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Les études de type financière et boursière

CADRE THEORIQUE DE LA RECHERCHE

SECTION 2 – LES DIFFERENTES APPROCHES DE LA PERFORMANCE DANS LES OPERATIONS DE FUSIONS ET ACQUISITIONS

2.1 L’APPROCHE FINANCIERE

2.1.2 Les études de type financière et boursière

Nous savons que les conditions de changement de l'offre et de la demande sont fondamentales pour comprendre ce qui dirige le marché des FA. Selon la théorie économique néo-classique, les fusions se produisent comme le résultat d'un comportement visant à maximiser le profit. De ce fait, les chercheurs se positionnent le plus souvent dans la perspective financière en analysant la performance des FA en fonction de leurs capacités à créer de la valeur sur le marché boursier. Plus spécifiquement, ils analysent l’impact de la fusion sur la valeur boursière de la firme acquéreuse et celle de la firme acquise, l’actionnaire étant considéré comme la partie prenante la plus importante (Schweiger et al., 1990).

A partir de l’approche financière enrichie par les travaux issus de la théorie de l’agence129 et de l’enracinement des dirigeants, Andrade et al. (2001) montrent que seuls les objectifs non rationnels liés au comportement des dirigeants sont susceptibles d’expliquer le recours à des opérations de FA. Or, la théorie économique et financière propose de nombreuses autres

129 La définition la plus classique d’une relation d’agence est donnée par Jensen et Meckling (1976). Les auteurs

apparentent la relation d’agence à un contrat par lequel une personne engage une autre personne en lui conférant un certain pouvoir de décision, afin que ce dernier exécute une tâche en son nom. Cette relation recouvre en fait, toutes relations entre deux individus dès lors que la situation de l’un dépend de l’action de l’autre. La partie qui agit est l’agent et la partie affectée est le principal.

La théorie d’agence définit la problématique de la divergence d’intérêts qui existe parmi les principaux acteurs (ou agents) d’une société. On distingue les dirigeants (mandataires) et les actionnaires ou créanciers (mandant). Cette divergence implique la création d’un équilibre pour satisfaire les parties. La relation d’agence qui se crée doit se prémunir contre les opportunismes et les déséquilibres entre les agents. Pour cela un système incitatif est proposé (primes et sanctions) en plus d’aménagements et des solutions de consensus entre les parties.

Audrey ASLANOFF – 2013 – Thèse de doctorat

raisons possibles pour comprendre les objectifs des entreprises de recourir à une opération de FA. En effet, les principales études réalisées dans le domaine de la performance financière reposent sur la méthodologie appelée étude d’événement. On distingue deux approches selon que l’on cherche à étudier l’impact à court terme ou à long terme. A court terme, la méthode repose sur le calcul d’un taux de rentabilité anormal, défini comme la différence entre un taux de rentabilité observé au moment de l’annonce de l’opération de FA, et un taux de rentabilité théorique, estimé comme toute chose égale par ailleurs (c’est-à-dire le taux de rentabilité qui aurait été attendu si l’opération n’avait pas été annoncée). A long terme, on compare le taux de rentabilité composé observé avec un taux composé moyen calculé sur un échantillon témoin, caractérisé par des entreprises de secteurs identiques, de tailles comparables et de « book-to-market ratio130 » similaires (Fama & French, 1992).

Connu sous d’autres noms tels que l’analyse résiduelle ou encore test d’indice de performance anormale, les études d’évènements visent donc à analyser le « comportement » du cours d’actions autour de la période d’annonce d’une information ou d’un événement (Bowman, 1983). L’information peut être d’ordre macroéconomique, de nature politique ou directement relative à l’entreprise (Finet, 2000).

L’événement est défini comme « une annonce faite par une entreprise ou une action sur le marché qui véhicule des informations incrémentales aux acteurs des marchés financiers, leur permettant de réviser leurs prévisions initiales sur les perspectives d’une organisation » (Abowd & al., 1990, p.205). La méthodologie d’étude d’évènements détermine ainsi la performance d’une entreprise en termes de variations de sa valeur boursière (Hubler & al., 2000). Selon McWilliams & Siegel (1997), la popularité de la méthode d’étude d’événement provient du fait qu’elle remède les défaillances des mesures comptables qui sont considérées comme des mauvais indicateurs de la performance de l’entreprise.

