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2. L E PANCREAS ET LES ILOTS DE L ANGERHANS

2.2. Les îlots de Langerhans : de micro-organes

2.2.2. Composition et organisation cellulaire

Les îlots de Langerhans (environ 1 million par pancréas) sont de petits amas cellulaires hétérogènes, mesurant entre 40 et 500 μm de diamètre, disséminés dans le parenchyme pan-créatique. Ces îlots possèdent également un important réseau capillaire (Goldstein and Davis 1968).

De manière générale, les îlots de Langerhans sont composés de cinq types cellulaires endocrines différents qui se distinguent principalement par l’hormone qu’ils sécrètent.

LE PANCREAS ET LES ILOTS DE LANGERHANS

o Les cellules bêta

Les cellules bêta représentent le type cellulaire majoritaire dans les îlots de Langerhans (environ 50-70% de la masse) et ont pour rôle de synthétiser, stocker et sécréter de l’insuline.

La sécrétion d’insuline est essentielle à la régulation glycémique dans l’organisme et est dépen-dante de plusieurs signaux métaboliques, qu’ils soient hormonaux ou nerveux. Cette hormone hypoglycémiante a un rôle déterminant dans le métabolisme des glucides, des lipides et des protéines, et est nécessaire pour permettre l’absorption de glucose depuis le sang vers les cel-lules adipeuses, les celcel-lules du foie et les celcel-lules du muscle squelettique.

o Les cellules alpha

Les cellules alpha représentent le second type cellulaire présent dans les îlots de Lan-gerhans, entre 20 et 40%, et ont pour rôle principal de synthétiser et de sécréter le glucagon. Au contraire de l’insuline, le glucagon est une hormone hyperglycémiante qui tend à ramener la glycémie vers sa valeur physiologique en permettant la libération de glucose dans le sang par les cellules du foie. Ce type cellulaire ainsi que l’action physiologique du glucagon sera décrit plus en détails dans le chapitre 3.

o Les cellules delta

Les cellules delta constituent le troisième type cellulaire et représentent environ 5 à 10%

de la masse de l’îlot. Ces cellules sécrètent la SST, une hormone peptidique également synthé-tisée par les cellules neuroendocrines et par le système gastro-intestinal. Plusieurs études mon-trent que la SST a un effet inhibiteur sur la sécrétion d’insuline et de glucagon (Schuit, Derde, and Pipeleers 1989; Strowski et al. 2000; Rutter 2009; Lins et al. 1980).

o Les cellules PP

Les cellules PP sont minoritaires dans l’îlot et sécrètent le polypeptide pancréatique (d’où leur nom). Plusieurs fonctions leur sont attribuées comme la diminution de la sécrétion exocrine du pancréas (Putnam, Liddle, and Williams 1989; Morisset 2008) ou la sensation de satiété (Batterham et al. 2003). Le polypeptide pancréatique pourrait également jouer un rôle dans la régulation du glycémie en modulant l’expression des récepteurs à l’insuline dans les

INTRODUCTION

hépatocytes (Seymour, Volpert, and Andersen 1996) ou en inhibant la sécrétion du glucagon dans les îlots de souris (Aragon et al. 2015).

o Les cellules Epsilon

Ce type cellulaire est également peu présent dans les îlots, moins de 1%, et sécrète la ghréline. En temps normal, cette hormone digestive est synthétisée et sécrétée de manière im-portante par les cellules de l’estomac pour stimuler l’appétit. Dans le pancréas, bien que son rôle n’ait pas été encore clairement établi, cette hormone aurait un effet inhibiteur sur la sécré-tion d’insuline (Tong et al. 2010; Dezaki et al. 2004; Dezaki et al. 2006; Wierup, Sundler, and Heller 2014).

Toutefois, le rôle de la SST, du PP et de la ghréline dans le fonctionnement global des îlots n’a toujours pas été clairement élucidé.

Plusieurs chercheurs ont constaté que la composition et l’architecture des îlots est va-riable en fonction des espèces (Steiner et al. 2010; Cabrera et al. 2006; Brissova et al. 2005).

