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La publicité sur les drogues de l’annexe F

2. L’encadrement normatif canadien

2.1 La Loi sur les aliments et drogues et son règlement

2.1.3 La publicité sur les drogues de l’annexe F

La LAD est complétée par le RAD, qui en détaille l’application. Un seul article vise spécifiquement la PDMO et on le retrouve dans la partie C du règlement :

C.01.044 RAD Quiconque fait de la publicité auprès du grand public d’une drogue mentionnée à l’annexe F doit ne faire porter la publicité que sur la marque nominative, le nom propre, le nom usuel, le prix et la quantité de la drogue.

Dès 1949, le RAD prévoyait une interdiction totale de faire de la PDMO et ce, afin de « protéger le consommateur contre les dommages à sa santé et contre les tromperies »277. À l’époque, il existait peu de traitements efficaces pour traiter les diverses maladies ou conditions connues et c’est pour cette raison que le gouvernement avait choisi d’interdire toute publicité reliant un produit spécifique à une condition médicale.Même si la Loi et le règlement ont été amendés à maintes reprises, l’interdiction de la PDMO demeure. Le libellé actuel de l’article C.01.044 date de 1978; il devait surtout faciliter la comparaison des prix des médicaments par les consommateurs. Un des objectifs sous-jacents était d’inciter les patients à consulter un professionnel de la santé quand il était question de

275 Union des Consommateurs, « L’Union des consommateurs et Guay c. Pfizer Canada », Communiqué de

presse, en ligne : http://www.consommateur.qc.ca/union-des-consommateurs/?page_id=124 (page consultée le 16 janvier 2012)

276 Id.

maladies graves nécessitant la prise de médication. Son adoption a eu des conséquences qui n’étaient pas prévues que nous présenterons ultérieurement278.

Avant d’inclure ou non une substance à l’annexe F de la LAD, un comité de Santé Canada procède à une évaluation du produit en se basant sur 10 facteurs établis et dont la liste est publiquement accessible sur le site web de Santé Canada279. L’ingrédient doit figurer à l'annexe F si l'une ou l'autre des 10 conditions s'applique. Ces critères ont été développés afin de protéger les patients eux-mêmes, mais également la santé publique de façon plus globale. À titre d’illustration, voici 4 de ces facteurs :

a) un mode d'emploi individualisé et/ou la supervision directe d'un praticien qualifié de la santé, un traitement auxiliaire à l'aide de médicaments d'ordonnance inscrits à l'annexe ou la supervision en laboratoire sont nécessaires;

b) il existe une mince marge de sécurité entre les dosages thérapeutiques et toxiques, en particulier dans le cas des personnes âgées, des enfants, des femmes enceintes et des mères qui allaitent;

g) ils ont contribué ou sont susceptibles de contribuer au développement de souches résistantes de micro-organismes chez les êtres humains;

j) ils ont un effet thérapeutique reposant sur des concepts pharmacologiques récemment élucidés, dont les conséquences n'ont pas encore été établies.

Les deux premiers critères sont les plus souvent cités, le troisième démontre bien l’aspect de protection de la santé publique et le dernier aborde le sujet des nouveaux médicaments, sujet que nous avons étudié à la partie précédente.

Il existe certaines exceptions à cette liste et certains médicaments sont exclus de l’annexe F même s’ils rencontrent les critères établis. C’est le cas des médicaments qui doivent être facilement accessibles en situation d'urgence soit lorsqu'il n'est pas possible d'obtenir une ordonnance en temps opportun : l'adrénaline dans les trousses de secours pour piqûres

d'insectes par exemple. Il en va de même pour ceux qui sont rarement utilisés sous la supervision d'un praticien qualifié de la santé, leur libre accessibilité l'emportant sur le besoin d'assurer la protection de leur utilisateur, telles l'insuline et la nitroglycérine280. Ces médicaments pourraient donc faire l’objet de PDMO si on se rapporte au libellé de l’article C.01.044 RAD, mais l’interdiction de l’article 3(1) LAD s’impose pour les maladies qui sont traitées par ces médicaments, telles le diabète et l’insuffisance cardiaque congestive.

En terminant, il est bon de noter que cet article du règlement interdit uniquement la publicité qui s’adresse au grand public. Par conséquent, la publicité de médicaments d’ordonnance peut être faite auprès de professionnels de la santé. Ceci est acceptable puisque ces derniers possèdent une formation et des connaissances qui leur permettent de mieux comprendre les implications liées à la prise d’un médicament. Cependant, une zone grise demeure : qu’est-ce que le grand public? On peut se demander quand un groupe devient assez distinct pour ne pas faire partie du « grand public »281. Un regroupement de patients atteints d’une même maladie serait-il assez distinct pour ne pas être visé par l’article C.01.044 RAD, n’étant plus assimilé au grand public? Par ailleurs, certains membres de tels groupes ont des connaissances poussées sur leur condition de santé et réclament de l’information sur les options thérapeutiques disponibles. À quel moment ce niveau de connaissance leur permet-il de se distinguer du « grand public »? La question demeure, mais nous croyons qu’il serait opportun d’établir cette distinction.

279 Veuillez consulter la page internet suivante : http://www.hc-sc.gc.ca/dhp-mps/prodpharma/applic-

demande/pol/schf_annf_fact_pol-fra.php

280 Résumé de l’étude d’impact de la réglementation du Règlement modifiant l'annexe A de la Loi sur les

aliments et drogues et le Règlement sur les instruments médicaux (projet 1539), préc., note 262, p. 10.

281 SANTÉ CANADA, « Renouveau législatif en matière de protection de la santé – proposition législative

détaillée », 9 juin 2003, p.5, en ligne : http://dsp-psd.pwgsc.gc.ca/Collection/H21-218-2003F.pdf (page consultée le 29 juin 2011).