• Aucun résultat trouvé

L’essor de la libre immatriculation des navires après la Seconde Guerre Mondiale

L’essor de la libre immatriculation se manifeste après la Seconde Guerre Mondiale sous l’effet de tendances convergentes. Mais cet essor se heurte à de fortes résistances.

A. Tendances convergentes.

Des tendances convergentes concourrent à un essor remarquable des flottes sous pavillons de libre immatriculation à partir de la fin de la Seconde Guerre Mondiale.

1. Les tendances.

Quatre éléments paraissent ainsi devoir être soulignés qui relèvent de l’économie comme de la politique : la croissance économique mondiale et le développement du trafic maritime ; la mise en oeuvre de politiques économiques peu libérales ; l’augmentation du nombre d’Etats ; le

56 Actuellement, le Liberian International Ship and Corporate Registry dont le siège est à Vienna, Virginie. La société

d’origine a créée avec le soutien de la Standard Oil (Esso) et d’autres « majors » par Edward Stettinius, ancien

Secrétaire d’Etat du Président F.D. Roosevelt.

57 Evoquant le XIXème siècle, Hannah Arendt indique (Arendt, 1982, pp.15-16) : « L’expansion en tant que but

politique permanent et suprême, voilà l’idée-clé de la politique impérialiste. Parce qu’elle n’implique ni pillage temporaire ni, en cas de conquête, assimilation à long terme, c’était là un concept absolument neuf dans les annales de la pensée et de l’action politiques. La raison de cette surprenante originalité – surprenante parce que les concepts vraiment neufs sont très rares en politique – tient tout simplement à ce que ce concept n’a en réalité rien de politique, mais prend au contraire ses racines dans le domaine de la spéculation marchande, où l’expansion signifiait l’élargissement permanent de la production industrielle et des marchés économiques qui a caractérisé le XIXème siècle. »

58Carlisle, R. (1981), « Sovereignty for Sale: The Origins and Evolution of the Panamanian and Liberian Flags of Convenience ».

comportement des compagnies maritimes influencées par la conjoncture poiltique puis par l’économie.

a) La croissance économique mondiale et le développement du trafic maritime.

En premier lieu, le lendemain de la Seconde Guerre Mondiale va être marqué par une période de croissance mondiale quasi-continue qui va aller de pair avec le développement du trafic maritime international.

b) La mise en oeuvre de politiques économiques peu libérales.

En second lieu, il convient de signaler l’évolution des politiques économiques et sociales de l’immédiat après-guerre, évolution marquée dans la plupart des pays industrialisés par l’accession durable des socialistes, socio-démocrates, chrétiens-sociaux ou chrétiens-démocrates.

Tableau 7 : Tendances politiques des gouvernements des pays de l’OECE de 1945 à 1950.

Liste des pays de

l’OECE (a) Tendances politiques des gouvernements de 1945 à 1950 Autriche Chrétiens-Sociaux (OeVP) et Sociaux-Démocrates (SPOe)

Belgique Parti Socialiste Belge puis Parti Social Chrétien

Danemark Parti Libéral puis Parti Social Démocrate

France Alliance Socialistes (SFIO), Communistes (PCF) et Chrétiens-Démocrates (MRP), puis Socialistes

Grèce Alternance entre Parti Libéral (Centre) – Parti Populaire

Irlande Alternance entre Fianna Fail (Centre) et Fine Gael (Centre)

Islande Parti de l’Indépendance puis Parti Social Démocratique

Italie Démocratie Chrétienne (Centre)

Luxembourg Parti Populaire Chrétien Social

Norvège Parti Travailliste Norvégien (Centre gauche)

Pays-Bas Alternance entre Parti Travailliste (Centre gauche) et Parti Populaire Chrétien (Centre)

Portugal Union nationale (Dictature)

Royaume-Uni Parti Travailliste (Centre gauche) de 1946 à 1951

Suède Parti Social démocrate Travailliste (Centre gauche)

Suisse UDC (Droite modérée), puis Parti radical Démocratique (Centre droit), puis Parti Démocrate Chrétien (Centre), puis Parti Socialiste (Centre gauche)

Turquie Parti Populaire Républicain (Centre gauche)

Sources : Angelelli, P. (2011) d’après les données de l’Ecole de Politique Appliquée de l’Université de

Sherbrooke (Canada) < http://perspective.usherbrooke.ca/ > [Consulté en Octobre 2011]. Note :

(a) L’Organisation Européenne de Coopération Economique rassemble à l’époque les pays d’Europe

occidentale bénéficiaires du Plan Marshall. L’OECE sera élargie et transformée en Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) en 1960.

