• Aucun résultat trouvé

La mesure de l’ouverture commerciale d’une économie

Mesure de l’ouverture commerciale et de l’intégration financière

2.1. Histoire des travaux effectués afin de mesurer l’ouverture commerciale et l’intégration financière

2.1.1. La mesure de l’ouverture commerciale d’une économie

Pour mesurer l’ouverture des économies, Il y avait les indicateurs les plus couramment mobilisés. Dans les études historiques (comme P. Bairoch (1994)1), la mesure de cette ouverture consiste à prendre en considération le tarif douanier moyen ; plus il est élevé, moins le pays est ouvert, mais il y a des problèmes pour utiliser cet indicateur :

- Un tarif élevé sur un produit, peut diminuer ses importations, et donc, la part de ce tarif dans les importations totales se réduit, ce qui cause une surestimation de l’ouverture du pays concerné. De la même manière, une sous-évaluation de l’ouverture est également possible pour un pays qui établit un tarif faible mais uniforme sur beaucoup de produits.

- Comme le montrent les travaux d’A. Bouët (2000), l’existence de plusieurs sortes de tarifs pour une même catégorie de produit, rend difficile le calcul d’un tarif moyen.

118

- Les changements et les substitutions éventuelles et parfois rapides entre les tarifs sont une autre raison qui rend plus compliqué le calcul d’un tarif moyen.

- A cause de la différence des élasticités-prix de la demande de produits dans les différents pays, les effets d’un même tarif peuvent varier d’un pays à l’autre ; il peut bloquer les importations d’un produit vers un pays, mais n’entrave pas du tout ses importations vers d’autres pays.

Les analystes vont, de plus en plus, vers la combinaison des indicateurs et l’introduction d’un ensemble d’indicateurs pour mesurer l’ouverture commerciale d’une économie. Sachs et Warner (1995) dans leur étude qui a eu le plus fort écho politique et académique, considèrent un pays comme fermé s’il remplit au moins un des cinq cas suivants :

- Un taux moyen de tarifs douaniers supérieur à 40%.

- Des barrières non tarifaires sur plus de 40% des importations.

- Une prime sur le marché parallèle des changes supérieure à 20% sur une période de dix ans.

- L’existence d’un système économique socialiste (associé à un contrôle centralisé des flux commerciaux internationaux).

- L’existence d’un monopole d’Etat sur les principales exportations.

Dans les études plus récentes, comme les travaux de Berg et Krueger (2003), les auteurs prennent en compte des dimensions du protectionnisme dans la mesure de l’ouverture.

2.1.1.1. Le coefficient d’ouverture

L’indicateur d’ouverture le plus utilisé dans les recherches et les travaux est le coefficient d’ouverture défini comme la moyenne des exportations et des importations des marchandises et des services rapportée au produit intérieur brut :

(2.1)

Ce coefficient calcule la somme des exportations et des importations du pays i à la période t divisée par deux et rapportée au PIB de ce pays sur la même période. Compte tenu de la contrainte qu’a une économie d’équilibrer sa balance courante à moyen ou long terme, les exportations et les importations ont tendance à s’égaliser les unes avec les autres ; donc, le coefficient peut se simplifier à :

(2.2)

Ce ratio est statique et il mesure l’intensité de l’insertion de l’économie nationale dans les échanges mondiaux. Il y a également les difficultés d’interprétation statique de ce coefficient qui sont plutôt issues de sa double dépendance envers des facteurs politiques et des facteurs structurels. En effet, il y a des facteurs politiques et structurels comme la taille de

119

l’économie nationale (population et dimension), le progrès technologique et industriel et la qualité des spécialisations, le revenu par tête et le niveau de développement, les stratégies de la manipulation de valeur de monnaie nationale et de taux de change, et aussi la localisation géographique, qui affectent sur le volume du commerce des économies, et donc, ils ont des rôles déterminants dans la mesure de leur ouverture.

De plus, l’autre difficulté associée à ce coefficient est à propos des pays qui sont plutôt des importateurs de biens manufacturés afin de les monter ou d’en terminer la fabrication et de les réexporter ; des opérations qui entraînent la surévaluation de valeur des exportations, et font parfois, que cette dernière dépasse le niveau de production (comme cela a été ou est le cas de quelques pays asiatiques notamment dans les années 1990).

En terme dynamique, le coefficient mesure l’intensité du processus d’ouverture commerciale et l’avancement de l’intégration réelle, mais deux effets structurels, l’un lié à la tertiarisation des économies, l’autre à la diminution du prix relatif aux exportations qui abaisse le taux d’exportation globale, perturbent l’interprétation de ce ratio. Afin de régler ce problème, certains économistes comme Maddison (2001)1 et Bairoch (2002)2, en supprimant les exportations des services, ne prennent en compte que les exportations de marchandises au numérateur :

(2.3)

L’autre problème qui persiste pour ce ratio est lié à la déformation de la structure des prix entre la période initiale et la période terminale ; en d’autres termes, il dépend de l’évolution des termes de l’échange entre prix des biens échangeables et prix des biens non échangeables. Pour neutraliser ce biais, on peut calculer le coefficient d’ouverture à prix constants afin d’éliminer l’incidence des variations des prix d’une année de référence (dans ce cas, la valeur du coefficient dépend du choix de l’année de référence). Ce mode de calcul est intéressant à travers la confrontation des valeurs respectives des coefficients en prix courants et en prix constants, dont la différence reflète l’évolution des termes de l’échange intérieur au cours de la période, et montre aussi, sous certaines hypothèses, l’écart des gains de productivités entre le secteur des exportations et la moyenne de l’économie.

Un autre coefficient dit d’« ouverture motrice » qui, d’après Asselain et Blancheton (2005)3, échappe très largement aux objections formulées à l’encontre des indicateurs habituels d’ouverture globale, est défini comme le rapport entre le contenu en valeur ajoutée nationale des exportations manufacturières (XVAsm) et la valeur ajoutée totale du secteur manufacturier (ΣVAsm) :

1 Angus Maddison, (2001), « The world economy ; a millenial perspective », OCED, Paris

2 Paul Bairoch, (2002), « Les principales composantes économiques de la mondialisation dans une perspective

historique ; mythes et réalités », Economie appliquée, t. LV, N° 2

3 Jean-Charles Asselain & Bertrand Blancheton, (2005), « Dynamique de l’ouverture internationale ; paradoxes,

120

(2.4)

La définition du numérateur et du dénominateur pour cet indicateur est homogène ; tant pour l’aspect conceptuel (mesure en valeur ajoutée) que pour l’aspect de la couverture sectorielle (l’industrie de transformation). Ici, il n’y a aucun effet de structure lié à la tertiarisation et aussi la question du changement du prix relatif des biens exportés se pose avec beaucoup moins d’acuité.

On ne substitue pas cet indicateur partiel aux indicateurs d’ouverture globale présentés plus haut, le coefficient en prix courants et le coefficient en prix constants. C’est leur complémentarité qui permet d’analyser plus précisément l’ouverture d’une économie nationale.