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Chapitre 2. Cadre conceptuel et modèle théorique

2.4. La distance pédagogique en formation à la recherche

2.4.3. Le développement de l’autonomie chez les étudiants-chercheurs

Un des objectifs de la formation à la recherche dans les cycles supérieurs est le développement de la capacité à conduire des projets de recherche de façon autonome. Ceci s’acquiert par la prise encadrée des décisions qui concernent le projet de recherche étudiant. La responsabilisation progressive de l’étudiant en ce qui a trait aux différents éléments qui constituent son projet est primordiale pour cultiver son autonomie. Les difficultés en lien avec la définition de son propre objet d’étude et celles en lien avec la conception, la mise en œuvre et la gestion

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de la démarche de recherche forgent la capacité de l’étudiant-chercheur à conduire des recherches de façon autonome. Ainsi, le but ultime de l’encadrement est de soutenir le développement des compétences personnelles et générales en plus de leurs compétences scientifiques, tout en aidant les étudiants à identifier et à surmonter des problèmes complexes qui pourraient entraver leur progression.

L’augmentation du nombre d’étudiants de cycles supérieurs au cours des dernières décennies, avec la diversité de profils que cela a entrainée, révèle une nécessité d’adopter une approche d’organisation de la formation à la recherche. Manathunga (2005) décrit deux approches que les universités ont adoptées pour l’organisation de l’encadrement des étudiants-chercheurs. Une première approche, que Godskesen et Kobayashi (2016) qualifient de « pédagogie de soutien et de provision », prône la création de davantage de structure : écoles d’études supérieures, centres de soutien et formation à la supervision pour les professeurs (Lee et Green, 2009). Une deuxième approche, considérée comme étant un « environnement d’apprentissage distribué privilégiant l’auto-organisation » (Godskesen et Kobayashi, 2016), se fonde sur une vision socioculturelle de la formation des étudiants-chercheurs (Boud et Lee, 2005). Suivant cette approche, les étudiants saisissent des opportunités d’apprentissage et créent leurs propres contextes dans un environnement plus large incluant les pairs, les collègues, les proches et les collaborateurs à l’intérieur et à l’extérieur de l’établissement universitaire (Golde, Bueschel, Jones et Walker, 2006).

Plutôt que mutuellement exclusives, ces approches doivent être considérées comme étant complémentaires, car les étudiants-chercheurs ont besoin autant de structures de soutien à l’apprentissage que d’un environnement leur permettant de développer l’agentivité. Pour les détracteurs de la « pédagogie de soutien et de provision », cette approche entrave le développement des étudiants en tant que chercheurs indépendants et autonomes. Cependant, la « pédagogie de l’auto-organisation dans un environnement d’apprentissage distribué » requiert un degré élevé d’autodirection et d’agentivité, des habiletés qui ne sont pas toujours assez développées chez les étudiants, notamment au début du parcours dans les cycles supérieurs. Des structures de soutien seraient ainsi nécessaires pour l’adoption de cette approche (Godskesen et Kobayashi, 2016). Le passage d’étudiant à étudiant-chercheur est un aspect crucial de la formation à la recherche dans les cycles supérieurs et l’exercice de l’autonomie serait la base de cette transition (Lovitts, 2005). Les relations que l’étudiant-chercheur entretient d‘abord avec son encadreur, puis avec ses pairs et enfin avec son réseau soutiennent le développement de son autonomie. L’autoefficacité des étudiants-chercheurs peut être promue par l’encouragement à penser et à agir de manière autonome, tout en fournissant les orientations nécessaires pour effectuer leurs travaux de recherche (Overall, Deane et Peterson, 2011). En outre, leur agentivité peut être renforcée par les rétroactions mettant en exergue les contributions concrètes qu’ils font grâce à la conduite de leurs travaux (McAlpine et Amundsen, 2015). Par leur engagement dans des instances de participation

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facultaire, les étudiants-chercheurs construisent leur identité au sein de leur discipline et développent la confiance en soi. De la même manière, cette identité et cette confiance se construisent par la participation à des activités scientifiques.

Boud et Lee (2005) insistent sur l’importance du rôle des pairs dans la formation à la recherche. Wright (2003), quant à elle, déclare que l’appel au soutien du réseau est un facteur fondamental afin de surmonter les difficultés qui surviennent tout au long du parcours d’études et que ceci contribue à maintenir la durée des études dans les délais prévus. Hopwood (2010), pour sa part, souligne l’importance des relations dans le processus de formation à la recherche, par exemple, pour améliorer la compréhension conceptuelle des étudiants ainsi que leur réponse affective aux défis auxquels ils sont confrontés.

Cette littérature met en exergue une vision de la formation à la recherche considérant l’autodirection et l’agentivité comme des compétences centrales. Les situations dans lesquelles les étudiants-chercheurs éprouvent des problèmes en lien avec la progression, la motivation ou le manque de confiance en soi sont souvent difficiles à définir. Ceci peut constituer un obstacle sérieux pour l’exercice de l’autodirection et peut aussi les empêcher de partager ces défis avec les personnes qui peuvent les aider (Kearns, Gardiner et Marshall, 2008). Pour Godskesen et Kobayashi (2016), ce cercle vicieux serait le principal facteur d’allongement de la durée des études. Ainsi, l’encadrement doit d’abord contribuer à définir le problème éprouvé par l’étudiant afin de favoriser sa progression.

En ce qui a trait à la dimension du développement de l’autonomie, la formation à la recherche dans les cycles supérieurs comporte plusieurs objectifs : premièrement, soutenir l’étudiant-chercheur dans la définition et la gestion de sa démarche de recherche; deuxièmement, le guider à travers l’exploration de pistes de solution aux difficultés qui surviennent; troisièmement, favoriser sa capacité à agir et à exercer son influence sur son environnement et quatrièmement, encourager sa responsabilisation vis-à-vis de la conduite de son projet de recherche et de sa formation en tant que chercheur.

Pour synthétiser les éléments qui viennent d’être présentés, la Figure 3 montre l’ensemble d’éléments qui déterminent la distance pédagogique dans un contexte de formation à la recherche dans les cycles supérieurs, ce qui constitue une des assises conceptuelles de cette thèse.

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Figure 3. Éléments déterminant la distance pédagogique en formation à la recherche

2.5. La présence transactionnelle globale dans une communauté