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La périurbanisation, le constat d'une évolution spatiale

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 55-58)

Chapitre 2 – Les espaces périurbains et leurs forêts

2.1/ La périurbanisation, le constat d'une évolution spatiale

Dés les années 1920, aux États-Unis, les sociologues Small, Park et Burgess (Coulon, 1992) ont décrit et conceptualisé l'étalement urbain de la ville de Chicago, avec ses corolaires sociaux.

L'évolution de l'urbanisation des villes intermédiaires françaises a suivi, au moins en partie, ces grandes descriptions de l’École de Chicago. Au XXe siècle, le développement des faubourgs et des banlieues a marqué les paysages urbains en entrainant des conséquences sociales à cause du zonage ou de la sectorisation. Après cette première phase d'étalement urbain, la démocratisation des moyens de transports modernes et individuels a rendu possible l'urbanisation des espaces plus éloignés. Aujourd'hui, l'évolution du modèle américain semble différer des concepts du développement européen. Certains spécialistes américains décrivent des modèles urbains sans réelle centralité (Grandelsomas, 2002). Ce schéma de développement semble très différent de la situation des villes intermédiaires européennes et françaises dans lesquelles la centralité est encore signifiante malgré d'incontestables tendances centrifuges (Bailly, Bourdeau-Lepage, 2011 ; Devisme, 2007).

En France, depuis une soixantaine d'années, l'urbanisation des périphéries urbaines a rarement été homogène. Les banlieues telles que nous les connaissons aujourd'hui, ont été créées au-delà des faubourgs traditionnels, mais elles n'ont pas constitué une limite à l'extension de l'urbanisation dans les espaces plus éloignés des villes-centres. Malgré des tentatives de planification sur de vastes échelles, les constructions de bâtiments et l'artificialisation des surfaces n'ont jamais vraiment cessé.

Le long de certaines voies de circulation, les villes se sont étendues sur des surfaces qui évoquent des tentacules ou des corridors urbains (Brun, 1985). Dans les espaces éloignés des grandes villes, les collectivités territoriales ont subi une urbanisation diffuse, mais elles ont aussi planifié des aménagements. Des lotissements et des zones d'activités ont donc été créés, et les bourgs toujours plus éloignés des centres urbains sont devenus des villes périurbaines (Brun, Roncayolo, 1985).

Pour décrire la situation actuelle, tout en s'inspirant des modèles développés par l’École de Chicago, des géographes ont élaboré des typologies d'espaces qui décrivent précisément la situation des villes intermédiaires françaises (Dodier, 2007). D'après ces modèles, les espaces périurbains peuvent s'appréhender selon le principe de couronnes d'urbanisation successive (Carte n°1, page 55). Dans la continuité de la ville et de sa banlieue, l'espace suburbain densément mais inégalement urbanisé, correspond à la première couronne périurbaine de la ville centre. La deuxième couronne est caractérisée par les petites villes et les bourgs qui se développent tels des ilots un peu à l'écart de la grande ville, et ils finissent par créer un maillage de bourgs que l'on identifie parfois à un archipel.

Un peu plus éloigné de la ville s'étend un espace davantage marqué par la ruralité. Cependant, une grande partie de sa population est sous l'influence prégnante de la ville, parce qu'elle y travaille

(cf. chapitre 2.2) ou qu'elle dépend d'elle de façons diverses. Cet espace constitue donc une troisième couronne périurbaine (Cailly, Dodier, 2007). Selon les villes et leurs caractéristiques géographiques, ces trois couronnes périurbaines ne sont pas uniformes, mais elles correspondent à des espaces identifiables dans les aires urbaines.

