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CONTEXTE GENERAL ET SPECIFICITES DU ON LINE

Section 3. Le marketing expérientiel sur le web

3. L’intérêt du marketing expérientiel en ligne

L’intérêt du marketing expérientiel en ligne est multiple. Du simple site vitrine qui relaie l’univers de la marque, à l’implication des consommateurs dans la chaîne de valeur de l’entreprise, en passant par la création d’un lien social entre marque et consommateurs, les possibilités sont variées.

Le premier intérêt du web est de véhiculer les valeurs et l’univers de la marque au travers d’espaces virtuels auxquels le consommateur peut accéder à tout moment et de partout. Cette capacité est encore décuplée avec le développement de l’Internet mobile et des terminaux mobiles permettant d’accéder à l’internet (tablettes numériques, téléphones, écrans embarqués dans les automobiles…). Le site peut être une simple vitrine ou un site marchand. L’offre peut alors être présentée au travers de vidéos, animations en 3D et améliorée grâce à la réalité augmentée32.

Un autre intérêt du marketing expérientiel en ligne est la création d’un nouveau lien entre une marque et ses clients (Badot et Heilbrunn, 2006 ; Hetzel, 2002), mais aussi avec les clients entre eux. Les consommateurs peuvent désormais vivre une véritable expérience sociale au sein des sites marchands ou des forums de consommateurs. Ce lien devient permanent : la relation devient pérenne et se nourrit en continu. L’avénement du web 2.0 ouvre l’ère de ce que l’on commence à qualifier de marketing conversationnel. Toutefois, il existe un revers à la médaille. Un adage en avertit les marketeurs : « votre marque est ce que Google en dit » (Anderson, 2007). Le pouvoir est passé aux mains des internautes, qui, au même titre que le chef de produit, peuvent modeler l’image des marques. Cet écueil peut toutefois être évité si une véritable stratégie conversationnelle est élaborée en lieu et place de simples réponses ponctuelles aux situations de crise.

L’implication des consommateurs en amont dans la chaîne de valeur de l’entreprise est également une des façons de faire vivre des expériences aux clients. Le web permet en effet la co-

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Pour plus d’information sur le modèle T.A.M. (Technology Acceptance Model) voir Davis, 1989.

32 La réalité augmentée désigne un ensemble de méthodes qui permettent d'incruster de façon réaliste des objets virtuels

création des produits encore dénommée prosumation (Tapscott et Williams, 2007). L’implication peut être à trois niveaux dans la chaîne de valeur. Très en amont comme dans le cas de l’ouverture des plateformes de recherche et développement aux participants extérieurs (Amazon, Google ou Procter and Gamble33) ; au moment de la production comme dans le cas du crowdfunding (appel de fonds auprès des internautes) pour le financement des produits (MyMajorCompany.com, carnetdemode.fr) ; enfin, lors de la déclinaison d’une gamme de produits (Danette de Danone, Starbucks ou carte bleue Visa de Caisse d’Epargne, voir Reniou, 2009).

Section 4. Expérience et immersion dans la consommation en ligne : le choix du concept de téléprésence

Synthèse de la section 4

L’état d’immersion est étudié dans plusieurs champs de recherche, au rang desquels la psychologie, sous l’égide de Csikszentmihalyi (1990), où il prend le nom de flow ; En sciences de l’information et de la communication, défini par Steuer (1992), il est nommé téléprésence. Ce concept a ensuite été adopté par le marketing, dans les années 2000, pour décrire le processus qui conduit à l’expérience optimale de consommation (avec ou sans lien avec les écrans).

Le concept d’immersion est utilisé en marketing pour décrire le mode d’accès à l’expérience de consommation. Il fait appel aux compétences du consommateur mais aussi à son vécu, sa quête de sens, son identité et son inscription sociale. Ainsi l’immersion est caractérisée par trois dimensions (affective, cognitive, comportementale) ayant chacune une facette individuelle et sociale (Fornerino, Helme-Guizon et Gotteland, 2008). Carù et Cova (2003) proposent un modèle d’accès à l’expérience composé de trois phases (nidification, exploration, marquage) qui se pose en alternative au modèle de flux de Csikszentmihalyi (1990). Selon l’expertise du consommateur, il empruntera soit l’un soit l’autre (Carù et Cova, 2006). Enfin, un des apports du marketing au concept d’immersion est de l’envisager comme un état de tristesse, d’épreuve et de douleur, et non comme systématiquement optimal (Bénavent et Evrard, 2002 ; Fornerino, Helme- Guizon et Gotteland, 2008).

