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Critères de la gestion privée

Dans le document Droit administratif (Page 159-161)

Section 2. Les fonctions de l’administration

A. Critères de la gestion privée

139. Les critères de la gestion privée des services publics753

La création de ce qu'il est convenu d'appeler un SERVICE PUBLIC FONCTIONNEL nécessite la réunion de deux conditions754. D’abord, un organisme privé doit être chargé de gérer une activité érigée en service public par les gouvernants, c’est- à-dire par la loi ou en vertu de la loi. Ensuite, cet organisme doit conserver son caractère privé.

140. L’activité doit avoir été érigée en service public par les gouvernants755

Cet élément est capital, puisque les concessions, les autorisations ou les agréments ne portent pas nécessairement sur des activités de service public756.

Comment savoir si l'on est en présence ou non d'une telle activité?

C'est dans les textes757 qu'il convient de rechercher la nature exacte de l'activité. Il

ne suffit pas, en effet, qu'une activité ait été réglementée par ou en vertu de la loi pour conclure à la gestion privée d'un service public, car nombre d’activités ont fait l'objet de réglementations minutieuses par ces pouvoirs publics, sans pour autant constituer des services publics.

Il faut, de plus, que les conditions de la concession, de l'autorisation ou de l'agrément comprennent des prestations positives – c’est-à-dire des obligations

752 Voy. par exemple, en ce qui concerne la Région de Bruxelles-Capitale, l’ordonnance du 27 avril 1995 relative aux services de taxis et aux services de location de voiture avec chauffeur.

753

Nous faisons ici référence aux critères dégagés par A. BUTTGENBACH, Manuel de droit administratif, o.c., n° 256 et s., p. 248 et s.

754 Voy. C.A., n° 23/95, 2 mars 1995, pt. B.3.2.

755 C'est-à-dire, rappelons-le, par la loi ou en vertu de la loi.

756 Ainsi en est-il des concessions domaniales qui ne constituent qu’un mode d'utilisation privative du domaine public; notons aussi dès à présent que les pouvoirs publics utilisent fréquemment le procédé des autorisations et agréments pour réglementer des activités privées qui ne changent pas de nature pour autant, ou comme support de techniques incitatives. À ce sujet, voy. la sect. 4 du chap. 1., Droit public économique, M.HERBIET ET

AL.DURVIAUX, La Charte, 2008

qui ne sont normalement pas imposées à une entreprise privée gérant une activité purement privée – imposées par les pouvoirs publics et qu'ils peuvent, à tout moment, étendre ou restreindre dans l'intérêt général758,759,760.

141. Quel est le contenu de ces prestations positives?

Le contrôle des véhicules en circulation est exercé par des sociétés privées agréées par le Gouvernement. Les obligations suivantes sont des prestations positives761:

Une zone d’action est dévolue à chaque organisme. Toutefois, ils sont tenus d’effectuer le contrôle de tout véhicule se présentant à leur station, même si celui- ci ne dépend pas de leur zone d’action. Les biens immobiliers destinés à exercer leurs missions doivent leur appartenir en pleine propriété. Des locaux de la station doivent pouvoir être mis gratuitement à la disposition de l’Administration de la Réglementation de la Circulation et de l’Infrastructure, sur demande du ministre, afin d’accueillir des guichets de la DIV. En cas de dépassement des recettes d’un seuil fixé, l’excédent doit être versé au Fonds de prévision et d’utilité publique de l’inspection des véhicules automobiles, afin de régulariser les conditions d’exploitation des organismes.

Les prestations positives imposées aux crèches autorisées par l’ONE sont les suivantes762. Elles ne peuvent refuser des enfants que pour certains motifs limitativement énumérés et sont tenues d’inscrire les enfants dans le respect de l’ordre de demande d’inscription763. Leur capacité d'accueil doit se situer entre 18 à

48 enfants (sauf dérogation). Elles doivent être ouvertes au moins 10 heures par jour, du lundi au vendredi, 220 jours par an764. Les frais demandés aux parents

758 Observons d'ailleurs que ces obligations particulières ne sont que la contrepartie d’avantages reconnus auxdits organismes.

