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CHAPITRE 1 : INTRODUCTION GÉNÉRALE

1.4 La Perception d'Efficacité Personnelle

Le concept de PEP a été créé dans un soucis d'expliquer et de prédire l'efficacité de traitements psychologiques divers (Bandura, 1977). Selon cette théorie, les techniques thérapeutiques seraient efficaces en activant ce MA cognitif. La PEP réfère à la capacité perçue de gérer ses comportements, ses cognitions et sa motivation relatifs aux demandes environnementales occasionnées par un stresseur, ainsi que la perception que ses actions auront l'effet désiré. Autrement dit, si les facteurs environnementaux ont un impact sur les cognitions, les comportements et les émotions d'un individu, sa PEP est à même de moduler ces impacts (Bandura, 1977; Maddux, 1995).

La PEP aurait une influence sur l'ajustement psychologique : elle permet l'établissement d'objectifs, la persistance dans la mise en place de stratégies pour les atteindre, l'utilisation de ses ressources cognitives et intellectuelles avec confiance, rapidité et rectitude, le tout menant à une adaptation émotionnelle, l'individu se sentant en contrôle et non en détresse (Maddux, 1995). Pour que la PEP soit une variable significative dans cet ajustement psychologique, elle doit être spécifique à la sphère de vie ciblée. Par exemple, un individu peut être confiant d'obtenir de bons résultats scolaires (haute PEP) mais se sentir incapable de remplir les exigences d'un travail dans le même domaine (faible PEP).

L'efficacité personnelle se distingue en deux catégories : l'attente de résultat (outcome expectancy) et l'attente d'efficacité (efficacy expectancy). L'attente de résultat concerne la croyance qu'un certain comportement peut mener à un certain résultat. L'attente d'efficacité est la conviction d'un individu qu'il peut performer le comportement requis pour atteindre le résultat (Bandura, 1977). Ces deux composantes seraient le plus souvent corrélées mais il pourrait s'avérer nécessaire de les distinguer lorsque les résultats attendus ne dépendent pas uniquement de la performance d'un individu et sont aussi influencés par des contraintes environnementales externes (Maddux, 1995).

La PEP se mesure en magnitude, en force et en généralisation. Plus la PEP est de forte magnitude, plus la personne se croit capable de performer un certain comportement malgré que le stresseur soit très important; une personne avec une PEP de moins grande magnitude pourrait croire en sa capacité dans certaines circonstances seulement par exemple. La force de la PEP est l'intensité de la conviction; une PEP de grande force n'ébranlera pas la conviction dans les capacités d'une personne malgré le fait de vivre une situation d'échec et celle-ci persistera dans ses comportements

malgré les obstacles. La généralisation de la PEP permet à un individu de se croire capable de quelque chose qu'il n'a jamais réalisé, parce qu'il se sent capable d'un comportement similaire (Maddux, 1995).

Les gens consulteraient en thérapie parce qu'ils souffrent, mais aussi, cette souffrance serait exacerbée du fait qu'ils ont l'impression de ne pas contrôler une sphère importante de leur vie (faible PEP). Le but de la thérapie serait de cibler cette démoralisation en amenant les gens à être en contrôle de leur vie, mais surtout, à leur faire savoir qu'ils le sont. Les nouveaux comportements adaptatifs, s'ils sont efficaces et apportent un changement cognitif et affectif, seront associés à une haute PEP et seront plus à même d'être répétés (Maddux, 1995). Ainsi, les stratégies thérapeutiques seraient efficaces parce qu'elles activent un MA, soit celui de permettre des expériences qui augmentent la PEP dans un domaine spécifique.

Bandura (1977) suggère quatre façons de permettre l'acquisition d'une forte PEP : par l'accomplissement d'une performance (expérience concrète de contrôle), la persuasion verbale (recevoir une remarque sur son potentiel), une diminution de l'activation émotionnelle (les personnes ont une plus forte PEP lorsqu'elles ne vivent pas d'émotions désagréables) et l'expérience vicariante (l'observation d'autrui). Il semblerait que l'accomplissement d'une performance soit la façon la plus efficace de fortifier sa PEP alors que la persuasion verbale aurait le moins d'impact (Maddux, 1995).

1.4.1 Le rôle de la PEP dans le TSPT et les cauchemars.

Benight et Bandura (2004) ont recensé et synthétisé dans la littérature plusieurs façons dont la PEP exerce un impact dans des expériences traumatiques diverses. Suivant une expérience traumatique, une personne avec un haut niveau de PEP interprèterait la situation de manière moins menaçante et adopterait un rôle proactif dans la mise en place de comportements d'adaptation aux difficultés. Au niveau cognitif, l'efficacité perçue à réguler ses pensées jouerait un rôle critique dans le maintien d'un bien-être émotionnel; en effet, c'est l'impression d'avoir perdu le contrôle de ses pensées, plutôt que la fréquence des cognitions aversives, qui serait anxiogène. Au niveau comportemental, les personnes avec un haut niveau de PEP iraient davantage chercher le soutien social dont ils ont besoin. Ainsi, chez des victimes de trauma de nature interpersonnelle telle qu'une agression sexuelle, un haut niveau de PEP aurait un effet protecteur, étant associé à moins de symptômes post-traumatiques et dépressifs, de ruminations, d'évitement et à une plus grande estime personnelle (Benight & Bandura, 2004).

Inversement, il a été démontré que la perception diminuée de contrôle contribuerait à un TSPT persistant après avoir contrôlé pour la sévérité de l'assaut (Benight & Bandura, 2004;

Kushner, Riggs, Foa, & Miller, 1993). De manière générale, une faible PEP expliquerait davantage l'anxiété d'anticipation et les comportements d'évitement (Maddux, 1995). Or, l'évitement constitue un symptôme important du TSPT, une stratégie qui empêcherait le traitement émotionnel de la structure de peur. Chez des patients souffrant d'un trouble anxieux ou de TSPT ayant suivi un traitement (cognitif-comportemental, recommandations médicales, ou les deux), autant l'attente d'efficacité que l'attente de résultats augmentaient en cours de traitement et prédisaient l'amélioration des symptômes anxieux et du fonctionnement général (Brown et al., 2014).

Étant donné son apport dans le développement et le maintien du TSPT, il est possible de croire que la PEP contribue également aux cauchemars post-traumatiques, un symptôme du TSPT. De la même manière, la RRIM pourrait se trouver à être efficace en augmentant la PEP des patients. La définition de la PEP ressemble à celle du sentiment de contrôle utilisée pour expliquer l'efficacité de la RRIM. Une mesure de PEP pourrait être une façon simple et efficace de mesurer le MA de sentiment de contrôle. L'avantage d'utiliser une telle mesure est de faire avancer la recherche à partir de connaissances déjà bien établies et reconnues. En effet, la mesure de la PEP a démontré ses propriétés psychométriques et est facilement adaptable à différentes sphères de vie (Bandura, 2006).

Or, à notre connaissance, la PEP n'a pas été étudiée à ce jour en relation avec les cauchemars associés au TSPT. Étant donné les particularités des cauchemars post-traumatiques discutées plus tôt, une échelle de PEP spécifique aux cauchemars apparaît nécessaire pour vérifier la contribution du sentiment de contrôle comme MA de la RRIM.