Après un aperçu des caractéristiques des sites qui favorisent l’immersion, nous questionnons l’impact corporel de l’immersion. Nous envisageons trois degrés de vécu corporel en immersion : l’abollition du corps où le corps tel une coquille vide est laissé sur sa chaise pendant que l’esprit navigue sur Internet (il s’agit de disembodiment) ; une hybridation entre le vécu réel et ce qui est vécu dans l’interface, qui ne peut plus être qualifié de virtuel dans le sens où il a des répercussions dans la vie réelle : dans ce cas là, il s’agit d’embodiment, traduit par incorporation dans l’expérience ; enfin, cet embodiment peut aller jusqu’à inscrire ce qui est vécu en ligne corporellement. Il s’agira alors plutôt d’incarnation de l’expérience, d’expérience incarnée au sens de l’anthropologie. Toutefois, ces situations d’immersion ne doivent pas être confondues avec leur pendant pathologique qui est l’addiction à Internet ou l’addiction au shopping assouvie sur Internet. Nous synthétisons ces concepts en utilisant le terme de téléprésence qui reflète à la fois l’immersion et la perte de repère concernant la matérialité du corps.

Quatre terminologies s’offrent à nous pour étudier « l’entrée » dans l’écran et dans l’expérience en ligne : immersion, embodiment, téléprésence, flow. Nous allons les étudier chacune avec un focus particulier sur l’immersion qui est le concept le plus générique des quatre mais aussi celui qui est utilisé à la fois en marketing expérientiel et en informatique. Il possède aussi le socle théorique le plus riche pour le marketing.

En effet, le marketing expérientiel enseigne que l’expérience de consommation a lieu seulement quand le consommateur y est immergé. D’autre part, les sciences de l’information et de la communication et l’informatique, qui étudient les relations entre l’homme et les interfaces, utilisent l’immersion pour désigner l’attention focalisée sur l’écran. Pour faciliter la compréhension de cette double immersion, nous utiliserons téléprésence (impression de se sentir davantage dans l’interface que dans l’environnement physique) dans le cas de l’immersion dans l’écran et simplement immersion, comme il est d’usage, dans le cas de l’immersion dans l’expérience. Ce procédé est rhétorique et, dans bien des cas, les deux termes sont interchangeables. Il est à noter aussi que les deux champs mobilisent aussi le concept de flow (Csikszentmihalyi, 1990). Le flow (ou flux) désigne un état de concentration caractérisé par une grande impression de liberté, de joie, d'accomplissement et de compétence, et durant laquelle le temps semble disparaître. La téléprésence est un antécédant du flow (Hoffman et Novak, 1996).

Ces états d’immersion posent la question de la relation au corps et de sa matérialité. Ce questionnement, à l’origine issu de la cybernétique puis de la cyberculture, a donné lieu à une vision mystique de l’Internet, notamment sous l’égide de Timothy Leary (1996), et de Donna Haraway (1991) qui imaginent l’avènement d’un cyborg. La relation du corps à l’interface peut s’envisager selon trois modes, qui constituent des degrés d’embodiment. Le premier est l’abollition du corps et l’avènement du cyborg où le corps tel une coquille vide est laissé sur sa chaise pendant que l’esprit navigue sur Internet (il s’agit de disembodiment) ; une hybridation entre le vécu réel et ce qui est vécu dans l’interface, qui ne peut plus être qualifié de virtuel dans le sens où il a des répercussions dans la vie réelle : dans ce cas là, il s’agit d’embodiment, traduit par incorporation dans l’expérience ; enfin, cet embodiment peut aller jusqu’à inscrire ce qui est vécu en ligne corporellement. Il s’agira alors plutôt d’incarnation de l’expérience, d’expérience incarnée au sens de l’anthropologie. Toutefois, ces situations d’immersion ne doivent pas être confondues avec leur pendant pathologique qui est l’addiction à Internet ou l’addiction au shopping assouvie sur Internet.