• Aucun résultat trouvé

Le droit communautaire et les services publics

Dans le document Droit administratif (Page 174-176)

Section 2. Les fonctions de l’administration

C. Le régime juridique de l’exploitant et de l’activité

IV. Le droit communautaire et les services publics

158. Présentation

Le droit communautaire ne connaît pas à proprement des services publics au sens du droit belge, puisqu’il exclu nécessairement de son champ les concepts de droit interne. L’interprétation du droit communautaire est fonctionnelle dans son principe, par pragmatisme, il s’agit de dépasser les spécificités nationales afin de construire un référentiel commun sous l’angle juridique.

Il n’est reste pas moins que le droit communautaire a eu un impact important sur les règles régissant l’organisation, le fonctionnement et le financement des services publics (au sens organique et fonctionnel) au travers essentiellement de divers concepts et politiques. Les notions d’entreprise publique et de service

824

HERBIET M., La notion d'autorité administrative dans le service public fonctionnel, o.c., p. 166 et s.; voy. aussi notre analyse de l'arrêt Scheuermann, n° 19.776 du 27 juillet 1979 dans Les A.S.B.L. et la gestion prive des services publics, o.c., p. 338; contra P. LEWALLE, Contentieux administratif, 2ème éd., Larcier, 2002, spéc. p. 554 et s.

825 Ainsi, à l’égard des décisions relatives à l’octroi de diplômes délivrés par les

établissements d’enseignement libre, après avoir rejeté tous recours contre de telles décisions, le Conseil d’État s’était déclaré compétent à plusieurs reprises (CE, Lemort, n° 76.909, 12 novembre 1998; CE, Loseke Nembalemba, n° 90.173, 12 octobre 2000). Mais, par un arrêt Deschutter, n° 93.289, 13 février 2001, rendu par l’assemblée générale, il semble être revenu sur sa jurisprudence antérieure, en se déclarant incompétent pour connaître d’un recours dirigé contre une décision du jury de l’Institut de Saint-Luc. Voy. également en ce sens: CE, Missorten, n°93.104, 6 février 2001; De Leersnijder, n° 94.530 , 5 avril 2001; Jacobs, n° 94.531, 5 avril 2001; Haouach, n° 99.791, 15 octobre 2001; Devinck, n° 102733, 22 janvier 2002. Cette nouvelle interprétation a fait l’objet de critiques doctrinales: voy. notamment X. DELGRANGE, Le Conseil d’État décline toute compétence à l’égard des établissements d’enseignement libre – Vers l’abandon du critère fonctionnel pour définir l’autorité administrative?, note sous CE, Missorten, n° 93.104, 6 février 2001 et CE, De Schutter, n° 93.289, 13 février 2001, R.R.D., 2000, pp. 521 à 542. Mais la Cour de cassation (Cass. (ch. réun.), 6 sept. 2002) et la Cour d’arbitrage (C.A., n° 41/03, 3 oct. 2003, rendu sur question préjudicielle du Conseil d’État) ont considéré que le Conseil d’État est compétent pour connaître des recours dirigés contre les actes de ces organismes, qui constituent des décisions obligatoires liant les tiers. Le Conseil d’État s’est aligné sur cette position dans un arrêt Zitoumi, rendu en assemblée générale (n° 120.131) du 4 juin 2003, concernant la décision d’un jury d’examen de l’Institut technique Cardinal Mercier – Notre Dame du Sacré Cœur.

826 Voy. pour un commentaire de la jurisprudence récente de nos hautes juridictions: D.

DEOM, «Enseignement libre et autorité administrative : dis-moi oui, dis-moi non», A.P.T., 2004, p. 95 et s.; X . DELGRANGE, «S.O.S. Bonheure», R.C.J.B., 2005, p. 26 et s.

d’intérêt économique général (SIEG), les aides d’Etats et enfin, les politiques de libéralisation ou nouveaux modes de régulation permettent de souligner les interactions entre le droit communautaire et les services publics des Etats membres.

Il importe de partir de l’article 106 (ex 86 TCE) du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dans la version consolidée827, soit la Troisième partie du traité relatif aux politiques et actions internes de l'Union, en particulier le Titre VII relatif aux règles communes sur la concurrence, la fiscalité et le rapprochement des législations, dont la section 1ère détermine les règles applicable aux entreprises

dans le cadre du chapitre Ier précisant les règles de concurrence.

La place de cet article précise le paradigme européen, les entreprises publiques ou privées sont en principe régies par les règles du Traité comportant de nombreuses dispositions en matière de concurrence et aides d’Etat.

L’art. 106 (ex-article 86 TCE) dispose que : « 1. Les États membres, en ce qui

concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n'édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles des traités, notamment à celles prévues aux articles 18 et 101 à 109 inclus. 2. Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt

économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont

soumises aux règles des traités, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de l'Union. 3. La commission veille à l'application des dispositions du présent article et adresse, en tant que de besoin, les directives ou décisions appropriées aux États membres. ».

L’article 106, §2 (ex 86, § 2 TCE et ex-art. 90, § 2) énonce une règle d’exception par rapport aux règles du Traité CE, notamment celles relatives à la concurrence. La disposition a fait l’objet de beaucoup d’attention828 sous l’angle général de l’interventionnisme des pouvoirs publics829. En effet, la Cour de justice a été amenée à préciser la définition de l’entreprise et des services d’intérêt économique général830.

827

J.O.C 115, 9 mai 2008. 828

K. LENAERTS, « Les services d’intérêt économique général et le droit communautaire », E.D.C.E., 2002, pp. 425-437, spéc. p. 425 ; pour une étude détaillée et critique du champ d’application de cette disposition, voy. égal. N. THIRION, op. cit., spéc. pp. 288-300. 829 Elle présente également un intérêt dans le cadre de la détermination du champ d’application des directives communautaires relatives aux marchés publics.

830

A contrario, il importe également de relever pour notre propos que les services d’intérêt général qui ne présentent pas un caractère économique ne sont pas visés par le droit communautaire de la concurrence (K. LENAERTS, op. cit., spéc. p. 426 ; C.J.C.E., 17 février

1993, Poucet et Pistre, aff. C-159/91 et C-160/91, Rec., 1993, p. I-637, pt 18 ; C.J.C.E., 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, aff. C-364/92, Rec., 1994, p. I-45, pts 27 et 30).

A. Les notions d’entreprise publique et de service économique d’intérêt

Dans le document Droit administratif (Page 174-176)