LA NOTION DE CONTRAT DE TRAVAIL PARTIAIRE

1) Selon l'art. 319 CO, le contrat de travail présente quatre éléments constitutifs essentiels: une prestation personnelle de travail; la mise à disposition, par le travailleur, de son temps; un rapport de subordination entre l'employeur et le travailleur; enfin, un salaire³ .

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In Revue suisse de jurisprodence, 1983, p. 169.

Cf MEIER-HA VOZ, A., FORSTMOSER, P., Grundriss des Schweizerischen Gesellschaftsrechts, Berne 1981, p. 42; OSER, H., SCHÔNENBERGER, W., Dos Obligalionenrechl, Zurich 1929, Vorbem. ru Art. 1-40, note 59.

ATF 106 (1980) II 45.

Art. 319, al. 1 CO. Cf VISCHER, F., «Le Contrat de travai!», in Traité de droit pri-vé suisse, vol. VII, t. l, 2, Fribourg 1982, p. 11 ss, 30 Ss; BERENSTEIN, A., «Le Contrat de travail, un siècle d'evolution législative), in Le Centenaire du code des T'~

obligations, Fribourg 1982, p. 227 SS, 232 S., 237, 245 5.; REHBINDER, M., Droit suisse du travail, trad. fr., Berne 1979, p. 204 5.; BRÛHWILER, 1., Hand-kommentar zum Einzelarbeitsvertrag, Berne 1978, p. 9 5S; SCHWEINGRUBER, ~~.-'

E., Commentaire du con/rat de travail, Berne 1975, p. 19 ss; STREIFF, U., Leiifaden zum nouen Arbeitsvertrag, Beme 1974, p. 27 ss; Al-KOURAICHI, 1., Us critères juridiques du contrai de travail, Genève 1968, p. 65 ss.

166 ETUDES DE DROIT DU TRAVAIL

D'ordinaire, le travailleur n'a pas vocation à bénéficier directement de la prospérité de l'entreprise. Il arrive cependant que l'employeur l'associe plus étroitement au devenir économique de cette dernière, si bien que s'instaure une véritable participation aux profits. Cette partici-pation s'étend aux risques, dans la mesure où le bas niveau des profits ou leur absence retentit sur la rémunération. Toutefois, le travailleur n'essuie point les pertes. Un tel contrat de travail sera qualifié de partiaire4 . Examinons les différentes formes du salaire pour déterminer lesquelles peuvent justifier cette qualification.

2) Le salaire est calculé soit d'après le temps, soit d'après le travail fourni ou, en d'autres termes, d'après le rendement (art. 319 al. 1 CO). Le salaire au rendement se présente sous divers aspects.

Les modes de calcul les plus répandus sont la rétribution aux pièces et à la tàche (art. 319 al. 1,326 et 326 a CO). Il faut y ajouter la rémuné-ration à la commission (dite aussi provision, art. 322b CO) et la partici-pation au résultat de l'exploitation (art. 322a CO). La commission est une participation à la valeur des affaires traitées par le travailleurs5. On la rencontre dans les activités qui, plaçant le salarié en contact avec la clientèle, lui permettent de réaliser un chiffre d'affaires individuel selon son rendement (personnel de vente, en particulier voyageurs de commerce; serveurs dans les restaurants; garçons-coiffeurs, etc.). La participation au résultat de l'exploitation, en revanche, a pour assiette le chiffre d'affaires ou le bénéfice de toute l'entreprise (ou d'une partie de celle-ci)6. Elle apparaît surtout dans les contrats des employés dont le rendement se reflète à ce niveau, c'est-à-dire les cadres dirigeants 7.

