• Aucun résultat trouvé

II. 2.3 / demande de formation des étudiants actuellement en cursus

II.5/ pédagogies actives

II.5.2 L’enseignement par projet

L’enseignement par projet fait en réalité référence à une multitude de dispositifs parfois très différents les uns des autres. Réverdy (2013), en recense les différentes formes et convient d’une définition large de la notion de projet. Convoquant Ardoino et Berger (1989) elle leur emprunte l’idée que le projet est

« premièrement, une intention philosophique ou politique, une visée affirmant de façon toujours, nécessairement, indéterminée, des valeurs en quête de réalisation […] C’est, seulement ensuite, la traduction stratégique, opératoire, mesurée, déterminée d’une telle visée […] le projet est la préfiguration la plus exacte possible […], donc déterminée et définie, de ce qu’on anticipe ». Ce que relève Réverdy dans cette définition, c’est le « marqueur » essentiel de ce type de méthode, à savoir l’engagement du sujet, la

MAS théories, pratiques et dispositifs de formateur d’enseignants 2017-2019 : mémoire

38

planification et les aspects matériels. Dans un champ un peu plus concret, Perrenoud (2002) écrit à propos de la démarche projet qu’elle…

- …est une entreprise collective gérée par le groupe-classe - …s’oriente vers une production concrète (au sens large)

- …induit un ensemble de tâches dans lesquelles tous les élèves peuvent s’impliquer et jouer un rôle actif, qui peut varier en fonction de leurs moyens et intérêts

- …suscite l’apprentissage de savoirs et de savoir-faire de gestion de projet (décider, planifier, coordonner, etc.)

- …favorise en même temps des apprentissages identifiables (au moins après-coup) figurant au programme d’une ou plusieurs disciplines.

Concernant la nature très générale des projets, le modèle de Kirkpatrick (1950) est toujours utilisé aujourd’hui, si bien pour la typologie que pour l’évaluation, cadre retravaillé par Coleman (1976) ou Karolewicz (1998). Il pointe quatre types de projets, soit concrétiser une idée, s’approprier une expérience vécue, résoudre un problème ou encore acquérir des connaissances au travers d’une expérience. Dans ces cas, l’activité de l’apprenant n’est pas toujours mise en avant. Dans la lignée de Dewey et l’école pragmatiste de l’apprentissage ou actualisante, l’activité est remise au premier plan. Avant toute description de dispositif associé, il s’agit d’un postulat de départ de l’activité structurée comme moteur des apprentissages. Nous retrouvons par exemple la notion d’apprentissage expérientiel sous la plume de Faulx et Danse (2015) qui relatent les travaux de Coleman à propos de l’apprentissage expérientiel, envisagé comme un cycle d’action. Le schéma reproduit ci-dessous, issu de ses travaux, en représente la notion :

Tableau 9 : cycle de l’apprentissage expérientiel selon Coleman

MAS théories, pratiques et dispositifs de formateur d’enseignants 2017-2019 : mémoire

39

Proulx (2004) cité par Réverdy (2013) dit bien la nature idéologique de l’approche par projet avant toute forme d’organisation, en écrivant que « l’approche par projet n’est pas, dans son essence même, une technique ou une façon spécifique d’enseigner. Elle est plutôt une façon de penser l’enseignement en vue d’un apprentissage que l’on espère meilleur ». De même Knoll (2012) cité par Tricot (2017) relate que Kirkpatrick lui-même, considéré comme l’instigateur de la pédagogie par projet, avait renoncé à en faire une méthode pour lui préférer la notion de « philosophie personnelle de l’enseignement ». Tout au plus pouvons-nous aller plus loin en passant de cette notion large à différents principes. Ce passage d’une philosophie de l’enseignement à des principes d’application, Faulx et Danse (2015) le déclinent quatorze points :

1. Un apprentissage situationnel : l’enseignement est situé dans un environnement, construit ou aménagé, propice aux apprentissages

2. L’autoformation collective : chaque apprenant est responsable de sa progression, avec le soutien actif du formateur

3. Une « psychagogie » interactive : l’on n’apprend pas seulement de la situation mais aussi des autres

4. L’incomplétude des savoirs : les connaissances ne suffisent pas, la pratique les complète

5. La participation active : l’implication des participants, puisque sans participation, pas d’apprentissages

6. Un potentiel humain partagé : considération du formateur que toute personne est en processus d’autoréalisation

7. Une non-substitution : la nécessaire retenue du formateur pour laisser les enseignés expérimenter, déduire, discuter

8. Une non-clôture : les savoirs issus de l’expérience sont non définitifs et non absolus

9. Une déstructuration-restructuration : passage par une déconstruction et reconstruction des représentations des savoirs

10. La quête de l’implicite : recherche des non-dits et des sous-jacents qui impacte l’expérience d’apprentissage

11. Une socioagogie groupale : les apprentissages individuels « migrent » vers le collectif

12. La singularité des situations (de formation) : un même cours ne se donne pas deux fois de manière identique, conditionné par différents particularismes non reproductibles.

13. La continuité : maintien des aspects stables dans la formation : persistance de l’intention, maintien de la forme, constance et cohérence du comportement de l’animateur

14. Le souci déontologique : repérage, analyse, limitation et acception du « pouvoir sur » du formateur Partant de là, il n’est pas de méthodes spécifiques à ranger dans la trousse à outils de pédagogie de projet, l’essentiel étant qu’ils passent par des points conceptuels qui fassent consensus sur la question tels que nous avons pu en transmettre ci-dessus.

Les bénéfices attendus de cette approche, à en croire Tricot (2017), sont assez difficiles à cerner précisément, en raison d’une littérature scientifique solide plutôt rare dans ce domaine. Néanmoins, il en ressort le constat indéniable de l’engagement des élèves et une grande satisfaction a posteriori de ces derniers. Reste une évaluation difficile des apprentissages tant l’objet est complexe, intriquant à la fois un objet de savoir et le dispositif lui-même, comme objet de savoir connexe.

MAS théories, pratiques et dispositifs de formateur d’enseignants 2017-2019 : mémoire

40