Cette évolution fera d’ailleurs craindre l’affaiblissement des libertés individuelles liée à la poursuite, sur des fondements marxistes ou keynésiens, du renforcement des Etats (pouvoirs, budgets, emplois, etc.) – dénoncé par exemple par la Société du Mont Pélerin dès 1947 sous l’impulsion d’économistes tels que F. Hayek, M. Friedman, J. Buchanan, G. Becker ou G. Stigler. Cette crainte sera d’une certaine manière à l’origine de la réaction libérale qui s’affirmera à partir des années 1980 (voir plus bas) pour promouvoir les vertus de la régulation par les marchés largement compris (biens et services, services publics privatisés, énergie, transports, banques, travail, taux de change, etc.), contre l’Etat et ses réglementations.

De fait, après guerre, les dirigeants élus dans la plupart des Etats européens appuient plutôt des politiques sociales favorables aux salariés et aux revenus du travail en général et caractérisées par : - l’instauration de régimes universels de sécurité sociale et de retraite,

- la nationalisation d’entreprises, en particulier dans les secteurs où celles-ci seront en situation de fortes concentrations voire de monopoles,

- le contrôle des moyens de production, de crédit, de transport ou de distribution de l’énergie, etc. - le renforcement de l’encadrement de certaines activités privées.

Dans ce contexte économique marqué par la forte croissance des pays industrialisés et l’alourdissement des coûts de main d’œuvre, ainsi que par la pression fiscale, deux phénomènes politiques vont favoriser le recours aux pavillons de libre immatriculation.

c) L’augmentation du nombre d’Etats.

Le premier phénomène réside dans le contexte politico-juridique global constitué par les accessions à l’indépendance de nombreux territoires. Le nombre des Etats membres de l’Organisation des Nations unies va être multiplié par deux de 1945 à 1960 pour passer de 51 à 99, par trois de 1945 à 1980 (154 Etats) et quasiment par quatre de 1945 à 2011 (193 Etats).

On rappelle que, du point de vue de l’immatriculation des navires, le droit de la mer de l’après Seconde Guerre Mondiale est essentiellement caractérisé par :

- le droit reconnu à tous les Etats indépendants, même sans littoral, d’immatriculer des navires, - l’absence de contrôle international sur les obligations coutumières pesant sur les Etats d’immatriculation,

- la liberté quasi-totale pour les Etats de fixer les conditions dans lesquelles leur pavillon pouvait être obtenu par des étrangers, ainsi que les modalités de fonctionnement (fiscalité, droit social), etc.

Dans la situation du droit international de la mer de l’époque, le statut d’Etat indépendant confère une liberté quasi-absolue pour définir les règles applicables aux navires. La création de nouveaux Etats rend donc possible les changements de pavillon et la libre immatriculation.

d) Le comportement des compagnies maritimes influencées par la conjoncture politique puis par l’économie.

Le second phénomène vient des choix individuels qui complètent ce contexte politico-juridique global. A ce titre, le rôle des armateurs grecs semble avoir été tout à fait déterminant dans le développement des flottes de libre immatriculation, de sorte qu’en 1960, 80% de la flotte dite PANHONLIB, c’est-à-dire immatriculée au Panama, Honduras et Liberia, appartient à des compagnies américaines ou grecques (Schulte, 1962, pp.11-12).

La fin de la Seconde Guerre Mondiale entérine le partage de l’Europe en zones d’influence américaine et soviétique. Devant l’incertitude du sort de la Grèce, en proie à la guerre civile de 1945 à 1947, nombre d’armateurs grecs choisissent de transférer leurs navires sous pavillon de libre immatriculation pour échapper à la collectivisation des moyens de production en cas de victoire des partisans du régime communiste.

Une fois écartés le risque de prise de pouvoir par les communistes et la crainte d’une confiscation-nationalisation, les navires sont pour l’essentiel restés sous pavillon de libre immatriculation pour des raisons économiques générales, et les armateurs ont conduit du début des années 50 au début des années 80 une politique de défiance vis-à-vis de l’intervention des pouvoirs publics en matière de réglementation de l’activité, de fiscalité et de droit du travail, défiance résumée dans le slogan « keep away from shipping » (Goulielmos, 1997). L’armateur grec Stavros Niarchos le rappelle dans une lettre ouverte au Times de Londres parue le 1er avril 1958 (Pinto, 1960). S. Niarchos y estime en substance que la fiscalité des pays maritimes traditionnels empêche les armateurs d’accumuler des fonds suffisants pour investir dans la croissance de leurs flottes.

