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ETIJDES DE DROIT DU TRAVAIL

Dans le document Etudes de droit du travail (Page 77-80)

SOUMISSIONS PUBLIQUES ET CONVENTIONS COLLECTIVES DE TRAVAIL *

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prévues à la convention collective de la branche. Ce mécanisme ne res-sortit pas précisément au domaine de la politique contractuelle. Nous ne pourrons cependant éviter d'en traiter au moins latéralement, car il se trouve pratiquement lié au régime des soumissions.

E) Actualité de la question

Si l'on peut souligner le rôle pionnier du droit du travail en matière de politique contractuelle, force est de reconnaître que la mise en œuvre des conventions collectives par ce moyen de contrainte indirecte n'a pas suscité d'étude détaillée à ce jour9 .

Et pourtant, un arrêté du Conseil fédéral de 197]l 0, un arrêt du Tribunal fédéral de 197611 , ainsi que certaines difficultés récemment rencontrées par les administrations cantonales du travail (en particulier dans le Valais et à Genève), montrent que le sujet mériterait un examen d'ensemble, qui devrait aussi prendre en compte les délicats problèmes posés par le régime des autorisations de travail pour étrangers 12.

F) Plan

Notre ambition est limitée. Après avoir décrit sommairement les législations valaisanne et genevoise en matière de soumissions publiques (II) 13, nous examinerons à quelles conditions la jurisprudence les consi-dère comme conciliables avec le droit collectif du travail (III). Nous nous demanderons ensuite à quelles exigences de droit constitutionnel elles doivent satisfaire (IV). Nous étudierons enfin quels effets elles déploient dans le cadre des contrats individuels de travail (V).

9 Cf toutefois BERENSTEfN, A., «Les effets Îndirects des conventions collectives», in Travail et sécurité sociale 1962, n° 4, p. 25; AUBERT, G., «L'extension defac/o des conventions collectives de travaib}, in RDAF. 1984, p. 52.

10 JAAC35 (1970-1971) n° 10, p. 40,Homère.

II ATF 102 (1976) la 533, USIT.

12 ATF 109 (1983)Ib 238, Vêtements Frey; 106 (1980) lb 125, Shala.

13 Sur le plan fédéral, cf l'art. 5 al. 9 de l'ordonnance du Conseil fédéral sur la mise en soumission et l'adjudication de travaux et de fournitures du bâtiment et du génie civil par la Confédération, du 31 mars 1971, RS 172.056.12.

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U. APERÇU DES LÉGISLA TIONS VALAISANNE ET GENEVOISE A) Entreprises destinataires de la réglementation

L'obligation d'appliquer ,la convention collective est faite aux entre-prises qui contractent avec l'Etat, qu'elles soient ou non liées par celle-ci.

Parmi les employeurs non liés, on peut distinguer les dissidents, soit ceux qui entendent demeurer à l'écart de toute association professionnelle, et les minoritaires, soit ceux qui appartiennent à une association exclue de la négociation collective,

En Valais sont visées les entreprises qui exécutent des travaux adjugés ou subventionnés par le canton ou une commune; la pratique interprète largement la notion de «travaux»; il s'agit en fait de toutes les commandes (de travaux et de fournitures) dépassant un certain montantl4 ,

A Genève, la réglementation couvre également l'ensemble des commandes des services publicsl5 ; les commandes dans le domaine des travaux publics et de la construction font l'objet d'un règlement parti-culierl6.

B) Contenu des obligations imposées aux entreprises soumissionnaires

La réglementation valaisanne oblige expressément les entreprises à respecter les contrats collectifs de la branche 17, La réglementation gene-voise vise le respect des usages de la professionl8 , Cette expression désigne la même réalité: les usages, en effet, ne sont rien d'autre que la copie conforme (voire la photocopie) des clauses des conventions collec-tives déterminant les conditions de travail.

