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L’informatisation des services publics au Burkina

Les technologies numériques au Burkina : des dispositifs peu développés mais donnant lieu à de multiples enjeux

I. L’informatisation des services publics au Burkina

Selon M. Bandé, un des responsables de la Délégation générale à l’Informatique (DELGI) cette structure chargée de conduire les politiques informatiques de l’État a été créée en 1990 dans le cadre du premier plan directeur informatique. Pendant le deuxième plan directeur qui a suivi, l’État a commencé l’introduction de l’informatique dans l’administration en équipant des services en outils bureautiques. Pendant ce deuxième plan directeur, de 1995 à 2000, la DELGI a créé des applications de gestion pour aider certains services. Cette période a été qualifiée de phase de modernisation de la fonction publique. C’est pendant cette période qu’est arrivé internet grand public. En dehors de ces actions, une des activités que mène la DELGI est la formation des fonctionnaires en informatique.

1. Les formations de fonctionnaires au niveau de la DELGI

La formation des fonctionnaires à l’utilisation des différents outils informatiques est l’une des activités menées au niveau de la DELGI. Les activités de formation à la DELGI concernent chaque année 1500 personnes selon M. Sawadogo Directeur de la vulgarisation des politiques TIC au sein du MPTIC (en 2008). Pour ces formations, cette institution dispose de deux salles équipées chacune de quinze micro-ordinateurs. Le principe est le suivant : la DELGI écrit aux différents ministères pour leur présenter les offres de formation selon un calendrier établi. Elle demande aux ministères de lui envoyer leurs besoins, la liste du personnel à former et leurs fonctions afin que les formations soient adaptées ou réadaptées en tenant compte des spécificités des participants aux formations. Selon un responsable de la DELGI : « actuellement (en 2008) tous les directeurs centraux et chefs de services sont censés avoir un ordinateur et beaucoup utilisent ces outils pour écouter de la musique, pour voir des mails, et il n’y a pas d’utilisation rationnelle des équipements ». Selon la DELGI la majorité des fonctionnaires ne connaissent pas leurs besoins en matière de formation en informatique. Les directeurs des ressources humaines qui s’occupent de la formation continue des agents font souvent des demandes de formation sans spécifier les attentes.

Malgré le fait que certains ministères ne répondent pas (rapidement) aux invitations de formations, la DELGI a néanmoins des difficultés pour assurer les séances pour ceux qui manifestent leur intérêt. Ces difficultés s’expliqueraient par un manque de moyens, humains, financiers et matériels. Au moment des enquêtes, La DELGI était en train de former des fonctionnaires dont certains avaient fait la demande depuis une année. Il faut dire que le besoin et la demande sont élevés : il y avait (en 2008) une trentaine de ministères au Burkina et tous ont été contactés. Même si tous ne répondent pas rapidement, certains ont envoyé des listes de 700 personnes à former alors que la DELGI forme en moyenne entre 1500 individus par an. Pour pallier les difficultés, cette structure essaie de trouver une équité dans la formation en faisant en sorte qu’il y ait une représentativité (des différents ministères) dans les séances. Pour les responsables de la DELGI, il faut que chaque structure administrative principale ait deux à trois personnes formées dans différents modules. Cet équilibre est nécessaire pour que dans chaque structure il y ait des compétences disponibles pour être sollicitées en cas de besoin.

certains acteurs privés qui qualifient ces formations de concurrence déloyale de la part de l’État.

2. Oppositions d’acteurs privés locaux aux formations de la DELGI

La DELGI est consciente des critiques que lui font certains propriétaires de cybercafés et de secrétariat public et à ce propos, un responsable de cette institution nous a affirmé ceci: « je ne suis pas économiste, mais avec les différentes stratégies de développement que notre pays applique, laissant penser qu’on demande à l’État de se retirer de certains secteurs opérationnels, il y a des secrétariats publics, et des cybercafés qui se plaignent. Ils disent que l’État leur fait perdre des marchés en s’érigeant en formateur et de ce fait les fonctionnaires formés qui étaient de potentiels clients pour les acteurs privés qu’ ils sont, ne viendraient plus se former chez eux.» Pour ce responsable de la DEGLI, l’État est en droit de former son personnel s’il en a les moyens. En dehors du fait que l’État joue un rôle de promoteur des TIC en formant son personnel, ce responsable pense que cette initiative étatique est nécessaire parce que la formation faite par l’État accompagne la sensibilisation visant la prise de conscience par certains fonctionnaires de l’intérêt de se former en informatique. Cela sous-entend que, si l’État ne forme pas son personnel, certains iront se former dans le privé parce qu’ils en sentiront le besoin. Mais il est possible qu’une partie de ces employés ne se forme pas. En outre, il convient de rappeler que l’État n’arrive pas à former tous les fonctionnaires, même ceux qui répondent aux propositions de formation ne sont pas tous formés. Ce qui laisse croire qu’il y a des parts de marchés disponibles pour les acteurs privés de formations en informatique. Ce responsable de la DELGI affirme que contrairement à ce que pensent les propriétaires de cybercafés, l’État fait tout pour promouvoir leur développement, « l’État a mis en place une politique d’accès universel aux TIC et quand un opérateur de téléphonie veut s’installer, cela se fait suivant un cahier des charges qui amène l’opérateur à couvrir par an un certain nombre de localités non encore couvertes. Dans ce sens nous avons des structures qui nous appuient pour la couverture du pays en internet. C’est le cas des cyberpostes, des centres ADEN, des cybercafés qui s’ouvrent un peu partout dans le pays. »