Après plusieurs décennies d’évolution entre les justifications d’ordre politique et celles d’ordre économique, ce point de vue semble établir le poids de l’économie, et en particulier des coûts

d’exploitation des navires, dans le choix et donc l’essor de la libre immatriculation. A la même époque, l’Organisation Européenne de Coopération Economique (OECE) reconnaît que pour les Etats maritimes traditionnels la seule manière de lutter contre les pavillons de complaisance est d’ajuster leurs propres dispositions fiscales pour compenser le handicap de compétitivité (Schulte, 1962 p.18, citant l’OECE 59).

2. L’effet des tendances convergentes.

a) Effet quantitatif.

Il résulte des quatre tendances convergentes rappelées que, sauf les cas particuliers des trafics protégés ou partagés ou les contextes politiques extrêmes – protection d’une flotte en situation de conflit armé par exemple – la quasi-totalité de la croissance du tonnage mondial depuis la Seconde Guerre Mondiale a été absorbée par les pavillons de libre immatriculation.

Ainsi, les pavillons des Etats de libre immatriculation ou de complaisance qui représentaient 1% du tonnage de la flotte mondiale en 1939 en représentent à l’heure actuelle plus de 50%.

b) Effet qualitatif.

Par ailleurs, après la Seconde Guerre Mondiale, les caractéristiques des pavillons de libre immatriculation se stabilisent sur les bases ébauchées dans l’entre-deux-guerres, à savoir : la nationalité des propriétaires, la nationalité des équipages, la fiscalité – volume, taux, localisation –, le droit social, l’adhésion à des conventions internationales.

Avec les pavillons PANHONLIB, les critères de base définissant la libre immatriculation sont établis dès la fin des années 40 autour de notions juridiques et économiques simples.

Au plan juridique, le point commun des pavillons de libre immatriculation réside dans la faiblesse voire l’absence de lien entre l’Etat du pavillon du navire et les propriétaires du navire – en d’autres termes, il n’est pas nécessaire d’être ressortissant de l’Etat du pavillon, ou même résidant dans celui-ci, pour pouvoir y immatriculer son navire. Cet aspect juridique est majoré par le contrôle qu’exerce un pays comme les Etats-Unis sur les conditions initiales de mise en œuvre de la libre immatriculation : traités bilatéraux permettant de négocier la souveraineté des Etats qui hébergent les navires dont les propriétaires sont américains, aménagement des règles nationales –

59 OECE (1958), « Study on the expansion of the flags of convenience and on varous aspects », Final text, 28/01/1958,

allant jusqu’à la direction effective ou le pilotage des services immatriculant les navires (cas du Liberia), etc.

D’un point de vue économique, le résultat est que les pavillons de libre immatriculation se caractérisent par leurs faibles coûts « obligatoires », c’est-à-dire les coûts dépendant des normes juridiques applicables aux navires – les normes de protection sociale, de rémunération, de retraite, de chômage ; fiscalité des revenus tirés des navires ; normes de sécurité concernant la construction des navires et les contrôles techniques, effectifs exigés à bord, qualification, etc.

B. Les résistances aux pavillons de libre immatriculation : origines, développement puis abandon.

Au cours de la période de développement des pavillons de libre immatriculation, des résistances se sont manifestées. Leur affaiblissement va ouvrir la voie à la généralisation, puis à l’universalisation du phénomène.

1. Résistance des syndicats de marins.

La résistance des syndicats de travailleurs est fédérée par l’International Transport workers Federation

(ITF).

C’est au syndicalisme que l’on doit la popularisation dans les opinions publiques de la notion de libre immatriculation, vue sous les termes synonymes mais péjoratifs de « pavillons de complaisance » - Flag of Convenience (FOC).

