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Chapitre I : Interactions entre la matière organique dissoute et les particules : de la station

2.1 Généralités sur la matière organique dissoute

2.1.3 Le fractionnement de la matière organique dissoute

La MOD contenue dans les systèmes aquatiques est très hétérogène et d’une très grande diversité. Afin d’étudier ses propriétés, il est possible de l’analyser de manière globale, éventuellement après isolation du milieu d’origine, ou bien de l’analyser après fractionnement selon des critères physico-chimiques. Plusieurs méthodes de fractionnement existent.

2.1.3.1

Méthodes de fractionnement

Il est tout d’abord possible d’effectuer une séparation selon la taille. Les techniques les plus couramment utilisées sont l’ultrafiltration (Jacques Buffle, 1988), le fractionnement par couplage flux-force asymétrique (AF4 pour « Asymmetric Flow-Field-Flow-Fractionation ») et la chromatographie d’exclusion de taille (Perminova et al., 1998). Cette technique permet d’obtenir une répartition des molécules dans l’échantillon selon leur taille. Toutefois, ces techniques sont assez peu adaptées à la séparation d’échantillons en quantités importantes (Her

Il est également possible d’effectuer une séparation selon la charge grâce aux méthodes électrophorétiques. Ces techniques sont assez sensibles puisqu’elles ont permis de différencier des acides fulviques de natures différentes (Dunkel et al., 1997).

Enfin, la séparation peut être effectuée selon l’hydrophobicité. Cette technique est basée sur le passage de la MOD sur des résines choisies pour retenir de façon sélective certains composés organiques en fonction de leur hydrophobicité. Différents types de résines existent : XAD, DEAE et PVP notamment. La méthode utilisant les résines XAD est la plus utilisée parmi toutes les méthodes de fractionnement car elle est reconnue par l’IHSS (International Humic Substances Society) (Janoš, 2003). Les résines XAD sont composées d’un substrat macroporeux non ionique (styrène – divinylbenzène ou polymères de méthacrylate de méthyle) avec différents types de groupements greffés. Plusieurs types de résines XAD existent mais seule la résine XAD-8, grâce à des rendements d’extraction satisfaisants et une meilleure séparation des fractions, est fréquemment utilisée pour retenir les substances humiques (Aiken

et al., 1979; Thurman and Malcolm, 1981). Récemment de nouvelles résines nommées DAX-

8, composées de méthacrylate de polyméthyle, ont été développées pour la même utilisation (Labanowski, 2004; Peuravuori et al., 2002, 2001). De façon opérationnelle, la fraction hydrophobe acide retenue sur les résines DAX-8 est définie comme étant des substances humiques. Il existe différents protocoles de fractionnnement variant en fonction de la nature et du nombre de colonnes utilisées ainsi que des types d’élution (Aiken and Leenheer, 1993; Imai

et al., 2001; Leenheer, 1981; Ma et al., 2001; Namour and Müller, 1998; Peuravuori et al.,

2005).

La méthode de Leenheer (1981) est basée sur l’utilisation de trois types de résines qui produisent six fractions (hydrophobe et hydrophile, chacune étant subdivisée en trois fractions acide, neutre et basique). Une autre méthode a été proposée par Thurman and Malcolm (1981) : les résines XAD-8 adsorbent la fraction de substances humiques dans un échantillon préalablement acidifié. Les substances humiques sont ensuite éluées par des solutions de divers pH afin de séparer les fractions AH et AF. Postérieurement, dans les années 90, cette technique de fractionnement a été améliorée afin de séparer les fractions hydrophobe (HPO), hydrophile (HPI) et transphilique (TPI) de la MOD, avec l’utilisation des résines XAD-4 et XAD-8 (Aiken, 1992; Malcolm and MacCarthy, 1992). Le Tableau 5 issu des données de Barber et al. (2001) et Imai et al. (2001), indique les principaux types de composés observés dans les fractions de MO séparées selon leur protocole.

Le fractionnement de la MOD peut donner des informations importantes sur sa composition (Tableau 5 et Figure 2). La fraction hydrophobe acide contient les substances humiques aquatiques tandis que les autres fractions sont des fractions non humiques. Les fractions humiques ont un caractère plus hydrophobe avec un poids moléculaire plus important et sont plus aromatiques. Plus le caractère hydrophile est important, plus la quantité de groupements fonctionnels oxygénés et azotés est importante. Les valeurs de SUVA élevées correspondent à une MO plus aromatique. Un rapport C/H faible indique un faible degré d’insaturation. Ces propriétés vont dépendre de l’origine du matériel humique (Martin-Mousset

Tableau 5 : Classification des solutés organiques de la MOD, adapté de (Barber et al., 2001; Imai et al., 2001).

Fraction selon l’hydrophobicité Classe des composées

HPO acide Substances humiques aquatiques (acides humiques et fulviques)

HPO neutre Hydrocarbures, détergents, chlorophylle, protéines, phospholipides

HPO basique Surfactants, protéines

HPI acide Acides carboxyliques simples, acides aminés, protéines

HPI neutre Oligosaccharides, des polysaccharides

HPI Basique Sucres aminés, protéines, amines de faible masse moléculaire,

Figure 2 : Évolution de certaines caractéristiques de la MOD selon la fraction (Croué, 2004).

