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La quête identitaire : Entre autonomie et dépendance

L’AUTONOMIE AFFECTIVE ET RELATIONNELLE

3.3. La quête identitaire : Entre autonomie et dépendance

3.3. La quête identitaire : Entre autonomie et dépendance

L’autonomie se matérialise par la liberté d’une personne de faire ses choix de manière personnelle, sans se laisser influencer par des personnes extérieures, elle est « déterminée de l’intérieur » Maslow (1989). Elle amène donc à une certaine liberté, une affirmation de soi, de ses choix indépendamment de l’influence de l’entourage. En vue d’accéder à cette forme d’autonomie, l’adolescent se lance dans une quête identitaire qui révèle un double besoin : la reconnaissance de son entourage et la reconnaissance de soi. Ce besoin révèle un paradoxe entre le désir d’autonomie, de singularité et celui de dépendance.

La société d’aujourd’hui que Braconnier (2007) qualifie « d’adolescente » rend plus difficile l’exercice de recherche de singularité. En effet, les repères posés par nos sociétés occidentales étant en constante mouvance, les adolescents sont assujettis à un effort permanent d’adaptation en vue de correspondre à leurs attentes. Finalement, la seule la constante correspondant aux différentes générations, est l'effort fourni par l'adolescent pour repérer la bonne distance à adopter avec ceux qui l'encadrent et qui l'entourent de leur affection.

Les interactions générées par ce processus d’affirmation face à l’autorité, renvoient l’adolescent à des images de soi, souvent contradictoires, qui contribuent selon Audétat et Voirol (2007), à l’élaboration de son Moi.

L’adolescent développe progressivement sa capacité à effectuer ses propres choix en reconsidérant les règles fixées par le milieu social et naturel (Piaget, 1974). Il est néanmoins à noter que le besoin des autres ne s’estompe pas du seul fait de l’indépendance que l’on acquiert. Bien au contraire, comme nous l’avons indiqué, les proches jouent un rôle majeur dans l’affirmation de soi ; Les regards et les jugements transmis à l’adolescent par l’entourage contribuent à la construction identitaire qui s’appuie justement sur ce rapport à l’autre, sur les liens d’amour et d’amitié, qui entretiennent, dans une certaine mesure, les liens de dépendance se révélant être au cœur du processus de la quête identitaire. (Balegamire Bazilashe, Ditisheim et Marc, 1995)

Partant de là, l’affirmation de l’autonomie de l’adolescent résidera dans sa capacité à prendre des décisions tout en assumant les divergences d’opinions, les points de désaccord, voire les oppositions de ses interlocuteurs. Son sentiment de liberté est d’autant plus assumé qu’il a conscience des répercussions de ses choix sur son entourage.

Finalement, cette conquête d’une identité distincte peut être rapprochée d’un parcours semé de défis, que l’adolescent affronte au fil du temps et qui pourrait nécessiter de nombreuses années. C’est au regard de ces enjeux et des difficultés guettant l’adolescent à cette période, qu’il appartient aux parents d’assumer leur rôle dans l’émancipation de leur enfant, et d’être en mesure de l’accompagner dans la quête de son autonomie affective et de sa construction identitaire.

3.4. Le rôle de l’amitié

Comme nous l’avons exposé, l’adolescence est une période de transition durant laquelle l’adolescent se découvre et subit de nombreuses transformations d’ordre social, familial et physique. A travers cela, c’est son identité et son être tout entier qui se développent et l’amènent

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ainsi dans le corps et la vie d’un adulte (Claes, 1983). A ce stade, l’adolescent ressent le besoin de s’émanciper, de prendre de la distance vis-à-vis de ses parents. Cette situation est assez complexe sachant que tout en ayant besoin de l'affection et du soutien de sa famille, il doit s'en détacher pour mieux se chercher.