Au fond, le syndicalisme ouvrier voit la lutte contre ces pavillons comme le prolongement international des efforts réalisés depuis le XIXème siècle au sein des Etats pour la défense des travailleurs. En d’autres termes, dans un secteur traditionnellement très syndiqué comme celui de la navigation, les pavillons de libre immatriculation sont à l’origine de pertes d’emplois et d’une détérioration des conditions de travail. Par le contournement des réglementations sociales nationales, le patronat est soupçonné de déplacer les rapports sociaux du niveau national au niveau international. A certains égards aussi, les syndicats ouvriers vont retrouver au plan international la transposition de l’analyse marxiste qui considère en substance que les Etats reflètent les rapports de classe et sont, dans les économies de marché, au service des intérêts de la classe dirigeante constituée par les propriétaires de capitaux.

Dès la fin des années 1950, alors que la libre immatriculation devient une réalité susceptible de nuire à l’emploi à la fois en termes d’effectifs et en termes de rémunérations moyennes des marins, l’International Transport workers Federation (ITF ou Fédération internationale des ouvriers des transports)60 entreprend de lutter contre le phénomène. Cette lutte, qui se poursuit encore à l’heure actuelle, donne lieu en décembre 1958 à un boycottage mondial des navires immatriculés au Panama, au Honduras et au Liberia. A cette occasion, on estime que 200 des 1400 navires battant ces pavillons ont été effectivement bloqués à quai, principalement dans les ports américains et allemands (Schulte, 1962, p.16).

Concrètement, l’ITF a été conduite, pour les besoins de la lutte syndicale, à préciser les critères de la « complaisance ».

Bien que le terme de « pavillon de complaisance » (« Flag of Convenience ») soit relativement ancien puisqu’il apparaît dès 1948 avec la première campagne syndicale contre la libre immatriculation menée par l’ITF – et accompagne l’essor de cette pratique –, sa définition n’est pas toujours « stabilisée », mais s’est précisée depuis les années 1970.

En 1970 en effet, le Rapport Rochdale, en Grande-Bretagne 61, pose 6 critères constitutifs de la complaisance, critères qui apparaissent aujourd’hui encore tout à fait pertinents :

- le pays d’accueil des navires autorise les étrangers à les détenir et les diriger,

- l’immatriculation et les changements de registres sont faciles et peu contraignants, - la fiscalité sur les revenus de l’activité des navires est faible, voire inexistante,

- le pays d’accueil n’a pas besoin des navires immatriculés pour ses propres besoins de transport, mais s’intéresse surtout aux taxes liées au tonnage,

- les navires sont autorisés à embarquer librement des équipages qui n’ont pas la nationalité du pavillon du pays d’accueil,

- enfin le pays d’accueil ne dispose pas réellement des pouvoirs (ou de la volonté) pour imposer les règles nationales ou internationales aux propriétaires.

60 Fédération créée en 1896 à la suite d’une grève des dockers aux Pays-Bas qui a déclenché un mouvement de

solidarité débouchant sur la création de la Fédération Internationale des Ouvriers des Navires et des Docks (International Federation of Ship, Docks and Riverside Workers), élargie plus tard aux transports ferroviaires, terrestres et enfin aériens.

61 Committee of Inquiry into Shipping, Report n°51, cité par OSIEKE, E. (1979), « Flags of Convenience Vessels : Recent Developments », American Journal of International Law, Vol. 73, n°4, Oct., p.604. Ce Comité d’Enquête sur le Transport Maritime, présidé par Lord Rochdale, avait été constitué par le Gouvernement britannique après une grande grève

En 1974, l’ITF adopte une définition plus compacte : « Sont considérés comme navires sous pavillon de complaisance les navires pour lesquels la propriété réelle et le contrôle se situent dans un pays autre que celui des pavillons sous lesquels ils sont immatriculés.»

Toutefois, un certain pragmatisme a « émoussé » la définition et la campagne contre la libre immatriculation. En effet, du fait de sa structure-même de fédération internationale, composée de syndicats nationaux dans plus de 130 pays, l’ITF repose sur des organisations locales. Dans ce contexte, le classement en « pavillon de complaisance » obéit à des règles principalement déclaratives émanant des syndicats, qui s’éloignent quelquefois de la définition de base rappelée ci-dessus. Des pavillons (Etats ou registres particuliers à l’intérieur d’un pavillon) peuvent ainsi être classés en pavillons de complaisance alors qu’ils ne remplissent pas stricto sensu les règles que l’ITF s’est elle-même fixées 62.

2. Les résistances institutionnelles.

a) Résistance de l’Organisation Internationale du Travail.