Signalons enfin que la gratification (art. 322 d CO), sans constituer à proprement parler une forme de salaire au rendement, est usuellement

4 Cf MEIER-HAYOZ 1 FORSTMOSER, p. 42; PATRY, R., Precis de droil suisse des sociétés, vol. l, Berne 1976, p. 49 55; VON STEIGER, W., «Die Personen-gesellschaften», in Schweizerisches Privatrecht, vol. VIII, 1. 1, Bâle et Stuttgart 1976, p. 327; OSER, H., SCHONENBERGER, W.,Das Obligationenrechl, Zurich 1936, ad Art. 330, note 10. Voir aussi A TF 99 (1973) 11303, 306.

5 Cf VISCHER, P 107; SCHNÜRlGER, B., «Les obligations des parties», in Le droit du rravait actuel dans les entreprises, Zurich 1982,4/3. 3. l, p. 2.

6 Cf Message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale concernant la revis ion des titres dixième et dixième^bis du code des obligations, du 27 août 1967, FF 1967 II 325; OSER 1 SCHONENBERGER, ad Art. 330, note 16.

7 Cf SCHWEINGRUBER, p. 66; OSERISCHONENBERGER, ad An. 330, notes 9 et 10. Voir aussi SJ 1982, p. 207 s.; 1960 p. 153, 157.

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fixée par l'employeur compte tenu des prestations du destinataire et du résultat de l'exploitation.

La pratique recourt souvent à une méthode de calcul mixte: le salaire se compose de deux parties, l'une fixe, mesurée selon le temps, l'autre variable, liée au rendements8. Rien n'empêche, cependant, que la rému-nération ne se fonde sur le seul rendement, c'est-à-dire que le travailleur soit payé uniquement aux pièces, à la tàche ou à la commission9, voire même qu'il ne touche qu'une participation au résultat de l'exploitation 10.

3) Lorsqu'il détennine le salaire seulement d'après le temps, le contrat ne saurait être qualifié de partiaire. Lorsque la rémunération est fonction du rendement, l'on doit faire une distinction. Ce dernier ne dépend-il que de l'activité du salarié (travail aux pièces ou à la tàche), toute idée de participation aux profits et aux risques reste absente. Tel n'est pas le cas si le rendement se révèle solidaire de la marche générale de l'entreprise. Sa rétribution consiste-t-elle dans des provisions, le voyageur de commerce d'une maison en pleine expansion ne gagne-t-il pas davantage que celui d'un employeur en déclin? La rémunération à la commission comporte donc une certaine participation aux profits et aux risques. Elle revêt un caractère partiaire. Ce caractère demeure limité, dès lors que l'entreprise doit verser la participation au chiffre d'affaires indi-viduel quel que soit son bénéfice (et même si elle enregistre des pertes).

Il s'accentue en cas de participation au chiffre d'affaires d'une partie de l'entreprise ou de l'entreprise tout entière. Cependant, ici encore, bien qu'elle se trouve plus étroitement liée au devenir de l'entreprise, cette participation peut être due même en l'absence de bénéfice (voire en présence de pertes). Le caractère partiaire du contrat de travail atteint son point culminant en cas de participation au bénéfice. Cette dernière, supposant un profit, comporte des risques plus étendus (sauf, encore une fois, celui de la participation aux pertes) 1 1. Le fait que la commission et la participation au résultat de l'exploitation ne représentent souvent qu'une partie du salaire, ajoutée à un montant fixe, atténue seulement l'aspect partiaire du contrat, mais ne le supprime pas.

8 Cf p. ex. Tribunal des prud'hommes de Bâle·Ville, 17 décembre 1979, in JAP ", 1981, p. 547 s.

9 Voir SJ 1982, p. 203, note 36, avec de nombreuses références; ATF 16 (1890) 400,

406; 41 (1915) II 105, 110 s. "..,.-'

10 Cf SJ 1982, p. 207 s.; 1960, p. 153, 157; 1953, p. 273, 277.

II C'est le cas classique. Cf supra, note 4.

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4) Ainsi, le contrnt de trnvail partiaire se définit à raison du mode de rémunération. Sont typiques, à cet égard, le salaire calculé à la commis-sion et, surtout, la rétribution déterminée en fonction du résultat de l'ex-ploitation.