C’est ainsi que l'appartenance à un groupe apparaît comme le moyen de s'écarter de ses proches, de se trouver une place, de trouver du soutien. (J. Kroger, cité par Clocher, 2007). L'adolescent évolue alors en fonction des relations qu'il entretient avec son entourage familial et du groupe auquel il appartient. On peut donc considérer que la gestion de ces relations constitue l’une de ses préoccupations majeures.

Claes (1983) insiste sur le rôle du groupe de pairs dans l’émancipation de l’adolescent. Selon lui, l’adolescence serait une période où le jeune apprend de ses échecs et succès et notamment à travers les expériences menées avec les pairs. Durant cette période, il est assez instable, en quête de lui-même et donc influençable notamment par d’autres adolescents et cela parfois pour mieux se distancer de sa famille, surtout quand il est en opposition avec celle-ci.

Au sein d’un groupe, il se socialise avec des personnes qui lui ressemblent, partageant les mêmes opinions et centres d’intérêt, avec lesquelles il tisse des liens d’amitié. C’est avec elles qu’il va partager ses expériences et se construire peu à peu (Braconnier, 1999 ; p :223). Ces expérimentations lui donnent un avant-goût de sa future vie sociale d’adulte. A cet effet, Coleman (1961) évoque la notion de société adolescente au sein de laquelle, les jeunes développent une culture propre en relâchant les liens familiaux.

Néanmoins, Claes (1983) précise que dans la majorité des cas, l’adolescent ne se détache pas de ses parents par opposition ou confrontation mais simplement car il est naturel de s’ouvrir aux autres et que cela fait partie du processus de socialisation et du développement de l’identité. Ainsi, l’adolescence se caractérise selon Audétat et Voirol (1997) par deux phénomènes contradictoires : le besoin d’indépendance par rapport à l’autorité et le désir d’appartenance à un groupe.

Le groupe de pairs dans lequel naissent et se cultivent les liens amicaux permet justement de se dégager de la sphère familiale qui gêne l’installation des acquis sociaux (Braconnier, 1999 ; p :34) Cette construction en dehors du cercle familial se fait par le biais d’un cercle d’amis dans lequel l’adolescent se sent bien. En effet, durant cette période, l’amitié occupe une place prépondérante. Selon une enquête réalisée par le CREDOC en mai-juin 2002, Pour 39% des jeunes et notamment des filles de 14-15 ans, le cercle d’amis est l’endroit où ils préfèrent se trouver, devant la famille (30%) et seuls dans leur chambre (23%). Les liens affectifs sont essentiels : la moitié des adolescents considèrent qu’un ami est « quelqu’un qui m’aime comme je suis » et pour plus d’un tiers d’entre eux, c’est « quelqu’un qui sait m’écouter et me comprendre ». Cependant, le côté affectif reste un peu plus faible chez les garçons qui recherchent davantage la complicité et pour qui un ami, « c’est quelqu’un avec qui on rit des mêmes choses ». Complicité, confidence et solidarité unissent donc les adolescents d’un même cercle d’amis qui peuvent alors partager des problèmes ou des inquiétudes (Braconner, 1999 ; p :222). Ils sont très sollicités sur des questions sentimentales qu’ils jugent parfois sujet tabou et impossible à aborder en famille. Une enquête IPSOS réalisée en 2005 révèle que 91% des adolescents ayant rencontré un problème, auraient obtenu l’aide d’un ami de leur âge.

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L’amitié est en ce sens le siège d’une confrontation avec des valeurs, des normes, des idées, des expériences qui font réfléchir l’adolescent à ses propres principes et ses adhésions.

Grâce à l’amitié, l’adolescent se construit une identité propre (Braconnier, 1999 ; p :411). Il trouve en l’ami, un alter ego une personne qui vit des réalités proches des siennes, une personne qui partage cette même quête d’identité et d’affirmation de soi. Les amis accompagnent la quête d’indépendance de l’adolescent qui fuit l’attachement ou les sentiments à la fois excessifs et ambivalents à l’égard des parents.

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CHAPITRE 4 :