Étant données les faibles concentrations en COD dans les milieux aquatiques et la nécessité d’en obtenir des quantités suffisamment importantes pour les diverses caractérisations, il peut être nécessaire de concentrer la MOD afin de faciliter les opérations de fractionnement. Les techniques membranaires offrent la possibilité de filtrer rapidement un large volume d’eau ce qui permet d’isoler une quantité importante de MOD en un temps très court. Grâce à de hauts rendements (r ≥ 95%) et la préservation des propriétés de la MOD, l’osmose inverse est la méthode de concentration la plus utilisée (De Schamphelaere et al., 2004; Kilduff et al., 2004; Sun et al., 1995). Il a été toutefois montré qu’une partie de la MOD était perdue dans le perméat d’osmose inverse (Huguet et al., 2009; Parlanti et al., 2002, 2000). L’inconvénient majeur de cette technique est de concentrer également les espèces inorganiques interférant lors des analyses de caractérisation et coprécipitant avec la MOD lors de la concentration. L’utilisation de l’électrodialyse avant l’étape d’osmose inverse permet d’éviter d’éliminer une grande partie des sels de l’échantillon. Cette technique a été utilisée avec succès en milieu marin et estuarien (Huguet et al., 2009; Parlanti et al., 2002, 2000).

2.1.3.2

Les substances humiques

C’est un composant majeur de la matière organique naturelle (MON) dans les sols, les systèmes aquatiques de surface, les sédiments et les tourbières. Elles ont comme caractéristique une couleur brune et sont des produits de décomposition de débris végétaux et confèrent une couleur marron/noir au sol. Comme présenté au paragraphe 2.1.1, les substances humiques sont composées des acides humiques (AH), des acides fulviques (AF) et de l’humine. La distinction

entre ces trois types de substances humiques est basée sur des critères de solubilité en fonction du pH. Les acides fulviques sont solubles à tout pH, l’humine est insoluble à tout pH tandis que les acides humiques sont solubles pour un pH supérieur à 1. Les substances humiques aquatiques contiennent en majorité des acides fulviques mais aussi des acides humiques. Les substances humiques sont définies de manière opérationnelle comme la fraction de MOD retenue par la résine XAD-8. Elles représentent entre 40 et 60% du carbone organique dissous (COD) dans les systèmes aquatiques naturels de surface (Martin-Mousset et al., 1997). Selon Leenheer (1981) cette fraction semble caractérisée par un ensemble d’acides organiques simples (acides gras volatils), de polyélectrolytes complexes riches en groupements hydroxyles et carboxyliques, de sucres sous forme acide (acides uronique, aldonique, polyuronique) ainsi que de structures de type carbohydrate.

Les substances humiques sont des macromolécules qui peuvent présenter une conformation linéaire ou enroulée en fonction de leurs propriétés et de la nature de la solution (Conte and Piccolo, 1999). Depuis les années 2000, la communauté scientifique s’accorde à dire que les acides fulviques ont généralement un poids moléculaire compris entre 500 et 2500 Da et les acides humiques entre 5000 et 10 000 Da. Il ne s’agit donc pas de macromolécules ayant d’importantes masses moléculaires mais d’objets relativement petits pouvant s’agréger entre eux par le biais d’interactions faibles (Baalousha et al., 2006; Piccolo, 2001; Swift, 1999).

Elles sont une association de molécules hétérogènes qui sont retenues ensemble par des forces d’interaction dépendantes du pH et de leur composition. Par exemple, les acides fulviques sont l’association de petites molécules de caractère hydrophobe composées de suffisamment de groupements acides pour retenir la macromolécule en forme dispersée quel que soit le pH. Les acides humiques sont constitués de composés hydrophobes qui sont stabilisés à pH neutre par des forces hydrophobes (van der Walls, π-π et CH-π). La conformation des acides humiques augmente en taille quand les ponts d’hydrogène intermoléculaires sont formés à pH acide jusqu’à la floculation (Piccolo, 2001).

Les substances humiques constituent un mélange de macromolécules portant une grande variété de groupements fonctionnels notamment des groupements azotés (amine primaire, imine, etc.), des groupements oxygénés aliphatiques (acides, aldéhydes, cétones, etc.) et des groupements oxygénés aromatiques (phénol, quinone…) et présentant une large gamme de propriétés physico-chimiques qui conditionnent leur comportement géochimique (MacCarthy and Malcolm, 1989).

2.1.3.3

Les substances non humiques

Les substances non humiques sont les substances non hydrophobes de la MOD. Les résultats obtenus au Leesu au cours du doctorat de Pernet-Coudrier (2008) ont montré que la MOD d’origine urbaine présente des caractéristiques différentes des substances humiques à savoir un fort pourcentage de MOD hydrophile et un degré d’aromaticité faible. De plus, la MOD d’origine urbaine a présenté une plus grande diversité fonctionnelle que la MOD naturelle avec une teneur élevée en structures protéiques (Benoît Pernet-Coudrier et al., 2011b).

La MOD urbaine est composée majoritairement d’une fraction hydrophile acide (HiA) avec 32-74% du COD et la fraction protéinique correspond à 11-17% de la MOD (Imai et al., 2002). Selon les analyses de Croué (2004) réalisées dans des eaux de rivière, la fraction transphilique neutre correspond aussi à des structures protéiniques caractérisant une origine biologique algale ou bactérienne fortement marquée au sein de cette fraction. Ces résultats sont

en accord avec le travaux de caractérisation réalisés dans les rejets de STEP et dans le milieu récepteur à l’aval de l’agglomération parisienne et qui ont montré que la MOD a une composition riche en fraction non humique (Louis et al., 2014; Matar, 2012a; Pernet-Coudrier, 2008; Benoît Pernet-Coudrier et al., 2011b; Varrault, 2011).

2.1.4La matière organique dissoute dans les milieux récepteurs sous forte

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