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CHAPITRE 2 – CADRE D’ANALYSE

2.2 LA THÉORIE DES SYSTÈMES : POSTULATS ET CONCEPTS

élaborée par le biologiste et psychologue Ludwig Von Bertalanffy. Les premiers fondements de la TGS ont été développés dans les années 1920 et s’inscrivent dans le courant de la première cybernétique (Whitchurch et Constantine, 1993). Le fondateur de cette conception théorique définit les systèmes comme étant « des ensembles d’éléments en interaction les uns avec les autres » (Bertalanffy, 1973, p.32). D’autres auteurs ont ajouté à cette définition quelques précisions en mentionnant que le système cherche à atteindre un ou plusieurs buts déterminés, explicites ou non, et qu’il produit une ou des activités tout en évoluant (Amiguet et Julier, 2001). Une des idées principales émises par Bertalanffy est que l’homme est actif dans son environnement. Cela signifie que l’humain n’est pas simplement réactif à son environnement, mais bien qu’il est capable d’initiative et d’adaptation (Bertalanffy, 1993).

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Trois postulats principaux sont à la base de la TGS (Whitchurch et Constantine, 1993). Le premier postulat stipule que la TGS a le potentiel d’unifier les sciences. Ce principe expose que la notion de système peut être applicable à toutes les sciences parce qu’il y a une analogie entre les différents systèmes, qu’on parle du système nerveux, du système informatique, du système familial ou autre. On appelle cette analogie l’« isomorphisme », qui signifie l’équivalence des formes. Le second postulat de base mentionne qu’un système doit être compris comme un tout, selon une perspective holiste. Ce postulat inclut les principes de « non-sommativité » et de « totalité ». La non-sommativité affirme que le tout est plus grand que la somme de ses parties. Par exemple, une famille est plus que l’addition de parents et d’enfants (Whitchurch et Constantine, 1993). En effet, la famille est un système complexe et plusieurs relations interdépendantes y sont présentes. Le principe de totalité, quant à lui, précise que les différentes parties (aussi appelées sous-systèmes) ne peuvent être examinées de manière individuelle puisque les éléments présents au sein d’un système sont interreliés. Ainsi, une modification dans un élément du système amène des répercussions sur l’ensemble des sous-systèmes (Amiguet et Julier, 2001; Whitchurch et Constantine, 1993). Le troisième postulat principal de la TGS est unique aux systèmes humains. Il explique que ces systèmes sont capables d’autoréflexivité, c’est-à-dire qu’ils ont la capacité d’examiner leur propre comportement. En effet, les humains ont une aptitude qui leur permet de réfléchir sur leur propre système et de se positionner en observateurs externes. Cette autoréflexivité donne la liberté à chaque individu d’établir ses propres buts et d’atteindre un niveau d’abstraction qui lui permet de planifier des activités orientées vers ces buts, comme la formation d’une famille. Whitchurch et Constantine (1993) mentionnent également qu’il est possible d’organiser des buts plus complexes comme la coopération internationale lors de désastres naturels, ou encore le développement d’alliance entre les nations.

Whitchurch et Constantine (1993) présentent cinq principaux concepts de la théorie générale des systèmes. Le premier concept important se nomme l’interdépendance ou l’influence mutuelle. Étant donné que toutes les composantes d’un système sont interdépendantes, ou maintenues ensemble dans un système, les comportements de chaque composante auront une influence mutuelle, ce qui signifie que l’ensemble des composantes du système sera affecté. Dans le cas d’une famille, cela signifie que le comportement d’un membre de la famille ou

ce qu’il vit dans une situation particulière aura une influence sur tous les autres membres. Par exemple, après avoir vécu un décès dans sa famille, un membre peut s’éloigner physiquement et émotionnellement des autres membres alors que deux autres personnes peuvent développer une alliance encore plus forte qu’avant le décès, modifiant ainsi significativement la dynamique familiale (Whitchurch et Constantine, 1993).