14 Art. 2 al. 2 du règlement du Conseil d'État concernant la mise en soumission et l'adjudication de travaux et de fournitures (conditions de soumission), du 9 avril 1986; art. 6 de l'arrêté du Conseil d'État concernant le registre professionnel, du 7 fevrier 1974.

IS Art. 2 du règlement du Conseil d'État concernant l'obtention de commandes de services publics, du IS décembre 1975, plusieurs fois modifié, RSLGJI3125.

16 Art. 1 du règlement du Conseil d'État concernant la mise en soumission et l'adjudi-cation des travaux publics, des travaux en bâtiment et des fournitures qui s'y rappor-17

18

tent, du 9 janvier 1985, RSLG U6/2. ,...

Art. 2 al. 1 lit. b et art. 13 al. 2 de l'arrête préeite du 7 fevrier 1974.

Art. 2 du règlement l/3/25 et art. 10 et Il du règlement U612.

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En Valais, les employeurs dissidents ou minoritaires sont tenus non seulement de faire en sorte que les salariés bénéficient des prestations prévues à la convention collective; ils doivent aussi s'affilier aux caisses sociales valaisannes créées par celle-ci et gérées par les organisations professionnelles (allocations familiales, vacances payées, assurance-maladie, AVS complémentaire etc.)19. La réglementation genevoise comportait naguère la même obligation qui, comme on le verra, fut déclarée contraire au droit fédéral par le Conseil fédéraPO.

C) La mise en œuvre

Pour déterminer le cercle des entreprises qui appliquent la conven-tion collective, le Valais a créé un registre professionnel, institué «pour les professions organisées paritairement et au bénéfice d'un contrat type ou d'un contrat collectif homologué par le Conseil d'État»21. L'entreprise qui sollicite son inscription au registre doit soit établir qu'elle a adhéré à l'organisation professionnelle de la branche, soit s'engager par écrit à res-pecter la convention collective du métier, laquelle est homologuée par le Conseil d'État22 . La violation des conditions de travail fixées par la convention entraine comme sanction la radiation23 .

Genève pratique le système des attestations, qui sont remises à l'au-torité par l'entreprise lors de chaque soumission. Il faut distinguer ici entre, d'une part, le respect des conditions de travail et, d'autre part, celui des obligations des employeurs envers les caisses de sécurité sociale.

a) Conditions de travail en général

Lorsqu'elle est liée par la convention collective de la branche, l'en-treprise se le fait attester par l'organisation patronale (ou, plus curieuse-ment, par une caisse de compensation) et produit l'attestation devant l'administration. Celle-ci s'en remet au contrôle effectué par les organisa-tions professionnelles signataires pour ce qui touche au respect effectif des conditions de travail. Elle n'accomplit elle-même aucune vérification.

Les autres entreprises (minoritaires ou dissidentes) suivent une pro-cédure plus lourde. Elles doivent signer auprès de l'Office cantonal de

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l'inspection et des relations du travail (ci-après: office ou OCIRT) un engagement officiel de respecter les usages de la profession (c'est-à-dire, comme on l'a vu, la convention collective)24. Elles sont régulièrement soumises à des visites sur place auxquelles l'office procède lui-même, en vue de s'assurer du respect effectif de cet engagement. L'inspection du travail se trouve ainsi amenée à contrôler non seulement l'application de la législation protectrice de droit public (ce qui est sa vocation), mais aussi celle des conventions collectives, qui relèvent du droit privé.

b) Cotisations aux caisses de sécurité sociale

Dans le domaine de la sécurité sociale, les obligations des employeurs ne diffèrent guère selon qu'ils sont ou non liés par la convention. Les uns et les autres doivent fournir une attestation de la caisse compétente (caisse instituée par les parties à la convention collec-tive ou par les organisations minoritaires, ou encore caisse publique) établissant qu'ils sont à jour en ce qui concerne les cotisations à l'assu-rance vieillesse et survivants25 et aux autres branches (allocations fami-liales, assurance perte de gain en cas de maladie, prévoyance profession-nelle)26.

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