Notamment, la composition et l’organisation des îlots de rongeurs, qui constituent le modèle d’étude le plus couramment utilisé, diffèrent de celles observées chez l’humain. Concernant la composition des îlots, des études ont estimé qu’il y a entre 60 à 80% de cellules bêta, 15 à 20%

de cellules alpha et 5 à 10% de cellules delta dans les îlots de rongeurs (Cabrera et al. 2006) contre 50% de cellules bêta, 40% de cellules alpha et 10% de cellules delta dans les îlots hu-mains (Cabrera et al. 2006) (Figure 3C). Même si la composition cellulaire est quelque peu variable entre ces deux espèces, la réelle différence est observée au niveau de l’organisation topographique de ces cellules. Chez les rongeurs, les îlots sont formés essentiellement d’un cœur de cellules bêta bordé en périphérie d’un manteau composé de cellules alpha et de d’autres types cellulaires endocrines (Orci et al. 1975; Abdulreda 2013) - Figure 3A). Ce type de struc-ture va avoir tendance à favoriser les contacts homotypiques (bêta-bêta) au détriment des con-tacts hétérotypiques (alpha-bêta ou delta-bêta). Au contraire, chez l’homme, seuls les petits îlots (40 à 60 μm de diamètre) ont ce type de structure, alors que les plus gros (100-500μm) ont une structure bien plus complexe. En effet, ces îlots présentent une structure épithéliale tri-laminaire composée de cellules bêta au centre, entourée de part et d’autre de cellules alpha et d’autres cellules non-bêta (Bosco et al. 2010) (Figure 3B). Cet épithélium tri-laminaire forme plusieurs

LE PANCREAS ET LES ILOTS DE LANGERHANS

replis, et est bordé par des vaisseaux sanguins (Bosco et al. 2010) (Figure 3B). Chaque côté de cette structure ressemble à un épithélium pseudostratifié avec des cellules basales, représentées essentiellement par des cellules alpha, et par-dessus des cellules bêta qui s’intercalent entre les cellules alpha pour entrer au contact de la lame basale. L’avantage principal de cette organisa-tion est de favoriser les contacts hétérotypiques entre les différents types cellulaires, notamment entre les cellules alpha et bêta.

Figure 3 : Différences structurelles entre les îlots humains et murins.

A : Organisation cellulaire chez la souris (à gauche) et chez l’humain (à droite). D’après Abdulreda et al. (2013). B : Organisation vasculaire et cellulaire dans les îlots humains. Structure tri-laminaire dépliée à gauche, et à droite la même structure repliée qui forme l’îlot. D’après Bosco et al. (2010). C : Com-paraison de la composition cellulaire entres des îlots de souris et des îlots humains. D’après Cabrera et al. (2006).

A B

C

INTRODUCTION

Physiologiquement, ces différences structurelles entraînent des répercussions sur le mode de fonctionnement des cellules endocrines au sein des îlots (Hauge-Evans et al. 2009;

Unger and Orci 2010; Koh, Cho, and Chen 2012; Marks et al. 1990). Afin de démontrer l’im-portance de ces organisations cellulaires, plusieurs chercheurs ont choisi d’observer les consé-quences de ces perturbations sur des îlots murins et humains. Chez les rongeurs, une modifica-tion structurelle des îlots entraine une altéramodifica-tion de la sécrémodifica-tion d’insuline dès lors que les cel-lules bêta sont mélangées avec les celcel-lules alpha (Gannon et al. 2000; Bosco, Orci, and Meda 1989). De même, il a été montré que les cellules bêta doivent être unies et fonctionner de ma-nière synchronisée afin de garantir une sécrétion d’insuline de type pulsatile (Bergsten et al.

1994; Pedersen, Bertram, and Sherman 2005; Santos et al. 1991). Ces observations démontrent bien l’importance de cette organisation cellulaire dite « core-mantle » où les contacts homo-logues entre cellules bêta sont particulièrement nécessaires pour une sécrétion correcte de l’in-suline. Contrairement aux îlots murins, la proportion élevée de contacts hétérotypiques (alpha-bêta) chez l’humain pourrait expliquer le fait que l’activité oscillatoire des cellules bêta soit différente entre ces deux espèces (Cabrera et al. 2006). Lors d’une diminution de la concentra-tion en glucose, Cabrera et al. ont pu observer une augmentaconcentra-tion du calcium (Ca2+) intracellu-laire dans les îlots, effet non observable dans les îlots de souris et qui pourrait être attribué aux cellules alpha (Cabrera et al. 2006). Compte tenu de la part importante de cellules alpha dans les îlots humains et de leur proximité avec les cellules bêta, celles-ci peuvent exercer une in-fluence plus forte sur la régulation de l’îlot comparé aux îlots murins (Cabrera et al. 2006).