Carte n°1 – Les trois couronnes périurbaines et leurs forêts

Dans le contexte général du développement des villes, il apparaît que les frontières ville/espace rural ou ville/environnement naturel deviennent floues et inopérantes. Pourtant en France, les limites administratives des communes restent déterminantes même si d’autres structures gagnent en puissance (communauté urbaine, communauté de communes, etc.). Les approches pour l’étude des phénomènes de périurbanisation se conçoivent donc différemment selon les échelles spatiales et temporelles considérées. Les politiques, les géographes et les urbanistes décrivent des villes tentaculaires et des archipels urbains qui s'étalent, insèrent et finalement absorbent les terres La dimension des couronnes périurbaines et la distribution spatiale des communes et des forêts varient selon les caractéristiques des aires urbaines (cf. chapitre 2.2). L'influence d'une ville centre sur sa périphérie est souvent liée à la topographie et aux voies de circulation qui génèrent un étalement urbain en « doigt de gant » le long de ces axes.

agricoles et forestières voisines (Chapuis, 2008 ; Devisme, 2007).

Cependant, en marge de cette conceptualisation, la description des types d’espaces à l'interface ville/campagne peut être assez compliquée. A grande échelle, l'intrication des surfaces est souvent importante, et cet enchevêtrement se reproduit en de multiples endroits autour des communes situées dans les différentes couronnes périurbaines. La périurbanisation n'est donc pas seulement conçue par l'étalement des banlieues. Ses influences dans les bourgs et les villes éloignés des agglomérations centrales peuvent être prises en compte (Adef, 2001 ; Devisme, 2007). La périurbanisation est donc un processus global qui impacte les périphéries proches des villes françaises, mais qui touche aussi de diverses façons les communes situées dans les couronnes éloignées.

Selon les contextes sociaux et environnementaux, l'évolution des communes périphériques se différencie. Certaines communes perdent des habitants, notamment dans les banlieues et les cités populeuses alors que d'autres plus éloignées ou mieux situées s'urbanisent grâce à leurs lotissements pavillonnaires. Actuellement, quelles que soient leurs situations, la plupart des collectivités cherchent à créer des équipements et à attirer des entreprises créatrices d'emplois.

Ces dynamiques économiques et sociales ont naturellement des conséquences sur la consommation d'espace qui n'est pas vraiment régit à l'échelle des territoires périurbains.

Toutefois, des concertations sont engagées entre les communes et les élus, pour élaborer les Schémas de cohérence territoriaux (SCOT), et la réglementation impose des évolutions telles que la mise en place de la trame verte et bleue (Cormier, 2011).

Depuis quelques années, des urbanistes, des géographes et de nombreux habitants des espaces périurbains peu denses s'accordent sur les avantages liés à la respiration qu'amènent les espaces ruraux et forestiers dans le tissu périurbain (Bailly, Bourdeau-Lepage, 2011). Il semble toutefois que les faibles densités urbaines et périurbaines sont parfois peu compatibles avec le développement durable des territoires (Alexandre, Theys, 1999). Malgré les critiques et les évolutions territoriales plus ou moins polémiques, la qualité de vie générée par le cadre environnemental des espaces périurbains est généralement admise par les nombreuses personnes qui choisissent d'y habiter (Mathieu-Huber, 2007).

Les territoires périurbains ne sont donc pas construits en tant que tels, et les nombreuses populations qui les habitent n'y font pas toujours société. Il semble même que les identités spatiales périurbaines se diversifient (Cailly, Dodier, 2007 ; Dodier, 2007). Cette individualisation des comportements a t-elle des conséquences sur la fréquentation des espaces boisés ? Les pratiques récréatives restent-elles marquées par la proximité (Fourmy et al., 2012) de ces espaces à la ville ? Pour aborder ces

questions, la connaissance des populations périurbaines est nécessaire. Comment sont-elles définies ? Quelles sont leurs rapports aux territoires où elles viennent s'installer ? Ont-elles des conceptions territoriales communes ? Adoptent-elles les traditions locales en terme d'utilisation des paysages, ou tentent-elles d'imposer leurs façons de penser l'environnement ?

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 55-58)

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