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sociales du réel

2. Les éléments périphériques

objet. En d’autres termes, « c’est la finalité de la situation dans laquelle est produite la

représentation qui va déterminer le ou les éléments centraux » (JODELET, 1997 : 197). Ces éléments centraux sont les éléments structurants essentiels à la viabilité et la pérennisation de la représentation dans la sphère sociale. En effet, leur altération ou leur suppression engendrerait une mutation radicale de l’organisation et/ou du sens de la représentation. C’est pour cette raison que ce sont les éléments du système représentationnel les plus résistants aux changements, aux évolutions et aux mutations que connaissent les contextes sociaux dans lesquels ils se meuvent. En fonction de la nature de son objet et du rôle que lui assigne la société dans laquelle elle évolue, le noyau central d’une représentation peut revêtir deux dimensions (ABRIC, 1994 : 23). Il peut être fonctionnel : dans ce cas, ce sont les éléments nécessaires à l’accomplissement de l’action et « à la réalisation de la tâche » qui sont prééminents. Cette définition fait référence au fait que les représentations sont aussi les artefacts sociaux qui permettent aux individus et/ou aux groupes de donner du sens à leurs attitudes, leurs conduites et leurs pratiques et d’adopter et d’adapter leurs attitudes, leurs conduites et leurs pratiques en fonction de la finalité de la tâche à réaliser. Le noyau structurant peut aussi recouvrir une dimension normative plus abstraite et idéelle, qui est privilégiée « dans toutes les situations où interviennent directement des dimensions

socio-affectives, sociales ou idéologiques » (Ibid.). Dans ces circonstances, ce sont des normes et des valeurs qui sont au cœur de la représentation dans la mesure où celles-ci guident et prescrivent les comportements des acteurs sociaux selon la situation, le contexte social et les rapports sociaux à l’œuvre. Mais si le noyau central confère à chaque représentation sa stabilité et pérennisent sa cohérence, les éléments périphériques, eux, lui permettent d’évoluer.

2. Les éléments périphériques

Les représentations sont aussi composées d’éléments périphériques qui se cristallisent autour du noyau central. Il s’agit de l’ensemble des informations, des images, des signifiés et symboles relatifs à l’objet et à son contexte et environnement social. Ces éléments sont plus concrets et plus erratiques que ceux du noyau central. Si sa signification est fixée par le noyau structurant, la combinaison périphérique préfigure tout de même l’essentiel de la substance signifiante et informationnelle de la représentation. « Schèmes organisés par le noyau central

assurant de façon instantanée le fonctionnement de la représentation comme grille de décryptage d’une situation » (FLAMENT cité in Ibid. : 26), les éléments périphériques sont liés au noyau central et subissent des modifications en permanence. Mais ces variations n’altèrent que superficiellement la macrostructure de la représentation et qui n’ont, par conséquent, qu’un impact

restreint sur la signification et la structuration globale de cette représentation. Le noyau central est l’élément essentiel à la stabilité et donc à la viabilité et au fonctionnement de la représentation dans le système social auquel elle est circonscrite. Les représentations sont composées d’un système central et d’un système périphérique qui agissent ensemble et qui en font des matrices cognitives singulières dans le champ des dynamiques sociopsychologiques. De plus, cette dualité explique l’ambivalence immanente des représentations qui sont, de façon paradoxale, « stables et

mouvantes, rigides et souples »(Ibid. : 29).

Dès lors, les représentations ont cette particularité de receler un double caractère social et cognitif qui les discrimine de toutes les autres élaborations ou processus de cognition. C’est pourquoi Jean–Claude Abric parle de matrices sociocognitives pour spécifier les représentations qu’il décrit comme des ensembles « organisés et cohérents » ayant des règles de fonctionnement propres. Au centre des dynamiques et des pratiques interrelationnelles et intersubjectives, ces systèmes sociocognitifs peuvent avoir quatre fonctions sociales fondamentales. En plus d’une fonction de savoirs et de connaissances sur le monde, elles régentent, nous l’avons vu, les comportements et les pratiques des acteurs sociaux. Dans certaines situations, elles sont mobilisées pour justifier ou pérenniser certaines décisions, actions ou conduites, et dans d’autres elles permettent de renforcer ou de préserver les identités des groupes. C’est cette dernière fonction qui rentre en résonance avec les processus d’édification et d’affermissent des identités culturelles des formations humaines. Les porteurs de culture ne se spécifiant et ne se situant dans le monde qu’en référence à un ensemble de représentations identitaires, géosymboliques, patrimoniales constituant leur(s) système(s) de spécification et de différenciation. Figurations symboliques de la catégorisation hiérarchisée du monde, les représentations se construisent dans des rapports interactionnels avec les individus et acteurs sociaux. Dans cette dynamique relationnelle, la communication joue un rôle fondamental dans la mesure où c’est elle qui véhicule et façonne (en partie) les représentations sociales et régule les rapports sociaux, et donc, qui unit les représentations aux sociétés.