En 2000, Agrawal et Jaffe proposent une revue de littérature sur les travaux issus de la perspective financière. Ils observent que toutes les recherches empiriques démontrent que les FA ont un effet positif à court terme sur la performance de la firme acquise (Agrawal et al., 2000). En revanche, la question des gains pour la firme acquéreuse est moins clairement tranchée (Jensen & Ruback, 1983).

130 Il s’agit d’un ratio définissant le rapport entre la valeur comptable d’une entreprise et sa valeur de marché.

Plus la valeur de ce ratio est faible, plus la valeur de marché de l’entreprise est importante comparativement à sa valeur comptable ; ceci pouvant être le signe de la présence d’opportunités de croissance importantes au sein de l’entreprise.

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Beaucoup de fusions ont ainsi été motivées par la conviction qu'une quantité significative de coûts d'exploitation superflus pouvaient être éliminée par la consolidation d’activités. Dans notre cas de recherche, de tels coûts peuvent être réduits si une banque est capable d’offrir plusieurs produits. De plus, Kwan et Wilcox (1999)131 trouvent des preuves comme quoi, les fusions réduisent les charges d'exploitation. Tant les coûts de main-d'œuvre que les dépenses d'occupation se trouvent sensiblement en baisse après la fusion. D'ailleurs, de grands établissements peuvent être plus efficients en cas de fusion. Mais considérant la question des causes du phénomène de FA, on s’attend à ce qu’une fusion soit profitable et salutaire aux actionnaires. Les théoriciens financiers ont longtemps débattu que l'objectif dans la prise de décision devait être la maximisation de la valeur de la firme132, laquelle étant la richesse des actionnaires. Par conséquent, l'hypothèse que les fusions se produisent pour tirer profit exige que les cash flows augmentent après une opération. Ainsi, durant la dernière décennie, les managers semblent être revenu au concept de maximisation de valeur qui devrait être au moins le premier objectif, sinon le seul, pour leurs sociétés.

Dans le chapitre introductif de leur ouvrage, Pablo et Javidan (2004 : 14) rappellent que les résultats des travaux sur la performance boursière de la firme acquéreuse après une fusion sont contradictoires (Pablo & Javidan, 2004). En effet, les retours financiers d’une FA pour la firme acheteuse peuvent être positifs (Hitt, Hoskisson, Ireland, & Harrison, 1991 ; Morosinu, Shane, & Singh, 1998), nuls (Healy, Palepu, & Ruback, 1997 ; Loderer & Martin, 1992) ou négatifs (Loughran & Vijk, 1997 ; Sirower, 1997). Afin d'obtenir un meilleur aperçu de l'impact d'une fusion sur la valeur d'une firme, beaucoup d'études sur ce sujet sont apparues couvrant différentes périodes de temps et différents positionnements.

La littérature sur la valeur des FA indique clairement qu'en moyenne il n'y a statistiquement pas de gain significatif dans la valeur ou la performance de l'activité de fusion. L’activité de FA résulte d’un ensemble de profits aux actionnaires quand la firme post-fusion consolidée a plus de valeur qu'une simple somme des deux firmes (pré-fusion) séparées. La cause primaire de ce gain en valeur est supposée être l'amélioration de la performance suivant la fusion mais, les gains de performance, qui peuvent être disponible de l'activité de l’opération, sont souvent uniques à une fusion spécifique et ainsi difficile à estimer. La plupart des études ne trouvent

131 Kwan, Simon H. and James A. Wilcox. (1999) “Accounting for More Productive Banks”. San Francisco:

Federal Reserve Bank of San Francisco.

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donc pas de relation positive entre l'activité de fusion et les gains soit dans la performance ou la richesse des actionnaires. De plus, afin de comprendre et d’obtenir des estimations de gains en valeur, un examen, au cas par cas, de l'activité de fusion, est exigé. Ceci a mené à un nombre de plus en plus important d’études de cas spécifiques, qui ont essayé d'analyser des fusions particulières et de documenter les résultats et leurs profits d'efficacité associés ou, dans certains cas, des pertes.

Malgré ces résultats contrastés entre la performance boursière des firmes acquises et des firmes acheteuses, les chercheurs issus de cette perspective concluent à la fin des années 80 que les vagues de FA sont globalement assez positives pour l’économie133 (Jensen, 1988). Si les recherches conduites dans une perspective financière permettent d’évaluer la profitabilité des opérations de FA, souvent sur de très larges échantillons d’entreprises, elles ne donnent aucune explication quant aux causes de ces écarts de profitabilité d’une firme à l’autre. C’est notamment pour cette raison que les travaux issus du management stratégique se sont développés.