La résistance du monde du travail a été prise en compte de façon précoce par l’Organisation Internationale du Travail (OIT)63. En effet, la principale critique contre les pavillons de libre immatriculation résidait dans les conditions de travail offertes aux marins (durée du travail, rémunération, protection sociale, conditions d’embauche et de licenciement, rapatriement, etc.). L’OIT s’est donc saisie dès 1933 du problème posé par les transferts de navires provenant de pays maritimes ayant des normes sociales assez élevées vers des pays aux normes inférieures (Osieke, 1979, p.615)64. Cependant, dans le fonctionnement tripartite de l’OIT, l’opposition des

62 Un des exemples récents est le classement FOC (Flag of Convenience) du Registre International Français (RIF) créé en

2005 pour permettre un allègement des coûts de personnels de certains navires français, tout en restant compatible avec les règles européennes et en particulier les régimes d’aide agréés par l’Union européenne. Le RIF a été classé FOC par l’ITF à la demande des syndicats français de marins, alors qu’il ne répond manifestement pas à la définition de l’ITF même, qui est fondée sur la déconnexion entre pavillon et propriété résidente et, alors que sur le fond les règles de sécurité applicables au RIF sont celles prévues au plan international par les conventions régulièrement ratifiées par le France (en particulier, les conventions SOLAS, MARPOL, STCW, COLREG, LL66, etc.)

63L’Organisation Internationale du Travail a été fondée en 1919. Emanation de la conférence de la paix, la

constitution de l’OIT a donné naissance à une organisation tripartite, unique en son genre, dont les organes exécutifs sont composés de représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs. Elle est devenue en 1946 une organisation spécialisée des Nations Unies. Particulière à la fois par sa taille et son mode de fonctionnement elle joue un rôle déterminant en matière de sécurité maritime et occupe une place particulière aux côtés de l’Organisation Maritime Internationale. Elle vise à promouvoir la justice sociale, ainsi que les droits de l'homme et du travail

reconnus à l'échelle internationale. (Angelelli & Moretti, op.cit., pp.132-133).

64 Dite Convention OIT n°147 de 1976 sur la marine marchande (normes minima), entrée en vigueur en 1981, dont

l’article 4 stipule que : « 1. Si un Membre, qui a ratifié la présente convention et dans le port duquel un navire fait escale dans le cours

normal de son activité ou pour une raison inhérente à son exploitation, reçoit une plainte ou acquiert la preuve que ce navire n'est pas conforme aux normes figurant dans la présente convention, après que celle-ci sera entrée en vigueur, il peut adresser un rapport au gouvernement du pays dans lequel est immatriculé le navire, avec copie au Directeur général du Bureau international du Travail, et prendre les mesures nécessaires pour redresser toute situation à bord qui constitue clairement un danger pour la sécurité ou la santé. (…) ».

armateurs a bloqué les velléités d’enquête de l’OIT sur les effets des transferts de pavillons sur les conditions de travail.

La question est redevenue d’actualité après la Seconde Guerre Mondiale, mais il a fallu attendre 1976 et la constitution d’un « Comité sur les navires sous-normes et en particulier ceux enregistrés sous pavillons de complaisance » pour que les discussions au sein de l’OIT s’orientent vers une possibilité de contrôle des navires étrangers dans les ports. Ce point sera acquis avec la Convention signée en 1976 et concernant les normes minima à observer sur les navires marchands. Cette Convention sera refondue en 2006.

b) Résistances des pays industrialisés.

Ces résistances sont fondées sur des argumentaires généraux d’une part et nationaux d’autre part.

i. Argumentaires généraux. Il semble s’isncrire dans une lutte d’arrière-garde65. Chaque Etat maritime traditionnel va développer son argumentaire propre, dont les bases sont cependant proches. Pour le Royaume-Uni au début des années 1990, Ledger et Roe (Ledger & Roe, 1992, pp. 240-243) donne un inventaire rénové des raisons de maintenir une flotte de commerce sous pavillon national. Ces raisons peuvent être transposées à d’autres pays industrialisés, notamment la France :

- l’emploi en effectif et en qualité (formation, expertise) - l’équilibre de la balance des paiements

- la défense nationale (flotte de complément, transports de matériels et de troupes, équipages) - la protection de l’environnement

- le maintien de l’influence britannique dans les instances internationales spécialisées

- la garantie contre les mesures protectionnistes maritimes d’autres pays ou la création d’oligopoles dans le secteur, qui tendraient à augmenter les prix des transports

- le maintien de normes de sécurité protégeant les passagers, les marchandises et l’environnement