Il ajoute que la taxe mensuelle que les cybercafés payaient à l’ONATEL coûtait presque 200 000 F CFA au moment où ces cybercafés se créaient au Burkina (environ 304,87 euros) et cette taxe est de 50 000 F CFA (environ 76,21 euros) en 2008. Selon lui cette évolution des prix vers le bas est le résultat d’une politique de l’État visant à permettre à des initiatives privées de développer des accès collectifs.

3- Autres types d’activités de la DEGLI

La DELGI forme également des élèves, des étudiants et d’autres catégories socioprofessionnelles, en plus des fonctionnaires. Depuis 2005, en collaboration avec une association, elle organise pendant les vacances (d’été), au mois d’août, un « camp vacance informatique » qui a permis de former pendant un mois en 2007, plus de 700 personnes en bureautique. Pour l’année 2008, en plus de la bureautique, il y avait au programme de ce « camp vacance informatique » des aspects liés à la sécurité informatique, aux outils de développement Web pour la création de sites internet.

Selon un responsable de cette structure, la philosophie qui conduit la DELGI à former un large public en plus des fonctionnaires est la suivante: « quand on ne sait même pas comment faire pour allumer un ordinateur on peut penser que tout ce qui tourne autour des TIC n’est pas donné à tout le monde et dans ce sens les gens ne connaissent pas comment ces outils pourraient être utiles, à eux et à tout le pays. Ce que nous faisons c’est démystifier l’informatique, il faut faire sortir les gens de l’analphabétisme numérique. Peut-être dans certains pays ce n’est pas grand-chose mais au Burkina il est important de faire cela. »

Dans le cadre de ses activités, la DELGI reçoit également des étudiants stagiaires venant d’écoles supérieures. Il s’agit de les encadrer pour leur mémoire de fin d’études dans différents domaines informatiques.

M. Bandé dans le cadre des activités de cette structure a évoqué le déploiement du réseau internet de l’administration dont la DELGI a en charge la mise en œuvre. Pour lui, la mise en place d’une administration électronique qui permet aux citoyens d’accéder à des services en lignes, nécessite un réseau internet propre à l’administration. Cette administration ne peut pas fournir ces services en utilisant le réseau de l’opérateur historique (l’ONATEL) qui a de plus en plus de mal à fournir le débit dont ont besoin ses clients. Une des raisons motivant la création d’un réseau propre à l’administration publique est donc liée au fait que celle-ci est un gros consommateur, le fait qu’elle ait son propre réseau serait donc la meilleure situation pour elle. Les possibilités d’utilisation de téléphonie sur IP sont aussi citées par la DELGI comme un autre avantage de la création d’un réseau internet propre à l’administration. Cela permettrait des économies sur les facteurs téléphoniques. Pour M. Bandé, « ce réseau véhiculera d’ici la fin de sa mise en place, le son et l’image. Nous travaillons à la mise en place de ce réseau de l’administration et l’État consent chaque année un

établi une grande partie de ce réseau à Ouaga, il y aura aussi Bobo et d’autres villes qui seront concernées dans les mois et les années à venir. » Le réseau qui est en train de se déployer, existait déjà, il s’agissait d’un réseau inter-administratif qui reliait trente bâtiments pour permettre des applications de gestion des dépenses de l’État. C’est ce réseau qui est donc en train d’évoluer vers le haut débit pour donner le réseau propre à l’État. Celui-ci veut ajouter à ce réseau existant, une boucle en fibre optique et un Wimax1 qui permet de connecter les bâtiments où l’État n’arrive pas à apporter la fibre optique. Ce réseau au stade actuel de son développement, s’étendrait selon la DELGI sur un rayon de 15 km à l’intérieur de la ville de Ouagadougou.