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3. L A CELLULE ALPHA

3.1. Le glucagon : une hormone hyperglycémiante

3.1.1. Fonctions

Comme nous l’avons vu précédemment, le maintien de la glycémie repose sur le juste équilibre de deux hormones majeures : l’insuline et le glucagon. En effet, pour fonctionner cor-rectement et répondre à des besoins spécifiques, le corps humain doit maintenir sa glycémie dans des valeurs relativement constantes. Les cellules alpha pancréatiques produisent le gluca-gon et le sécrètent en réponse à une baisse de glycémie (hypoglycémie). La correction des hy-poglycémies se fait également via la baisse de l’insuline (hormone hypoglycémiante) et le re-lâchement de diverses molécules telles que les catécholamines, le cortisol ou les hormones de croissance. Le glucagon agit principalement sur le foie en favorisant les mécanismes de glyco-génolyse et de néoglucogenèse, permettant la libération de glucose dans la circulation sanguine (Gerich 1988; Cryer et al. 1984). Il va également intervenir dans l’inhibition de la synthèse des triglycérides et va favoriser la β-oxydation des acides gras dans le foie. De même, le glucagon va induire un phénomène de lipolyse au niveau des tissus adipeux, permettant la dégradation des triglycérides en acides gras et glycérol (Bewsher and Ashmore 1966). Une fois libéré dans la circulation sanguine, le glycérol va ensuite être capté par le foie pour participer à la néoglu-cogenèse. Au niveau protéique, le glucagon va augmenter la capture des acides aminés par les hépatocytes pour favoriser la néoglucogenèse (Charlton, Adey, and Nair 1996). Toutefois, le glucagon ne sert pas uniquement à réguler la glycémie. En effet, ses rôles sont multiples dans l’organisme : il est par exemple capable de diminuer la mobilité gastrique (Mochiki et al. 1998), d’augmenter la filtration rénale (Ahloulay et al. 1992), d’intervenir dans la signalisation hypo-thalamique (Charron and Vuguin 2015) et d’avoir des effets inotropes et chronotropes sur le cœur (Kruty et al. 1978). En plus de son effet endocrine, le glucagon exerce un effet paracrine sur les cellules bêta et delta en régulant la sécrétion d’insuline et de SST (Kawai et al. 1995;

Brunicardi et al. 2001; Stagner, Samols, and Marks 1989). Le glucagon a aussi un effet auto-crine sur la cellule alpha (effet qui sera décrit plus en détails dans la section 3.2.3).

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3.1.2. Synthèse et maturation

Le glucagon est une hormone peptidique de faible poids moléculaire (3485 Da) dont la séquence en acides aminés (29 au total) est similaire chez plusieurs espèces mammifères. Le glucagon est synthétisé à partir d’une forme immature composé de 180 acides aminés, appelé pre-proglucagon. Ce polypeptide est clivé pour donner le peptide signal d’une vingtaine d’acides aminés et le proglucagon composé de 160 acides aminés. En plus d’être synthétisé par les cellules alpha, le proglucagon est également synthétisé par les cellules L intestinales ainsi que par diverses régions du cerveau (Merchenthaler, Lane, and Shughrue 1999). Son clivage par les prohormones convertases 2 (PC2) et 1/3 (PC1/3) permet d’obtenir de nombreux peptides avec des activités biologiques différentes (Figure 6) (Rouille et al. 1994; Tucker, Dhanvantari, and Brubaker 1996; Furuta et al. 2001). Dans les cellules alpha, le clivage du proglucagon est majoritairement effectué par la PC2, permettant la création de quatre peptides : le glucagon, la glicentin-related polypeptide (GRPP), le major proglucagon fragment (MPGF) et l’intervening peptide 1 (IP-1). Dans les cellules L intestinales, le clivage du proglucagon par la PC1/3 va quant à lui donner naissance aux GLP-1 et GLP-2, à l’oxyntomoduline, à la glicentine et à l’intervening-peptide 2 (IP-2). Bien que les GLP-1 et 2 soient deux hormones gastro-intesti-nales, leurs rôles biologiques ne sont pas les mêmes au sein de l’intestin. En effet, le GLP-1 est une incrétine, une hormone capable d’agir sur la régulation de la glycémie en favorisant la synthèse et la sécrétion de l’insuline par les cellules bêta (Gromada, Brock, et al. 2004; Kjems et al. 2003). Il va également être capable d’inhiber la sécrétion de glucagon et de favoriser la sécrétion de SST (De Marinis et al. 2010; Oh and Bargiello 2015). Le GLP-2 est quant à lui caractérisé par ses propriétés intestinotrophiques (Thulesen 2004; Janssen et al. 2013). La gli-centine a également des rôles multiples, elle est notamment impliquée dans la sécrétion de l’in-suline, l’inhibition de la sécrétion du glucagon (Ohneda et al. 1995), l’inhibition de la sécrétion d’acide gastrique (Kirkegaard et al. 1982) ainsi que dans la régulation de la motilité intestinale (Shibata et al. 2001). L’oxyntomoduline stimule la sécrétion d’insuline et ralentit la vidange d’acide gastrique (Jarrousse, Bataille, and Jeanrenaud 1984; Schjoldager et al. 1989). Les rôles physiologiques des autres dérivés peptidiques issus du proglucagon (GRPP et MPGF) sont quant à eux moins bien connus. Dans le système nerveux central, les PC2 et PC1/3 sont toutes les deux exprimées, d’où la présence de glucagon et de GLP-1 dans différentes régions du cer-veau (Larsen et al. 1997; Li et al. 2003). De même, plusieurs études ont montré que certaines

