à la restructuration ne peuvent être accordées qu’une seule fois et sont strictement encadrées par la Commission.

L’appréciation des conditions par la Commission européenne soulève des problèmes récurrents en droit de la concurrence. Les analyses économiques et financières sont délicates. L’évaluation des chances d’un plan de restructuration et de l’impact de l’aide sur la concurrence est particulièrement difficile à apprécier910.

L’État investisseur911 doit composer avec les contraintes du droit des aides d’Etat. L’État peut parfois acquérir des participations en capital. La plupart des États membres ont mis en place des sociétés publiques qui ont pour mission de favoriser « la création, la réorganisation ou l’expansion économique d’entreprises

905 A. B

ARTOSCH, « The Relationship between Public Procurement and State Aid Surveillance- The Toughest Standard Applies ? », C.M.L.Rev., 2002, pp. 551-576, spéc. p. 554.

906 L. I

DOT, « Les aides aux entreprises en difficulté et le droit communautaire », R.T.D.E.,

1998, pp. 295-315.

907 Communication de la Commission - Lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté, J.O.C.E., C 288 du 9

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