759

A. BUTTGENBACH, Manuel de droit administratif, o.c., n° 261, p. 251. 760

Remarquons cependant que l’organisme agréé doit pouvoir, selon certaines modalités, renoncer à son agrément. Dans son arrêt n°10/93, la Cour d’arbitrage a été amenée à se prononcer sur la légalité de l’article 90 de la loi du 17 juin 1991 portant organisation du secteur du crédit et harmonisation du contrôle et des conditions de fonctionnement des établissements de crédit. Cet article interdisait de façon générale et absolue aux associations de crédits agréées par la Caisse Nationale de Crédit Professionnel – aujourd'hui transformée et privatisée – de renoncer à leur agrément. Dans son arrêt d’annulation, la Cour d’arbitrage estime que si le législateur peut valablement estimer que la fonction d’intérêt public exercée par les associations de crédits agréées exige que la renonciation à l’agrément entraîne la perte des avantages retirés de cet agrément et soit soumise, notamment dans un souci de stabilité et continuité, à certaines conditions. Encore est-il que la disposition de l’article 90 alinéa 3, litera g), telle qu’elle est formulée (...) porte atteinte de manière excessive à la liberté des associations de crédits agréées en raison du caractère absolu de l’interdiction prescrite à leur égard.

761 Voy. notamment les articles 4, 11, 12, 23 et 24 de l’arrêté royal du 23 décembre 1994 portant détermination des conditions d’agrément et des règles du contrôle administratif des organismes chargés du contrôle des véhicules en circulation.

762

En vertu de l’article 6, §2 du décret du 17 juillet 2002 portant réforme de l’Office de la Naissance et de l’Enfance.

763 Article 50 de l’arrêté royal du 27 février 2003 du Gouvernement de la Communauté française portant réglementation générale des milieux d’accueil.

sont liés au revenu mensuel net du ménage765. Si la contribution financière des parents dépasse un certain seuil, l’ONE perçoit une cotisation. Ces sommes sont ensuite réparties entre les différentes crèches afin de garantir à l’ensemble de celles-ci un équilibre financier.

Les exemples sont nombreux766. Dans chaque cas, il est possible de cerner un

ensemble de prestations positives imposées dans l’intérêt général, qui dépassent notablement les obligations que dicte le souci de réglementer une simple activité privée.

142. Qui peut ériger une activité en service public?

Seul le législateur est compétent pour ériger une activité en service public. Le fait de soumettre à une réglementation aussi stricte une activité qui, dans bien des cas, était libre, et d'en subordonner l'exercice à l'obtention d'une concession ou d'une autorisation, constitue, à n'en pas douter, une restriction importante au principe de la liberté du commerce et de l'industrie. A fortiori en est-il ainsi lorsque cette réglementation aboutit à ériger une activité en service public: seul le législateur peut donc créer un tel service et le faire gérer selon un régime largement dérogatoire au droit commun. Si le législateur délègue à l'exécutif une partie de son pouvoir, cette délégation doit être certaine.

143. L’organisme doit conserver son caractère privé nonobstant le fait qu’il assure la gestion d’un service public

L'organisme doit procéder de l'initiative privée, c'est-à-dire qu'il doit avoir été créé sinon exclusivement, du moins majoritairement, par des particuliers (personnes physiques ou personnes morales). Il doit, de plus, garder son caractère privé tout au long de son existence: il ne peut pas, comme tel, être soumis à la haute direction des gouvernants, mais exclusivement à celle des particuliers, du moins en ce qui concerne sa structure, son organisation et son fonctionnement interne. Le fait de son autorisation ou de son agrément par exemple – dans le cadre de son activité de service public – ne peut donc en rien interférer sur sa nature juridique. Son activité est soumise à un régime particulier767.

B. Des modes de gestion des services publics fonctionnels :

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