Suite à cette explication, nous pouvons dire que certains chercheurs ont prôné la méthode financière dans leurs études sur les FA et la recherche de la performance. Selon Caves (1989), cette technique, théoriquement bien fondée, constitue une véritable innovation. Elle représente le meilleur indice de performance théoriquement disponible (Langetieg, 1978) et est admise par la littérature financière comme méthodologie d’études des évènements importants tels que les fusions.

Pour Chatterjee & al. (1992), l’évaluation de la performance des FA par la méthode financière présente certains avantages :

* Premièrement, les cours d’actions sont censés être entièrement spécifiés c’est-à-dire ils ne sont pas limités à un aspect particulier de la performance (les ventes ou la productivité), mais reflètent plutôt tous les aspects appropriés de la performance.

* Deuxièmement, les cours d’actions ont été montrés comme un moyen à travers lequel on pourrait observer les tentatives des managers à manipuler les mesures comptables.

133 Les entreprises participant aux FA analysées par Jensen (1988) sont américaines. Lorsque l’auteur conclut

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* Troisièmement, les cours d’actions sont rapportés objectivement. Enfin, les mesures de rentabilités anormales qui sont calculées à partir des cours d’actions sont ajustées par rapport aux mouvements généraux du marché, et au risque du marché de l’entreprise. Ce dernier argument a été déjà abordé par Lubatkin (1983). En effet, selon l’auteur, le modèle quantifie le risque systématique134 d’une entreprise de sorte que la mesure de la performance soit ajustée au risque. Lubatkin (1983) ajoute que, selon l’hypothèse de l’efficience des marchés, tous les avantages attendus d’une fusion sont entièrement prévus et ils sont incorporés instantanément dans le cours d’action de la firme acquéreuse au moment de la consommation de la fusion.

Cependant, en dépit de tous les avantages que nous venons de voir, la méthode financière a été vivement critiquée par les tenants de l’économie industrielle. En effet, selon Healy & al. (1992), la méthode financière est incapable de déterminer si les FA créent de vrais gains économiques et d’identifier les sources de tels gains. Par ailleurs, Bromiley (1986) a précisé que les mesures comptables de la performance étaient meilleures dans beaucoup de cas que les mesures basées sur le marché financier parce qu’elles ont été employées plus fréquemment par des managers dans leur processus de prise de décisions stratégiques.

Selon Lubatkin (1983), la mesure de la performance des FA par la méthode financière présente deux limites :

* La première limite est que les acquéreurs constituant l’échantillon doivent être relativement « inactifs » sur le marché d’acquisitions ; ceci signifie que l’acquéreur ne peut pas être impliqué dans une autre fusion pendant une période de trois ans entourant la date de la fusion à étudier. Cette période de six ans (trois ans avant et trois ans après l’opération de FA) de « données propres » est requise pour s’assurer que les paramètres estimés, pour le modèle, reflètent l’influence de fusions multiples. Les conclusions des études ayant utilisé des mesures financières pour évaluer la performance des acquéreurs peuvent donc s’appliquer pour seulement un échantillon restreint d’acquéreurs caractérisés comme rarement fusionnant.

134 Le risque systématique se rapporte à la sensibilité des rentabilités du portefeuille de marché. Dans le cas d’un

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* La seconde limite est que les hypothèses sur lesquelles est fondée la méthode financière simplifient le fonctionnement des marchés financiers. En outre, les rentabilités post-fusions doivent toujours être observées pour expliquer toutes les inefficiences du marché (les révisions systématiques sont nécessaires pour que toute nouvelle information concernant l’échantillon des FA soit connue).

Ainsi, pour toutes ces raisons, il est recommandé d’employer conjointement les mesures financières et les mesures comptables. Au fils du temps, nous avons donc pu observer que la perspective financière n’était pas la seule qui puisse servir d’outils de mesure. En effet, à ces catégories de mesures, dites aussi objectives, s’ajoutent des mesures subjectives, de plus en plus utilisées par les chercheurs en management stratégique et en comportement organisationnel. Elles consistent à reporter sur des échelles de mesure, le niveau de la performance relative ou globale, à partir d’informations obtenues auprès de différents membres de l’entreprise.

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