Le second concept important de la TGS s’avère être la hiérarchie. Les tenants de cette théorie conçoivent la nature comme une superposition de systèmes dont la complexité va en croissant, comprenant les sous-systèmes, les systèmes et les suprasystèmes. Par exemple, lorsqu’on s’intéresse à la famille, un sous-système pourrait être la relation conjugale et le système serait la famille avec tous les membres de la famille, incluant les enfants (Whitchurch et Constantine, 1993). Le sous-système est donc une sous-division du système dans lequel il évolue. Le suprasystème est constitué des systèmes plus larges dans lesquels évolue le système. Pour une famille, les suprasystèmes sont les liens avec la famille éloignée, la communauté, la région géographique et le système national (Whitchurch et Constantine, 1993).

Les frontières constituent un autre concept important de la TGS. Les frontières ont comme utilité de distinguer ce qui est inclus dans un système et ce qui ne l’est pas. Une frontière constitue une interface, ou un point de contact, entre le système et d’autres systèmes (sous- systèmes et suprasystèmes), ou entre le système et son environnement (Whitchurch et Constantine, 1993). Chaque système a ses propres frontières qui ont chacune un degré de perméabilité. Ainsi, un système peut avoir des frontières ouvertes et posséder une facilité à échanger de l’information avec l’environnement alors qu’un autre système aura des frontières fermées sans aucun échange avec l’environnement qui l’entoure. Lorsqu’il est question de systèmes humains, on parle toujours de systèmes ouverts puisque les individus effectuent des transactions avec leur environnement, et ce, à des degrés d’ouverture très variables.

Le quatrième concept d’importance pour la TGS est l’équifinalité. Un système possède la capacité d’atteindre les mêmes buts en empruntant des voies différentes (Bertanlanffy, 1973). Ainsi, un résultat peut avoir plusieurs causes initiales et une cause, plusieurs résultats

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différents. Par exemple, la garde des enfants dans une famille recomposée peut varier d’une famille à l’autre. Dans une famille, les parents peuvent avoir une garde partagée où les enfants partagent leur temps de manière égale entre leurs deux parents (une semaine chez leur mère et une semaine chez leur père). Dans une autre famille, les enfants peuvent avoir une garde où les enfants sont une fin de semaine sur deux avec leur père. Bien que la modalité de garde soit différente, les deux familles présentées constituent toutes les deux des familles recomposées.

Enfin, un dernier concept important de la théorie générale des systèmes est la rétroaction, aussi appelée feedback. L’information circule entre les différents éléments du système et cela lui permet d’effectuer des changements selon les finalités à atteindre. La rétroaction comprend aussi le principe d’homéostasie, c’est-à-dire la capacité d’un système à retrouver un équilibre fonctionnel. Un système recherche donc autant la transformation que la stabilité. Ces deux fonctions permettent au système de développer une bonne adaptation. Il y a deux mécanismes de rétroaction, soit le feedback négatif et le feedback positif. Le feedback négatif sert à rétablir ou maintenir un état d’équilibre dynamique, ce qui permet de réguler toutes formes de perturbations internes ou externes. Ce type de rétroaction permet d’assurer une stabilité au sein du système. De son côté, le feedback positif permet une déviation de l’état initial. Il s’agit de l’ouverture du système aux nouveautés et aux changements (Whitchurch et Constantine, 1993). Cette rétroaction est utile pour permettre au système d’évoluer et de s’adapter aux nouvelles situations.

L’ensemble des fondements de base de la théorie générale des systèmes a permis de mieux comprendre les systèmes sociaux selon une perspective complexe et holiste. En effet, l’évolution de cette théorie globale des systèmes a contribué significativement à la compréhension des interactions humaines (Galvin, Dickson et Marrow, 2006). Cette approche systémique a grandement influencé le développement de la recherche et de l’intervention en sciences humaines. La principale contribution de l’approche systémique a été en thérapie familiale (Whitchurch et Constantine, 1993; Galvin et coll., 2006).

2.3 LA THÉORIE SYSTÉMIQUE APPLIQUÉE À LA FAMILLE