Principal vecteur de transmission d’imaginaires et de représentations, la communication est donc centrale aux phénomènes de prise de conscience d’appartenance identitaire, culturelle et spatiale et l’instauration d’un univers consensuel inhérent aux modalités de fonctionnement des systèmes représentationnels. Le sentiment d’appartenance à une aire culturelle et identitaire s’élabore en effet à partir de représentations sociales qui, elles, se fabriquent « à travers et dans

communication et les rapports sociaux qui permet de mettre en lumière les dynamiques psychosociales à l’œuvre dans les croyances culturelles et territoriales. Dans cette optique, on ne peut penser les faits culturels qu’intriqués aux dispositifs et manifestations communicationnels qui supportent des représentations, des idéologies et des utopies. Il s’agit de visions du monde qui se métamorphosent, à travers le prisme de la communication et des médias en « versions de la réalité

communes et partagées » (JODELET, 1997 : 49), versions qui sont centrales à la constitution et à l’expression ethnodiscursive de représentations d’appartenance.

II. Représentations d’appartenance

Certains auteurs, dans la lignée de la pensée de Max Weber, ont démontré que quel que soit le type de société ou de communauté, celle-ci ne peut exister et fonctionner sans sentiment d’appartenance. En effet, la conscience collective n’existe concrètement et de manière opératoire que vécue par les acteurs sociaux. Plus que la somme des consciences individuelles, la conscience collective les transcende. Aussi, il s’agit de s’interroger « sur les raisons qui peuvent conduire les

individus à s’investir affectivement, à participer à la vie et au développement du pays et à adhérer au type de société projeté »(TABOADA-LEONETTI in COSTA-LASCOUX, HILY, VERMÈS, 2000 : 108). Nous pensons avec Denise Jodelet, que c’est dès lors qu’elles sont « étayées sur une

énergétique sociale, [que] les représentations sont pertinentes pour la vie pratique et affective des groupes » (Ibid.). Dynamiques sociales et dynamiques représentationnelles s’entrelacent pour former ensemble un système holistique cohérent et intelligible évoluant dans des contextes d’inscription sociale, territoriale, historique et culturelle. C’est parce qu’elles sont partagées par une communauté via les énoncés sociodiscursifs et ethnodiscursifs, que les représentations sociales peuvent être appréhendées comme les soubassements nécessaires au maintien des liens sociaux et identitaires et, par conséquent, aux mécanismes d’insertion et d’adhésion collective à des groupes ou environnements d’appartenance.

Les travaux en psychologie sociale se sont attachés à démontrer la corrélation étroite entre les systèmes sociocognitifs que sont les représentations et la manière dont les collectivités humaines les instrumentalisent et les insèrent dans leurs matrices définitoires et identitaires. Car

« ce que les représentations collectives traduisent c’est la façon dont le groupe se pense dans ses rapports avec les objets qui l’affectent »(DURKHEIM cité in JODELET, 1997 : 51). C’est dans cette perspective que nous pensons pertinent de proposer un examen plus attentif du sentiment

d’appartenance des individus à une culture, un territoire et/ou une identité et d’en proposer des éléments de définition. Ce sentiment est intrinsèquement interrelié aux représentations qui circulent dans toutes des sphères du champ social dans la mesure où l’espace géographique n’est pas seulement matérialité, il est également idéologique c’est-à-dire que les discours qui s’y tiennent le structurent et participent à sa production. Dans le cadre de formation des territoires, les représentations en tant que systèmes d’images, d’interprétation et d’explication ne peuvent se comprendre que dans leur(s) relation(s) avec les discours et informations ayant trait à cet environnement social et spatial. S’intéresser aux discours et énoncés producteurs de nouvelles idéologies territoriales essentielles à la production et la reproduction de nouveaux territoires, souvent imaginés, qui ont tout de même une corporalité et réalité sociales, suppose la mobilisation d’outils et de paradigmes propres aux Sciences de l’information et de la communication corrélés et enrichis de ceux de la géographie classique et culturelle. Identitaires et territoriales, les représentations sociales contribuent in fine « à l’élaboration d’un sens commun, d’un système de

pré-codage de la réalité partagée, de la construction d’une identité et donc d’une différenciation communautaire »(BOYER, 2003 : 25).