INTRODUCTION

conditions (hyperglycémie, traitement à l’interleukine-6) permettent aux cellules alpha de pro-duire du GLP-1 (via la PC1/3) (Whalley et al. 2011; Hansen et al. 2011; Ellingsgaard et al.

2011).

Figure 6 : Peptides dérivés du proglucagon.

Le clivage du proglucagon est effectué par la prohormone convertase 2 (PC2) dans les cellules alpha pancréatiques et par la prohormone convertase 1/3 (PC1/3) dans les cellules L intestinales et le système nerveux central. Après clivage par la PC2, on obtient plusieurs peptides tels que le glucagon, le glicentin-related pancreatic peptide (GRPP), l’intervening peptide 1 (IP1) et le major proglucagon fragment (MPGF) pour les cellules alpha. Pour les cellules L intestinales et le système nerveux central, les diffé-rents peptides obtenus sont les glucagon-like peptide 1 et 2 (GLP-1, GLP-2), l’oxyntomoduline, la gli-centine et l’intervening peptide 2. Modifié d’après Sandoval et Alessio, 2015.

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3.1.3. Le récepteur au glucagon et les voies de signalisations associées

Une fois dans la circulation, le glucagon a la possibilité d’aller agir sur différents types cellulaires tels que les hépatocytes, les cellules bêta pancréatiques, les adipocytes ou les cellules musculaires. Tous ces types cellulaires possèdent des récepteurs au glucagon (Hansen, Abrahamsen, and Nishimura 1995; Ouhilal et al. 2012) indispensables à la mise en place de divers mécanismes physiologiques (Charron and Vuguin 2015).

Le récepteur au glucagon est une protéine ayant une structure composée de sept do-maines transmembranaires faisant partie de la famille des récepteurs couplés aux protéines G (RCPGs) de classe B (Jelinek et al. 1993; Siu et al. 2013; Mayo et al. 2003). Cette classe de récepteurs inclut également d’autres récepteurs, parmi eux les récepteurs aux GLP-1 et 2, au GIP, au VIP et à la sécrétine (Laburthe et al. 1996). La fixation du glucagon à son récepteur entraine un changement de configuration du récepteur, ce qui lui permet d’interagir avec la protéine Gαs. L’activation de l’adénylate cyclase par la protéine Gαs provoque l’augmentation d’adénosine monophosphate cyclique (AMPc) dans la cellule et l’activation de la protéine ki-nase A (PKA) (Jiang et al. 2001). Cette cascade de signalisation va également entrainer l’acti-vation du cAMP-responsive element-binding protein (CREB) et du CREB-regulated transcrip-tion coactivator 2 (CRTC2), tous deux essentiels pour la régulatranscrip-tion transcriptranscrip-tionnelle des gènes gluconéogéniques (Erion et al. 2013; Sun, Dang, et al. 2015). Une autre voie faisant intervenir la protéine Gq serait quant à elle capable d’activer la phospholipase C (PLC) hydrolysant le phoshatidylinositol 4,5-biphosphate (PIP2) en diacyl glycerol (DAG) et en inositol 1,4,5-tri-phosphate (IP3). Cela entrainerait l’activation de la protéine kinase C (PKC) ainsi que l’éléva-tion de Ca2+ intracellulaire (Xu and Xie 2009; Mayo et al. 2003; Wakelam et al. 1986). Toute-fois, la signalisation permettant l’augmentation de Ca2+ intracellulaire est fortement débattue et nécessite de plus amples investigations. L’existence d’autres voies de signalisations dépen-dantes du type cellulaire n’est pas exclue (Kimball, Siegfried, and Jefferson 2004; von Meyenn et al. 2013; Aw et al. 2014). L’activation de ces différentes voies de signalisations a de multiples effets, notamment sur l’exocytose, l’activation d’enzymes métaboliques ou l’ouverture de ca-naux ioniques présents sur la membrane cellulaire.

INTRODUCTION

3.2. Les différents mécanismes de régulation de la sécrétion du